Heroof Hearts Chapitre 4001 Ă  5000 en ligne gratuit. Lisez les chapitres complets gratuitement.
Reminder of your requestDownloading format TextView 1 to 526 on 526Number of pages 526Full noticeTitle MĂ©moires de la SociĂ©tĂ© d'agriculture, sciences et arts du dĂ©partement de l'AubeAuthor SociĂ©tĂ© acadĂ©mique de l'Aube. Auteur du textePublisher TroyesPublisher Ath. Payn TroyesPublisher Bouquot TroyesPublisher Dufour-Bouquot TroyesPublisher Imprimeries Paton TroyesPublication date 1858Relationship textType printed serialLanguage frenchFormat Nombre total de vues 44107Description 1858Description 1858 T9,SER2,N45- T9,SER2,N48.Description Collection numĂ©rique Fonds rĂ©gional Champagne-ArdenneRights Consultable en ligneRights Public domainIdentifier ark/12148/bpt6k55265752Source SociĂ©tĂ© acadĂ©mique de l'AubeProvenance BibliothĂšque nationale de FranceOnline date 30/11/2010The text displayed may contain some errors. The text of this document has been generated automatically by an optical character recognition OCR program. The estimated recognition rate for this document is 100%.SOCIÉTÉ ACADÉMIQUE DU DÉPARTEMENT DE L'AUBE. MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE, DES SCIENCES, ARTS ET BELLES-LETTRES Du DĂ©partement de l'Aube TOME XXII DE LA COLLECTION. TOME IX. — DEUXIÈME SÉRIE. ANNÉE 4858. TROYES. BOUQUOT, IMPRIMEUR DE LA SOCIÉTÉ, RUE NOTRE-DAME. RAPPORT A SA MAJESTÉ LE ROI DE PORTUGAL SUR UN VOYAGE D'EXPLORATION SCIENTIFIQUE Aux Ăźles Açores, ExĂ©cutĂ© par MM. Arthur MORELET et Henri DROUËT Pendant le printemps et l'Ă©tĂ© de 1959 Par M. HENRI DROUET, Membre rĂ©sidant. SIRE, Au milieu des soucis et des prĂ©occupations du trĂŽne, Votre MajestĂ© aura-t-elle gardĂ© le souvenir de deux naturalistes français poussĂ©s par l'amour des sciences naturelles Ă  explorer les Ăźles Açores, encouragĂ©s par vous dans ce dessein, et, dĂšs le dĂ©but du voyage, accueillis par la Cour de Portugal avec une bienveillance qui ne s'effacera jamais de leur pensĂ©e?.... Ces deux naturalistes, aprĂšs avoir accompli leur tĂąche autant qu'il a Ă©tĂ© en leur pouvoir, viennent dĂ©poser a vos pieds leur tribut de 6 RAPPORT A SA MAJESTÉ LE ROI DE PORTUGAL respectueux hommages, et exposer Ă  Votre MajestĂ© le rĂ©sumĂ© de leurs dĂ©couvertes et de leurs travaux. Un mot d'abord sur les diffĂ©rents trajets que nous avons effectuĂ©s; je passerai ensuite successivement en revue les trois rĂšgnes de la nature. § 1. Partis de Lisbonne dans le courant du mois d'avril dernier, nous sommes arrivĂ©s heureusement Ă  SaintMichel, la premiĂšre des Ăźles Açores, sur la fin du mĂȘme mois, et immĂ©diatement ont commencĂ© nos investigations. AprĂšs avoir minutieusement explorĂ© les environs de Ponta-Delgada, ville capitale, notre attention s'est fixĂ©e particuliĂšrement sur les points les plus intĂ©ressants de l'Ăźle, et c'est ainsi que nous avons successivement visitĂ© la belle Caldeira das Sete-Cidades 1, remarquable par sa grandeur et par l'Ă©tendue de son lac ; le Lagoa do Fogo lac de feu si pittoresque par lui-mĂȘme et par les magnifiques cascades qui l'avoisinent ; la vallĂ©e de Furnas, fameuse par ses eaux minĂ©rales, son beau lac, et 1 Aux Açores, la plupart des cratĂšres de volcans, aujourd'hui Ă©teints et tapissĂ©s intĂ©rieurement d'une vĂ©gĂ©tation plus ou moins riche, prennent le nom de Caldeiras chaudiĂšres. Ces Caldeiras sont quelquefois si Ă©tendues, qu'elles pourraient ĂȘtre regardĂ©es comme de larges vallĂ©es circulaires. SUR UN VOYAGE AUX ILES AÇORES. 7 surtout par ses Ă©tonnants volcans d'eau bouillante sĂ©jour vraiment enchanteur et qui mĂ©riterait d'ĂȘtre connu davantage, et enfin, plus Ă  l'est, le Pico da Vara 1, montagne ardue, qui est le point culminant de l'Ăźle. Nous avons parcouru en outre beaucoup de localitĂ©s secondaires, gravi un grand nombre de pics et de chaĂźnes de montagnes, notamment Serra Gorda, Pico da Pedra, Pico do Fogo, Lagoa do Congro, Caldeiras, explorĂ© toute la cĂŽte mĂ©ridionale depuis Mosteiros jusqu'Ă  Povoaçao, et visitĂ© les environs de Villa-Franca et l'Ăźlot du mĂȘme nom et de Ribeira-Grande. L'Ăźle de Saint-Michel, qu'on ne peut mieux caractĂ©riser qu'en la comparant Ă  un vaste jardin volcanique plantĂ© d'orangers 2, ou Ă  un nouveau Jardin des HespĂ©rides moins le dragon; l'Ăźle de Saint-Michel, dis-je, Ă©tant la plus grande, la plus importante, et certainement aussi la plus intĂ©ressante Ă  tous Ă©gards de l'archipel des Açores, nous avons cru devoir apporter Ă  son exploration une attention plus scrupuleuse, et, par consĂ©quent, y faire un sĂ©jour plus prolongĂ©. C'est ainsi que, par suite de ces vues et de circonstances particuliĂšres qu'il est inutile de rapporter ici, nous sommes restĂ©s lĂ  deux mois entiers. 1 Pico, pic ou montagne c'est le nom le plus communĂ©ment donnĂ© aux montagnes, dans l'archipel des Açores, sans doute Ă  cause de leur forme ordinairement aiguĂ«. Serra se dit plutĂŽt d'une montagne Ă  forme mamelonnĂ©e ou dĂ©chirĂ©e. Le Pico da Vara mesure 1,100 mĂštres d'Ă©lĂ©vation. 2 Les oranges de Saint-Michel sont trĂšs-renommĂ©es et forment, avec les cĂ©rĂ©ales, la principale branche du commerce d'exportation. 8 RAPPORT A SA MAJESTÉ LE ROI DE PORTUGAL A la vĂ©ritĂ©, dans l'intervalle, nous avons trouvĂ© l'occasion d'aller Ă  Sainte-Marie; un sĂ©jour d'une semaine dans cette petite Ăźle, et des excursions quotidiennes, nous ont permis de la sillonner en tous sens et de fendre ce sĂ©jour aussi fructueux que possible. Sainte-Marie a une physionomie Ă  part, extrĂȘmement pittoresque, et c'est, Ă  mon avis, lĂ  plus belle et la plus gracieuse de toutes, avec FlorĂšs. Elle est trĂšs-fertile. On y trouve une argile plastique avec laquelle les habitants fabriquent une; poterie grossiĂšre dont ils approvisionnent lĂ©s Ăźles voisines, industrie qui se retrouve Ă  Graciosa. Dans la baie de San Lourenzo, nous avons pu visiter l'Ăźlot dos Romeiros ou des PĂ©lerins, cĂ©lĂšbre par sa grotte et par ses stalactites. Nous avons Ă©galement constatĂ©, dans cette Ăźle, la prĂ©sence d'un terrain calcaire, fiche en fossiles. Quant au prĂ©tendu ossement fossile gigantesque, mentionnĂ© par quelques voyageurs, et attribuĂ© par la tradition locale Ă  un gĂ©ant, ce n'Ă©tait simplement qu'un os de baleine, longtemps enfoui dans le sable non loin du rivage, et maintenant disparu. Une foule d'oiseaux chanteurs animent les bois de lauriers et d'orangers de cet heureux sĂ©jour. DĂ©barquĂ©s Ă  Fayal au commencement de juillet, je me suis sĂ©parĂ© de M. Morelet, mon compagnon de voyage, afin de profiter d'une occasion qui me permettait de visiter les trois Ăźles de Graciosa, de FlorĂšs et de Corvo. Je partis en compagnie de M. Georges Hartung, gĂ©ologue prussien, plein de zĂšle et de talent, que le hasard nous avait fait connaĂźtre Ă  SaintMichel, et qui Ă©tudiait l'archipel des Açores, au point de vue de la gĂ©ologie et de la minĂ©ralogie, aprĂšs avoir dĂ©jĂ  parcouru ceux de MadĂšre et des SUR UN VOYAGE AUX ILES AÇORES. 9 Canaries. M. Morelet demeurait momentanĂ©ment seul, avec la mission d'explorer Fayal et Pico. Graciosa est une trĂšs-petite Ăźle, fertile et riche en cĂ©rĂ©ales. Sa Caldeira est extrĂȘmement intĂ©ressante et remarquable par une prodigieuse variĂ©tĂ© de roches basaltiques et trachytiques. Elle prĂ©sente en outre un phĂ©nomĂšne des plus curieux qui lui est particulier. C'est une fissure Ă©norme de prĂšs de cent pieds de profondeur, dont les parois sont Ă  pic. Le long de ces parois croissent de nombreuses fougĂšres, et, dans les anfractuositĂ©s, nichent des bandes de pigeons sauvages. Au fond de ce gouffre immense est une excavation profonde et un lac Ă  Ă©manations sulfureuses. On descend non sans danger au fond de ce forno, comme on l'appelle, au moyen de cordes, fixĂ©es au bord dĂ© l'ouverture et passĂ©es autour du corps, et l'on remonte de mĂȘme. — J'ai fait Ă  Graciosa une dĂ©couverte de quelqu'intĂ©rĂȘt C'est un lĂ©zard, dont personne ne soupçonnait l'existence aux Açores. De Graciosa, nous sommes passĂ©s Ă  FlorĂšs, non sans peine, Ă  vrai dire, car une violente tempĂȘte nous fit mettre sept longs jours et sept nuits pour opĂ©rer un trajet d'environ soixante lieues ! Un jour peutĂȘtre il me sera donnĂ© de raconter lĂ©s Ă©motions de cette traversĂ©e et les dangers courus, sur un frĂȘle esquif 1, au milieu de cette mer terrible. Que FlorĂšs mĂ©rite bien son nom gracieux d'Ile des Fleurs! Il est impossible en effet de rencontrer 1 Le Santa-Cruz, mauvais petit yacht de trente-six tonneaux! 10 RAPPORT A SA MAJESTÉ LE ROI DE PORTUGAL une plus luxuriante vĂ©gĂ©tation. FougĂšres aux larges palmes vertes, ComposĂ©es aux fleurs plus brillantes que l'or, BruyĂšres aux petites clochettes roses et blanches, OmbellifĂšres larges comme de blancs parasols, Renoncules gigantĂ©sques, HypĂ©ricinĂ©es Ă©clatantes, RosacĂ©es vigoureuses, Convolvulus souples et Ă©lĂ©gants, LabiĂ©es odorifĂ©rantes, OrchidĂ©es semblables au velours; toutes les richesses de Flore sont lĂ  rĂ©unies et prodiguĂ©es avec une profusion telle qu'on les croirait placĂ©es Ă  dessein par quelque main inconnue sur un fond de Mousses toujours vertes et de GraminĂ©es dĂ©licates. Je ne parle pas de la profondeur des vallĂ©es, de la hauteur dĂ©s escarpements, de la fraĂźcheur des cascades, du bruit des torrents, de l'horreur des prĂ©cipices, de la tranquillitĂ© des pĂąturages, de la sombre verdure des bois de genĂ©vriers, de la menaçante attitude des rochers suspendus ; toutes ces choses de la nature forment un ensemble et des tableaux si pleins de grĂące, d'harmonie, de mystĂšre, de splendeur et de majestĂ©, qu'il est presque impossible de les dĂ©peindre. Ma plume, du moins , est impuissante Ă  les dĂ©crire. Il faut les voir et sentir. — Cette Ăźle produit beaucoup d'orseille, lichen tinctorial que d'audacieux herboristes vont recueillir sur les rochers les plus escarpĂ©s, au pĂ©ril de leur vie, en se suspendant Ă  des cordages au-dessus d'affreux prĂ©cipices. On m'a assurĂ© que deux hommes pouvaient ainsi gagner une piastre et plus 5 Ă  6 francs, en un jour 1. 1 L'orseille Rocella tinctoria s'exporte, particuliĂšrement pour l'Angleterre, au prix de 15 Ă  14,000 reis 63 francs environ le quintal. SUR UN VOYAGE AUX ILES AÇORES. 11 La plus petite Ăźle de l'archipel, Corvo, qui touche presque FlorĂšs, a une Caldeira digne d'intĂ©rĂȘt, et surtout une race singuliĂšre de taureaux et de vaches remarquable par sa petite taille et dĂ©jĂ  connue de Votre MajestĂ© 1. Mais on y chercherait en vain la fameuse statue Ă©questre montrant du doigt le Nouveau-Monde, dont parlent les anciens chroniqueurs 2 statue qu'aurait vue Christophe Colomb, suivant eux, ainsi que de prĂ©tendues inscriptions portant des caractĂšres inconnus, sur les rochers. Tout cela paraĂźt n'avoir jamais existĂ© que dans l'imagination de voyageurs amis du merveilleux. AprĂšs une semaine passĂ©e Ă  FlorĂšs, je revins Ă  Fayal, au commencement d'aoĂ»t, et je retrouvai M. Morelet prĂȘt Ă  s'embarquer pour Terceire, ayant fini d'explorer Fayal et Pico. Fayal a aussi son genre de beautĂ©, des vallĂ©es profondes, une vĂ©gĂ©tation variĂ©e et abondante, des sites charmants, et plusieurs de ses montagnes rappellent les formes pittoresques de FlorĂšs. Les environs d'Horta, son chef-lieu, mĂ©ritent d'ĂȘtre explorĂ©s, 1 Cette annĂ©e mĂȘme, S. M. le Roi de Portugal a fait hommage Ă  S. M. la Reine d'Angleterre de plusieurs individus de choix de ces animaux. La hauteur d'un taureau est Ă  peine de 40 pouces anglais. A Saint-Michel, il existe une race particuliĂšre de boucs, surtout caractĂ©risĂ©e par le prodigieux dĂ©veloppement de ses cornes. M. Antonio Borges l'a envoyĂ©e au MusĂ©um de Paris, et l'administration du Jardin des Plantes l'a jugĂ©e digne de figurer dans sa mĂ©nagerie. 2 Fructuoso, Cordeiro, et, d'aprĂšs eux, plusieurs Ă©crivains modernes. 12 RAPPORT A SA MAJESTÉ LE ROI DE PORTUGAL et ils sont dignes de toute l'attention du naturaliste. Mais sa localitĂ© la plus curieuse, pour qui que ce soit, est sans contredit la Caldeira. LĂ , le botaniste et le gĂ©ologue sont assurĂ©s dĂ© faire une rĂ©colte abondante, le peintre y trouvera des perspectives inconnues, le poĂšte, des inspirations nouvelles. La zoologie seule, lĂ  comme ailleurs, fait dĂ©faut, ainsi que Votre MajestĂ© le verra tout-Ă -l'heure. On dit qu'un gentilhomme portugais s'Ă©tait construit dans ce lieu paisible et retirĂ© une chaumiĂšre oĂč il venait, en Ă©tĂ©, se reposer du commerce des hommes. Aujourd'hui la chaumiĂšre a disparu. Mais la belle et brillante vĂ©gĂ©tation, mais les ravins, les sources, les cascades, le lac bleu, les fleurs sauvages, subsistent toujours. Le gracieux vallon, connu sous le nom de vallĂ©e des Flamands valle dos Flamengos, mĂ©rite Ă©galement d'ĂȘtre mentionnĂ© ce site est rĂ©ellement enchanteur. — A Fayal mĂ»rissent les meilleures bananes de l'archipel. L'Ăźle de Pico, si voisine de Fayal qu'on traverse le canal qui les sĂ©pare en moins d'une heure, a une apparence plus sauvage. Ses rivages, couverts d'Ă©normes laves rocheuses, sans cesse battus par des vagues courroucĂ©es, ont un aspect sombre et dĂ©solĂ©, plein de mĂ©lancolie. On fait ainsi des lieues entiĂšres, sur les cĂŽtes, sans voir autre chose qu'un sable noirĂątre et mouvant, dans lequel on enfonce plus haut que la cheville, des rochers noirs et bizarres, et çà et lĂ , la fleur brillante d'une plante açorĂ©enne, le Solidago azorica. Mais cette Ăźle est fameuse par sa montagne o Pico, pic volcanique, haut de 2,222 mĂ©tres; De temps en temps, le pain-de-sucre qui termine cette montagne altiĂšre, dont la cime porte presque tou- SUR UN VOYAGE AUX ILES AÇORES. 13 jours une triple couronne de nuages, lance encore quelques bouffĂ©es de fumĂ©e 1. - La production principale de Pico est son vin. La vigne, chose Ă©tonnante Ă  voir, croĂźt sur la lave, au milieu des roches les plus arides. L'Ăźle produit Ă©galement une grande abondanee de fruits estimĂ©s, tels que des abricots, des figues, des prunes, des pommes, des poires, des coings, etc. Je pensais clore mon voyage par l'ascension du Pic, et couronner par lĂ  mon entreprise, quand, au moment mĂȘme oĂč je mettais ce projet Ă  exĂ©cution, Ă©tant dĂ©jĂ  arrivĂ© Ă  moitiĂ© hauteur de la montagne, je ressentis les, premiĂšres atteintes d'une maladie dont j'avais puisĂ© le germe dans les fatigues et les privations du voyage de FlorĂšs et de Graciosa une inflammation du foie, qui dĂ©gĂ©nĂ©ra bientĂŽt en ictĂšre, me retint prĂšs d'un mois au lit et mit terme Ă  la partie scientifique de mon voyage 15 aoĂ»t 2. Pendant ce temps-lĂ , M. Morelet explorait l'Ăźle de Terceire; deux semaines d'excursions continuelles l'ont mis Ă  mĂȘme de bien reconnaĂźtre ce point im1 im1 gens du pays disent que l'intĂ©rieur de la montagne est rempli de feu, et ils ajoutent trĂšs-sĂ©rieusement qu'il y a aussi lĂ -dedans beaucoup d'or et d'argent. » C'est une tradition invĂ©tĂ©rĂ©e chez eux, et qui a pour base les parcelles nombreuses de mica renfermĂ©es dans les roches et dans le sable. On aperçoit Ă  une trĂšs-grande distance en mer ce cĂŽne colossal, placĂ© dans ces parages comme un phare ou comme une tour immense pour guider les navigateurs. 2 Plus heureux que moi, M. Morelet a pu faire l'entiĂšre ascension du Pic, non sans labeur Ă  la vĂ©ritĂ©, et au prix de mille fatigues et des plus pĂ©nibles incidents. 14 RAPPORT A SA MAJESTÉ LE ROI DE PORTUGAL portant de l'archipel, et de porter ses investigations non seulement sur les environs d'Angra, sur la Caldeira principale Caldeira de Santa-Barbara et le Morro do Brazil mont Brasil, mais encore sur plusieurs localitĂ©s secondaires, non moins intĂ©ressantes pour le naturaliste. — Terceire paraĂźt ĂȘtre la plus giboyeuse des Açores, et ses pĂąturages passent pour excellents. Tel est, Sire, le rĂ©cit abrĂ©gĂ© de nos courses, l'exposĂ© sommaire de nos navigations. Sur neuf Ăźles dont se compose l'archipel des Açores, huit ont Ă©tĂ© visitĂ©es par nous. Une seule, Saint-Georges, Ă©chappe Ă  nos investigations; malgrĂ© notre ardent dĂ©sir, les circonstances ne nous ont pas permis d'y sĂ©journer. D'ailleurs, ses analogies de formation, de constitution, de vĂ©gĂ©tation, avec Pico, et sa proximitĂ© de cette Ăźle, nous font moins regretter cette lacune dans l'ensemble de nos opĂ©rations. Il me reste maintenant Ă  prĂ©senter Ă  Votre MajestĂ© un tableau du rĂ©sultat de nos recherches. Ce tableau sera court et succinct comme le comporte ce rĂ©sumĂ©; je tĂącherai nĂ©anmoins de donner Ă  Votre MajestĂ© une idĂ©e des productions naturelles du pays que nous avons explorĂ©. Ce sera l'objet de la seconde partie de ce Rapport. SUR UN VOYAGE AUX ILES AÇORES. 15 § II. Je commencerai par la zoologie, but principal de notre voyage, et sur laquelle notre attention s'est particuliĂšrement reposĂ©e. 1. — Zoologie. Ce qui frappe tout d'abord l'observateur, en arrivant aux Açores, c'est le peu de dĂ©veloppement dans ce pays de la vie animale. Ce fait peut s'expliquer par deux causes principales d'une part, la formation peut-ĂȘtre relativement rĂ©cente de ces terres volcaniques, et d'autre part, leur complet isolement, leur manque absolu de communication avec les continents 1. La plupart des animaux sont ceux de l'Europe tempĂ©rĂ©e et paraissent, en grande partie, avoir Ă©tĂ© introduits par les colons. Les MammifĂšres sauvages se rĂ©duisent Ă  sept ou huit espĂšces, des plus petites, ce sont une chauvesouris elle existait, dit-on, lors de la dĂ©couverte des Ăźles, la belette, le furet, le lapin, le rat, la souris et un petit mulot qui habite la montagne. 1 Peut-ĂȘtre aussi les phĂ©nomĂšnes volcaniques, si terribles et si multipliĂ©s, dont elles ont Ă©tĂ© le théùtre, le manque de forĂȘts et de grands bois, etc. 46 RAPPORT A SA MAJESTÉ LE ROI DE PORTUGAL Les MammifĂšres domestiques sont les mĂȘmes que dans le midi de l'Europe le cheval, l'Ăąne trĂšsabondant et habituellement employĂ© comme monture pour les voyages et les promenades, le mulet, le mouton peut-ĂȘtre une race Ă  part, petite, Ă  laine trĂšs-blanche et trĂšs-frisĂ©e, le bouc fort belle race Ă  cornes trĂšs-developpĂ©es, le porc trĂšs-abondant, avec une chair excellente, le chien, le chat, le taureau j'ai dĂ©jĂ  parlĂ© de la race particuliĂšre de Corvo, remarquable par l'exiguitĂ© de sa taille. Les Oiseaux sauvages sont un peu plus nombreux. J'estime qu'il y en a de trente Ă  quarante espĂšces. Je ne les ai pas toutes observĂ©es, et je ne puis citer que les principales, savoir la buse qui a donnĂ© son nom Ă  l'archipel 1, un canard sauvage, deux espĂšces de goĂ©lands la grande et une plus petite, deux espĂšces de sternes ou hirondelles de mer garajao et maçarico, un plongeon, un hĂ©ron ?, le pigeon biset si abondant, lors de la dĂ©couverte des Ăźles, disent les chroniqueurs, qu'ils venaient se poser sur les Ă©paules des hommes, la tourterelle ?, la caille, la bĂ©casse, la bĂ©cassine, la perdrix rouge, le merle, l'Ă©tourneau, le cini aussi commun aux Açores 1 Lors de la dĂ©couverte des Ăźles, les Portugais ont confondu cet oiseau avec l'autour açor, en portugais. Je ne puis pas dire encore positivement si la buse des Açores est l'espĂšce commune d'Europe Buteo vulgaris, C. Bonap., ou bien la buse d'AmĂ©rique Buteo Swainsoni, C. Bonap.. Elle niche dans les rochers et pond trois oeufs assez gros, d'un blanc verdĂątre, avec des taches brumes plus ou moins marquĂ©es. Son aire se compose de bĂ»chettes, de petites, branches et de feuilles sĂšches. Sa proie principale est le poisson et les oiseaux. SUR UN VOYAGE AUX ILES AÇORES. 17 que chez nous le moineau domestique, le bec-fin rouge-gorge, une bergeronnette, plusieurs fauvettes, un pinson, le roitelet, le corbeau, le pic-vert, les thalassidromes oiseaux rares, que je n'ai pu me procurer, malgrĂ© mes efforts; les AçorĂ©ens les dĂ©signent, je crois, sous Je nom de alma-de-mestre, et quelques autres encore. J'ai recueilli les nids et les oeufs des principales espĂšces. Les Oiseaux domestiques sont peu nombreux le coq les poules abondent aux Açores, le canard, l'oie deux espĂšces l'oie ordinaire, et une autre toute blanche, moins grosse, Ă  bec largement CaronculĂ©, particulier 1, le dindon, la pintade, le paon, le pigeon de voliĂšre plusieurs races portugaises. L'absence presque complĂšte de Reptiles est bien remarquable. Il n'y en a que deux dans tout l'archipel, dont un dĂ©couvert par moi, savoir la grenouille l'espĂšce commune de Lisbonne; introduite il y a une vingtaine d'annĂ©es Ă  Saint-Michel, elle 1 Cest avec le plumage de celte oie que se font, Ă  Saint-Michel, les fleurs en plumes, si remarquables par leur ressemblance avec la nature. Cette industrie vient du BrĂ©sil. — A Fayal, on utilise les mousses de mer et la moelle du figuier pour faire des fleurs et des groupes d'une dĂ©licatesse et d'une Ă©lĂ©gance extrĂȘmes. A Fayal Ă©galement se fabriquent divers petits ouvrages en fil d'agave et des paniers aux formes les plus originales. Les femmes de Pico tressent la paille avec une merveilleuse adresse et en font de trĂšs-jolis chapeaux Ă  larges bords. FlorĂšs est renommĂ©e pour ses couvertures en laine de diverses couleurs et ses broderies en dentelle. Ainsi, chaque Ăźle a, pour ainsi dire, son industrie particuliĂšre et sa spĂ©cialitĂ©. T. XXII. 2 18 RAPPORT A SA MAJESTÉ LE ROI DE PORTUGAL pullule aujourd'hui dans toutes les eaux douces de cette Ăźle; — et un fort beau lĂ©zard peut-ĂȘtre une espĂšce inĂ©dite, Ă  moins cependant que ce ne soit une espĂšce de MadĂšre ou de Portugal que j'ai dĂ©couvert Ă  Graciosa personne, avant la rencontre que j'en fis, n'en soupçonnait l'existence. Les Poissons je parle des poissons d'eau douce sont pareillement d'une extrĂȘme raretĂ© ; les lacs des montagnes renferment presque tous une ou deux espĂšces de cyprins, notamment le cyprin dorĂ© de la Chine vulgairement poisson rouge, qu'il est assez singulier de rencontrer dans ces conditions; et, dans les petites riviĂšres torrentueuses qui descendent des montagnes, on pĂȘche une anguille qu'on trouve Ă©galement dans les eaux saumĂ tres, au bord de la mer. Je ne me suis occupĂ© que superficiellement des animaux vertĂ©brĂ©s marins, faute de temps et de circonstances favorables. Je dois pourtant citer, comme Ă©tant plus dignes de remarque. parmi les mammifĂšres, la baleine trĂšs-rare, le cachalot et quelques autres espĂšces des genres Physeter et Delphinus. Les cachalots sont assez communs dans la mer des Açores, et leur pĂȘche fait, de la part des baleiniers amĂ©ricains, l'objet d'une industrie Ă©tendue; on Ă©value Ă  150 environ le nombre des individus capturĂ©s chaque annĂ©e dans ces parages. On dit qu'il y avait autrefois aussi des phoques ils paraissent avoir disparu ; — parmi les reptiles, une tortue de moyenne taille, Ă©dule. — Les poissons de mer sont nombreux en espĂšces et trĂšs-abondants; on m'a remis une liste comprenant plus de cinquante noms vulgaires d'espĂšces Ă©dules et trĂšs-connues. Plusieurs de ces pois- SUR UN VOYAGE AUX ILES AÇORES. 19 sons sont vraiment dĂ©licieux et forment la base principale de la nourriture quotidienne des AçorĂ©ens 1. Les Mollusques ont particuliĂšrement fixĂ© notre attention, et c'est sur cette classe d'ĂȘtres organisĂ©s que se sont plus spĂ©cialement dirigĂ©es nos recherches. Soixante espĂšces environ de GastĂ©ropodes terrestres se sont seulement offertes Ă  nos minutieuses investigations, et parmi elles, plus du tiers nous paraĂźt inĂ©dit. Ces mollusques appartiennent tous aux genres Arion, Limax, Testacella, Vitrina, Zonites, Helix, Bulimus, Glandina, Pupa, Balea, Carychium, Cyclostoma, et l'espĂšce la plus curieuse nous paraĂźt ĂȘtre une Limace tout-Ă -fait particuliĂšre, dont la limacelle Ă  spire naissante donnera lieu probablement de crĂ©er un genre nouveau 2. Il n'y a pas, aux Açores, un seul mollusque fluviatile! - Un fait que nous avons constatĂ© et qui nous a frappĂ©s, c'est que tous ces mollusques habitent exclusivement sous les pierres et dans les feuilles mortes. Jamais on ne les voit sur les arbres, sur les plantes herbacĂ©es, ou contre les murs et les rochers, et tous Ă  l'exception de quelques Limaces et des Helix lactea et aspersa sont de petite taille, avec peu de vivacitĂ© dans la coloration. Les Mollusques marins sont peu nombreux dans ces parages, et en gĂ©nĂ©ral de petite taille. C'est tout 1 Saint-Michel seule compte plus de 800 pĂȘcheurs. 2 Depuis mon retour en France, j'ai reconnu que le Limacien en question appartient au genre Viquesnelia, rĂ©cemment Ă©tabli par M. Deshayes pour une espĂšce trouvĂ©e dans l'Inde. 20 RAPPORT A SA MAJESTÉ LE ROI DE PORTUGAL au plus si nous avons pu rĂ©ussir Ă  nous procurer une soixantaine d'espĂšces appartenant aux genres Argonauta, Octopus, Spirula, Carinaria, Bulla, Pedipes, Littorina, Vermetus, Janthina, Trochus, Solarium, Scalaria, Purpura, Nassa, Cassis, Murex, Tritonium, Columbella, Fusus, Mitra, Oliva, Cyproea, Haliotis, Patella, Hinnites, Pecten, Lima, Arca, Pinna, Cardita, Cardium, Ervilia, Tellina, Cytherea, Solen, Anatifa, Balanus. -— On ne connaĂźt pas d'HuĂźtre aux Açores. En revanche, on rencontre assez abondamment de curieux Zoophytes, et notamment des Polypiers admirables d'Ă©lĂ©gance et de dĂ©licatesse, des AstĂ©ries gigantesques, de beaux Oursins, des Holothuries, des MĂ©duses, des MadrĂ©pores, des Eponges et beaucoup d'autres animaux infĂ©rieurs. M. Dabney, de Fayal, en possĂšde dĂ©jĂ  une collection intĂ©ressante. Nous avons observĂ© quelques AnnĂ©lides d'apparence assez particuliĂšre, un petit nombre de CrustacĂ©s terrestres, et plusieurs grandes espĂšces marines qui sont Ă©dules. Les Arachnides sont plus rĂ©pandus et paraissent variĂ©s en espĂšces; plusieurs d'entre elles sont trĂšs-remarquables; on prĂ©tend mĂȘme qu'il y en a de venimeuses, mais ce fait est douteux. Parmi les Insectes, nous avons accordĂ© une attention particuliĂšre Ă  la classe des ColĂ©optĂšres, peu abondante en espĂšces, Ă  ce qui nous a paru; celles que nous avons rapportĂ©es ne montent qu'Ă  50 environ, appartenant aux genres Calosoma, Calathus, Argutor, Amara, Anisodactylus, Ptistonychus, Ophonus, Harpalus, Stenolophus, Acupalpus, Bembidium, Parnus, Onthophagus, Aphodius, Elater, Agriotes, Staphylinus, Ocypus, Pitophilus, Saprinus, Dermesles, Attalus, Dasytes, Opilus, Anobium, Hegeter, Blaps, Gonocepha- SUR UN VOYAGE AUX ILES AÇORES. 21 lum, Phaleria, Tribolium, Tenebrio, Anaspis, Sitones, Otiorhynchus, Laparocerus trois espĂšces nouvelles, Toeniotes le T. scalaris, qui paraĂźt importĂ© du BrĂ©sil, il vit sur les figuiers, Hylotrupes, Clytus, Coccinella et Rhizobius. Les autres classes, OrthoptĂšres, HĂ©miptĂšres, NĂ©vroptĂšres, HymĂ©noptĂšres et DiptĂšres, sont Ă©galement rĂ©prĂ©sentĂ©es par des espĂšces plus ou moins nombreuses et plus ou moins remarquables. Quant aux LĂ©pidoptĂšres, ils m'ont paru peu abondants ce sont, pour la plupart, les espĂšces communes de l'Europe tempĂ©rĂ©e, se rattachant aux genres Pieris, Vanessa, Satyrus, Sphinx, Noctua, etc. Les Myriapodes sont plus nombreux, du moins en individus, et leurs formes sont assez Ă©tranges. Pour ne point fatiguer l'attention de Votre MajestĂ© par de plus grands dĂ©tails, je borne lĂ , quant Ă  prĂ©sent, cet exposĂ© de nos observations zoologiques, heureux si, par ce rapide aperçu, j'ai rĂ©ussi Ă  vous donner, Sire, une idĂ©e approximative de la zoologie de l'archipel 1. 2. — Botanique. Quoique les plantĂ©s de l'archipel des Açores aient dĂ©jĂ  Ă©tĂ© l'objet des recherches de plusieurs botanistes anglais et allemands Gutnick, Fr. et Ch. Hochstetter, Watson, Masson..., il est Ă  prĂ©sumer 1 De la revue qui prĂ©cĂšde, il rĂ©sulte pour moi que l'archipel des Açores, zoologiquement parlant, se rattache au continent europĂ©en. 22 RAPPORT A SA MAJESTÉ LE ROI DE PORTUGAL que le nombre des espĂšces observĂ©es sera encore augmentĂ©, et nous pensons que la briĂšvetĂ© du sĂ©jour n'a pas, jusqu'Ă  prĂ©sent, permis aux naturalistes de prendre une complĂšte connaissance des productions du rĂšgne vĂ©gĂ©tal de ce pays. Le Flora Azorica du professeur Maurice Seubert 1, composĂ© sur les documents et avec les herbiers des Hochstetter, et le catalogue de l'anglais Watson 2, portent Ă  prĂšs de quatre cents le nombre des vĂ©gĂ©taux spontanĂ©s de ce groupe d'Ăźles. Sans ĂȘtre fort Ă©loignĂ© de la vĂ©ritĂ©, nous croyons que ce chiffre est un peu au-dessous de la rĂ©alitĂ©, et que des recherches ultĂ©rieures, dans les diffĂ©rentes saisons, accroĂźtront ce rĂ©sultat, surtout pour les plantes cryptogames. Quant Ă  nous, qui n'avons recueilli que les espĂšces principales, celles surtout qui nous ont paru propres Ă  l'archipel, nous ne pouvons guĂšre avoir la prĂ©tention d'avoir dĂ©couvert beaucoup de choses nouvelles ; nous avons vu en masse, plutĂŽt qu'examinĂ© en dĂ©tail. Voici cependant quelques plantes recueillies par nous aux Açores, et qui paraissent avoir Ă©chappĂ© Ă  nos devanciers Ulex europoeus, Spergula arvensis, Trifolium arvense, Trifolium patens, Marrubium vulgare, Crithmum maritimum, Erigeron canadensis, Statice limonium, Vinca media, Mentha pulegium, Cynoglossum pictum, Ornithopus perpusillus, Clinopodium vulgare, et en outre plusieurs espĂšces, encore incertaines, 1 Seubert. Flora Azorica. Bonnoe, Marcus, 1844; in-4° de 50 p. et 15 pl. 2 Notes of a Botanical Tour in the Western Azores in Journ. Botan. Lond. t. 5 et 4; 1844. SUR UN VOYAGE AUX ILES AÇORES. 23 appartenant aux genres Erythroea, Rumex, Iris, Equisetum, Epilobium, Cerasus, Papaver, Myrtus, OEnothera, Barbaroea, Geranium, etc. Le docteur Seubert partage le sol des Açores en cinq rĂ©gions botaniques 1° RĂ©gion de la plaine, ou cultivĂ©e ; 2° RĂ©gion montagneuse infĂ©rieure, ou sylvatique; 3° RĂ©gion montagneuse supĂ©rieure ; 4° RĂ©gion des bruyĂšres ; 5° RĂ©gion des sommets, ou des pĂąturages. Ces distinctions sont naturelles, et chacune de ces rĂ©gions a, pour ainsi dire, sa flore spĂ©ciale. Dans la plaine, ou plutĂŽt au fond des vallĂ©es et sur les rivages de la mer, au milieu des cultures, brillent, entre toutes, les fleurs jaunes de l'Androsoemum Webbianum, du Solidago azorica et des Hypericum c'est la zone la moins riche pour le botaniste. Dans la rĂ©gion sylvatique, si fraĂźche, si vivante, si dĂ©licieuse, s'Ă©lĂšvent les arbres des bois et les arbustes Persea azorica, Myrica Faya, Picconia excelsa, Rhamnus latifolius, Laurus indica Ă  feuilles luisantes, Ă©paisses et presque toujours vertes; l'innombrable cohorte des FougĂšres dĂ©ploie son gracieux feuillage, et les Ronces Rubus fruticosus et R. Hochstetisrorum, redoutĂ©es des naturalistes, se multiplient avec une rare abondance. A la rĂ©gion montagneuse supĂ©rieure appartiennent plus particuliĂšrement le genĂȘvrier Juniperus oxycedrus, cedro des AçorĂ©ens, dont le port rappelle celui du cĂšdre, le Myrsine retusa, le Myrica Faya, plusieurs grandes fougĂšres, entre autres le Diksonia Culcita, dont la racine soyeuse est utilisĂ©e par les habitants ils en font des matelas et des coussins, et un grand nombre de plantes rares ou 24 RAPPORT A SA MAJESTÉ LE ROI DE PORTUGAL Ă©clatantes, propres Ă  l'archipel Tolpis nobilis, Microderis filii, M. umbellata, Bellis azorica, Sanicula azorica, Euphrasia grandiflora....J Au-dessus rĂ©gion des bruyĂšres apparaissent les bruyĂšres Erica azorica, Calluna vulgaris, Myrsineretusa, qui recouvrent souvent des espaces Ă©normes, mĂȘlĂ©es aux Vaccinium, Ă  l'Ilex Perado, aux genĂȘvriers, et au laurier des Açores fPersea azorica. Enfin sur les hauteurs, sur les sommets rĂ©gion des pĂąturages, au milieu des rochers, croissent plusieurs petites plantes rabougriesAgrostis, Thymus, PolygalaJ et mĂȘme encore les bruyĂšres Erica, Calluna, Daboecia polyfolia. En rĂ©sumĂ©, les plantes cryptogames lichens, hĂ©patiques, mousses et fougĂšres forment un quart, Ă  peu prĂšs, de la flore açorĂ©enne; les plantes monocotylĂ©donĂ©es sont un peu moins abondantes; plus de la moitiĂ© appartient aux dicotylĂ©donĂ©es. Les arbres indigĂšnes sont peu nombreux sept ou huit espĂšces, dont plusieurs commencent Ă  devenir fort rares et restent le plus souvent avec l'apparence d'arbustes, ce qui tient en partie aux localitĂ©s dans lesquelles ils croissent, et en partie au dĂ©plorable dĂ©boisement des montagnes. L'attention des autoritĂ©s devrait, nous pensons, ĂȘtre Ă©veillĂ©e sur ce point, et leur sollicitude pourrait en arrĂȘter les rĂ©sultats d'autant plus fĂącheux, que le reboisement par les vĂ©gĂ©taux exotiques Pinus Pinea, Laurus, indica, Castanea vulgaris.... ne compense en aucune façon la destruction des espĂšces indigĂšnes. En somme, les plantes recueillies par nous s'Ă©lĂšvent Ă  deux cent cinquante espĂšces environ, reprĂ©sentĂ©es dans nos herbiers par un grand nombre d'Ă©chantillons. J'ai joint Ă  mon herbier une collec- SUR UN VOYAGE AUX ILES AÇORES. 25 tion assez complĂšte des diffĂ©rentes essences des bois de l'archipel. A l'Ă©tude des vĂ©gĂ©taux spontanĂ©s se rattache celle des vĂ©gĂ©taux cultivĂ©s. C'est donc ici le lieu de dire un mot des oranges, de la vigne et des cĂ©rĂ©ales. Ainsi que Votre MajestĂ© ne l'ignore pas, les orangers enduraient, depuis plus de dix annĂ©es, aux Açores, une terrible maladie. Un insecte parasite de la famille des Gallinsectes, le Coccus Hesperidum, venu, dit-on, des Antilles, avait envahi ces arbres prĂ©cieux, source de richesse pour le pays 1, et en attaquant le tronc, les feuilles et les fruits, avait presque anĂ©anti le commerce des oranges. Depuis deux ans, grĂące Ă  Dieu, le flĂ©au, diminue, et aujourd'hui il a presque disparu. DĂ©jĂ  les orangers ont en partie repris leur vigueur accoutumĂ©e, et dans peu de temps il ne sera plus question, aux Açores, du Coccus Hesperidum. Malheureusement nous ne pouvons pas en dire autant de la vigne. Survenue depuis tantĂŽt six annĂ©es, la maladie est actuellement en pleine activitĂ©, et l'on ne rencontre partout que des ceps maladifs et rabougris, portant Ă  de rares intervalles des grappes avortĂ©es et atteintes par l' oĂŻdium. Le commerce du vin de Pico n'existe plus, Ă  proprement parler, et l'Ăźle a subi, par cela mĂȘme, un notable appauvrissement. Saint-Michel ne rĂ©colte plus de vin depuis plusieurs annĂ©es. Quand disparaĂźtra le 1 L'Ăźle de Saint-Michel, seule, exporte annuellement 100,000 caisses d'oranges; 50,000 caisses environ sortent des autres Ăźles. 26 RAPPORT A SA MAJESTÉ LE ROI DE PORTUGAL flĂ©au?..... C'est ce que personne ne peut prĂ©voir 1. Les cĂ©rĂ©ales, fort heureusement, sont eh bon Ă©tat de rendement. Partout, cette annĂ©e, les rĂ©coltes du blĂ© et de l'orge ont Ă©tĂ© satisfaisantes, partout les greniers sont abondamment fournis. Le maĂŻs, base principale de la nourriture du peuple et de l'habitant des campagnes, le maĂŻs se trouverait dans les mĂȘmes conditions, si par malheur un ouragan terrible, Ă©clatĂ© le 24 aoĂ»t dernier, n'avait dĂ©truit en trois jours les deux tiers au moins de la rĂ©colte, et dissipĂ© ainsi les espĂ©rances que l'on avait jusque-lĂ  conçues. Probablement, Ă  cause de ce dĂ©sastre, sera-t-il nĂ©cessaire d'autoriser l'importation temporaire. Les autoritĂ©s locales ne manqueront pas de s'occuper, sans dĂ©lai, de cette importante question, et de la soumettre au gouvernement de Votre MajestĂ©. 3. — GĂ©ologie. DĂ©jĂ  plusieurs voyageurs ont parcouru l'archipel des Açores en gĂ©ologues, et quelques-uns d'entre eux ont publiĂ©, sur ce sujet, de savantes et curieuses observations. C'est ainsi que Webster, Hebbe, Hunt, Vargas de BĂ©dĂ©mar, principalement Mou1 Mou1 pipe de vin de 500 bouteilles, qui se vendait de 30 Ă  35 piastres 200 francs il y a dix ans, Ă  Fayal, vaut aujourd'hui 100 piastres 550 francs ! Il s'en exportait autrefois 25,000 pipes chaque annĂ©e. SUR UN VOYAGE AUX ILES AÇORES. 27 sinho d'Albuquerque 1, et quelques autres encore, ont Ă©crit sur la constitution gĂ©ologique de ces Ăźles des pages pleines d'intĂ©rĂȘt. N'est-ce pas aussi le lieu de citer les cartes levĂ©es par le capitaine Vidal, de la marine d'Angleterre, et de rendre Ă  leur exactitude, Ă  leur fidĂ©litĂ©, l'hommage qu'elles mĂ©ritent?... Pour nous, qui n'avons fait qu'effleurer, pour ainsi dire, cette branche de l'histoire naturelle, prĂ©occupĂ©s que nous Ă©tions par d'autres Ă©tudes, nous ne pourrions guĂšre que rĂ©pĂ©ter ce qui a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© dit par nos devanciers, et ce qui est trop connu aujourd'hui. Ne serait-ce pas d'ailleurs empiĂ©ter, en quelque sorte, sur le terrain de notre savant et honorable compagnon de voyage et ami, M. Hartung 2?.... Je me bornerai donc Ă  rĂ©sumer ici nos observations principales, n'ayant rien d'ailleurs de bien nouveau Ă  rĂ©vĂ©ler, sur ce point, Ă  Votre MajestĂ©. Toutes les Ăźles Açores doivent ĂȘtre considĂ©rĂ©es comme le produit d'une action volcanique sousmarine. Toutes aussi, par suite du violent cataclysme dont elles sont le rĂ©sultat, sont des terres Ă©levĂ©es, prĂ©sentant les formes les plus variĂ©es, les plus bizarres, et portant, dans leur relief, un cachet particulier de pittoresque hardiesse. 1 Voir le savant mĂ©moire de Mousinho d'Alburquerque intitulĂ© Observaçoes sobre a ilha de S. Miguel. Lisboa, impr. reg., 1826; in-4° de 43 p. et 3 pl. 2 M. Hartung se propose de publier prochainement le rĂ©sultat de ses observations gĂ©ologiques comparatives sur les trois archipels de MadĂšre, des Canaries et des Açores. 28 RAPPORT A SA MAJESTÉ LE ROI DE PORTUGAL L'Ă©poque de leur, formation paraĂźt relativement rĂ©cente. Les Ă©lĂ©ments gĂ©ologiques composant leurs chaĂźnes de montagnes et leurs masses Ă©normes de rochers ne sont pas trĂšs-nombreux; voici les principaux le basalte, le trachyte, des laves basaltiques et trachytiques prĂ©sentant d'innombrables variations d'Ă©tat, de forme et de couleur, la pierre ponce, des conglomĂ©rats de scories, de pierre ponce et d'obsidienne, des tufs variĂ©s. Les rivages de la mer sont en gĂ©nĂ©ral composĂ©s de blocs Ă©normes de roches trachytiques, Ă  formes bizarres, avec de nombreux cristaux d'olivine, amphibolie, pyroxĂšne, et mica que les habitants des campagnes prennent pour de l'or. Partout se rĂ©vĂšlent l'empreinte et les traces de l'action des feux volcaniques toutes les montagnes sont des cratĂšres Ă©teints caldeiras ou des cĂŽnes d'Ă©ruption; le fameux pic dĂ© l'Ăźle de Pico, haut de prĂšs de 7,000 pieds, fume encore et dĂ©gage des vapeurs sulfuriques et des gaz inflammables; l'Ăźle de Saint-Georges a Ă©tĂ©, en 4808, le théùtre d'une Ă©ruption mĂ©morable; plusieurs Ăźlots se sont formĂ©s Ă  diverses Ă©poques, sur ce point du globe, et ont Ă©tĂ© soudainement engloutis 1638, —1719, —1811 Sabrina ! ; des tremblements de terre plus ou moins violents ont, Ă  plusieurs reprises, portĂ© l'Ă©pouvante et la dĂ©solation dans l'archipel, notamment Ă  TercĂšre, Saint-Georges et Fayal le dernier mouvement ressenti date de 1854, Ă  Saint-Michel; les Ă©tonnants volcans d'eau chaude de Furnas sont en pleine activitĂ©, recouvrant le sol qui les entoure de dĂ©pĂŽts SUR UN VOYAGE AUX ILES AÇORES. 29 de soufre et de stalagmite siliceuse 1 ; enfin, l'on rencontre Ă  chaque pas, si l'on peut dire, des sources d'eaux thermales et minĂ©rales. Sainte-Marie, seule, ne porte pas Ă  sa surface les traces de l'effort des feux souterrains; On y trouve des couches de terrain calcaire assez riches en fossiles, et une argile plastique utilisĂ©e pour la fabrication de la poterie. Sur la cĂŽte mĂ©ridionale, au bord de la mer, se rencontre le feldspath, en cristaux abondants. A Graciosa, paraĂźt exister, vers le centre de l'Ăźle, une couche de schiste argileux primitif Vargas de BĂ©dĂ©mar. A Fayal, non loin d'Horta, se trouverait, suivant Vargas de BĂ©dĂ©mar 2, l'opale commun. On rencontre assez frĂ©quemment, dans ces Ăźles, des troncs d'arbres enfouis profondĂ©ment, trĂšs-lĂ©gĂšrement carbonisĂ©s et parfaitement conservĂ©s. Sans s'arrĂȘter, pour expliquer ce phĂ©nomĂšne, Ă  l'opinion des habitants qui font remonter ces troncs au dĂ©luge, nous pensons qu'il faut simplement attribuer ces faits Ă  des Ă©boulements considĂ©rables, et Ă  l'action des matiĂšres enveloppantes et des vapeurs sulfuriques sur les corps ensevelis. En somme, les Açores sont sorties, par exhaus1 exhaus1 phĂ©nomĂšnes que l'on observe Ă  Furnas sont les analogues des fameux geysers de l'Islande, mais sur une plus petite Ă©chelle. 2 Resumo de observaçoes geologicas feitas em uma viagem as ilhas da Madeira, Porto Santo, e Açores. Lisboa, 1837; in-8°. 30 RAPPORT A SA MAJESTÉ LE ROI DE PORTUGAL sement et par l'effort des feux volcaniques, du sein de la mer; mais, ne sont-elles que des fragments Ă©pars et aujourd'hui isolĂ©s d'une grande Ăźle et mĂȘme d'un continent disloquĂ© par une catastrophe violente, comme l'avancent quelques auteurs?.... On peut, Ă  cet Ă©gard, dire tout ce que l'on veut, mais quoi de certain et quoi de positif? Et qui sait encore si un nouveau cataclysme ne les fera pas disparaĂźtre un jour et s'abĂźmer dans les flots ?... Quoi qu'il en soit de leur origine et de leur destinĂ©e future, il est certain que ces Ăźles prĂ©sentent Ă  l'observateur, dans leurs phĂ©nomĂšnes volcaniques, un sujet inĂ©puisable de profonde mĂ©ditation. Le spectacle affreux d'une ancienne dĂ©vastation, de vastes plaines de laves rejetĂ©es des entrailles de la terre en torrents enflammĂ©s, des masses compactes et rugueuses d'un aspect sombre et triste, vomies dans les siĂšcles passĂ©s, et formant aujourd'hui d'Ă©normes montagnes dures et rocheuses ; » Ă  cĂŽtĂ© de ce tableau, ou plutĂŽt au milieu de cet encadrement, une vĂ©gĂ©tation splendide et gracieuse, des pĂąturages toujours verts, des vallĂ©es dĂ©licieuses, des campagnes fertiles et bien cultivĂ©es, des bois, des lacs, des torrents, des cascades;.... " tout cela pĂ©nĂštre l'homme du sentiment de sa faiblesse, et l'oblige, en dĂ©pit de lui-mĂȘme, Ă  reconnaĂźtre et adorer le pouvoir mystĂ©rieux, incomprĂ©hensible, pour lequel ces prodiges ne sont qu'un jeu 1. » En rĂ©sumĂ©, les collections formĂ©es pendant ce 1 D'Avezac. Iles de l'Afrique. Paris, 1848; in-8°; p. 44. Excellent traitĂ©, faisant partie de l' Univers, ou Histoire et Description de tous les peuples. SUR UN VOYAGE AUX ILES AÇORES. 31 voyage comprennent plus de deux cents espĂšces animales, reprĂ©sentĂ©es par un grand nombre d'individus, trois cents vĂ©gĂ©taux environ, et plus de trois cents Ă©chantillons de gĂ©ologie et de minĂ©ralogie; Ă  quoi il faut ajouter encore des documents bibliographiques et statistiques aussi complets que possible, quelques vues et quelques dessins, et enfin, une collection des principaux produits industriels de l'archipel. Tel est, Sire, l'imparfait tableau que j'ai l'honneur de vous prĂ©senter; tel est le rĂ©sultat de cinq mois de recherches incessantes. Je ne sais si nous avons trop augurĂ© de nos forces, mais nous avons du moins la conscience de n'avoir point faibli devant les difficultĂ©s, de n'avoir point reculĂ© devant les obstacles, et d'avoir menĂ© la tĂąche entreprise Ă  sa fin. Nous nous estimerons trop heureux si, dans notre amour dĂ©vouĂ© des sciences naturelles, nous obtenons l'assentiment de Votre MajestĂ©. Et maintenant, Sire, permettez-nous de rendre un hommage public Ă  la parfaite hospitalitĂ© des AçorĂ©ens. Partout nous avons reçu, des autoritĂ©s comme des simples particuliers, le meilleur accueil, partout nous avons trouvĂ© aide et assistance. Parmi les hommes de mĂ©rite qui nous ont secondĂ©s de tout leur pouvoir, quelques noms sont dignes d'ĂȘtre signalĂ©s Ă  Votre MajestĂ©. En premiĂšre ligne nous devons citer l'honorable M. JosĂ© do Canto, de Saint-Michel. C'est Ă  ses connaissances Ă©tendues, Ă  sa parfaite obligeance et Ă  ses 32 RAPPORT A SA MAJESTÉ LE ROI DE PORTUGAL bienveillantes communications, que nous sommes redevables d'une foule de prĂ©cieux documents concernant Saint-Michel. Personne ne connaĂźt, mieux que lui, les choses de son pays. M. le commandeur Antonio Borges, de la mĂȘme Ăźle, nous a aussi prĂȘtĂ© son concours obligeant, et plus d'une fois il nous a permis de mettre Ă  contribution son adresse de chasseur. M. Guillaume Ribeiro, vice-consul de France Ă  Fayal, nous a reçus avec cet officieux empressement que tous les Français qui touchent Ă  Horta lui connaissent, et je lui suis, en particulier, reconnaissant pour la paternelle hospitalitĂ© qu'il m'a donnĂ©e pendant le cours de ma maladie. Enfin, comment ne pas nommer la famille de M. Dabney, consul des Etats-Unis, Ă  Fayal, toujours si aimable pour les Ă©trangers, et toujours prĂȘte aussi Ă  les obliger avec cette dĂ©licatesse et cette distinction qui semblent hĂ©rĂ©ditaires chez elle ? C'est un devoir pour nous de porter, en cette occasion, ces noms Ă  la connaissance de Votre MajestĂ©, et cet hommage rendu au talent, Ă  la distinction et Ă  l'obligeance n'est que l'acquittement partiel et imparfait de la dette de la reconnaissance. Nous n'oublierons pas non plus que nous sommes en partie redevables de cet accueil, qui n'a pas peu contribuĂ© Ă  la rĂ©ussite de notre voyage, aux hautes recommandations dont nous Ă©tions munis, et aussi Ă  des lettres particuliĂšres, Ă©manĂ©es d'un savant aussi Ă©minent que modeste, d'un de ces hommes d'Ă©lite dĂ©vouĂ©s Ă  leur patrie et qui contribuent de tout leur SUR UN VOYAGE AUX ILES AÇORES. 33 pouvoir Ă  l'avancement des sciences naturelles 1. Mais ce qui restera toujours prĂ©sent Ă  notre esprit, c'est l'intĂ©rĂȘt que daigne prendre Ă  nos Ă©tudes et Ă  nos travaux un jeune Souverain, aussi distinguĂ© par l'Ă©tendue de ses connaissances acquises qu'heureusement douĂ© par la nature, c'est le bienveillant accueil qu'il a bien voulu nous faire, ce sont enfin les faveurs particuliĂšres qu'il lui a plu de nous accorder. C'est dans ces sentiments, Sire, que je prie Dieu de vous accorder longue et heureuse vie, et que je demeure, avec le plus profond respect, De Votre MajestĂ©, Le trĂšs-humble et le trĂšs-dĂ©vouĂ© serviteur. HENRI DROUËT. Ile de Pico, 15 Septembre. 1857. 1 M. le docteur Bernardino Antonio GomĂšs, mĂ©decin de Sa MajestĂ©, professeur d'histoire naturelle mĂ©dicale, de matiĂšre mĂ©dicale et de pharmacie Ă  l'Ecole de MĂ©decine et de Chirurgie de Lisbonne, membre de l'AcadĂ©mie Royale des Sciences, etc., etc. T. XXII. 3 NOTE RELATIVE A UN SCEAU DÉCOUVERT A TROYES En 1857, PAR M. L'ABBÉ COFFINET, Chanoine titulaire, membre rĂ©sidant. Un sceau qui paraĂźt offrir un vĂ©ritable intĂ©rĂȘt pour notre histoire locale, vient d'ĂȘtre dĂ©couvert dans les dĂ©molitions d'une maison sise Ă  Troyes, rue du Bois, et appartenant Ă  M. JournĂ©. Il est en bronze, de forme ronde, et taillĂ© Ă  cĂŽtes extĂ©rieurement; son tenon se termine par une figure trilobĂ©e du style le plus pur. Sa surface prĂ©sente un champ complĂštement divisĂ© par une croix Ă©gale dans toutes ses parties. Entre chaque croisillon sont deux fleurs-de-lis, tournĂ©es pied-Ă -pied, et alternant avec deux tĂȘtes humaines, barbues, bandĂ©es, et accostĂ©es de deux Ă©toiles. La forme de ce sceau, de ses lettres et de ses figures, accuse l'Ă©poque du XIVe au XVe siĂšcle. Lorsqu'il me fut communiquĂ©, on me pria d'en 36 NOTE RELATIVE A UN SCEAU dĂ©chiffrer la lĂ©gende et d'en dĂ©terminer l'usage; — c'est ce que je vais essayer. Une Ă©toile, gravĂ©e sur le bord extĂ©rieur du sceau, indique sa partie supĂ©rieure et le commencement de sa lĂ©gende. Le nombre graduĂ© de points placĂ©s aprĂšs chaque mot, fait connaĂźtre le rang que ces mots doivent occuper dans la mĂȘme lĂ©gende. Enfin, deux signes abrĂ©viatifs figurĂ©s Ă  la seconde et Ă  la derniĂšre lettre de ladite lĂ©gende, avertissent qu'il y a autant de lacunes Ă  remplir pour la complĂ©ter. Cet examen une fois fait, je lis IPOSICIOM DE TROYS FOR Sauf meilleur avis, j'interprĂšte l'inscription cidessus de la maniĂšre suivante , en me conformant au style ancien et Ă  l'orthographe de l'Ă©poque IMPOSICION ‱ DE TROYS FORTIFICATIONS D'aprĂšs le style moderne, je proposerais l'interprĂ©tation dĂ©finitive de Administration des ImpĂŽts de Troyes, pour les fortifications, Craignant que cette version fĂ»t un peu hasardĂ©e, je l'ai soumise Ă  M. Boutiot, qui a fait de nos archives municipales une Ă©tude toute spĂ©ciale. J'Ă©tais convaincu que notre laborieux collĂšgue me donnerait, Ă  cet Ă©gard, d'utiles renseignements. Mon attente ne fut pas trompĂ©e. M. Boutiot m'apprit qu'il avait existĂ©, jusqu'en 1470, une Commission chargĂ©e de percevoir les impĂŽts pour les fortifications de Troyes; que ceux qui en faisaient partie s'appelaient les MaĂźtres de l'OEuvre des fortifications, et qu'ils avaient DÉCOUVERT A TROYES EN 1857. 37 Ă©tĂ© supprimĂ©s Ă  l'Ă©poque de l'Ă©tablissement des Maire et Echevins de notre ville. Cette derniĂšre assertion est pleinement confirmĂ©e par la teneur d'un procĂšs-verbal de 1493, que renferme un ouvrage imprimĂ© Ă  Troyes, chez Blanchard, en 1679, et qui a pour titre La Mairie et Eschevinage de Troyes, capitale de la Province de Champagne. Parmi les attributions dĂ©volues aux Maire et Echevins nouvellement instituĂ©s, est relatĂ©, Ă  la page 13e, le droit de percevoir les impĂŽts destinĂ©s aux fortifications de la ville, et d'en disposer selon les besoins de ce service. Le mot Imposition, appliquĂ© au XVe siĂšcle, paraĂźtra peut-ĂȘtre trop moderne, pour avoir Ă©tĂ© usitĂ© Ă  cette Ă©poque. Je rĂ©pondrai Ă  cette objection qu'il se trouve dans tous les vieux dictionnaires français du XVIe et du XVIIe siĂšcle que j'ai consultĂ©s Ă  la BibliothĂšque de notre ville, et qu'il est citĂ© comme signifiant la perception des tailles et des impĂŽts. En outre, des arrĂȘts extraits des registres du Conseil d'Etat, Ă  la date de 1598 et de 1600, donnent Ă  ce mot la mĂȘme signification. D'aprĂšs tous ces documents, l'objet que nous venons de dĂ©crire serait le scel des MaĂźtres de l'OEuvre des fortifications de la ville de Troyes. Ce petit monument, qui semble ĂȘtre sorti de terre pour protester, avec la SociĂ©tĂ© AcadĂ©mique de l'Aube, contre la destruction des derniers vestiges de l'amour national et de la valeur militaire de nos 38 NOTE RELATIVE A UN SCEAU DÉCOUVERT A TROYES. ancĂȘtres, pour survivre Ă  ces nobles ruines qui donnaient Ă  notre vieille citĂ© une physionomie si glorieuse et, en mĂȘme temps, si pittoresque; m'a paru devoir exciter tout notre intĂ©rĂȘt. Je prie la SociĂ©tĂ© de vouloir bien faire dĂ©poser la prĂ©sente empreinte dans le MusĂ©e , de notre ville, et de dĂ©cider que l'existence du sceau susdit sera constatĂ©e parmi les dĂ©couvertes archĂ©ologiques recueillies avec tant de soin, classĂ©es avec tant de science, par notre trĂšs-honorable collĂšgue, M. le prĂ©sident Corrard de Breban. Troyes, ce 27 novembre 1857. LE MAIRE ET LES ECHEVINS DE TROYES PRISONNIERS A L'HOTEL-DE-VILLE En 1675, Par M. THÉOPHILE BOUTIOT, Membre rĂ©sidant. I. Parmi les privilĂšges dont les habitants de Troyes Ă©taient fiers, au XVIe et au XVIIe siĂšcles, il y en avait un entr'autres dont l'exercice faisait leur gloire, en assurant la sĂ©curitĂ© que leur procuraient leurs murailles c'Ă©tait celui de se garder eux-mĂȘmes et de ne pouvoir ĂȘtre contraints par le Roi Ă  recevoir garnison que dans les cas d'un grand et imminent danger. Pendant longtemps cette noble prĂ©rogative, qu'ils tenaient de la faveur royale, fut respectĂ©e par le pouvoir souverain. Au temps des premiĂšres guerres des Anglais, sous 40 LE MAIRE ET LES ÈCHEVINS DE TROYES le rĂšgne du roi Jean et sous celui de Charles V, les Troyens entretinrent une compagnie de brigands 1 pour la sĂ»retĂ© de leur ville. En 1417 et en 1418, ils salariĂšrent des hommes d'armes pour la garde d'Isabeau de BaviĂšre, pendant que cette reine, de si triste mĂ©moire, faisait de Troyes le quartier-gĂ©nĂ©ral de son gouvernement; ils Ă©taient aussi chargĂ©s de maintenir le bon ordre dans l'intĂ©rieur de la ville, dont les portes Ă©taient alors sous le commandement de quatre Ă©cuyers choisis par le sire de Toulongeon, gouverneur de la province de Champagne. Sous Charles VII, les Troyens reçurent dans leurs murs les compagnies royales nouvellement organisĂ©es, et sous Louis XI, ils soldĂšrent un certain nombre de lances et une compagnie de Francs-Archers, entretenus dans l'intĂ©rĂȘt de la cause royale. Par suite de la faveur que la ville de Troyes tenait de nos Rois, elle ne recevait de garnison, au XVIe siĂšcle, qu'Ă  de rares intervalles. Ce n'Ă©tait qu'avec la plus vive inquiĂ©tude que les habitants consentaient Ă  y laisser entrer la garde de MM. d'Aumale et de Guise, pendant les troubles, et les hommes d'armes, dont ces princes croyaient devoir se faire accompagner, pour appuyer leur autoritĂ© dans la capitale de leur gouvernement. Souvent encore ces troupes n'Ă©taient-elles logĂ©es que dans les faubourgs. Mais, au XVIIe siĂšcle, en exĂ©cution des ordres de Richelieu, la ville de Troyes perdit l'un des plus beaux fleurons de sa couronne; il fallut, bien malgrĂ© elle, qu'elle 1 Nom donnĂ© Ă  des soldats revĂȘtus d'une casaque nommĂ©e brigandine. PRISONNIERS A L'HÔTEL-DE-VILLE EN 1675. 41 se dĂ©cidĂąt Ă  rompre avec son passĂ©, et qu'elle abandonnĂąt ce privilĂšge, et, avec celui-ci, d'autres encore. L'Ă©pisode que nous choisissons parmi ceux qui composent l'histoire municipale de Troyes, au XVIIe siĂšcle, se rapporte Ă  l'entrĂ©e des rĂ©giments Ă  la solde du Roi dans la ville de Troyes, Ă  leur logement et Ă  leur subsistance, pendant qu'ils y prenaient leur quartier d'hiver. A l'Ă©poque oĂč se placent les faits que nous allons raconter, nous ne sommes plus au temps oĂč les hahitants de Troyes refusent aide et comfort » Ă  M. de Barbazan, pour repousser les Anglais, en motivant leur refus sur les Ă©normes sacrifices qu'ils ont fait pour reprendre, sur les ennemis de Charles VII, les places de Villemaur, de Pont-sur-Seine, de Marigny, de Villeneuve l'ArchevĂȘque, de Saint-LiĂ©bault, de Chappes et d'autres places fortes. Nous ne sommes plus au temps oĂč, malgrĂ© ce refus apparent, la ville nĂ©gocie secrĂštement avec les villes de ChĂąlons, de Reims et de Laon, pour assurer le succĂšs des armĂ©es royales partout oĂč elle a intĂ©rĂȘt Ă  le faire. Au milieu du XVIIe siĂšcle, les Troyens n'avaient plus Ă  craindre les violences de. Jehan de Chaumont, capitaine du chĂąteau d'Estissac, qui, tenant pour le duc de Bourgogne, faisait arrĂȘter par ses compagnons les convois de grains dirigĂ©s sur Troyes pour l'approvisionnement de la ville, rançonnait les voituriers Ă  un salut d'or par cheval, ou bien s'emparait des charretiers qui allaient dans la forĂȘt d'Othe pour y charger du bois, et les dĂ©tenait, ainsi que leurs che- 42 LE MAIRE ET LES ÉCHEVINS DE TROYES vaux, pendant quarante-huit heures, sans leur donner aucune nourriture. Non, ce temps-lĂ  n'Ă©tait plus. On ne craignait plus, comme en 1431, de voir, aux arbres des chemins, des hommes pendus par les doigts pour obtenir une forte rançon. Les habitants de Troyes n'avaient plus Ă  redouter quelques surprises des troupes bourguignonnes ou anglaises qui, occupant les places et les chĂąteaux-forts du plat pays, cernaient la ville de toutes parts. Ils n'avaient plus, au XVIIe siĂšcle, leurs murailles garnies de leurs bonnes couleuvrines et de leurs solides voguelaires; leurs portes n'Ă©taient plus murĂ©es. Ils n'avaient plus mĂȘme Ă  redouter ni les lansquenets, ni les reĂźtres qui, au XVIe siĂšcle, leur rappelaient les temps les plus mauvais de la guerre des Anglais. C'est Ă  une Ă©poque de transition qu'appartiennent les faits que nous voulons raconter. Ils rappellent des souvenirs importants de l'histoire municipale de la ville de Troyes, ainsi que les difficultĂ©s que la monarchie rencontra au sein des grandes citĂ©s, lorsqu'elle travaillait Ă  placer sous une rĂšgle commune l'administration de la France. II. En 1638, une modification profonde s'Ă©tait dĂ©jĂ  introduite dans l'organisation de l'armĂ©e entretenue Ă  la solde du Roi. Si, Ă  cette Ă©poque, on compare l'Ă©tat des troupes royales avec l'indiscipline qui rĂ©gnait mĂȘme aux premiĂšres annĂ©es du XVIIe siĂšcle, PRISONNIERS A LHÔTEL-DE-YILLE EN 1675. 45 on les trouve rĂ©guliĂšres et soumises. Et pourtant, il ne faut pas moins que la signature du Roi pour obliger les rĂ©giments Ă  suivre l'itinĂ©raire qui leur est tracĂ©. Pendant son rĂšgne si long, Louis XIV s'astreint Ă  mettre sa signature au pied des feuilles de route alors dĂ©signĂ©es sous le seul nom de routes », et qui fixaient l'itinĂ©raire des troupes en voyage. Jusqu'Ă  cette Ă©poque, les soldats logeaient aux champs, c'est-Ă -dire dans les campagnes. Ils ne pĂ©nĂ©traient jamais en ville, et mĂȘme les faubourgs et la banlieue de Troyes Ă©taient Ă  cette Ă©poque dispensĂ©s de ce logement. C'est par ce motif que le duc de Nevers, gouverneur de Champagne, fixait, en 1622, la limite de la banlieue de Troyes, et dispensait tous les villages qu'elle renfermait de ce logement si redoutĂ©. En 1636, Louis XIII, confirmant tous les privilĂšges dont jouissait la ville de Troyes, y comprenait encore celui qui exonĂ©rait les habitants de celte lourde charge. Mais un semblable Ă©tat de choses ne pouvait durer plus-longtemps. L'autoritĂ© royale devait briser cet ancien privilĂšge, comme elle renversa les autres immunitĂ©s Ă  l'aide desquelles les grands centres municipaux avaient traversĂ©, plus facilement que les gens du plat pays, les Ă©poques dĂ©sastreuses de notre histoire. Abordons les faits. En mars 1638, M. Dorieux, maire de Troyes, et MM. les Echevins reçurent du Roi la lettre suivante De par le Roy, Chers et bien amez, aiant ordonnĂ© que nostre » rĂ©giment de Navarre yra tenir garnison Ă  Troyes, 44 LE MAIRE ET LES ÉCHEVINS DE TROYES » nous vous faisons cette lettre pour vous dire et » trĂšs-expressĂ©ment ordonner que vous aiez Ă  le re» re» et loger sans difficultĂ© et luy fournir la » subsistance en la mesme sorte et sur le mesme » pied quelle lui a estĂ© dĂ©livrĂ©e par les habitants de » Vitry, tant pour le regard des cappitaines et offi» offi» que des haultes paies et soldats conformĂ©ment » Ă  nostre reiglement du huistiesme novembre » trente-sept, et Ă  nostre ordonnance du 5me jour de » janvier dernier. » En suivant le traitĂ© qui en a estĂ© faict par les » srs D'Avernes et Campez, cappne dud. rĂ©giment » avecq les eschevins dudict Victry, le 2me du pré» sent mois, voulant que vous faciez l'aduance de » lad. subsistance de quinze jours en quinze jours, » Ă  commancer du jour que ledict rĂ©giment arrivera » en nostrd. ville de Troyes, sauf Ă  vous tenir compte » de ceste despence, sur ce que vous et vostre eslection » debuez fournir pour votre cottepart de la subsis» tance de noz trouppes, Ă  quoy nous vous enjoi» gnons de satisfaire ponctuellement Ă  peine de dé» sobĂ©issance et de respondre en vos propres et » privez noms de tous les dĂ©sordres et inconvĂ©niens » qui en pourrpient arriver au prĂ©judice de nostre » service. CAR TEL EST NOSTRE PLAISIR. » DonnĂ© Ă  Saint-Germain-en-Laye, le troisiesme » de mars mil six cent trente-huict. » Louis. » Et plus bas SUBLET. » La rĂ©ception d'une pareille lettre jeta le trouble PRISONNIERS A LHÔTEL-DE-VILLE EN 1675. 45 dans la citĂ©. La volontĂ© royale intervenait pour modifier profondĂ©ment le passĂ©, et faisait prĂ©sager que les privilĂšges d'autrefois avaient vĂ©cu. Que devenaient les chartes royales qui, depuis Louis XI jusqu'Ă  Louis XIII, confirmaient les droits, que les habitants de Troyes possĂ©daient, de repousser les troupes royales de l'intĂ©rieur de leurs murailles? Aussi l'Ă©motion fut-elle grande au sein de l'Ă©chevinage. Le corps municipal ne se crut pas revĂȘtu d'une autoritĂ© suffisante pour prendre parti sans consulter les habitants. Les assemblĂ©es gĂ©nĂ©rales des habitants Ă©taient, depuis un temps Ă©loignĂ© dĂ©jĂ , tombĂ©es dans l'oubli. On leur avait substituĂ© une rĂ©union composĂ©e des trois corps principaux de la ville qui Ă©taient pour la citĂ© ce qu'Ă©taient pour l'Etat les trois ordres du Royaume. Celte rĂ©union se composait des dĂ©putĂ©s du clergĂ©, de ceux de la justice et du corps de ville auquel s'adjoignaient les anciens maires et Ă©chevins, les capitaines de la milice bourgeoise et quelques notables; les premiers reprĂ©sentant le clergĂ©, les seconds la noblesse, et les derniers le tiers-Ă©tat. Les trois Etats de la ville furent donc convoquĂ©s pour prendre connaissance de la volontĂ© royale et dĂ©libĂ©rer. Le Maire exposa les faits et fit lecture de la royale missive. Il ajouta qu'elle estait un commandement » formel auquel ne gisait que l'obĂ©issance, et né» antmoings que ledit RĂ©giment, entrant en lad. " ville, c'estoit une grande bresche et prĂ©judice aux » privilĂšges octroiez par Sa MajestĂ©, par les Roys, » ses prĂ©dĂ©cesseurs, comme ville cappitalle de la 40 LE MAIRE ET LES ÉCHEVINS DE TROYES » Province et particuliĂšrement par l'Edict de Sa Ma» jestĂ© de l'annĂ©e 1594 1. » Dans le cours de la discussion, M. Pierre Lenoble, lieutenant-gĂ©nĂ©ral au bailliage de Troyes, observa que cet orage Ă©tait bien prĂ©vu, » puisque l'on n'avait pas payĂ© la subsistance, dont les bases et les conditions avaient Ă©tĂ© posĂ©es en dĂ©cembre prĂ©cĂ©dent, et que, si l'on voulait Ă©viter le logement, il n'y avait qu'Ă  payer, M. le Maire ajouta encore que le moyen de se garantir du logement du rĂ©giment de Navarre Ă©tait de payer la subsistance demandĂ©e par le Roi, et que, pour subvenir au paiement de cet impĂŽt, il avait trouvĂ©, Ă  Paris, 200,000 livres Ă  emprunter Ă  constitution de rente; mais que les prĂȘteurs ne voulaient point entendre parler ni de maire, ni d'Ă©chevins pour garantir cet emprunt. AprĂšs une longue et pĂ©nible discussion, l'assemblĂ©e dĂ©cida que l'on adresserait au Roi de trĂšs-humbles remontrances, afin de conserver Ă  la ville la jouissance de ses anciennes libertĂ©s, en l'exemptant du logement du rĂ©giment de Navarre, Ă  la condition toutefois que la ville paierait le montant de la subsistance fixĂ©, en dĂ©cembre prĂ©cĂ©dent, Ă  la somme annuelle de 65,000 livres. Il fut de plus dĂ©cidĂ© que l'on ferait un emprunt pour y arriver. Des nĂ©gociations Ă©taient dĂ©jĂ  ouvertes. 1 C'est l'Ă©dit sur la reddition de la ville de Troyes Ă  Henri IV ; Ă©dit qui n'est autre qu'un traitĂ© passĂ© entre le Roi, d'une part, et les habitants de Troyes, d'autre part. PRISONNIERS A LHÔTEL-DE-VILLE EN 1675. 47 Le traitant voulait que son prĂȘt lui fĂ»t garanti par l'engagement personnel du Maire et des Eçhevins et de dix notables habitants. Pour rĂ©unir les sommes dont on avait un pressant besoin, on leva un impĂŽt sur les farines, et de plus les habitants aisĂ©s furent taxĂ©s, chacun, Ă  une somme de 150 livres. Pendant ces nĂ©gociations entre la ville et les agents royaux, le rĂ©giment de Navarre s'Ă©tait logĂ© dans les faubourgs, dont il ne dĂ©guerpit, quoique la ville eĂ»t rempli ses engagements, que dans le courant du mois d'avril, et sur les ordres formels et rĂ©itĂ©rĂ©s du Roi. Pour cette fois, mais ce fut la derniĂšre, la ville paya, et, par ce moyen, prolongea de quelques mois seulement la jouissance de privilĂšges auxquels les habitants attachaient le plus haut prix. Plus tard, elle paya encore, et de plus elle logea. III. Six mois s'Ă©taient Ă  peine Ă©coulĂ©s que les Ă©vĂ©nements, provoquĂ©s par la lettre du Roi pour l'entrĂ©e en ville du rĂ©giment de Navarre, se reproduisaient pour la rĂ©ception du rĂ©giment de Picardie. Une nouvelle lettre de Louis XIII, du 8 octobre 1638, ordonnait aux Troyens de recevoir, dans leurs murs, le rĂ©giment de Picardie qui venait pour y passer son quartier d'hiver. AprĂšs l'avoir reçu, il fallait en loger les soldats et leur fournir les vivres et les ustensiles dont ils 48 LE MAIRE ET LES ÉCHEVINS DE TROYES avaient besoin. Cette missive royale Ă©tait accompagnĂ©e d'une lettre de M. de Mesgrigny, alors Intendant de Champagne. Dans cette nouvelle et dĂ©licate occurrence, le Maire demande au Conseil de ville de vouloir bien lui tracer la conduite qu'il doit tenir. Le Conseil, persistant dans sa rĂ©sistance aux volontĂ©s royales et ne voyant de salut que dans la conservation des libertĂ©s de la citĂ©, dĂ©cide que l'on dĂ©putera prĂšs de M. l'Intendant, afin d'ĂȘtre de nouveau dĂ©chargĂ© du logement des gens de guerre, et que l'on fera ses efforts pour faire respecter les privilĂšges concĂ©dez et suc» cessivement confirmez par les feux Roys, mesme » par Sa MajestĂ© Ă  prĂ©sent rĂ©gnant, comme il se » recongnoist parles archives de ladicte ville, tou» chant l'exemption des garnisons. » L'un des Ă©chevins, porteur des instructions du Conseil, fut envoyĂ© prĂšs de M. l'Intendant pour lui faire connaĂźtre la rĂ©solution de l'Ă©chevinage. La tentative ne fut pas heureuse. Ce dĂ©putĂ© n'obtint, pour toute rĂ©ponse, que l'ordre de se procurer la somme de 40,000 livres pour la part des habitants dans la subsistance des garnisons. Nouvelle convocation des trois Etats de la ville pour prendre connaissance du rĂ©sultat de la mission de l'ambassadeur municipal prĂšs de M. l'Intendant. Sur ces entrefaites, on annonce l'arrivĂ©e du rĂ©giment de Picardie aux portes de la ville pour le lendemain 23 octobre. Pendant ces nouveaux dĂ©bats, un sieur Elie Michelin, marchand-tanneur Ă  Troyes, Ă©tait arrĂȘtĂ© Ă  Paris, Ă  la requĂȘte de M. de la BaziniĂšre, TrĂ©sorier de l'Epargne, et mis au Fort-l'EvĂȘque, parce que la PRISONNIERS A L'HÔTEL-DE-VILLE EN 1675. 49 ville n'avait point acquittĂ© l'emprunt demandĂ© par le Roi. Le sieur Michelin s'adressa au corps de l'Ă©chevinage, en le priant de prendre des mesures pour obtenir sa mise en libertĂ©. Aucune mesure n'Ă©tait sans doute possible. Dans tous les cas, aucune ne fut prise; car la mise en libertĂ© du sieur Elie Michelin ne fut ordonnĂ©e que par arrĂȘt du conseil d'Ă©tat du 26 mars 1639, arrĂȘt qui, en rĂ©glant les affaires de la ville, Ă  l'occasion de cet emprunt, statuait sur le sort de cet honorable citoyen. Le rĂ©giment de Picardie, dont l'arrivĂ©e Ă©tait annoncĂ©e pour le courant du mois d'octobre, n'arriva, nĂ©anmoins, aux portes de la ville, qu'en dĂ©cembre suivant. Avant qu'il se prĂ©sentĂąt, le corps de ville fit parvenir de nouvelles supplications au Roi, pour ĂȘtre dĂ©barrassĂ© du logement de ce rĂ©giment vaines dĂ©marches. De nouveau, le 17 novembre, Louis XIII Ă©crivait en personne au maire et aux Ă©chevins de recevoir en ville les malades et les bagages du rĂ©giment de Picardie. Mais, continuant ses refus, la ville n'ouvrit pas ses portes Ă  ceux qui dirigeaient et conduisaient ce dĂ©tachement. Les soldats ne furent admis Ă  loger que dans les faubourgs et aprĂšs avoir Ă©tĂ© visitĂ©s avec soin par les mĂ©decins et chirurgiens, pour s'assurer que cette troupe n'Ă©tait pas atteinte de quelque maladie contagieuse. Enfin, le 30 dĂ©cembre, quelques officiers du rĂ©giment de Picardie se prĂ©sentent au Maire de Troyes, et lui remettent des lettres du Roi, ordonnant que leur rĂ©giment prendrait garnison Ă  Troyes. Le Maire expose Ă  ces officiers que la ville est T. XXII. 4 50 LE MAIRE ET LES ÉCHEVINS DE TROYES exempte du logement des gens de guerre ; que, s'ils le dĂ©sirent, ils peuvent prendre leurs quartiers dans les faubourgs, et lĂ , mais lĂ  seulement, la ville leur fournira leur subsistance en denrĂ©es. Mais que, pour la subsistance en argent, ils aient Ă  se pourvoir prĂšs de M. l'Intendant. Sur ce nouvel incident, le Conseil, consultĂ©, dĂ©pute Ă  ce haut fonctionnaire MM. Corrard et de la FertĂ©, pour lui faire connaĂźtre les calamitĂ©s et la misĂšre qui pĂšsent sur la ville et la campagne des environs, et, par ces motifs, obtenir la dĂ©charge de l'emprunt dont la ville est grevĂ©e. Le Conseil, persistant dans ses prĂ©cĂ©dentes rĂ©solutions, refuse net l'ouverture des portes de la ville au rĂ©giment de Picardie, qui se prĂ©sente Ă  Troyes par le faubourg Saint-Jacques. ConvoquĂ© de nouveau le 5 janvier, il arrĂȘte, en maintenant ses prĂ©cĂ©dentes dĂ©libĂ©rations, que l'on convoquera les trois ordres pour prendre leur avis. Pendant ce long dĂ©bat, les hommes du rĂ©giment de Picardie sont logĂ©s au Pont-Hubert, Ă  SaintParres et dans d'autres villages voisins du faubourg Saint-Jacques. Mais, s'il faut en croire ce qu'ils Ă©crivent au Maire, l'espace leur manquĂ©, et pour ĂȘtre plus commodĂ©ment logĂ©s, les officiers demandent au Maire de leur permettre, en raison du mauvais Ă©tat des chemins qui contournent les murs d'enceinte, de faire traverser la ville Ă  vingt voitures de leurs bagages pour aller se loger de l'autre cĂŽtĂ© de la Seine. Le Maire, craignant quelques ruses de guerre, refuse cette autorisation. NĂ©anmoins, aprĂšs avoir pris l'avis du Conseil, il est arrĂȘtĂ© que la permission demandĂ©e sera accordĂ©e, Ă  la condition que la porte de ComportĂ© sera tenue fermĂ©e, et qu'il sera PRISONNIERS A L'HÔTEL-DE-VILLE EN 1675. 51 fait bonne garde. Mais l'affaire est Ă©ventĂ©e. Le coup a manquĂ©, et le passage ne s'est pas effectuĂ©. Sur le refus fait au rĂ©giment de Picardie de lui laisser prendre garnison en ville, ce rĂ©giment avait envoyĂ© des dĂ©putĂ©s en cour. La ville en avait fait autant. Mais les dĂ©putĂ©s du rĂ©giment, plus heureux que ceux de la ville, obtinrent du Roi la lettre suivante, adressĂ©e au Maire, aux Echevins et aux habitants de Troyes. De par le Roy. » Chers et bien amez, aiant sceu comme vous » auez faict difficultĂ© de receuoir nostre rĂ©giment » de Picardie en nostre ville de Troyes oĂč nous » avons entendu qu'il feust logĂ© suivant les ordres » que nous vous en avons adressez. Nous vous fai» fai» cette lettre par laquelle nous vous mandons » et trĂšs expressĂ©ment enjoignons de faire entrer et " loger ledict Regiment en nostre dicte ville, sans y » apporter aucun delay ny difficultĂ© pour quelque » cause et sous quelque prĂ©texte que ce puisse ĂȘtre » sur peine de dĂ©sobĂ©issance, CAR TEL EST NOSTRE » PLAISIR. DonnĂ© Ă  Sainct Germain en Laye le pre» pre» jour de janvier 1639. » LOUIS. » Et plus bas " SUBLET. » Cette lettre fut lue au Conseil dans la sĂ©ance du 6 janvier. Aucune dĂ©cision n'y fut prise, parce que les dĂ©putĂ©s de la ville, envoyĂ©s en cour, n'Ă©taient pas encore revenus. M. de Vienne, lieutenant particulier au bailliage, Ă©mit l'avis que, comme il s'a- 52 LE MAIRE ET LES ÉCHEVINS DE TROYES » gissoit d'un commandement de Sa MajestĂ© auquel » on debuoit rendre une obĂ©issance aveugle, il » exhortoit la compagnie de se conformer Ă  sa vo» lontĂ©. » Mais l'assemblĂ©e, moins docile aux ordres royaux, se sĂ©para sans statuer. Pendant ce temps, employĂ© en dĂ©marches et en dĂ©putations, le rĂ©giment de Picardie vivait sur le bonhomme, comme on disait encore, et, chaque jour, des rĂ©clamations arrivaient en ville des grandes vexations » que les soldats de ce rĂ©giment causaient aux habitants de la campagne. Ces vexations Ă©taient grandes en effet, car les officiers de ce rĂ©giment placĂšrent des gardes aux portes de la ville pendant plusieurs jours, pour empĂȘcher lĂšs habitants de sortir. Plusieurs maisons des faubourgs furent pillĂ©es et dĂ©molies par les soldats. Un certain nombre d'habitants furent blessĂ©s, et un sieur Grapin, ou Guerrapin, imprimeur, fut tuĂ©. Des plaintes montĂšrent jusqu'Ă  la cour. Dans ces hautes rĂ©gions, les dommages causĂ©s par les soldats du rĂ©giment de Picardie furent attribuĂ©s au refus que les Troyens faisaient d'ouvrir les portes de leur ville. La rĂ©sistance du Conseil continuait et paraissait se perpĂ©tuer. Un tel Ă©tat de choses ne pouvait durer, et le ministre accoutumĂ© Ă  vaincre ne voulait pas ĂȘtre vaincu. Aussi, pour faire exĂ©cuter les ordres du Roi, il dĂ©pĂȘcha, Ă  Troyes, M. le marquis de Praslain, Lieutenant-GĂ©nĂ©ral au gouvernement de la province, et M. de Mesgrigny, Intendant. Mais ces deux hauts fonctionnaires, s'ils obtinrent de la ville une contribution de 120 livres par jour pour la subsistance, ne purent encore dĂ©cider les Troyens Ă  l'abandon de leurs privilĂšges. Cette somme de 120 livres par jour PRISONNIERS A L'HÔTEL-DE-VILLE EN 1675. 53 ne fut pas mĂȘme acceptĂ©e du marquis de BrĂ©aultĂ©, maĂźtre du camp du rĂ©giment, sur une premiĂšre proposition. Mais, comme les habitants de Troyes apprirent que pour son fait particulier, M. de » BrĂ©aultĂ© voulait avoir dix ou douze Ă©cus par jour, » ce maĂźtre de camp cĂ©da lorsqu'on lui offrit quinze » livres, par jour, pour son logement et ustensiles, » qu'on lui livrerait aux faubourgs. L'affaire ainsi terminĂ©e avec ceux qui Ă©taient directement intĂ©ressĂ©s dans ces dĂ©bats, les Troyens crurent, cette fois encore, ĂȘtre dĂ©barrassĂ©s du logement des garnisons, moyennant les sommes que nous avons dites. Mais l'inflexible ministre n'avait pas atteint son but. Il fallait abolir ces immunitĂ©s auxquelles la bourgeoisie tenait tant. A la premiĂšre occasion, des faits semblables se seraient renouvelĂ©s. Richelieu voulait assurer l'avenir. La ville, au contraire, pour la conservation de ses vieilles libertĂ©s, les aurait payĂ©es dix fois pour une. Dans ce but, elle fit offrir de verser Ă  la caisse de l'extraordinaire une somme de soixante mille livres, pour ĂȘtre continuĂ©e dans l'exemption du logement des gens de guerre. Il Ă©tait trop tard ! Ce n'Ă©tait pas seulement de l'argent que l'on dĂ©sirait; le ministre voulait l'anĂ©antissement complet des franchises municipales qui Ă©taient alors de sĂ©rieux obstacles Ă  la constitution de l'unitĂ© française Ă  laquelle ce grand et habile ministre consacra sa vie et toutes ses facultĂ©s. On a vu accourir, Ă  Troyes, le Lieutenant-GĂ©nĂ©ral au gouvernement de Champagne, et l'Intendant, pour mettre fin Ă  ce dĂ©bat dans lequel ils n'avaient obtenu qu'une demi-victoire. Le ministre la voulait entiĂšre et complĂšte. Il l'obtint. 54 LE MAIRE ET LES ÉCHEVINS DE TROYES MM. de Praslain et de Mesgrigny avaient-ils eu quelque condescendance pour les habitants de Troyes avec lesquels depuis bien longtemps ils entretenaient des relations pleines de bienveillance ? Le fait peut ĂȘtre vrai. Aussi, sur ces entrefaites, M. de Mesgrigny, appelĂ© Ă  d'autres fonctions, fut-il remplacĂ© par M. de Choisy. AussitĂŽt en possession de sa nouvelle charge, M. de Choisy vint Ă  Troyes. Il accompagnait M. du Hallier, gĂ©nĂ©ral des armĂ©es du Roi, en Champagne. Des troupes marchaient sous leurs ordres, et, comme eux, se dirigeaient sur notre ville. RĂ©unis Ă  M. de Praslain, ils firent connaĂźtre aux Troyens que le Roi leur avait fait savoir qu'il avait eu avis des dĂ©sordres que le rĂ©giment de Picardie commettait dans la campagne, Ă  cause du refus qu'ils avaient fait de recevoir ce rĂ©giment en garnison, et qu'en outre le Roi donnait ordre trĂšs-exprĂšs Ă  M. du Hallier de faire Ă©tablir le rĂ©giment de Picardie dans la ville de Troyes, avec ceux de Saint-Luc et de Plessis-Praslain, poury passer le reste du quartier d'hiver, et que ce commandement, Ă©tant absolu, devait recevoir une prompte et exacte exĂ©cution. M. du Hallier, pour se rendre aux ordres du Roi, demanda Ă  M. le Maire de dĂ©signer les personnes qui, avec les marĂ©chaux-de-logis, feraient, sans dĂ©lai, la distribution des logements. Pour appuyer l'exĂ©cution de ses ordres, il remit au Maire deux lettres du Roi adressĂ©es aux Maire, Echevins et habitants de Troyes. Ces lettres portaient la date du 3 mars. Cette communication fit son effet. Nulle rĂ©sistance n'Ă©tait plus possible. En prĂ©sence d'ordres aussi formels et de trois rĂ©giments qui cernaient la ville, PRISONNIERS A LHÔTEL-DE-VILLE EN 1675. 55 il ne fut plus question de composition. On obĂ©it sans mot dire aux trois commissaires royaux. RĂ©duit Ă  cette dure extrĂ©mitĂ© de consacrer la ruine de l'un des privilĂšges les plus considĂ©rables dont la ville de Troyes ait eu le bĂ©nĂ©fice, le Conseil RÉSOLUT » UNANIMEMENT que, puisqu'il y avoit un sy exprĂšs » commandement du Roy de laisser entrer dans ceste dicte » ville lesdicts rĂ©giments, et que lesdicts sieurs du Hal" lier, de Praslain et de Choisy en pressoient l'exĂ©cution, » il ne restoit qu'Ă  obĂ©ir. » IV. Ces dĂ©bats, qui aboutissaient toujours Ă  des levĂ©es de deniers considĂ©rables sur les habitants, presque toujours avancĂ©es d'urgence par les membres du corps de ville,.Ă©loignaient des assemblĂ©es le plus grand nombre des conseillers. Aussi, une dĂ©libĂ©ration prise dans les circonstances qui nous occupent signale-t-elle que lorsqu'il s'agit d'avancer de l'ar» gent pour les affaires de la ville, les conseillers ne » se rendent pas Ă  l'hĂŽtel-de-ville ainsy qu'il se » peult veoir des actes des assemblĂ©es et mĂȘme en » la prĂ©sente oĂč il y en a seullement cinq sur vingt» quatre. » Les fonds employĂ©s au paiement de la subsistance des trois rĂ©giments de Picardie, de Saint-Luc et de Plessis, furent levĂ©s au moyen d'un droit assis sur les vins et dit de la courte pinte, d'un autre droit nommĂ© du pied fourchu, payĂ© sur le bĂ©tail destinĂ© Ă  la bouche- 56 LE MAIRE ET LES ÉCHEVINS DE TROYES rie, et fixĂ© Ă  30 sous par boeuf, 15 sous par vache, 10 sous par porc, et 5 sous par veau, mouton ou brebis. Mais, avec le privilĂšge qui exemptait les habitants de Troyes du logement des gens de guerre, un autre disparut aussi. La suppression du premier entraĂźna celle du second. Le Maire de Troyes avait seul la garde de la ville, et, aprĂšs la fermeture des portes, les clefs lui en Ă©taient chaque soir rapportĂ©es. Ce droit, si important, n'avait subi dans le passĂ© aucune interruption, si nous exceptons que, par honneur, ces clefs Ă©taient remises aux gouverneurs de la province ou Ă  ses lieutenants-gĂ©nĂ©raux lorsqu'ils venaient Ă  Troyes. Dans le courant du mĂȘme mois de mars 1638, le Maire reçut du Roi une lettre datĂ©e du 17, et adressĂ©e aux Maire, Echevins et habitants de Troyes. Le Roi faisait savoir par cette missive qu'il avait appris les diffĂ©rends qui existaient entre les habitants de Troyes et les officiers et soldats du rĂ©giment de Picardie, qu'il importait Ă  son service d'ĂȘtre dans lĂ  sĂ©curitĂ© la plus entiĂšre, et qu'il avait besoin d'ĂȘtre averti Ă  toute heure de ce qui se passait Ă  Troyes. Le Roi enjoignait ensuite trĂšs-expressĂ©ment de faire donner aux officiers des rĂ©giments les clefs de l'une des portes de la ville, pour en prendre la garde tant de jour que de nuit, avec dĂ©fense de mĂ©faire ni de » mĂ©dire contre aucun de ses officiers et soldats. » Les habitants de Troyes invoquĂšrent la protection de M. le marquis de Praslain dans cette nouvelle circonstance, non moins importante que lorsqu'il s'agissait des garnisons. MalgrĂ© le beau prĂ©sent de deux douzaines de grands plats d'argent valant prĂšs PRISONNIERS A LHÔTEL-DE-VILLE EN 1675. 57 de 3,000 livres que la ville venait de lui faire, le crĂ©dit de M. le Lieutenant-GĂ©nĂ©ral au gouvernement de Champagne ne put rien prĂšs du Roi en faveur du maintien des anciens droits du Maire de Troyes. Vivement pressĂ©, l'Echevinage ne put encore que cĂ©der Ă  une autoritĂ© accoutumĂ©e Ă  vaincre. Le Conseil de ville, composĂ© seulement, dans la circonstance, de M. Le Noble, lieutenant-gĂ©nĂ©ral au bailliage, de M. Dorieux, maire, de MM. Nicolas Moreau, Louis Michelin, Nicolas Morel, Nicolas Langlois, Nicolas Allen, Jean Lombard, Ă©chevins, et de M, Claude Camusat,conseiller de ville, arrĂȘta que M. le Maire, » aprĂšs la fermeture des portes, remettrait les clefs » de la ville au sieur Le Marquis, Lieutenant-GĂ©nĂ©ral » pour le Roy en la province, pour faire par luy » tout ce qu'il jugeroit bon sur le contenu esdictes » lettres, et disposer des clefs et des portes comme » il jugera nĂ©cessaire pour le bien de ceste commu» nautĂ© en l'obĂ©issance qui est due aux commande» ments du Roy. » Ainsi, Ă  partir de 1639, les portes de la ville furent pour toujours ouvertes aux troupes royales, et le Maire de Troyes perdit en mĂȘme temps le privilĂšge d'en avoir la garde. V. Mais les rĂ©giments, quoique logĂ©s en ville, ne furent pas plus respectueux envers l'autoritĂ© civile ou judiciaire qu'autrefois. Combien ne pourrions- 58 LE MAIRE ET LES ÉCHEVINS DE TROYES nous pas citer d'actes de violences commis dans les murs de la ville et n'ayant pour cause que l'indiscipline! Nous passerons lĂ©gĂšrement sur cette Ă©poque qui fourmille d'Ă©pisodes de ce genre; car les habitants de la ville furent souvent victimes de l'insubordination militaire, et l'autoritĂ© royale avait encore beaucoup Ă  faire pour que l'on acceptĂąt sans rĂ©sistance ses ordonnances sur la police des gens de guerre. L'annĂ©e 1640 ne se passa pas sans plaintes. Il en fut portĂ© jusqu'au gouverneur de Champagne par les habitants de Troyes. En 1641, M. Odard Perricard, ce maire; qui avait Ă©tĂ© choisi par le Roi, l'annĂ©e prĂ©cĂ©dente, et Ă  qui son dĂ©vouement Ă  la cause royale valut plus tard la plus vive opposition dans le sein du Conseil de ville, fit connaĂźtre, le 16 fĂ©vrier, dans les termes suivants, Ă  M. le marquis de Praslain, les dĂ©sordres causĂ©s par la garnison. Nous copions textuellement, et nous respectons dans ce texte jusqu'aux fautes d'orthographe Les soldats qui sont en garnison en ceste ville et » nos faulbourgs continuent de plus en plus leurs » dĂ©sordre, ils gastent tout et perdent tout tant Ă  la » ville qu'aux faubourgs. Ils ont rompu et bruslĂ© » les posteaulx qui soustiennent les couverture de » nos muraillies, bruslĂ© nos grandes eschelles et » crochets destinĂ©s pour le feu, bruslĂ© les cordes » des puits et quantitĂ© d'estaux qui estoient devant » les boutiques de nos marchands. Nos bour» geois n'osent plus sortir le soir de leurs maisons, » sans crainte de receupvoir des coups despĂ©es. Les PRISONNIERS A LHÔTEL-DE-VILLE EN 1675. 59 » soldats s'abandent 1 et satroupe par tous les » carefours, tirent la leine 2 et blessent tous les » jours nos habitans de coups d'espĂ©e. Nous ne » voyons que sang espanchĂ©. Nous en avons faict » plainte plusieurs fois aux officiers de la garnison » qui disent que leurs soldats ne sont pas payez. Il » y en a qui ont voulu forcer des filles que les ha» ha» nous amenĂšrent aprĂšs les auoir dĂ©sarmez » et les ayant voulu enuoyer prisonniers, ils ont estĂ© » recours 3 par d'autres soldats. Nos habitans mur» mur» disent ne pouvoir plus soufrir cela, qu'ils » se mettront en deffense et qu'ils ne se laisseront » point tuer, mais je leurs ai deffendu de prendre » les armes et je les en ay empeschĂ© jusques icy ce » que je continueray toujours aultant qu'il me sera » possible. Nous baillions tous les jours du bois » pour le corps de garde des soldats ce qui n'em» n'em» point les dĂ©sordres. Nous auons recours » Ă  vous, Monsieur, pour vous supplier trĂšs-humble» trĂšs-humble» d'interposer vostre authoritĂ© pour nous faire " descharger de ceste garnison qu'il y a quatre mois » qui est en ceste ville et ce nous sera un surcroist » des obligations que nous vous auons que si cela » ne se peut, au moins leur procurer leurs payement » et nous donner les moyens d'empescher le dé» dé» car quant nous leurs parlons d'obseruer le » rĂšglement faict par Sa MajestĂ© pour les gens de 1 Se mettent en bande. 2 Tirer la laine, dĂ©trousser les passants. 3 Secourus. 60 LE MAIRE ET LES ÉCHEVINS DE TROYES » guerre, ils se mocquent. Nous espĂ©rons de vostre » bienueillance quelque soulagement. » En 1643, Ă  la suite de quelques lĂ©gĂšres difficultĂ©s entre les habitants de Troyes et les soldats du rĂ©giment de Vaubecourt, une querelle s'ensuivit. Le lendemain, au moment oĂč ce rĂ©giment quittait la ville par la porte de Croncels, la troupe tira sur les habitants. Plusieurs personnes furent blessĂ©es, d'autres perdirent la vie. La soumission des habitants ne fut pas complĂšte en 1642. La ville rĂ©siste de nouveau Ă  la volontĂ© du Roi et aux ordres de l'Intendant. Elle refuse d'ouvrir ses portes au rĂ©giment de Bretagne qui s'Ă©tait logĂ© dans la banlieue. Des scĂšnes du mĂȘme genre se renouvelĂšrent encore. Le 21 janvier 1646, le prince de CondĂ©, gouverneur de Champagne, Ă©crivait dans les termes suivants Ă  l'occasion de cette rĂ©sistance Messieurs les Maire et EschĂ©vins de la ville de » Troyes, m'aiant estĂ© enuoyĂ© des ordres du Roy de » faire entrer dans vostre ville des gens de guerre » pour vous rĂ©duire dans l'obĂ©issance que vous de» de» J'ai bien voulu encor differer quelques jours » afin de vous en donner aduis par ce gentilhomme » et vous donner de recognoistre en quelle extrĂ©mitĂ© » vous vous rĂ©duisez, le peu de cas que vous auez » cy devant faict de mes ordres me pouvoit dispen» dispen» de vous faire cette grĂące. NĂ©antmoings j'ay » oubliĂ© le ressentiment que jen debvais avoir pour » vous rendre d'autant plus de preuve de l'affection » que je vous porte, vous vous en servirez pour PRISONNIERS A L'HÔTEL-DE-VILLE EN 1675. 61 » votre bien et me croirez, Messieurs les Maire et » Eschevins de la ville de Troyes, vostre trĂšs affec» tionnĂ© amy. » LOUIS DE BOURBON. " De Paris, ce 21 janvier 1646. » VI. Mais arrivons au fait qui donne son titre Ă  cette rapide Ă©tude, et voyons comment, en 1675, se comportent, Ă  Troyes, les soldats qui y prennent leur quartier d'hiver. A cette Ă©poque encore, chaque nouveau rĂ©giment placĂ© en garnison Ă  Troyes est redoutĂ© par les habitants. Leur subsistance fait souvent l'objet de graves difficultĂ©s. Leur logement est considĂ©rĂ© comme tellement onĂ©reux, que les personnes qui peuvent se faire recommander prĂšs de l'autoritĂ© municipale par les plus hauts et les plus puissants personnages invoquent cette protection pour s'en dĂ©barrasser. A cette occasion, citons une lettre d'une femme, veuve d'un noble marĂ©chal de France, qui tint un rang fort distinguĂ© parmi ses collĂšgues. Si le langage de plusieurs marĂ©chales de France du XIXe siĂšcle a Ă©tĂ© l'objet de railleries, je laisse apprĂ©cier le style de leurs collĂšgues du grand siĂšcle littĂ©raire. Voici cette lettre Monsieur, vous nores cun regimant qui et celuy » de bretagne et un de cavalerie. Je vous prie deux » santer d'exempter de loiement Monsieur Lefebvre 62 LE MAIRE ET LES ÉCHEVINS DE TROYES » le Coses l'Ă©cossais. La vesue Tournas Chandeliere » et un nomme Menisier et mo de Saint Vernon. Je » suis » votre cervante, » de Paris le » X. C.. » » 28 de sanbre. » » a Monsieur » Monsieur le MĂšre. » Comme nous l'avons dit, nous n'enregistrerons pas tous les dĂ©sordres dont la ville de Troyes a Ă©tĂ© le théùtre. Nous rapporterons seulement un procĂšs-verbal de M. Le Noble, lieutenant-gĂ©nĂ©ral au bailliage de Troyes. Si ce procĂšs-verbal n'est pas rĂ©digĂ© dans le style de Racine et de MoliĂšre, il est du moins leur contemporain. Aussi n'y changerons-nous rien, nous ne pourrions qu'en attĂ©nuer la valeur. Il est suffisamment dĂ©taillĂ©, clair et prĂ©cis. Il nous apprend qu'Ă  l'occasion de logements donnĂ©s aux soldats du rĂ©giment du Roi, le Maire et les Echevins de la ville furent retenus prisonniers par ces bandes ameutĂ©es. Mais laissons parler M. Christophe-Lefebvre, l'auteur du procĂšs-verbal L'an 1675, le dimanche huitiĂšme jour de dĂ©cembre, environ les trois heures de l'aprĂšs-midi, seroit comparu pardevt nous Christophe Lefebvre, Escuyer, M. Jehan Grassin, Conseiller au PrĂ©sidial de Troyes et ancien Eschevin de lad. ville, en personne, qui nous a dit que les Maire et Eschevins estant assemblĂ©s dans l'hostel commun de ceste ville, pour adviser aux moyens d'empescher les dĂ©sordres que commet journellement le rĂ©gt. du Roy, qui y est en garnison ; il n'eust pas estĂ© plutot assemblĂ© que ledict rĂ©giment du Roy s'est emparĂ© de toutes les advenues dud. hostel de ville qu'il tient assiĂ©gĂ© en telle sorte que pensant nous envoyer deux Esche- PRISONNIERS A LHÔTEL-DE-VILLE EN 1675. 63 vins et un Sergent de ville, ainsy quil est accoustumĂ©, pour nous pryer de nous y trouver, les sentinelles qui estoyent posĂ©es Ă  la porte, leur auroyent presentĂ© le mousquet dans le ventre et menassĂ© de les tuer sils ne rentroyent, et que sestant addressĂ©s aux officiers dud. rĂ©giment pour Ă«mpescher les suittes d'une telle violence, ils avoyent faict responce quils ne laisseroyent sortir personne qu'on ne leur eust donnĂ© un nouveau logement, ce qui auroyt obligĂ© lesd. Maire et Eschevins de cryer par une fenestre aud. M. Jehan Grassin de nous advertir de ce qui se passoyt et nous prier de nous y vouloir transporter avecq. le Procureur du Roy, ce que nous auryons faict Ă  l'instant, et passant par les places publiques du marchĂ© an bled et de l'estappe au vin de ceste ville, nous les aurions trouvĂ©es remplies de soldats du rĂ©giment avecq. des sentinelles et corps de garde, et toutes les advenues qui y aboutissent et veu que quelques personnes sestant prĂ©sentĂ©es pour y passer, lesd. soldats les en ont empescher, de lĂ  estant arrivĂ©es Ă  l'hostel de ville, nous avons trouvĂ© la place qui est au devant d'icelle, occupĂ©es comme les prĂ©cĂ©dentes par plusieurs compagnyes dud. rĂ©giment du Roy qui avoyent leurs officiers Ă  leur teste et s'estoyent emparĂ©s de toutes les advenues oĂč ils avoient posĂ© des corps de garde et des sentinelles, tenant par ce moyen led. hostel de ville, investi tant par devant que par derriĂšre, et nous estant prĂ©sentĂ©s Ă  la porte d'iceluy ou il y avoit nombre de soldats en haye des deux cottĂ©s et deux mousquetaires Ă  la porte, la mĂȘche de leurs mousquets allumĂ©e, qui nous auroyent laissĂ© passer avec peyne et auroyent empeschĂ© nostre greffier di entrer, et estant aud. hostel de ville nous avons remarquĂ© que lesd. soldats s'estoyent emparĂ©s et rendus maistres de toutes les portes et chambres d'iceluy et ayant des sentinelles Ă  chacune desd. portes et chambres, aussy la mĂšche de leurs mousquets allumĂ©es, et que nous estant obligĂ© de nous adresser au sieur Darnault, commandant led. rĂ©giment, qui se promenoit dans la cour avecq grande quantitĂ© d'aultres officiers, pour luy demander la raison et le motif de. telles violences, il nous avoit faict response qu'ils vouloient qu'on leur fist un nouveau logement et que jusques a ce qu'il fut faict ils s'estoyent rĂ©solus de demeurer soulz les aimes et d'empescher que pas un des Maire et Eschevin ne sortist et les obligeroyent de passer la nuict dans la chambre oĂč ils estoient enfermez. Sur quoy, nous avons dict aux officiers qu'il falloit entendre lesd. Maire et 64 LE MAIRE ET LES ÉCHEVINS. DE TROYES Eschevins, et estant montĂ© dans la salle oĂč on tient d'ordinaire les assemblĂ©es, nous avons trouvĂ© deux sentinelles en dehors de la porte du degrĂ©, deux en dedans, deux au bas dud. degrĂ©, deux au milieu, et ayant tous les mĂšches allumĂ©es, et un hallebardiers au hault du degrĂ© contre la porte de lad. salle en dehors, et deux mousquetaires en sentinelle en dedans d'icelle, et les Maire et Eschevins et Conseillers de ville sont venus au devant de nous et nous ont faict plainte de ce que lesd. officiers du rĂ©giment du Roy pour les obliger Ă  leur donner une somme d'argent que et au pardessus les ordres de Sa MajestĂ© le jour de samedy dernier, s'estant emparez des portes de la ville et y ayant mis des soldats pour empescher les paysants d'apporter des vivres et danrĂ©es au marchĂ© duquel ils s'estoyent pareillement emparez et de toutes les places ou on a accoustumĂ© de dĂ©biter lesd. danrĂ©es qu'ils avoyent remplies de soldats, prĂ©tendant par ce moyen exciter le peuple Ă  sĂ©dition, quand il n'y a rien au marchĂ©; que la prĂ©sence de M. le duc de qui passait fortuitement par cette ville avoyt dissipĂ© cet orage et empescher leffect de leur mauvais desseins et quayant appris que le conseil de ville estoit assemblĂ©, les officiers du rĂ©giment du Roy estoyent venus Ă  la teste de leurs compagnies en armes et sestoyent rendus les maistres des advenues et de toutes les portes et les tenoyent assiĂ©gĂ©es, les menassant de les empescher d'en sortir jusques Ă  ce qu'ils eussent faict ce qu'ils demandoyent, de quoy pensant nous donner advis, lesd. officiers ont faict maltraicter deux Eschevins qui nous estoient envoyez pour les empescher de sortir, les premiĂšres sentinelles leur ayant appuyĂ© plusieurs fois le bout de leurs mousquets dans le ventre et menassĂ© de les tuer sils ne rentroyent, et en mesme temps M. Pierre Gassement, advocat et doyen des conseillers de ville, aagĂ© de plus de 80 ans, s'estant prĂ©sentĂ© Ă  la porte pour se trouver Ă  l'assemblĂ©e, reçut plusieurs coups de bout de mousquet et de picques sur le corps, qui l'ont obligĂ© de se retirer. Nous priant d'entrer en la chambre du conseil de l'eschevinage pour adviser avecq eux aux moyens de faire retirer les trouppes qui les assiĂ©geoient et empescher les dĂ©sordres que les officiers de la garnison sefforçoient dexciter par toutes sortes de moyens. Sur quoy estant passĂ© dans lad. salle, oĂč nous estions dans lad. chambre du conseil, nous avons trouvĂ© deux sentinelles, la mĂšche allumĂ©e, dans une petite gallerie qui est entre les deux, avecq dix ou douze officiers dud. rĂ©giment, et aprĂšs PRISONNOERS A L'HÔTEL-DE-VILLE EN 1675. 65 avoir demeurĂ© pendant quatre heures en lad. chambre du conseil pour adviser aux moyens de trouver quelque argent et achepter la paix avecq led. rĂ©giment. Le commissaire d'iceluy nous est venu donner en advis que nous debuions au plutost sĂ©parer lesd. trouppes parce quil y avait tout Ă  craindre, que pendant la nuit qui estoit desjĂ  fort avancĂ©e, les soldats ne se servissent de cette occasion pour piller la ville, qu'en passant par le marchĂ© au bled il avoyt entendu beaucoup de bruit et quil estoit d'advis que nous leur promissions tout ce qu'ils dĂ©siroient affin de les obliger Ă  se retirer. Nous avons faict prier led. sieur Darnault de monter dans lad. chambre, que quoyque nous ne pussions despartir de lexĂ©cution des ordres du Roy, neantmoings nous voyions bien quil falloyt payer nostre rançon, que la compagnye y estoit rĂ©solue et quon les priait de faire relever les trouppes, et que demain on satisferait Ă  ce qu'ils ont tesmoingnĂ© de souhaiter, a quoy led. sieur Darnault a faict response quils ne souhaitoient rien qu'un nouveau logement, et qu'ils estoyent rĂ©solu de ne point sortir ny souffrir qu'aucun des Maire et Eschevins ne sortist quon. ne leur en eust dĂ©livrĂ© les billets et luy ayant reprĂ©sentĂ© plusieurs fois que l'heure Ă©toit tardive, estant prĂšs de neuf heures du soir, qu'il n'y avoit pas d'apparence d'obliger leurs soldats Ă  aller chercher de nouveaux hostes toute la nuit et que les choses se faisant avecq tant de prĂ©cipitation, il se trouverait que les logemens ne seroyent pas mieux faicts que ceulx dont ils se plaignent, que l'intention desdicts Maire et Eschevins estoit de les loger plus commodĂ©ment que faire se pourrait, que nous l'interpellions de leur part de donner le rosle des soldats qu'il prĂ©tendait nestre pas bien loger et de sy transporter avecq le commre de leur regiment, en prĂ©sence desd. Maire et Eschevins, pour en congnoistre la vĂ©ritĂ©, mais que cela ne se pouvait pas faire Ă  l'heure prĂ©sente, nous le pryons de se retirer et de nous laisser la libertĂ© d'en faire de mesme de nostre part. Led. sieur Darnault, un grand nombre, d'officiers qui estoient entrez aprĂšs luy en lad. chambre du Conseil, ayant protestĂ© en leur premiĂšre rĂ©solution d'obliger led. corps de ville, nous avons dict ausdicts Maire et Eschevins de nous suivre quil y avoit assez longtemps qu'il travailloyent et que nous verrions sil y avait quelqu'un sy tĂ©mĂ©raire que de les toucher en nostre prĂ©sence. A quoy l'un desd. officiers, dans la foule des austres, auroit rĂ©pondu que nostre robbe n'estoit pas Ă  l'Ă©preuve du mousquet et voyant que nonobstant leur sentiT. sentiT. 5 66 LE MAIRE ET LES ÉCHEVINS DE TROYES nelle nous allions nous prĂ©senter Ă  la porte pour sortir, dix ou douze desd officiers s'y seroyent prĂ©sentez tous Ă  la fois pour couvrir lad. sentinelle et nous empescher de laborder pendant que le Maire et nous avecq des Eschevins ayant dict audiçt sr Darnault que s'il ne voulait qu'un logement nouveau on luy promettoyt de luy en dĂ©livrer les billets le lendemain matin conformĂ©mt au projet qui en avoyt estĂ© faict avec le Commre dud. rĂ©giment, nous a led. Procureur du Roy ayant assurĂ© que d'autre part nous y tiendrions la main, ils s'estoient retirez et faict retirer toutes les trouppes, et en mesme temps plusieurs particuliers s'estant venu plaindre de quantitĂ© d'exceds qui venoient d'estre commis Ă  leurs personnes, pillages de leurs maisons par les soldats dud. rĂ©gt du Roy et de plusieurs aultres viollences ; nous aurions ordonnĂ© qu'il en sera informĂ© Ă  la requeste du Procureur du Roy pour l'information et le prĂ©sent procĂšs-verbal ĂȘtre envoyĂ© Ă  Sa MajestĂ©. LEFEBVRE; PRUDOT. Les officiers municipaux arrangĂšrent cette affaire en donnant de nouveaux logements aux soldats du rĂ©giment royal. Mais, dĂšs l'annĂ©e suivante, la guerre recommença Ă  l'occasion de la subsistance. Voici une lettre Ă©crite, par M. l'Intendant, aux Maire et Echevins. Son style nous apprend que, si la ville rĂ©sistait toujours, la caisse du ministĂšre de la guerre Ă©tait aux abois. MESSIEURS, » Je suis surpris de voir le foudre prest Ă  tomber » sur vostre ville et que vous ne songez Ă  dĂ©tourner » le nuage. M. Paillot ayant veu ce qui s'est passĂ© Ă  " Chaalons. Je n'ay pas doutĂ© que vous n'envoyas» n'envoyas» un dĂ©putĂ© exprĂšs Ă  Paris en poste pour scauoir » la volontĂ© du Roy qui sera expliquĂ©e' en voyant » M. le marquis de Louvoy. Par une lectre du 5e de PRISONNIERS A L'HÔTEL-DE-VILLE EN 1675. 67 » ce mois, M. le Maire m'escrit qu'on ne peut rien » donner au RĂ©giment du Maine, parce qu'on n'a » point d'argent. Je dois Ă  ma conscience et Ă  mon » honneur de vous dire que vous aurez grand nom» bre de troupes, dans peu, qui vous cousteront six » fois ce que vous donneriez. Messieurs de la ville de » Chaalons se sont prĂ©sentĂ©s Ă  M. le marquis de » Louvoy lequel a fixĂ© la gratification Ă  5,000 livres » par bataillon avec ordre de les payer dans trois » jours... Cette obĂ©issance de Chaalons vous con» vaincra d'opiniĂątretĂ©. C'est Ă  vous d'y pourveoir » aprĂšs ce que je vous viens de dire; j'ay satisfait Ă  » mon deuoir vous enupyant cet homme exprĂšs vous » dire que vous n'avez pas un moment de temps Ă  » perdre pour enuoyer de jour et de nuit encor. Et » ce-pendant Ă  trouuer de l'argent par toutes voyes, » il y va du salut du peuple. » Je suis, etc. » HUE DE MIROMESNIL. » Chaalons du 9 febvrier 1677. » On dĂ©puta en Cour, mais sans succĂšs. Pour avoir dĂ© l'argent, on avisa d'imposer dix sous sur chaque cheminĂ©e ou foyer des maisons de la ville et des faubourgs pouf ceux qui avaient garnison, et trente sous pour ceux des habitants qui avaient Ă©tĂ© dispensĂ©s de cette charge. 68 LE MAIRE ET LES ÉCHEVINS DE TROYES VII. Louis XIV faisait les efforts les plus louables pour discipliner les troupes qui lui avaient Ă©tĂ© d'un si puissant secours pour asseoir la monarchie française sur de solides bases et pour soumettre l'Europe. Les documents rĂ©glementaires sur la discipline militaire ne sont pas moins nombreux sous son rĂšgne que ceux qui intĂ©resssent l'administration civile. Si dans les hautes rĂ©gions de l'Etat, ce besoin d'unitĂ© Ă©tait admis et compris, il n'en Ă©tait pas de mĂȘme dans la province. LĂ , l'ordre civil et judiciaire ne marchait pas toujours d'accord avec l'autoritĂ© militaire, et l'Ă©pĂ©e ne prĂȘtait point le prestige de sa puissance pour assurer l'exĂ©cution des arrĂȘts Ă©manĂ©s de la magistrature. Souvent les deux pouvoirs, loin de se fortifier l'un par l'autre et de se prĂȘter un mutuel concours, formaient, on peut le dire, deux camps ennemis. En voici un exemple choisi entre plusieurs Il y avait dĂ©jĂ  bien longtemps que les Ă©vĂ©nements que nous venons de raconter Ă©taient du domaine du passĂ©, lorsque la ville eut en garnison le rĂ©giment de Bourbitou. Quelques soldats, pour des motifs sans gravitĂ©, avaient exercĂ© des violences non pas envers de simples citoyens, mais bien envers des bourgeois de la ville, et mĂȘme contre la personne du SubdĂ©lĂ©guĂ© de l'Intendant. Une condamnation prononcĂ©e par le bailliage avait Ă©tĂ© la consĂ©quence de ces excĂšs. Alors ces faits, pour ĂȘtre plus sĂ»rement PRISONNIERS A L'HÔTEL-DE-VILLE EN 1675. 69 rĂ©primĂ©s, tombaient sous la compĂ©tence de la justice civile et locale. Mais le plus difficile Ă©tait de faire exĂ©cuter la sentence. Le jour venu, M. le lieutenant criminel se rendit aux prisons pour y donner l'ordre de conduire le patient au lieu de l'exĂ©cution. A son arrivĂ©e, il trouva les abords de la prison occupĂ©s par des soldats du rĂ©giment, ayant Ă  leur tĂȘte un capitaine; on menaçait d'empĂȘcher l'exĂ©cution du condamnĂ©, nommĂ© Gauthier dit La Fontaine. AprĂšs quelques explications aigres-douces entre le capitaine et le lieutenant criminel, celui-ci fit sortir le patient sous la garde de vingt huissiers. Le funĂšbre cortĂšge se dirigea de la place des Prisons sur celle du MarchĂ©-au-BlĂ©, lieu de l'exĂ©cution. Chemin faisant, et tout en se tenant sur leur garde, MM. les ser. gents et huissiers du bailliage furent attaquĂ©s par des soldats du rĂ©giment de Bourbitou, au nombre de plus de cent hommes. Les gens de la justice ne purent rĂ©sister au choc. Ils furent mis en complĂšte dĂ©route, et le condamnĂ© fut enlevĂ© par ses camarades des mains de l'exĂ©cuteur qui fut battu et fort maltraitĂ©. Si le succĂšs, qui suivit cette attaque, n'eĂ»t pas couronnĂ© l'entreprise, l'exĂ©cution n'en Ă©tait pas moins devenue impossible. Un autre dĂ©tachement, avant Ă  sa tĂȘte un soldat surnommĂ© Va-de-Bon-Coeur, s'Ă©tait rendu sur la place du MarchĂ©-au-BlĂ©, avait arrachĂ© le poteau qui devait servir Ă  pilorier » le condamnĂ© et l'avait jetĂ© dans un puits voisin. Un siĂšcle et demi nous sĂ©pare de l'Ă©poque de ce dernier Ă©pisode. Les temps ont bien changĂ©! La robe et l'Ă©pĂ©e se rĂ©unissent pour faire respecter l'autoritĂ© souveraine, et leur action commune s'exerce sans conflit comme sans rivalitĂ©. 70 LE MAIRE ET LES ÉCHEVINS DE TROYES Dans l'ordre militaire, cbtntne dans les relations civiles, il y avait certaines coutumes et certains droits qui nous paraissent vexatoires autant que bizarres, aujourd'hui que nous n'en connaissons pas l'origine. Ainsi, pourquoi les tambours et les trompettes exigeaient-ils cinq sous des meuniers lorsque les troupes passaient prĂšs des moulins? Ce droit singulier peut devoir son origine Ă  la force. Sous Louis XIV, ce droit ne se percevait plus qu'Ă  l'aide de violences. Les meuniers rĂ©sistaient le plus qu'ils pouvaient, et leur refus Ă©tait trop souvent puni par le pillage de leurs moulins et l'enlĂšvement de leurs meubles. Enfin, Louis XIV leur vint en aide par une ordonnance qui porte la date de 1680, en dĂ©fendant l'exercice d'un pareil usage qu'il qualifie d'abusif et de vexatoire. VIII. Les faits que nous venons de rĂ©unir et de grouper sont renfermĂ©s entre les annĂ©es 1638 et 1702. Avec beaucoup d'autres, ils se rapportent aux profondes modifications qui s'opĂ©raient dans l'administration militaire; sous le rĂšgne de Louis XIII et de Louis XIV. Comme tous les changements administratifs, celuici n'eut pas lieu sans dĂ©placer des droits depuis longtemps acquis, et sans froisser de gravĂ©s intĂ©rĂȘts. L'avĂšnement de Henri IV au trĂŽne de France PRISONNIERS A LHÔTEL-DE-VILLE EN 1675. 71 amena la rĂ©organisation,— qu'on me passse le mot, — de la RoyautĂ© française. Avec le fondateur de la race royale de Bourbon tout change. La noblesse est comprimĂ©e, et ses exigences se traduisent en vains efforts pour retourner vers un passĂ© devenu impossible. La bourgeoisie commence Ă  perdre les libertĂ©s qu'elle tenait des rois de France, et sa puissance dĂ©choit chaque jour. L'attaque dirigĂ©e contre les privilĂ©ges de la bourgeoisie caractĂ©rise l'arrivĂ©e et le passage de Henri IV et de Richelieu aux affaires de l'Etat. Louis XIV ne fut que le continuateur de la politique inaugurĂ©e par son illustre aĂŻeul. Si, aux derniĂšres annĂ©es du XVIe siĂšcle et au commencement du XVIIe siĂšcle, on jette un coup-d'oeil sur l'administration en gĂ©nĂ©ral, qu'il s'agisse des finances, de la justice, de la police et de l'armĂ©e, ou de l'administration intĂ©rieure des citĂ©s, on sent l'autoritĂ© royale pĂ©nĂ©trer profondĂ©ment dans toutes les affaires. Dans le cours du XVIIe siĂšcle, les privilĂšges et les libertĂ©s municipales tombent les uns aprĂšs les autres. L'anĂ©antissement de ces libertĂ©s, qui marquent dans l'histoire les premiers pas vers un affranchissement plus complet, et faisaient, de chaque citĂ©, un petit gouvernement isolĂ©, Ă©tait nĂ©cessaire pour assurer l'oeuvre immense entreprise par la royautĂ©, et dont les futures consĂ©quences devaient profiter autant aux populations qu'Ă  la monarchie. La bourgeoisie, organisĂ©e en corps de citĂ©s, avait prĂȘtĂ© un actif concours Ă  Louis XI pour rĂ©duire les grands vassaux de la couronne. Plus d'un siĂšcle se passa aprĂšs cette lutte impitoyable. Pendant ce temps, 72 LE MAIRE ET LES ÉCHEVINS DE TROYES la bourgeoisie recueillit et jouit des fruits de la victoire due Ă  ses actifs travaux et Ă  sa longue persĂ©vĂ©rance. Elle fut alors toute-puissante. Elle domina, au XVIe siĂšcle, par les lettres, par les sciences et par les arts. Elle domina jusque dans la politique. Le roi de Navarre compta avec elle pour monter sur le trĂŽne de France, et s'il composa avec les grands seigneurs, il traita avec les citĂ©s. En possession du pouvoir, Henri IV frappa en bas comme il sĂ©vit en haut. Il comprima ces deux Ă©lĂ©ments dont lĂ©s intĂ©rĂȘts Ă©taient si opposĂ©s. Il sut vaincre et dominer les princes ligueurs, et avec eux tombĂšrent ces prĂ©tentions d'un autre temps, et qui, sans plus de succĂšs, se firent jour pendant les minoritĂ©s de Louis XIII et de Louis XIV, cette derniĂšre fois pour ne plus reparaĂźtre. Mais lĂ  seulement n'Ă©taient pas tous les obstacles. La bourgeoisie, fortement constituĂ©e, Ă©tait une puissance avec laquelle il fallait compter. Henri IV commença l'attaque. Ce Roi, de si populaire mĂ©moire, travailla avec habiletĂ© Ă  la rĂ©duction de la classe moyenne. Mais le temps lui manqua pour achever son oeuvre. La voie Ă©tait tracĂ©e. Richelieu y entra, et Louis XIV aprĂšs lui. L'Echevinage de la ville de Troyes, au XVIIe siĂšcle, comprit la position qui lui Ă©tait faite par la royautĂ©; sa politique fut celle de la rĂ©sistance. L'autoritĂ© municipale se cabra contre chacun des envahissements qui, d'annĂ©e en annĂ©e, ruinaient les anciennes libertĂ©s dont la conservation lui Ă©tait confiĂ©e par les habitants. Si l'attaque ne fut pas rapide, elle se continua sans interruption, et chaque nouveau coup, portĂ© aux prĂ©rogatives de la citĂ©, amena une dĂ©faite pour les assiĂ©gĂ©s. On leur enleva le droit de nommer PRISONNIERS A LHÔTEL-DE-VILLE EN 1675. 73 leurs maires. On dĂ©plaça l'autoritĂ© des officiers de la citĂ©, et on la mit aux mains de ceux du Roi. On obligea les habitants Ă  loger des gens de guerre et Ă  les nourrir. La garde de la ville fut donnĂ©e aux agents du pouvoir royal. Les deniers patrimoniaux furent confondus avec ceux d'octroi. Les comptes des deniers communs furent soumis Ă  l'approbation d'une cour souveraine. Les fortifications relevĂšrent d'une autoritĂ© supĂ©rieure Ă  celle de la citĂ©. La milice bourgeoise ne fut plus qu'un simulacre des anciennes connĂ©tablies, divisĂ©es en hommes de fer et en hommes de pourpoint. L'artillerie de la ville passa subrepticement des arsenaux de la citĂ© dans - ceux du Roi. Chacun de ces changements, qui, dans leur ensemble, constituent une vĂ©ritable rĂ©volution, fut marquĂ© par des actes de rĂ©sistance du cĂŽtĂ© des habitants de Troyes. Je n'ai abordĂ© ici qu'un cĂŽtĂ© de ce grand mouvement opĂ©rĂ© dans le cours du XVIIe siĂšcle. Les faits qui intĂ©ressent les municipalitĂ©s au grand siĂšcle de la monarchie sont pĂąles, dĂ©colorĂ©s et sans intĂ©rĂȘt dramatique, quelques-uns mĂȘme paraissent sans dignitĂ©, si on les compare Ă  ceux du siĂšcle prĂ©cĂ©dent; mais si on les observe dans leur ensemble, si on les coordonne, si on les Ă©tudie en les Ă©levant Ă  la hauteur du caractĂšre qu'ils avaient dans l'esprit de ceux qui prenaient part Ă  l'action ; et si surtout on les considĂšre dans leurs consĂ©quences, alors ils acquiĂšrent une physionomie qui captive, on trouve 14 LE MAIRE ET LES ÉCHEVINS DE TROYES, ETC. qu'ils Ă©clairent l'histoire de la monarchie française sous un jour encore nouveau aujourd'hui. Je n'ai pas la prĂ©tention d'avoir Ă©crit une page d'histoire. Ma tĂąche Ă©tait beaucoup plus modeste; elle se bornait Ă  raconter des faits qui se sont accomplis dans notre citĂ©, et Ă  vous faire apprĂ©cier quelques-uns des Ă©vĂ©nements qui rappellent, Ă  Troyes, le travail si considĂ©rable de la monarchie absolue au profit de l'unitĂ© française. Si, Messieurs, j'ai pu captiver quelques instants vĂŽtre attention en Ă©voquant des souvenirs qui intĂ©ressent notre commune patrie, j'aurai atteint le but que je m'Ă©tais proposĂ©, et obtenu la plus honorable rĂ©compensĂ© Ă  laquelle je puisse prĂ©tendre. Troyes, le 27 novembre 1857. APERÇU SUR LES RÉSULTATS DU DRAINAGE DANS LE DEPARTEMENT DE L'AUBE, PrĂ©sentĂ© Ă  la SociĂ©tĂ© AcadĂ©mique, DANS SA SÉANCE DU 15 JANVIER 1858, Par M. le Comte DE LAUNAY, Membre associĂ©. MESSIEURS, GrĂące Ă  l'initiative de la SociĂ©tĂ© AcadĂ©mique de l'Aube, Ă  l'intĂ©rĂȘt qu'elle a toujours tĂ©moignĂ© Ă  la question du drainage, aux encouragements qui, sur sa demande, ont Ă©tĂ© accordĂ©s Ă  cette maniĂšre nouvelle d'amĂ©liorer le sol, grĂące, enfin, aux membres de la SociĂ©tĂ© AcadĂ©mique dont le gĂ©nĂ©reux concours a aplani, pour un grand nombre de propriĂ©taires, les difficultĂ©s inhĂ©rentes Ă  un semblable travail, le drainage est pratiquĂ©, dans notre dĂ©partement, depuis trois annĂ©es environ. Maintenant, que prĂšs de cinq cents hectares sont 76 APERÇU SUR LES RÉSULTATS DU DRAINAGE drainĂ©s, que deux rĂ©coltes ont Ă©tĂ© faites dans des conditions atmosphĂ©riques complĂštement diffĂ©rentes, il est possible d'apprĂ©cier les rĂ©sultats obtenus. Je vais essayer de les mettre sous vos yeux, certain que vous Ă©couterez avec bienveillance le compte-rendu de travaux qui sont, en quelque sorte, votre oeuvre. Vous connaissez, Messieurs, la nature des terres auxquelles le drainage est nĂ©cessaire. Ce sont celles oĂč l'eau sĂ©journe, les terres froides. Plus ou moins impermĂ©ables par elles-mĂȘmes, elles reposent sur un sous-sol impermĂ©able. Les eaux pluviales et les sources qui sont frĂ©quentes dans ces sortes de terrains les maintiennent dans un Ă©tat constant d'humiditĂ©, trĂšs-dĂ©favorable Ă  la vĂ©gĂ©tation. Les racines des plantes utiles y pourrissent, tandis que les mauvaises herbes y rencontrent les meilleures conditions d'existence. Les engrais, toujours imbibĂ©s d'eau, ne sont point convertis en humus par la fermentation, ou sont entraĂźnĂ©s par les eaux superficielles. Ces terres pĂšchent alternativement par un excĂšs de sĂ©cheresse et par un excĂšs d'humiditĂ©. Mortier en hiver, elles deviennent pierre en Ă©tĂ©. Il est extrĂȘmement malaisĂ© de les cultiver. Si l'on s'y prend trop tĂŽt, la terre est trop dure et est difficilement attaquĂ©e par les instruments. Si l'on attend trop tard, le sol est dĂ©trempĂ© et pĂąteux, les chevaux y enfoncent et la terre se met en boule sous la charrue. DANS LE DÉPARTEMENT DE L'AUBE. 77 Leur culture exige donc bien plus de peine, de temps, et, par consĂ©quent d'argent, que celle des terres plus lĂ©gĂšres. Cette lĂ©gĂšretĂ© qui leur manque, le drainage la leur donne. DĂšs qu'une terre est drainĂ©e, l'eau coule, l'air circule, la terre se divise et s'effrite, les herbes qui ne vivent que dans l'humiditĂ© pĂ©rissent, les labours deviennent faciles par tous les temps et dans toutes les saisons; l'eau du ciel pĂ©nĂštre dans la terre et y fait pĂ©nĂ©trer les sels fĂ©condants. Les racines des plantes utiles vont chercher profondĂ©ment, dans ce sol meuble et sain, les sucs nourriciers. Si la facilitĂ© avec laquelle l'eau entre dans un sol drainĂ© s'oppose Ă  ce que, par les temps humides, l'humiditĂ© le sature, il ne s'ensuit pas que, par les temps secs, la sĂ©cheresse soit augmentĂ©e. Le contraire a lieu. Au moyen de la permĂ©abilitĂ© du sous-sol, l'humiditĂ© remonte Ă  la surface et vient y entretenir une fraĂźcheur bienfaisante. J'ai remarquĂ© que souvent l'argile pjastique, formant les sous-sols d'un grand nombre de terrains drainĂ©s, se trouvait mĂ©langĂ©e dans d'assez fortes proportions Ă  du carbonate de chaux. On pourrait, en rĂ©pandant sur les sols argilosiliceux les terres calcaires extraites des tranchĂ©es, opĂ©rer un marnage qui ne coĂ»terait rien et qui serait Ă©minemment utile. Des projets de drainage sont proposĂ©s aujourd'hui pour 650 hectares appartenant Ă  140 propriĂ©taires. 472 hectares sont entiĂšrement terminĂ©s. 78 APERÇU SUR LES RÉSULTATS DU DRAINAGE Ils se rĂ©partissent ainsi entre les cantons Lusigny . 469 Piney . . ..... 87 Bouilly . . . . . . . 55 Vendeuvre ....... 45 Brienne. . . . . . . . 39 Soulaines ....... 29 Ervy ........ 22 Chaource . . . . . . . 12 Bar-sur-Aube . ..... 8 Bar-sur-Seine .. ... . 3 Essoyes. .. .. .. . . . 3 TOTAL . . . .472 La dĂ©pense varie sous l'influence de diverses causes, telles que le prix plus ou moins Ă©levĂ© de la main-d'oeuvre, le degrĂ© de rĂ©sistance du sous-sol, la diffĂ©rence d'espacement des drains, la distance des fabriques de tuyaux, entre 150 et 891 francs l'hectare. Ces chiffres extrĂȘmes rĂ©sultent des dĂ©clarations des propriĂ©taires eux-mĂȘmes. Dans un cas comme dans l'autre, les circonstances Ă©taient Ă©videmment exceptionnelles. La dĂ©pense moyenne, dans la plupart des cantons, s'Ă©lĂšve Ă  environ 300 francs l'hectare. Dans le canton d'Ervy elle n'a Ă©tĂ© que de 210 fr. au plus bas, et de 235 fr. au plus haut. Je suis persuadĂ© qu'Ă  mesure qu'il se formera des ouvriers draineurs en nombre plus considĂ©rable, et que les fabriques de tuyaux se multiplieront, le prix de revient diminuera dans de fortes proportions. DANS LE DÉPARTEMENT DE LAUBE. 79 Il ne devrait pas dĂ©passer 220 Ă  250 fr. par hectare. Mais, aujourd'hui, c'est le chiffre de 300 fr. qui est ce que l'on peut appeler le chiffre normal, celui sur lequel on doit baser les calculs. Dans quelles proportions le drainage a-t-il augmentĂ© les rĂ©coltes ? Quel a Ă©tĂ©, par consĂ©quent, l'intĂ©rĂȘt produit par l'argent dĂ©pensĂ© ? Les rĂ©sultats sont loin d'ĂȘtre partout identiques. Ici l'influence du drainage est immĂ©diate, lĂ  elle est longue Ă  se faire sentir. Sur un point on aura Ă©tĂ© prodigue de labours et de fumiers, sur un autre on les aura Ă©conomisĂ©s. Enfin, la diffĂ©rence de rendement est bien plus sensible dans une annĂ©e humide que dans une annĂ©e sĂšche. L'augmentation de rĂ©colte peut dĂ©passer cent pour cent, comme chez M. de La Mothe, Ă  Montceaux, oĂč des terres humides achetĂ©es des hospices de Troyes, Ă  raison de 1,500 fr. l'hectare, ont Ă©tĂ© drainĂ©es, bien labourĂ©es, fortement fumĂ©es, et ont produit 80 doubles-dĂ©calitres l'arpent. Elle peut n'ĂȘtre que de dix ou quinze pour cent; mais, forte ou faible, elle est incontestable partout. Voici, Messieurs, quelques observations faites sur des terres de qualitĂ© ordinaire, qui ont Ă©tĂ© traitĂ©es exactement comme les terres voisines non drainĂ©es. On peut considĂ©rer les rĂ©sultats du drainage sur ces terres comme la moyenne de ceux obtenus dans le dĂ©partement. M. Thoureau, propriĂ©taire de fermes considĂ©rables, entre Lusigny et Piney, a drainĂ© environ. 100 hectares depuis trois ans, Les terres drainĂ©es, visitĂ©es par 80 APERÇU SUR LES RÉSULTATS DU DRAINAGE moi quelques heures aprĂšs une pluie abondante, Ă©taient parfaitement Ă©tanches, tandis que les terres voisines, non drainĂ©es, Ă©taient couvertes d'eau. En 1856, 19 hectares ont produit du froment, et environ 1 hectare a portĂ© de l'avoine. En 1857, il y a eu du froment sur 22 hectares, et de l'avoine sur 19. Le rendement en froment a peu variĂ© dans ces deux annĂ©es sur les terres drainĂ©es; il a Ă©tĂ© de 21 Ă  22 hectolitres par hectare; mais il a considĂ©rablement variĂ© sur celles qui ne le sont pas. 1856, annĂ©e humide, a dĂ©montrĂ© d'une maniĂšre victorieuse les bons effets du drainage. Les terres non drainĂ©es n'ont portĂ© en moyenne que 14 hectolitres. 1857, annĂ©e sĂšche, a Ă©tĂ© favorable aux terres froides et argileuses; les produits en froment se sont Ă©levĂ©s Ă  environ 19 hectolitres sur les terres non drainĂ©es. L'excĂ©dant sur les terres drainĂ©es a donc Ă©tĂ©, en 1856, de 7 Ă  8 hectolitres, soit 7 1/2, qui, a 30 fr. l'un, font 225 fr. d'augmentation de recette pour une dĂ©pense de 300 fr. ; c'est-Ă -dire 75 0/0 de la dĂ©pense. En 1857, l'excĂ©dant n'a pas dĂ©passĂ© 2 Ă  3 hectolitres, soit 2 1/2, Ă  15 fr. l'un, ou 37 fr. 50 cent. En prenant la moyenne de ces deux annĂ©es si diffĂ©rentes, on obtient une plus-value annuelle de 130 fr. par hectare, — soit 43 0/0 de la dĂ©pense. Ces rĂ©sultats, pour les froments, sont extrĂȘmement remarquables. Les orges en ont donnĂ© d'analogues, car elles sont venues trĂšs-belles, lĂ  oĂč elles DANS LE DÉPARTEMENT DE L'AUBE. 81 ne rĂ©ussissaient pas avant le drainage; mais les avoines n'ont pas prĂ©sentĂ© de diffĂ©rence sensible. Il est juste de dire que l'avoine ne craint pas autant l'humiditĂ© que l'orge et le froment. Les rĂ©sultats observĂ©s chez moi ont Ă©tĂ© Ă  peu prĂšs semblables; cependant ils ont Ă©tĂ© encore plus dĂ©cisifs. L'augmentation de produit en froment a Ă©tĂ©, en 1856, de prĂšs de 10 hectolitres, qui ont payĂ© le drainage en une seule annĂ©e. Elle a Ă©tĂ© Ă  peu prĂšs de 5 hectolitres en 1857. Quant aux avoines, il en a Ă©tĂ© chez moi comme chez M. Thoureau ; elles n'ont produit, sur drainage, que 2 ou 3 hectolitres de plus que sur les terres non drainĂ©es. En rĂ©sumĂ©, Messieurs, le drainage augmente les rĂ©coltes grains et paille de 30 0/0 en moyenne. Il diminue les frais de culture dans une proportion considĂ©rable, puisque l'on n'emploie que trois chevaux lĂ  oĂč il en fallait six. Il double donc Ă  peu prĂ©s le produit net. En tenant compte de la jachĂšre qui, dans l'assolement encore usitĂ© gĂ©nĂ©ralement, revient tous les trois ans, et en admettant que cette jachĂšre soit morte ce qui ne sera pas, car lĂ©s terres ameublĂ©es et facilement cultivĂ©es porteront tous les ans, en comptant l'hectolitre de blĂ© Ă  20 fr., et l'hectolitre d'avoine Ă  7 fr. 50 cent., on peut estimer, sans exagĂ©ration et mĂȘme en restant au-dessous de la vĂ©ritĂ©, la plus-value annuelle donnĂ©e Ă  la terre par le drainage Ă  60 fr. par hectare, soit 20 0/0 de la somme dĂ©pensĂ©e. En six ans, l'agriculteur-draineur doit ĂȘtre rentrĂ© T. XXII. 6 82 APERÇU SUR LES RÉSULTATS DU DRAINAGE, ETC. dans le capital et les intĂ©rĂȘts de son argent, et avoir doublĂ© la valeur vĂ©nale de ses terres. Ce n'est pas tout. Le perfectionnement de l'agriculture est la consĂ©quence naturelle et forcĂ©e du drainage. Comme celui-ci rend, pour ainsi dire, les bonnes rĂ©coltes certaines, on ne craindra plus de faire Ă  la terre des avances qu'en bonne mĂšre elle rembourse toujours largement. Le drainage qui augmente et surtout qui rĂ©gularise les rĂ©coltes deviendra, lorsqu'il sera appliquĂ© avec tous les dĂ©veloppements qu'il comporte, le meilleur moyen d'Ă©viter le retour des crises alimentaires. Appelons donc de tous nos voeux des mesures qui, en mettant les capitaux Ă  la disposition des propriĂ©taires qui en manquent, permettraient de drainer une bonne partie des 60,000 hectares qui dans notre dĂ©partement rĂ©clament cette amĂ©lioration. Courcelle, le 11 Janvier 1858. DOCUMENTS SUR LA VILLE DE TROYES, Extraits du GĂ©ographe arabe EDRISI, COMMUNIQUÉS Dans la SĂ©ance du 21 AoĂ»t 1857, Par M. CLÉMENT -MULLET, Membre honoraire. Le gĂ©ographe arabe Edrisi nous fournit un document qui prouve combien, vers le XIIe siĂšcle, la ville de Troyes Ă©tait florissante. A cette Ă©poque, oĂč les communications Ă©taient si difficiles, les opĂ©rations commerciales de notre citĂ© s'Ă©tendaient dĂ©jĂ  au loin, franchissaient les mers et fixaient l'attention des historiens Ă©trangers. L'auteur du TraitĂ© de gĂ©ographie, ou plutĂŽt de l'ItinĂ©raire dont il s'agit, s'appelait Abon-AbdallahMohammed - ben - Abdallah -ben-Edriz ou Edrisi l'Edrisite, fils d'Edris. Il vivait Ă  la cour de Roger, roi de Sicile et de Calabre. Il composa cet ouvrage, 84 DOCUMENTS SUR LA VILLE DE TROYES. dit d'Herbelot 1, pour servir Ă  la description d'un globe, de 800 marcs d'argent, que son souverain avait fait exĂ©cuter. Aussi porte-t-il le nom de Kitab Rodjiar, livre de Roger. ConformĂ©ment Ă  l'habitude des Orientaux, son titre excentrique a peu de rapport avec le sujet qu'il traite. Il fut terminĂ©, d'aprĂšs la prĂ©face, dans les derniers jours du mois de Schewal 548 de l'HĂ©gire correspondant Ă  la mi-janvier 1154 de l'Ăšre chrĂ©tienne. La division territoriale y est Ă©tablie d'une maniĂšre bien diffĂ©rente de celle que nous trouvons dans nos auteurs occidentaux. La France est partagĂ©e en treize provinces seulement. Troyes se rattache Ă  la Bourgogne des Francs. Paris est annexĂ© Ă  la province, dont le nom, par une de ces erreurs de copiste si frĂ©quentes dans les manuscrits arabes, se lit Afflandris ou Affrandjis. Troyes y est citĂ© comme une des villes importantes de la chrĂ©tientĂ©, du pays de Roum, tandis que Paris n'aurait eu, Ă  cette Ă©poque, qu'une grandeur mĂ©diocre. Dijon passait alors pour une ville peu considĂ©rable, mais bien peuplĂ©e. La gĂ©ographie d'Edrisi avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© publiĂ©e, en latin, par Gabriel Sionita, sous le titre de Geographia Nubiensis. Ce n'est qu'un abrĂ©gĂ© du grand TraitĂ© traduit par le comte Jaubert. Aussi la ville de Troyes n'y est dĂ©signĂ©e que par son nom seul et sans aucuns dĂ©tails historiques. 1 BibliothĂšque orientale. DOCUMENTS SUR LA VILLE DE TROYES. 85 Extraits de la GĂ©ographie d'EDRISI, intitulĂ©e DĂ©lassements de l'homme dĂ©sireux de connaĂźtre Ă  fond les diverses contrĂ©es du monde, Traduite par A. JAUBERT 1. Les principales villes de la Bourgogne des Francs sont Besnis, MĂącon, Dijon, Nevers, Ikchoun Auxonne, Troyes et Langres. De Langres Ă  Troyes, ville solidement bĂątie, dans une position pittoresque, et rĂ©unissant toute espĂšce d'agrĂ©ment et de ressources, 60 milles. De Troyes Ă  OrlĂ©ans, dĂ©pendance du pays de France, 60 milles. De Langres Ă  Troyes — 60 milles. Cette derniĂšre ville, rĂ©sidence importante dans le pays des chrĂ©tiens, se fait remarquer par la facilitĂ© qu'on a de s'y procurer toutes choses Ă  bon compte, par ses vignobles, ses jardins et la grandeur de son Ă©tendue. DelĂ  Ă  Antichoun Auxonne ... 30 milles. La Bourgogne des Francs est bornĂ©e du cĂŽtĂ© du midi par les montagnes dites monts Djouz les Alpes; vers l'orient, par la Bourgogne des Allemands; 1 2 vol. in-4° formant le tome V des MĂ©m. de la Soc. de GĂ©ographie. — 1836. 86 DOCUMENTS SUR LA VILLE DE TROYES. Ă  l'occident, par le Berry et par quelques parties de la Provence, et au nord par la France. Les principales villes de la Bourgogne des Francs sont Besnis. V. sup. La Bourgogne des Francs est un pays couvert de villages et offrant de grandes ressources, soit en vignobles, soit en cĂ©rĂ©ales. Ses habitants sont renommĂ©s pour leur bravoure Ă  la guerre et leur capacitĂ© dans les affaires. Ils passent pour les plus belliqueux d'entre les Francs. Leurs rois sont les plus considĂ©rables d'entre les rois de cette nation. A celle province touche la Bourgogne allemande, qui compte au nombre de ses villes Aghints Aix, en Savoie? Djinevra GenĂšve, Lausanne, Besançon et Verdoun Yverdun, qui est l'une des contrĂ©es les plus abondantes en productions et les plus fertiles qu'il soit possible de voir. Le roi des Allemands y habite et s'y maintient. Cette province est bornĂ©e au midi par le mont Djouz les Alpes, au levant par l'Allemagne, au couchant par la Bourgogne des Francs, et au nord par le pays de Lotaringa la Lorraine. La Lorraine est un pays limitrophe Ă  l'Afflandris la Flandre ou la France, qui est bornĂ©e du cĂŽtĂ© du nord par la mer. Au nombre des dĂ©pendances de ce dernier pays, il faut compter Louns Laon, Abriz Paris, Bontiz Pontoise, Djindorz Gisors, El-ZaĂŻz Beauvais, la riviĂšre de Saint-Walerin Saint-ValĂ©ry, Rewa Eu ?, et Boratriz TrĂ©port. De Louns Laon Ă  Abriz Paris, 70 milles. Cette ville, de grandeur mĂ©diocre, environnĂ©e de vignobles et de bois, est situĂ©e, dans une Ăźle de la DOCUMENTS SUR LA VILLE DE TROYES. 87 Seine, fleuve qui l'entoure de tous cĂŽtĂ©s; elle est extrĂȘmement agrĂ©able, forte et susceptible de dĂ©fense. De Paris, qu'on prononce Ă©galement Abarisch, au Mans, en se dirigeant vers le midi, 70 milles. La Flandre, la Frise, la Bourgogne des Francs, la Normandie, la Bretagne, le Maine, l'Anjou, la Touraine, le Berry, l'Albernia l'Auvergne, le Poitou, la Gascogne, la Provence; toutes ces treize provinces sont sous l'obĂ©issance du roi des Franks. Le sol y est plus fertile en cĂ©rĂ©ales et en fruits excellents, et les habitants y sont plus riches que dans le pays des Allemands. RAPPORT A la SociĂ©tĂ© AcadĂ©mique de l'Aube, SUR UN MANUSCRIT DE M. GÉROST, MEMBRE ASSOCIÉ, par M. LE BRUN-DÀLBANNE, Membre rĂ©sidant MESSIEURS, Dans une de vos prĂ©cĂ©dentes sĂ©ances, vous avez renvoyĂ© Ă  mon examen deux communications de M. GĂ©rost, de Villenauxe, membre associĂ© de la SociĂ©tĂ© AcadĂ©mique de l'Aube, la premiĂšre intitulĂ©e Extrait analytique de l'Histoire de l'Abbaye de Nesle-la-Reposte, et Notice sur deux ChĂąsses de cette abbaye, actuellement conservĂ©es dans l'Ă©glise paroissiale de Villenauxe-la-Grande ; la seconde ayant trait Ă  la vente faite le 3 fĂ©vrier 1856, de la chĂąsse de SaintAlban, le plus remarquable de ces deux reliquaires. Vous ne demandez pas que je vous entretienne 90 RAPPORT SUR UN MANUSCRIT DE M. GÉROST. de la premiĂšre partie du travail de notre honorable collĂšgue, contenant les Annales chronologiques et historiques de l'Abbaye de Nesle-la-Reposte, parce que vous les connaissez et que vous les avez remarquĂ©es depuis longtemps dans le Voyage archĂ©ologique de l'Aube, oĂč M. GĂ©rost les a publiĂ©es sous le voile de l'anonyme, ainsi qu'il nous l'apprend lui-mĂȘme dans l'avant-propos du manuscrit dont j'ai l'honneur de vous rendre compte en ce moment. Si j'avais Ă  parler de ces annales, je dirais qu'elles brillent entre tant d'autres notices du mĂȘme ouvrage, par leur nettetĂ©, leur exactitude et le savoir de l'auteur. La seconde partie indique l'histoire des chĂąsses et des reliques de Nesle-la-Reposte et de Villenauxe. Malheureusement, au lieu d'y trouver ce qui semble annoncĂ© l'origine des reliquaires; par quelles mains pieuses et dans quelle intention ils ont Ă©tĂ© donnĂ©s ; quels sont les maĂźlres-orfĂšvres qui les ont exĂ©cutĂ©s, ciselĂ©s, Ă©maillĂ©s; pourquoi le mĂȘme reliquaire renferme des reliques si mĂȘlĂ©es la tĂȘte de saint Calixte, pape, et un doigt de saint Eloy; quatre grands ossements de saint Alban, premier martyr de l'Angleterre, et une dent de saint Gengoul ; un os de saint AndrĂ©, apĂŽtre, et un bras de saint ThĂ©odulphe; une partie du bras droit de saint Jean-Baptiste, et un osselet de saint Gosselin ; une jambe de saint Bavon, et des reliques de saint Etienne, de saint Laurent et de saint Philippe, etc., etc., je ne rencontre que des procĂšs-verbaux de visite, d'ouverture et de translation, dont le plus ancien remonte seulement Ă  l'annĂ©e 1671, et dont le dernier est de 1819. Sans contredit, ces documents ont une rĂ©elle im- RAPPORT SUR UN MANUSCRIT DE M. GÉROST. 91 portance, mais il eĂ»t Ă©tĂ© dĂ©sirable qu'ils fussent reliĂ©s entre eux par l'histoire des reliquaires et des Ă©vĂ©nements de toute sorte que depuis le XIIe siĂšcle ils ont traversĂ©. Puisque notre laborieux et savant collĂšgue ne nous a envoyĂ© que ces feuillets dĂ©tachĂ©s et les derniers d'une intĂ©ressante histoire qu'il Ă©tait, mieux que personne, en Ă©tat de rĂ©ussir, permettezmoi, Messieurs, de vous en prĂ©senter une succincte analyse, en vous priant de ne pas oublier que c'est Ă  M. GĂ©rost seul qu'appartient le mĂ©rite des citations. En 1671, dom Amand Tribout, et dom MĂ©dard Gillet, visiteurs de la communautĂ© des BĂ©nĂ©dictins de Saint-Vanne et de Saint-Hydulphe, du diocĂšse de Verdun, font ouvrir une chĂąsse de bois autrefois couverte et ornĂ©e de lames d'argent et de plaques de cuivre Ă©maillĂ©, aujourd'hui dĂ©pouillĂ©e par les hĂ©rĂ©tiques, Hoereticorum vi ac vabie jĂ m nunc planĂš dirutam et expilatam, et aprĂšs y avoir reconnu des reliques d'un trĂšs-grand nombre de saints, ils rĂšglent la solennitĂ© et l'Ă©poque des fĂȘtes de ces saints parmi lesquels, disent-ils, il y en a d'assez notables dont on ne fait assez de solennitĂ©. De 1674 Ă  1789, les deux chĂąsses des bĂ©nĂ©dictins de Nesle reposent intactes dans leur Ă©glise de Villenauxe. Mais la rĂ©volution est arrivĂ©e, les communautĂ©s religieuses sont supprimĂ©es, leurs biens attribuĂ©s Ă  l'Etat, et comme Ă  cette Ă©poque on avait encore le respect de la religion et que le temps n'Ă©tait pas tout-Ă -fait venu oĂč, aprĂšs avoir aboli le culte catholique et cherchĂ© Ă  guĂ©rir le Pape de ses erreurs, on dĂ©crĂ©terait la fĂȘte du culte de la Raison, les chĂąsses des bĂ©nĂ©dictins de Nesle-la-Reposte furent 92 RAPPORT SUR UN MANUSCRIT DE M. GÉROST. processionnellement transportĂ©es, en vertu de l'ordonnance des administrateurs du district de Nogentsur-Seine, de l'Ă©glise des BĂ©nĂ©dictins en l'Ă©glise paroissiale de Saint-Pierre et Saint-Paul de Villenauxe. Le procĂšs-verbal en fut dressĂ© le 8 mai 1791, toutefois son contenu ne diffĂšre guĂšre du prĂ©cĂ©dent ; on avait supposĂ©, Ă  juste titre, que les visiteurs des BĂ©nĂ©dictins devaient s'y connaĂźtre, et les dĂ©lĂ©guĂ©s de Messieurs du district s'Ă©taient contentĂ© de traduire, tant bien que mal, le procĂšs-verbal latin de 1671. La vente des biens meubles des BĂ©nĂ©dictins de Villenauxe eut lieu en 1791. Leur Ă©glise fut vendue, puis dĂ©molie en 1793. Quant aux reliquaires, ils furent relĂ©guĂ©s dans la sacristie de l'Ă©glise de Villenauxe, comme des monuments de la superstition et du fanatisme, aprĂšs qu'on en eut arrachĂ© et foulĂ© aux pieds les reliques, dans un de ces tristes jours oĂč les honnĂȘtes gens courbant la tĂȘte et retirĂ©s dans leurs demeures, les mĂ©chants se trouvaient le courage de tout oser. Heureusement qu'un digne citoyen, Michel Messageot, attachĂ© Ă  l'Ă©glise de Villenauxe, veillait sur les prĂ©cieuses reliques; il avait Ă©tĂ© impuissant Ă  empĂȘcher leur profanation, mais il put les recueillir au pĂ©ril de sa vie, et le 11 septembre 1819, Monseigneur de Boulogne, Ă©vĂȘque de Troyes, rendait une ordonnance constatant leur parfaite identitĂ© avec celles Ă©noncĂ©es dans le procĂšs-verbal du 14 septembre 1671. M. GĂ©rost termine sa notice en se livrant Ă  quelques conjectures sur les personnages que les sta- RAPPORT SUR UN MANUSCRIT DE M. GÉROST. 93 tuettes, ornant le reliquaire de Saint-Alban, devaient reprĂ©senter. La seconde communication de notre collĂšgue relate la vente que le Conseil de Fabrique de l'Ă©glise de Villenauxe avait cru pouvoir faire, le 3 fĂ©vrier 1856, du reliquaire de Saint-Alban, Ă  deux marchands d'antiquitĂ©s de Paris, et l'avertissement ou cri d'alarme que M. GĂ©rost s'empressa d'adresser au Ministre des Cultes. L'initiative que notre honorable collĂšgue a prise dans cette circonstance a eu les plus heureux rĂ©sultats, la vente a Ă©tĂ© annulĂ©e, et le reliquaire de Saint-Alban a repris le chemin d'une contrĂ©e qui le vĂ©nĂ©rait depuis prĂšs de six siĂšcles. L'Ă©glise de Villenauxe saura-t-elle le garder maintenant, et le dĂ©sir de l'Ă©changer contre des ornements sacerdotaux, qu'il suffit de quelques annĂ©es pour anĂ©antir, prĂ©vaudra-t-ii contre le respect qu'un si merveilleux reliquaire devrait inspirer? S'il devait quitter Villenauxe, qu'il soit du moins recueilli et abritĂ© dans le trĂ©sor de la cathĂ©drale de Troyes, qui saura lui rendre son ancien lustre et le conserver Ă  la piĂ©tĂ© des fidĂšles du diocĂšse, c'est le voeu sincĂšre que nous formons 1. N'est-il pas, en effet, douloureux de voir les monuments de l'art admirable du moyenĂąge dĂ©serter peu Ă  peu nos Ă©glises, d'oĂč le goĂ»t, 1 Le voeu exprimĂ© par l'auteur du rapport a Ă©tĂ© rempli, et, grĂące Ă  Monseigneur Coeur, et Ă  M. Fortoul, Ministre des Cultes, la Fabrique de la CathĂ©drale de Troyes est devenue, au mois d'aoĂ»t 1856, propriĂ©taire du reliquaire de Saint-Alban, qui avait dĂ©jĂ  pris la route de la Belgique. Note de la Commission de publication. 94 RAPPORT SUR UN MANUSCRIT DE M. GÉROST. je dirais presque la manie des collections, les arrache successivement? Si l'amour de l'art en a sauvĂ© quelques-uns, combien n'en a-t-il pas enlevĂ© au culte et fait Ă©migrer Ă  l'Ă©tranger pour y demeurer confondus Ă  l'Ă©tat de curiositĂ©s et de numĂ©ros de musĂ©e avec les objets les plus vulgaires, les plus Ă©tranges et les plus disparates ! Mais je m'arrĂȘte, je ne voudrais pas dire trop de mal de cette passion pour l'art des temps passĂ©s, c'est elle qui a inspirĂ© et soutenu M. GĂ©rost dans son intĂ©ressante notice et dans sa croisade pour la rĂ©intĂ©gration, Ă  Villenauxe, de l'un des plus prĂ©cieux monuments de l'art chrĂ©tien au XIIe siĂšcle. Je vous demande donc d'ordonner le dĂ©pĂŽt aux archives de la SociĂ©tĂ© du mĂ©moire de M. GĂ©rost, et de dĂ©cider que de vives fĂ©licitations lui seront adressĂ©es pour son travail et ses actives dĂ©marches dans le but de conserver Ă  sa ville natale les richesses archĂ©ologiques dont elle devrait se montrer fiĂšre. Troyes, le 20 juin 1856. MĂ©m. de la Soc. d'Agric. Sc Arts et Belles L. de l'Aube Tome XXII, 1858. CAVERNE DE MONTGUEUX EXCURSION A LA CAVERNE DE MONTGUEUX, PAR M. GUSTAVE LE GRAND, Membre rĂ©sidant. DĂšs l'annĂ©e 1851, alors que l'administration municipale recherchait, sous l'habile et active direction de l'honorable M. Ferrand-Lamotte, les moyens Ă  employer pour alimenter la ville d'eaux abondantes et salubres, l'attention de la SociĂ©tĂ© AcadĂ©mique fut appelĂ©e sur l'existence d'un cours d'eau souterrain Ă  Montgueux. Une excursion, dont il a Ă©tĂ© rendu compte, fut mĂȘme entreprise dans le but de recueillir des indications sur ce cours d'eau. Voir MĂ©moires de la SociĂ©tĂ©, tome XVI, 1851, page 227. Les habitants de Montgueux affirmaient qu'en 1789 un homme, en creusant un puits, avait Ă©tĂ© surpris dans son travail par une irruption d'eau soudaine, abondante; qu'il n'avait eu que le temps de fuir en abandonnant ses outils. On ajoutait que 96 EXCURSION A LA CAVERNE DE MONTGUEUX. le courant Ă©tait tellement impĂ©tueux que les seaux Ă©taient heurtĂ©s, entraĂźnĂ©s de cĂŽtĂ© ; que cet inconvĂ©nient fit abandonner le puits, et qu'on le combla. — Une dĂ©pression trĂšs-marquĂ©e du sol dans le jardin du sieur ClĂ©ment Armand, au-devant de son habitation, marquait encore le lieu de la fouille. Pendant l'annĂ©e sĂšche qui vient de passer, le manque d'eau se fit partout ressentir, surtout dans les villages des plateaux Ă©levĂ©s de la craie; les souvenirs de la tradition furent naturellement ravivĂ©s; l'on reprit l'ancien dĂ©combrement, et cette fois l'existence certaine non pas d'un torrent, mais d'une caverne au centre mĂȘme de la masse crayeuse, fut de nouveau signalĂ©e Ă  la SociĂ©tĂ© AcadĂ©mique. Celle-ci s'empressa de faire examiner un fait aussi intĂ©ressant; plusieurs de ses membres se rendirent Ă  Montgueux. Voici ce qu'ils constatĂšrent A une profondeur de 39m 50, dans la paroi sudest du puits dont il s'agit, se trouve une ouverture de Om 80 de largeur, de 2 mĂštres de hauteur, formant un couloir que les ouvriers ont sensiblement agrandi, et par lequel on pĂ©nĂštre directement dans une premiĂšre et grande excavation. La forme de celle-ci est fort irrĂ©guliĂšre, pourtant elle se rapproche d'un ellipsoĂŻde de rĂ©volution fort allongĂ©, ayant son grand axe placĂ© verticalement. Sa hauteur est d'environ 10 mĂštres, son petit axe en a 6m 40. A droite, tout prĂšs de l'entrĂ©e, on remarque un trou de trente centimĂštres de diamĂštre, s'inclinant Ă  45°, et qui paraĂźt se bifurquer. Au fond, presqu'en face de l'entrĂ©e de la mĂȘme excavation, il existe un pareil trou, s'inclinant de mĂȘme. Du cĂŽtĂ© opposĂ©, et plus bas, se trouvent de EXCURSION A LA CAVERNE DE MONTGUEUX. 97 nombreuses fissures. Du sommet de la voĂ»te, audessus de ces fissures, l'eau coule sur la paroi, mais en si faible quantitĂ©, qu'un orifice de la grandeur d'un verre Ă  boire en dĂ©biterait autant. Le sol tout entier, et les parois en quelques endroits, sont recouverts d'un limon jaunĂątre. — Sur tous les points le doigt fait de faciles empreintes dans la craie qui est ramollie par l'humiditĂ©. — Les strates sont trĂšsdistinctes ; elles sont horizontales, formĂ©es de couches d'environ 2 mĂštres chacune. En face de l'entrĂ©e de cette premiĂšre caverne, Ă  cinq mĂštres au-dessus du sol, on voit l'entrĂ©e d'une autre excavation. On y arrive au moyen d'une Ă©chelle; puis, en rampant sur les genoux et sur les mains pour traverser une galerie de 4 mĂštres de longueur, de 4m 50 de largeur et 0m 80 de hauteur, on pĂ©nĂštre dans une seconde caverne qui a 6 mĂštres de longueur, 3 mĂštres de largeur et 2m 50 de hauteur, non compris une sorte de fissure ou de cheminĂ©e fort Ă©levĂ©e, et qui paraĂźt se terminer en pointe. Dans ce petit lieu de dĂ©solation, situĂ© Ă  cent pieds sous terre, on voit partout les traces de la violence et du fracas des eaux; le sol est couvert de morceaux de craie de toute grosseur, d'autres semblent prĂȘts Ă  tomber de la voĂ»te et des parois. Telles sont les excavations pu cavernes visitĂ©es; le dessin ci-joint en donne une idĂ©e plus prĂ©cise. Nous ajouterons que la respiration est facile dans la premiĂšre, qu'elle l'est beaucoup moins dans la seconde, oĂč l'on est quelque peu oppressĂ©. La tempĂ©rature Ă  l'air libre, dans la campagne, Ă©tant de 14°, a Ă©tĂ© trouvĂ©e de 12° 1/4 dans les cavernes. T. XXII. 7 98 EXCURSION A LA CAVERNE DE MONTGUEUX. Qu'il nous soit permis de dire un mot sur le mode de formation probable de pareils vides. Ainsi que MM. LĂ©ymerie et ClĂ©ment-Mullet le font observer dans leurs Ă©crits, il existe dans la colline de Montgueux beaucoup de fissures, de nids ou de crevasses remplis de terre; parfois des filets d'eau doivent y pĂ©nĂ©trer et entraĂźner avec eux dans les fentes infĂ©rieures, et peut-ĂȘtre mĂȘme jusqu'Ă  la riviĂšre de Vannes, les matiĂšres friables qui se trouvent sur leur passage. C'est ainsi que les cavernes visitĂ©es auront Ă©tĂ© dĂ©blayĂ©es, et leur aspect semble dĂ©montrer qu'aujourd'hui l'eau s'y rend parfois en grande abondance. Elles doivent offrir alors un bien curieux spectacle ; nous nous proposons d'en ĂȘtre le tĂ©moin en temps opportun, c'est-Ă -dire aprĂšs une saison pluvieuse, et d'en rendre compte. Quoi qu'il en soit, Ă  cause de l'intermittence de ces eaux, on ne peut les utiliser au profit de la contrĂ©e ; l'on ne peut malheureusement songer Ă  cette bonne fortune de dĂ©tourner pour la ville de Troyes une source situĂ©e Ă  cent mĂštres au-dessus du Ravelin. Bien que sous ce rapport le rĂ©sultat soit nĂ©gatif, la visite faite Ă  Montgueux n'aura pourtant pas Ă©tĂ© stĂ©rile, puisqu'elle contribue Ă  fixer plus prĂ©cisĂ©ment les donnĂ©es prĂ©cĂ©demment recueillies sur la constitution gĂ©ologique de cette trĂšs-intĂ©ressante colline. Troyes, le 16 avril 1858. ANALYSE DE L'EAU DE LA CAVERNE DE MONTGUEUX, Par M. HENRI OUDART, Pharmacien Ă  Troyes. MESSIEURS, La dĂ©couverte d'une source, ou d'un cours d'eau, a toujours de l'importance pour les lieux oĂč on les trouve; aussi, la SociĂ©tĂ© AcadĂ©mique de l'Aube, jalouse de tout ce qui peut intĂ©resser le pays, a-t-elle voulu connaĂźtre la nature de l'eau dĂ©couverte derniĂšrement sous la cĂŽte de Montgueux. C'est pourquoi j'ai procĂ©dĂ© avec soin Ă  l'examen et Ă  l'analyse de cette eau, dont un litre seulement m'a Ă©tĂ© remis. Voici les principaux rĂ©sultats obtenus Physiquement, elle est comme toutes les eaux du dĂ©partement, incolore, inodore, insipide; cependant je lui trouve un peu de cruditĂ©, et elle m'a paru d'une lourde digestion. 100 ANALYSE DE L'EAU Recueillie avec soin dans un litre, et rien Ă  son arrivĂ©e en vase clos n'en troublant la transparence, elle a laissĂ© dĂ©poser, aprĂšs 48 heures d'exposition Ă  l'air, un prĂ©cipitĂ© pondĂ©rable de carbonate de chaux. Ce fait s'explique, on le sait, par le dĂ©gagement d'une petite quantitĂ© d'acide carbonique, qui, sous une pression plus ou moins grande au centre de la terre, Ă©tait combinĂ© Ă  la chaux et la tenait en dissolution, Ă  l'Ă©tat de bi-carbonate soluble. La pression venant Ă  cesser, une partie de cet acide, en combinaison forcĂ©e, se dĂ©gage, et le sel de chaux, devenu sous-carbonate insoluble, se dĂ©pose lentement au fond du vase, Ă  mesure que sa dĂ©composition s'opĂšre, sous l'absence de toute pression. C'est ainsi que nous connaissons des eaux, dites incrustantes, qui recouvrent trĂšs-promptement d'une couche Ă©paisse de calcaire les objets soumis Ă  leur action au sortir de la source. ExaminĂ©e chimiquement, elle a donnĂ©, sous l'action de l'ammoniaque, un prĂ©cipitĂ© gris blanc de carbonate de chaux. L'acide oxalique a Ă©galement offert un prĂ©cipitĂ© abondant d'oxalate de chaux. Le phosphate de soude a indiquĂ© des traces de magnĂ©sie. Elle est donc Ă©minemment calcaire. L'azotate d'argent ayant aussi donnĂ© un prĂ©cipitĂ© blanc, abondant, caillebotĂ©, m'a indiquĂ© que, dans cette eau, la chaux est plus particuliĂšrement unie Ă  l'acide hydrochlorique hydrochlorate de chaux. La baryte, ce rĂ©actif toujours si sensible, si DE LA CAVERNE DE MONTGUEUX. 101 tranchĂ©, n'a occasionnĂ© aucun prĂ©cipitĂ©, mĂŽme aprĂšs un long contact et en variant ses sels ; ce qui, Ă  mon grand Ă©tonnement, dĂ©montre l'absence de tout sulfate dans cette eau cependant c'est Ă  sa prĂ©sence que la plus grande partie des eaux du pays doivent leur cruditĂ©. Ladite eau versĂ©e dans de la teinture rouge de bois de campĂȘche, l'a fait passer au violet, indice d'une eau calcaire impropre Ă  la teinture. AprĂšs quelques minutes de contact avec l'eau de savon, elle a caillebotĂ© ce dernier, qui s'est prĂ©cipitĂ© insoluble en olĂ©ate et en stĂ©arate de chaux; d'oĂč cette conclusion, qu'elle est impropre au savonnage. Si, Ă  l'air libre, elle abandonne une partie de la chaux y contenue, ce rĂ©sultat devra ĂȘtre plus grand encore lorsqu'on la soumettra Ă  l'Ă©bullition. Elle sera donc impropre Ă  la cuisson des lĂ©gumes, de la viande, etc., qui, une fois recouverts d'une couche de calcaire, ne se laisseront plus ramollir, mĂȘme par l'eau bouillante. Le cyanure potassique, ajoutĂ© Ă  cette eau prĂ©alablement acidifiĂ©e, n'y a occasionnĂ© aucune coloration ; il y a donc absence absolue de fer. Conclusion Cette eau est Ă©minemment calcaire, TrĂšs-peu magnĂ©sienne, Sans traces de fer ; Elle tapisse d'une couche de chaux les vases qui la contiennent ; Son dĂ©pĂŽt calcaire sera considĂ©rable si on la fait bouillir; 102 ANALYSE DE L'EAU DE LA CAVERNE DE MONTGUEUX. Elle dĂ©compose le savon et les matiĂšres tinctoriales; Elle sera impropre aux usages domestiques, ne pourra servir Ă  la cuisson des lĂ©gumes, de la viande ; La plus grande partie de la chaux soluble y contenue est Ă  l'Ă©tat de bi-carbonate, et surtout de chlorure ; Mais, fait assez rare en ce pays, elle ne contient pas de sulfate de chaux, si abondant dans toutes les eaux du dĂ©partement. Troyes, le 16 Avril 1858. RAPPORT SUR LE LIVRE DE PAILLOT DE MONTABERT, INTITULÉ L'ARTISTAIRE, ou LIVRE DES PRINCIPALES INITIATIONS ADX BEAUX-ARTS, Par M. SCHITZ, Membre rĂ©sidant. MESSIEURS, Regardez au sommet de cette montagne Ă©levĂ©e; voyez cet homme qui paraĂźt sous l'influence d'un dĂ©sir ardent, d'une pensĂ©e secrĂšte. Cet homme, c'est HomĂšre, Michel-Ange, Virgile, GoĂ«the, ou Shakspeare. La nuit retire ses ombres ; et, sous les premiĂšres lueurs du jour, se dessinent dĂ©jĂ  les plaines immenses qui se dĂ©roulent Ă  ses pieds. Tout-Ă -coup l'horizon resplendit, le soleil envahit l'espace, tous les ĂȘtres animĂ©s commencent Ă  Ă©lever la voix, et la nature s'Ă©veille, au milieu de ces bruits harmonieux et de ces torrents de lumiĂšre. Lui, notre 104 RAPPORT SUR L'ARTISTAIRE poĂšte, reste debout, pendant quelques instants, immobile comme une statue ; puis, sa figure s'anime, ses traits s'illuminent, une larme vient mouiller sa paupiĂšre, ses genoux flĂ©chissent, et, les bras tendus vers la voĂ»te embrasĂ©e du ciel, Dieu tout-puissant, s'Ă©crie-t-il avec enthousiasme, que cela est beau ! Remontons, par la pensĂ©e, le cours des siĂšcles Ă©coulĂ©s, traversons la place publique de Rome au temps du Consulat. Foule immense, grande agitation sur le Forum on va conduire deux hommes Ă  la mort; ces deux hommes ont levĂ© le bras contre la libertĂ© de leur patrie. C'est juste, disons-nous ; c'est le droit de la patrie qui se venge ; et nous passons. Quelqu'un nous arrĂȘte et nous dit Mais, ces deux hommes qui marchent Ă  la mort, ce sont les deux fils de celui qui condamne ; car, le Consul, qui vient de prononcer l'arrĂȘt fatal, se nomme Brutus. Nous nous arrĂȘtons soudain ; et, les yeux fixĂ©s sur ce visage, oĂč se peint en traits Ă©loquents la lutte qui se passe entre l'amour du pĂšre et l'amour du citoyen, nous nous sentons remuĂ©s, par une mystĂ©rieuse influence, dans toutes les profondeurs de notre ĂȘtre. Pourquoi, Messieurs, cet enthousiasme ? Quel est le secret de cette mystĂ©rieuse influence? Pourquoi encore ces frissons Ă©mouvants, lorsque les Malibran, ou les Pasta, nous transmettent les inspirations sublimes d'un Mozart, ou d'un Rossini? Pourquoi cet empressement de la foule, qui assiĂ©ge les portes de nos MusĂ©es ? Pourquoi encore, autrefois, sous le beau ciel de la GrĂšce, cet entraĂźnement d'une nation guerriĂšre, aux accents d'un TyrtĂ©e inspirĂ© ? Qui rĂ©pondra, Messieurs, Ă  toutes ces questions? DE PAILLOT DE MONTABÉRT. .105 Qui nous expliquera ces mouvements de notre coeur, ces aspirations de notre Ăąme vers le bien, lorsque nous sommes sous l'influence du beau? Qui nous dira ce que c'est que le beau; si c'est quelque chose d'absolu ou de relatif; s'il y a un beau essentiel, Ă©ternel, immuable, rĂšgle et modĂšle du beau subalterne ? Avons-nous un sens interne du beau, une facultĂ© esthĂ©tique, ou tout cela n'est-il que le rĂ©sultat de l'instruction, et en est-il de la beautĂ© comme des modes ? Le sens du beau dĂ©pend-il de l'Ă©ducation, du prĂ©jugĂ© et de la coutume ; et, si le beau existe indĂ©pendemment de toutes ces choses, qui nous dira si c'est une affaire de sentiment, ou de raison ; s'il y a des rĂšgles gĂ©nĂ©rales qui puissent diriger dans son application et dans son emploi ? Qui nous dira Ă  quelles qualitĂ©s est attachĂ© notre sentiment d'admiration, ou de plaisir ; et pourquoi cette diversitĂ©, ce dĂ©saccord dans le jugement, que les hommes portent sur la beautĂ© ? Je m'arrĂȘte, Messieurs. Ce que je viens de dire suffit pour vous faire sentir de quel intĂ©rĂȘt sont les questions que soulĂšve le sujet qui va nous occuper. Car, vous m'avez chargĂ© de vous rendre compte d'un ouvrage de Paillot de Montabert, oĂč toutes ces choses sont traitĂ©es de main de maĂźtre. Cette oeuvre, en effet, une des plus importantes sorties de la plume de notre compatriote, est un traitĂ© de pure esthĂ©tique. Si ce compte-rendu n'eĂ»t dĂ» ĂȘtre qu'un exposĂ© scientifique de la thĂ©orie de l'auteur, j'en aurais laissĂ© le soin Ă  un esprit plus habituĂ© que le mien au langage philosophique. Mais, c'Ă©tait une occasion de vous faire apprĂ©cier la haute intelligence de 106 RAPPORT SUR L'ARTISTAIRE l'homme de bien qui fut notre compatriote ; c'Ă©tait une occasion de combattre ce fatal prĂ©jugĂ© des gens du monde, esprits faibles ou frivoles, qui s'en vont rĂ©pĂ©tant que les beaux-arts ne sont destinĂ©s qu'Ă  nos amusements. Aussi cette occasion, vous le comprenez, Messieurs, par sentiment et par devoir, je n'ai pas voulu la laisser Ă©chapper. On lit au frontispice du livre de de Montabert Initiation aux Beaux-Arts. Or, qu'est-ce que les beaux-arts? Tout le monde raisonne du beau. Que c'est beau ! Que c'est laid ! sont des expressions que l'on trouve Ă  chaque instant sur toutes les lĂšvres, en prĂ©sence des ouvrages de la nature et des productions de l'art. Demandez Ă  ceux qui se prononcent aussi nettement ce que c'est que le beau, quelle est son origine, sa nature, son exacte dĂ©finition. Demandez-leur s'ils ont une rĂšgle, un criterium, qui serve de base Ă  leurs jugements, Combien avoueront leur ignorance Ă  ce sujet? Cependant, il y a un beau presque tous les hommes sont d'accord sur ce point; beaucoup le sentent vivement et le reconnaissent lĂ  oĂč il est; mais combien il en est peu qui savent ce que c'est! Tels furent les motifs qui engagĂšrent Paillot de Montabert Ă  Ă©crire le livre dont j'ai Ă  vous entretenir aujourd'hui. C'est donc avec la philosophie pour guide et le livre d'un peintre philosophĂ© Ă  la main, que nous allons pĂ©nĂ©trer dans le sanctuaire des beaux-arts. Et n'allez pas croire, Messieurs, que le flambeau de la philosophie, que la froide raison, DE PAILLOT DE MONTABERT. 107 n'aient rien Ă  voir dans les rĂ©gions Ă©levĂ©es de l'art; car nous disons, avec M. Cousin " la philosophie » ne coupe point Ă  l'art ses ailes divines, mais elle le » suit dans son vol, mesure sa portĂ©e et son but. » Vous pressentez au contraire d'avance, Messieurs, tout l'intĂ©rĂȘt qui s'attache Ă  une telle Ă©tude, et quels avantages, artiste ou amateur, nous devons en retirer. Dans la connaissance des principes de l'art et des rĂšgles qui en dĂ©coulent, l'un trouvera un guide sĂ»r dans l'exĂ©cution de ses oeuvres, l'autre un moyen d'apprĂ©cier avec discernement les productions de l'art, et d'en tirer toutes les jouissances et toute l'utilitĂ© dont elles sont susceptibles. La poĂ©sie, dans le sens le plus large de ce mot, c'est l'Ăąme des beaux-arts. Elle en est la partie vivifiante. C'est, pour me servir d'une comparaison de vieille date, c'est le feu sacrĂ© que PromethĂ©e poursuivit de son audacieuse tentative. Or, la poĂ©sie, ainsi interprĂ©tĂ©e, qu'est-ce? sinon la reprĂ©sentation du beau modifiĂ© par les conceptions de l'intelligence, sous l'influence des Ă©motions de la sensibilitĂ©. Les beaux-arts ont donc le beau pour objet. Or, qu'est-ce que le beau? Nous touchons ici au domaine de la mĂ©taphysique. Nous sommes portĂ©s vers ces rĂ©gions de l'infini et de l'absolu par notre sentiment, attirĂ©s par un charme irrĂ©sistible, qui agit dans les profondeurs de notre Ăąme. Mais lĂ , oĂč nous entraĂźne notre sensibilitĂ©, notre intelligence s'effraie; et devant ces champs sans bornes de l'inconnu, en face de ces horizons resplendissants mais sans limites, notre raison craint d'ĂȘtre prise de vertige. C'est pourquoi nous prendrons, pour nous guider, ceux qui se sont 108 RAPPORT SUR L'ARTISTAIRE lancĂ©s sur cet ocĂ©an sans rivages du monde de la pensĂ©e. Interrogeons done les philosophes, demandonsleur des notions sur la nature intime, l'essence du beau, sur ses caractĂšres constitutifs, son objet, son but et sa loi. Un des plus brillants gĂ©nies de l'antiquitĂ©, Platon, s'exprime Ă  peu prĂšs en ces termes Le beau ne se trouve nulle part complet, exempt de tache et d'altĂ©ration; il ne faut le rechercher dans rien de particulier, dans rien de relatif. Un objet est beau, mais il ne l'est pas par lui-mĂȘme; il faut chercher le beau au-delĂ  des choses individuelles. Il y a, dans notre Ăąme, un rayon de lumiĂšre Ă©manĂ© de la divinitĂ©; mise en action par cette influence divine, notre Ăąme aspire sans cesse aprĂšs le beau essentiel, le poursuit dans les ouvrages de la nature, et traduit souvent l'idĂ©e qu'elle s'en est formĂ©e par les chefs-d'oeuvre des arts. Platon a encore donnĂ© cette formule d'une inspiration sublime Le beau est la splendeur du vrai. » Une autre grande autoritĂ© parmi les anciens, le disciple de Platon, Aristote s'est contentĂ© de dire Le beau, c'est l'ordre dans la grandeur, l'ordre supposant toujours la symĂ©trie, la convenance, l'harmonie; et la grandeur supposant toujours la simplicitĂ©, l'unitĂ© et la majestĂ©. C'est Ă  la remorque de cette formule qu'ont marchĂ© tous les philosophes sensualistes, lorsqu'ils ont voulu formuler une dĂ©finition. Mais, disons-le en passant, ce n'est pas lĂ  tout Aristote. Si nous pĂ©nĂ©trons plus avant dans la mĂ©taphysique du prĂ©cepteur d'Alexandre, nous retrouvons le disciple de Platon. Car, pour Aristote, il y a Dieu DE PAILLOT DE MONTABERT. 109 et le monde, et le seul lien qui unisse le monde Ă  Dieu, c'est la beautĂ© de Dieu et l'amour du monde. Un mĂ©decin philosophe, Galien, a dit, dans le mĂȘme sens, mais d'une maniĂšre moins gĂ©nĂ©rale Le beau est le rĂ©sultat de la correspondance des » parties et de la justesse des proportions. » Une des plus grandes gloires de l'Ă©glise latine, saint Augustin, prĂ©sente dans ses Ă©crits des idĂ©es sur le beau qui peuvent ĂȘtre rĂ©duites Ă  celles-ci Le rapport exact des parties d'un tout entr'elles le constitue un; c'est lĂ  le caractĂšre distinctif de la beautĂ©. La similitude, l'Ă©galitĂ©, la convenance des parties rĂ©duisent tout Ă  une espĂšce d'unitĂ© qui satisfait la raison; mais il n'y a point de vraie unitĂ© dans les corps, puisqu'ils sont tous composĂ©s d'une infinitĂ© de parties. Rien sur la terre ne peut ĂȘtre parfaitement un. Il faut reconnaĂźtre qu'il y a, au-dessus de nos esprits, une certaine unitĂ© originale, souveraine, Ă©ternelle, parfaite, qui est la rĂšgle essentielle du beau, et que l'on cherche dans la pratique de l'art. D'oĂč ce grand Docteur conclut que c'est l'unitĂ© qui constitue, pour ainsi dire, la forme et l'essence du beau en tout genre. Djgne admirateur de Platon, saint Augustin a aussi donnĂ© une formule inspirĂ©e en disant Le beau est l'Ă©clat du bon. » Interrogeons maintenant quelques philosophes des siĂšcles plus rapprochĂ©s de nous. IL y a, pour Wolf, des choses qui nous plaisent, il y en a d'autres qui nous dĂ©plaisent; cette diffĂ©rence est ce qui constitue le beau et le laid. Ce qui nous plaĂźt s'appelle beau, ce qui nous dĂ©plaĂźt s'appelle laid. Il admet de plus le beau vrai, ou celui qui naĂźt 110 RAPPORT SUR L'ARTISTAIRE d'une perfection rĂ©elle, et le beau apparent, ou celui qui naĂźt d'une perfection apparente. Si je fais attention, selon Crouzas, Ă  ce qui se passe en moi, Ă  la maniĂšre dont je pense, Ă  ce que je sens lorsque je m'Ă©crie cela est beau! je vois que j'exprime un certain rapport d'un certain objet avec des sentiments agrĂ©ables, oĂč avec des idĂ©es d'approbation. C'est-Ă -dire, j'aperçois quelque chose que j'approuve et qui me fait plaisir, et dans tous les objets qui m'arrachent cette exclamation, je reconnais les caractĂšres constitutifs suivants La variĂ©tĂ©, l'unitĂ©, la rĂ©gularitĂ©, l'ordre et la proportion. Nous avons, d'aprĂšs Hutcheson, un sens intĂ©rieur, une facultĂ© par laquelle nous distinguons les belles choses, comme le sens de la vue est une facultĂ© par laquelle nous recevons la notion des couleurs et des figures, et il faut entendre par le beau tout ce qui est fait pour ĂȘtre saisi par ce sens intĂ©rieur du beau. Il admet un beau absolu, c'est-Ă -dire, le beau que l'on reconnaĂźt en quelques objets, sans les comparer Ă  aucune chose extĂ©rieure dont ces objets soient l'imitation et la peinture; et un beau relatif, celui qu'on aperçoit dans les objets considĂ©rĂ©s communĂ©ment comme des imitations et des images de quelques autres. Quant aux qualitĂ©s que doit possĂ©der un objet pour Ă©mouvoir le sens interne du beau, il les rĂ©duit Ă  l'uniformitĂ© dans la variĂ©tĂ©. Le P. AndrĂ©, un de ceux qui ont le plus approfondi cette matiĂšre, et qui a donnĂ© les principes les plus vrais et les plus solides, paraĂźt faire consister le DE PAILLOT DE MONTABERT. 111 beau, en gĂ©nĂ©ral, dans l'unitĂ©. Le beau a toujours pour fondement l'ordre et pour essence l'unitĂ©. Quant Ă  la nature des notions que nous avons Ă  ce sujet, il distingue les notions gĂ©nĂ©rales de l'esprit pur, qui nous donnent les rĂšgles essentielles du beau; les jugements naturels de l'Ăąme, oĂč le sentiment se mĂȘle avec les idĂ©es purement spirituelles, mais sans les dĂ©truire; et les prĂ©jugĂ©s de l'Ă©ducation et de la coutume, qui semblent quelquefois les renverser les uns et les autres. Quant aux diffĂ©rents genres que prĂ©sente le beau, il distingue un beau essentiel, absolu, indĂ©pendant de toute institution mĂȘme divine, consistant dans la rĂ©gularitĂ©, l'ordre, la proportion, la symĂ©trie en gĂ©nĂ©ral ; un beau naturel, dĂ©pendant de l'institution du crĂ©ateur, mais indĂ©pendant de nos aspirations et de nos goĂ»ts, consistant dans la rĂ©gularitĂ©, l'ordre, la proportion, la symĂ©trie observĂ©e dans les ĂȘtres de la nature; un beau artificiel,* et, en quelque sorte arbitraire, mais toujours avec quelque dĂ©pendance des lois Ă©ternelles, consistant dans la rĂ©gularitĂ©, l'ordre, la symĂ©trie, les proportions observĂ©es dans les productions des arts. Dans le beau artificiel ou arbitraire, notre auteur reconnaĂźt un beau de gĂ©nie fondĂ© sur la connaissance du beau essentiel, qui donne des rĂšgles invariables; un beau de goĂ»t, fondĂ© sur la connaissance des ouvrages de la nature et des productions des grandsmaĂźtres, qui dirige dans l'emploi et l'application du beau essentiel ; et un beau de caprice, qui, n'Ă©tant fondĂ© sur rien, ne doit ĂȘtre admis nulle part. L'exercice, pour Diderot, le plus immĂ©diat de nos facultĂ©s de sentir et de penser, conspire, aus- 112 RAPPORT SUR L'ARTISTAIRE sitĂŽt que nous naissons, Ă  nous donner des idĂ©es d'ordre, de symĂ©trie, de proportion, d'unitĂ©. Ces notions sont expĂ©rimentales, positives, distinctes, universelles. Ces notions, Ă©bauchĂ©es dans notre entendement par l'exercice de nos facultĂ©s, sont entretenues et perfectionnĂ©es par tous les objets qui nous environnent ; on peut les employer dans les dĂ©finitions qu'on en donne. J'appelle donc beau, hors de moi, tout ce qui contient, en soi, de quoi rĂ©veiller, dans mon entendement, l'idĂ©e de rapport; et beau, par rapport Ă  moi, tout ce qui rĂ©veille cette idĂ©e. La potion du rapport constitue la beautĂ©. Diderot admet un beau relatif et un beau rĂ©el; et, de plus, il distingue plusieurs espĂšces de beau tel que le beau moral, littĂ©raire, musical; le beau naturel, artificiel; le beau d'imitation ; beaux qu'il dĂ©finit tous, d'aprĂšs son principe. Le beau, selon Montesquieu, soit dans la nature, soit dans l'art, est ce qui nous donne une haute idĂ©e de l'une et de l'autre, et nous porte Ă  les admirer. La nature et l'art ont trois maniĂšres de nous affecter 1° par la pensĂ©e, 2° par le sentiment, 3° par la seule Ă©motion des organes; d'oĂč trois espĂšces de beau dans la nature et dans les arts 1° le beau intellectuel, 2° le beau moral, 3° le beau matĂ©riel et sensible. Les qualitĂ©s distinctives du beau se rĂ©duisent Ă  trois la force ou l'intensitĂ© d'action, la richesse ou l'abondance et la fĂ©conditĂ© des moyens, et l'intelligence ou la maniĂšre utile et sage de les appliquer; et, de tous les objets qui frappent nos sens, la vue et l'ouĂŻe surtout, ĂŻl n'y a de beau que ce qui annonce, DE PAILLOT DE MONTABERT. 113 dans l'art ou dans la nature, un haut degrĂ© de force, de richesse, ou d'intelligence. Ce qu'il y a de plus beau est ce qui paraĂźt rĂ©sulter de l'ensemble et de l'accord de ces qualitĂ©s; et, Ă  mesure que l'une d'elles manque, ou que chacune est moindre, l'admiration, et avec elle le sentiment du beau, s'affaiblissent en nous. Mendelsohun, et quelques Ă©crivains anglais, disent du beau que c'est l'unitĂ© dans la variĂ©tĂ©. Winkelmam, en parlant du beau, dit qu'il est plus facile » de dire ce qu'il n'est pas que de dire ce qu'il » est. » Il Ă©crit aussi que le beau suprĂȘme rĂ©side » en Dieu, et que l'unitĂ© et la simplicitĂ© sont les » deux vĂ©ritables sources de la beautĂ©. » Miungs dĂ©finit le beau une perfection visible, » image imparfaite de la perfection suprĂȘme. » Pour Tieck et Wackenroder, le beau est un seul » et unique rayon de la clartĂ© cĂ©leste ; mais en pas» sant Ă  travers le prisme de l'imagination, chez les » peuples des diffĂ©rentes races, il se dĂ©compose en » mille couleurs et en mille nuances. » Burk dĂ©finit le beau les qualitĂ©s des corps par » lesquelles ils produisent l'amour ou une passion » semblable. » Hamsterhuis dit l'Ăąme juge le plus beau, ce » dont elle peut se faire une idĂ©e dans le plus court » espace de temps. » Goethe fait consister le beau dans l'expression. Schelling a dit le beau, c'est l'infini reprĂ©sentĂ© » dans le fini; c'est une rĂ©vĂ©lation de Dieu dans » l'esprit humain. » Plusieurs Ă©crivains ont dit, les uns tout simplement le beau, c'est l'ordre; d'autres c'est l'unitĂ© T. XXII. 8 114 RAPPORT SUR L'ARTISTAIRE du vrai, ou le vrai complet, un et parfait ; d'autres enfin le beau est pour l'artiste ce que la perfection spirituelle est pour le saint, un but vers lequel il est entraĂźnĂ© avec amour et par une force divine. Nous ayons cru, Messieurs, devoir mettre devant vos yeux cette sorte de tableau synoptique, afin que vous pussiez voir par quels liens la doctrine exposĂ©e dans le livre de Paillot de Montabert se rattache au passĂ©, Augmenter le nombre des citations eĂ»t Ă©tĂ© aussi inutile que fatiguant pour l'esprit. Toutes les dĂ©finitions, toutes les opinions Ă©mises sur ce sujet, ne sont que des dĂ©rivĂ©s, des transformations de celles de Platon et d'Aristote. Car, Messieurs, mettons d'un cĂŽtĂ© ceux qui vont au-delĂ  des notions fournies par les sens, qui, partant d'idĂ©es qu'ils trouvent en nous, comme faisant partie de la portion spirituelle de notre ĂȘtre, s'Ă©lĂšvent, d'un Ă©lan spontanĂ©, jusqu'Ă  l'infini et l'absolu; qu'ils portent le nom de spiritualistes, d'idĂ©alistes, ou de mystiques; mettons, d'un autre cĂŽtĂ©, ceux qui, se contentant de la notion que les sensations fournissent Ă  notre entendement, s'Ă©lĂšvent simplement aux idĂ©es gĂ©nĂ©rales que ces notions acquises font surgir dans leur esprit; qu'ils soient sensualistes, matĂ©rialistes ou sceptiques; faisons-en deux grandes catĂ©gories qui sont, du reste, dans la loi du dĂ©veloppement de l'esprit humain, et nous pourrons rapporter Ă  deux chefs principaux, Platon d'un cĂŽtĂ© et Aristote de l'autre, les diverses opinions des philosophes, qui toutes viennent se rĂ©soudre et s'absorber dans ce que ces deux grands philosophes ont dit du beau. Car tous, par des chemins divers et sous des expressions plus ou moins variĂ©es, arrivent Ă  dire, les uns le beau, dans son DE PAILLOT DE MONTABERT. 115 ensemble absolu, c'est Dieu; les autres le beau c'est l'ordre dans la grandeur, l'ordre comprenant la symĂ©trie, la convenance et l'harmonie, et la grandeur comprenant la simplicitĂ©, l'unitĂ© et la majestĂ©. Ouvrons maintenant, Messieurs, le livre de notre compatriote. L'idĂ©e et le sentiment du beau ont Ă©tĂ© dĂ©posĂ©s par Dieu dans le coeur des hommes ; tous ont l'idĂ©e et le sentiment d'un beau supĂ©rieur. Le beau absolu, ne rĂ©sidant qu'en Dieu, est inaccessible Ă  la perception de notre dĂ©bile humanitĂ©, ainsi que l'essence mĂȘme de Dieu. Mais il est un degrĂ© de beau infĂ©rieur que Dieu a mis Ă  la portĂ©e de cette faiblesse de l'humanitĂ© ; et c'est ce beau qui nous fait aspirer au beau suprĂȘme. L'homme est un composĂ© de sens et d'intelligence c'est donc par les sens et par l'intelligence qu'il a l'idĂ©e du beau. L'homme possĂšde de plus, dans la profondeur de son ĂȘtre, une facultĂ© toute divine, celle de reconnaĂźtre le beau, ou plutĂŽt son principe Ă©ternel. Le beau, » dit Paillot de Montabert, n'est que l'effet que nous Ă©prouvons; mais » oĂč est la cause de ce beau? Elle est en Dieu. » Mais l'Ăąme doit dominer le corps qui lui est confiĂ©; l'Ăąme Ă©tant, pour ainsi dire, tout notre ĂȘtre, c'est surtout l'Ăąme qu'il s'agit de satisfaire et de perfectionner par le beau. Ainsi, dans l'analyse de la thĂ©orie du beau, on doit distinguer le beau sensible et le beau intellectuel; le beau sensible et le beau intellectuel constituent donc le beau gĂ©nĂ©ral. Mais ces diverses sortes de beau sont dominĂ©es par leur principe, et c'est par leur principe mĂȘme qu'on peut expliquer ce qui les constitue. On doit, » dit Paillot de Montabert, reconnaĂźtre qu'il faut sur- 116 RAPPORT SUR L'ARTISTAIRE » tout, pour que les sens soient exercĂ©s agrĂ©able» ment et Ă©prouvent le plaisir qui rĂ©sulte du beau » sensible, qu'ils ne soient pas affectĂ©s par deux » perceptions Ă©galement dominantes ; car notre sen» timent est un, et ne saurait partager ses affections » sans les affaiblir ; de cette duplicitĂ©; rĂ©sulterait » donc une corruption de l'unitĂ©, c'est-Ă -dire que la » chose qui devrait dominer ne domine plus, Ă  » cause de l'envahissement qu'elle subit d'une unitĂ© » qui aurait dĂ» rester secondaire. » Le beau intellectuel ne saurait ĂȘtre autre chose » que l'unitĂ© elle-mĂȘme; et, pour dire autrement, » ça ne peut ĂȘtre que dans l'unitĂ© que rĂ©side le beau » pour l'intelligence, de mĂȘme que ça ne peut ĂȘtre » que dans l'unitĂ© que rĂ©side le beau pour les sens. » Il importe, » ajoute-t-il ailleurs, de ne jamais » dĂ©sassocier l'idĂ©e du beau pour l'esprit ou pour » l'intelligence de l'idĂ©e du beau pour les sens, dĂšs » qu'il s'agit de l'apprĂ©ciation du beau gĂ©nĂ©ral. On » doit reconnaĂźtre, tout en entrant dans cette ques» tion si importante du beau, que tout sujet ou objet » devenant un sujet doit, pour faire Ă©prouver le » beau Ă  l'intelligence, ĂȘtre lui-mĂȘme un, c'est-Ă -dire constituĂ© de toutes ses parties, sans qu'aucun » autre objet, ou partie Ă©trangĂšre, vienne apporter » une seconde unitĂ© disputante avec lui ; car cette" » seconde unitĂ© ne pourrait ĂȘtre perçue sans peine, » par l'esprit, en mĂȘme temps que l'unitĂ© princi» pale. » Ainsi, il y a quelque chose au-dessus du beau, il y a son principe. Le beau gĂ©nĂ©ral, le beau sensible, le beau intellectuel, sont dominĂ©s par leur principe, l'unitĂ©, ainsi que le beau suprĂȘme, dont le prin- DE PAILLOT DE MONTABERT. 117 cipe est Dieu lui-mĂȘme, ou l'unitĂ© des unitĂ©s par excellence. VoilĂ  donc la rĂšgle des phĂ©nomĂšnes du beau, la loi du beau trouvĂ©e pour Paillot de Montabert. Cette loi, c'est le principe de l'unitĂ©; principe qui permet de dire avec autoritĂ©, cela est beau, et cela ne l'est pas ; loi qui marque au sceau de la perfection toutes les oeuvres du gĂ©nie antique. Continuons de parcourir le livre de notre compatriote, et voyons quel est son sentiment sur les caractĂšres gĂ©nĂ©raux des beaux-arts, leur but et leur rĂŽle dans la sociĂ©tĂ© ; sans nous rendre responsables de certaines idĂ©es abstraites, quelquefois obscures et mĂȘme exagĂ©rĂ©es, mais toujours, nous sommes heureux de le proclamer hautement, toujours nobles et Ă©levĂ©es. Tous d'origine divine, les beaux-arts prennent naissance dans l'amour et dans l'Ă©tude du beau. Leur Ă©clat, sur cette terre, reflet d'un foyer tout divin, symbole perceptible de la beautĂ© parfaite et infinie, exerce sur les esprits un charme et une magie qui lient entr'eux, comme une grande famille, tous les peuples du globe. C'est une langue universelle, douĂ©e d'une Ă©loquence spĂ©ciale, d'une persuasion entraĂźnante, langue comprise par tous les hommes et qui rĂ©vĂšle le principe du beau et de toute perfection . DĂ©positaires et dispensateurs du feu sacrĂ© du beau, les beaux-arts sont frĂšres et le mĂȘme principe les domine tous ; principe dont la possession et la dĂ©monstration sensible font toute leur puissance. C'est cette puissance attractive et bienfaisante, exerçant son influence sur tous les individus, qui donne aux beaux-arts un cachet tout particulier d'excel- 118 RAPPORT SUR L'ARTISTAIRE lence, car les beaux-arts s'adressent, non-seulement aux citoyens, aux nations, Ă  toute l'humanitĂ©, mais encore aux gĂ©nĂ©rations futures, dans l'avenir le plus Ă©loignĂ©. Il faut le reconnaĂźtre, » dit Paillot de Montabert, Dieu a voulu que l'homme fĂ»t privilĂ©giĂ© » par l'idĂ©e et le sentiment d'un beau supĂ©rieur, et » il a voulu nĂ©cessairement que cette facultĂ© fĂ»t » entretenue par l'influence particuliĂšre des beaux» arts, rĂ©vĂ©lateurs obligĂ©s du principe de ce beau » supĂ©rieur de lĂ , l'empire de ces mĂȘmes beaux» arts. » En effet, par les beaux-arts, tous conducteurs de la beautĂ© jusqu'Ă  l'Ăąme par les sens, tous chargĂ©s de manifester et de produire le beau et son principe, nous acquĂ©rons mieux l'idĂ©e et le sentiment du beau possible. Mais, Messieurs, cette idĂ©e, ce sentiment, cette facultĂ©, qui sont dans l'Ăąme humaine, dans quel but Dieu les y a-t-il dĂ©posĂ©s ? En un mot, quelle est la fin des beaux-arts ? Est-il permis de rester indiffĂ©rent Ă  cette question ? Non, Messieurs, et cependant aujourd'hui, quelle insouciance, quelle incertitude, quelle ignorance dans les esprits Ă  ce sujet ! Ceux-ci ne verront dans les beaux-arts que d'agrĂ©ables et innocentes rĂ©crĂ©ations, dont l'homme a tant besoin sur cette terre ; ceux-lĂ , gens affairĂ©s de toute sorte, n'en comprenant ni le charme, ni l'utilitĂ©, vous jetteront, en passant au milieu de vos contemplations, ces paroles impies vous ĂȘtes bien heureux d'avoir du temps Ă  perdre. Les jouissances qu'ils nous font goĂ»ter seraient-elles stĂ©riles? Faudrait-il, comme l'ont voulu certains philosophes, enlever les beauxarts du sein des sociĂ©tĂ©s ? Faudrait-il, d'une main sacrilĂ©ge, couper cet arbre divin dans sa racine, sous DE PAILLOT DE MONTABERT. 119 prĂ©texte que son ombre est Ă©nervante et que ses fruits sont sans utilitĂ©? Cette question serait au moins ridicule, si elle n'Ă©tait absurde. L'homme, Messieurs, a une fin, une destinĂ©e. En principe, notre devoir unique est la rĂ©alisation de notre destinĂ©e, et cette destinĂ©e, du consentement de la religion et de la philosophie, consiste Ă  nous rapprocher de Dieu par le perfectionnement, Ă  nous Ă©lever sans cesse vers Dieu, centre de toute perfection. Or, quel rĂŽle les beaux-arts jouent-ils dans l'accomplissement de ce devoir? Laissons parler Paillot de Montabert Dieu a donnĂ© Ă  l'homme les » beaux-arts pour l'aider Ă  comprendre sa propre » dignitĂ©, son origine, ses devoirs et sa haute desti» nation. Les beaux-arts doivent Ă©clairer l'humanitĂ© » dans la voie du perfectionnement, auquel elle doit » tendre pour parvenir Ă  la fĂ©licitĂ© ; don suprĂȘme, » feu sacrĂ© et tout divin, d'oĂč notre Ăąme, toute di» vine elle-mĂȘme, peut et doit faire jaillir la lumiĂšre » Ă©clairant les sociĂ©tĂ©s dans l'Ă©tude progressive du » beau. La nature, qui a donnĂ© Ă  l'homme tous les » Ă©lĂ©ments nĂ©cessaires pour progresser vers sa desti» nation et pour servir Ă  la perfectibilitĂ© sociale, lui » a nĂ©cessairement accordĂ© le nombre complet des » beaux-arts, qui, chacun en particulier et collecti» vement, ont la facultĂ© de convertir en principes " et en exemples sensibles les principes et les exem» ples mĂ©taphysiques du beau. Chacun des beaux» arts se rapporte et tend Ă  la mĂȘme fin, et cette fin, » c'est l'enseignement du beau, c'est le perfection» nement de l'espĂšce, c'est, par consĂ©quent, l'Ă©tude » des merveilles de Dieu et de son principe Ă©ternel, » Ă©tude qui conduit Ă  l'adoration de l'auteur de 120 RAPPORT SUR L'ARTISTAIRE » toutes les merveilles. En un mot, par la rĂ©union » des beaux-arts, tous les exemples sensibles et in» tellectuels de la beautĂ© se prĂ©sentent Ă  l'envi, pour » nous rappeler Ă  la vertu et pour entretenir eh nos » coeurs le feu de l'amour de Dieu et de l'amour de » l'humanitĂ©. » Noble langage, Messieurs, qui nous fait aimer notre compatriote ; car, Ă  travers ces paroles Ă©levĂ©es, ne sentez-vous pas l'Ăąme d'un honnĂȘte homme, d'un chrĂ©tien fervent et d'un citoyen gĂ©nĂ©reux? Les beaux-arts ont donc une mission; ils sont un enseignement au sein des sociĂ©tĂ©s, et leurs leçons peuvent ĂȘtre individuelles, sociales et divines, c'estĂ -dire qu'ils prennent part Ă  la notion des devoirs de l'homme envers lui-mĂȘme, envers ses semblables et envers Dieu; ce qui leur donne un caractĂšre essentiellement moral. Le philosophe vante les beauxarts, non-seulement parce qu'ils nous instruisent, mais encore parce qu'ils nous rendent meilleurs. L'art fĂ©conde et fait germer les plus grandes vertus; car l'idĂ©e du beau ne peut ĂȘtre conçue sans l'idĂ©e du bien et du bon, idĂ©es qui nous mĂšnent invinciblement Ă  leur application, c'est-Ă -dire Ă  la vertu. Or, par les beaux-arts, nous possĂ©dons les moyens d'Ă©tudier et de dĂ©montrer le principe du beau, lequel comprend toujours le bon. Les beauxarts sont donc pour l'homme un agent moral. En nous rendant familiĂšre la dĂ©monstration de ce principe fĂ©cond de l'unitĂ©, et en nous fournissant le moyen d'en faire l'application Ă  tous nos devoirs envers nous-mĂȘmes, leur bienfait devient immense; car qu'est-ce que la vertu ? Chez les Grecs, nos maĂźtres en tout genre, les DE PAILLOT DE MONTABERT. 121 beaux-arts Ă©taient de grands moyens d'hygiĂšne morale; ils devenaient, dans les mains du philosophe, des remĂšdes puissants et efficaces contre les dĂ©faillances du coeur et de l'esprit. Qui ne veut pas » devenir connaisseur en beaux-arts, » dit Paillot de Montabert, ne veut pas devenir connaisseur en » vertu, l'Ă©tude de la beautĂ©, manifestĂ©e par l'art, » Ă©tant la meilleure prĂ©paration Ă  l'Ă©tude de la vertu. » L'art est nĂ©cessaire, parce qu'il faut que l'imagi» nation soit dirigĂ©e par l'art vers le beau, c'est» Ă -dire vers la vertu. Par l'art, nous pouvons nous » connaĂźtre et nous perfectionner en nous rap» prochant du beau ou de l'archĂ©type qui nous » concerne. » L'homme, Messieurs, devant vivre dans un milieu social, est douĂ© de toutes les facultĂ©s qui lui permettent de vivre en sociĂ©tĂ©, et la facultĂ© artistique en est une. Si nous considĂ©rons, en effet, les beaux-arts au sein des sociĂ©tĂ©s, nous serons amenĂ©s Ă  voir encore en eux un des grands bienfaits accordĂ©s Ă  l'espĂšce humaine ; et leur caractĂšre social deviendra Ă©vident. Les beaux-arts ne sont pas de stĂ©riles distractions et d'inutiles frivolitĂ©s, mais d'attrayants moyens d'instruction. Ils polissent et adoucissent les moeurs, ils dĂ©veloppent le goĂ»t, fortifient le jugement, ennoblissent les sentiments, prĂ©disposent l'Ăąme aux grandes pensĂ©es, et dirigent la volontĂ© dans la voie des grandes actions. Les beaux-arts ne se contentent pas de charmer les sens, de sĂ©duire l'intelligence, d'Ă©mouvoir la sensibilitĂ© ; leur puissance va plus loin, au point de vue des destinĂ©es humaines, ils rendent sensible et attrayant le sentiment de la vertu, en facilitant l'Ă©tude de son prin- 122 RAPPORT SUR L'ARTISTAIRE cipe, d'aprĂšs lequel ils provoquent irrĂ©sistiblement les hommes Ă  rĂ©gler leur conduite; Et c'est lĂ  la vraie destination des beaux-arts. Vous le voyez, Messieurs, par leur nature, parleur destination, les beaux-arts imposent Ă  l'humanitĂ© des commandements qui sont de tous les temps. RĂ©formateurs nĂ©s de tout ce qui est contraire Ă  la beautĂ©, ils doivent combattre le mauvais goĂ»t rĂ©pandu dans les moeurs; ils ont le droit de contrĂŽler et de flĂ©trir tout ce qui est immoral et anti-social, puisqu'ils doivent entretenir parmi les hommes le sentiment de la vertu. Les gens du monde rĂ©pĂštent sans cesse que les beaux-arts sont choses d'agrĂ©ment, d'innocentes rĂ©crĂ©ations, voir mĂȘme d'inutiles futilitĂ©s. DĂ©lassement, amusement, divertissement,voilĂ  leur but. Payez les arts, mais ne les cultivez pas, disent nos voisins d'outre Manche. A ceux-lĂ , nous pouvons dire que l'art s'agite dans une sphĂšre plus Ă©levĂ©e, que l'Ă©loquence des beauxarts a un but plus noble, celui de nous instruire et de nous rendre meilleurs, et que nous ne voyons, dans leurs paroles, que le langage de l'ignorance et de l'Ă©goĂŻsme. Le caractĂšre essentiel et principal » des beaux-arts, » dit Paillot de Montabert, est » d'ĂȘtre un enseignement moral et social. » Que les beaux-arts, oubliant leur haute destination, viennent Ă  se transformer en industrie, qu'ils ne produisent que pour satisfaire les caprices de la mode, flatter le mauvais goĂ»t, les passions et les moeurs dissolues, et bientĂŽt la sociĂ©tĂ© morale se dĂ©gradera et s'abĂźmera dans la corruption. Mais que leur voix » magistrale et solennelle s'Ă©lĂšve dans ces moments » de dĂ©tresse morale, » comme dit Paillot de Mon- DE PAILLOT DE MONTABERT. 123 tabert, et la sociĂ©tĂ© est sauvĂ©e de l'abĂźme de la » barbarie oĂč elle allait tomber. » Aussi, Messieurs, l'art doit rester un et incorruptible au milieu des moeurs changeantes et variables des sociĂ©tĂ©s. L'influence des moeurs est un fait, mais ce n'est pas un droit. L'art, pas plus que la vertu, n'a des lois et des enseignements que les circonstances aient le droit de dĂ©prĂ©cier. Le beau et le bien sont absolus; les moeurs changeantes ne sauraient en altĂ©rer la valeur ; ils n'ont pas Ă  s'inquiĂ©ter de nos caprices et de nos fantaisies, et c'est pourquoi l'art, cette langue universelle et sublime, qui se parle dans tous les pays et dans tous, les temps, et toujours avec les mĂȘmes accens, l'art ne saurait ĂȘtre seulement et expressĂ©ment national, pour nous servir de l'expression de Paillot de Montabert. L'art est un et incorruptible comme la vertu. Aussi, lorsqu'on dit l'art progresse, l'art rĂ©trograde, reculer les limites de l'art; ces propositions sont aussi nulles en rĂ©alitĂ© que si elles s'appliquaient Ă  la vertu. Ce sont les artistes qui progressent ou rĂ©trogradent; et, au-delĂ  des limites de l'art, il n'y Ă  plus que des excentricitĂ©s et des tours de force. L'Ă©clat de l'art, » dit Paillot de Montabert, est » inaltĂ©rable et Ă©ternel, comme le foyer divin d'oĂč il » Ă©mane. » En saine philosophie, comme en religion, la vie n'est qu'une trĂšs-courte pĂ©riode de notre existence totale. Mourir, c'est changer de vie. La mort est un sommeil, c'est un rĂ©veil peut-ĂȘtre, dit Shakspeare; doute sublime d'un grand gĂ©nie artistique. L'Ă©clat » des beaux-arts sur cette terre, » dit Paillot de Montabert laissant lĂ  la forme du doute, ne peut 124 RAPPORT SUR L'ARTISTAIRE » ĂȘtre que le reflet d'un foyer tout divin ; mais il » nous prĂ©pare Ă  un plus grand Ă©clat que percevra » l'Ăąme dans les phases supĂ©rieures qu'elle aura » mĂ©ritĂ© de parcourir. La sympathie que notre Ăąme » Ă©prouve pour le beau suprĂȘme est donc un doux » pressentiment de notre immortalitĂ©. » Le christianisme, Messieurs, a dĂ©terminĂ© la destinĂ©e humaine et indiquĂ© nos devoirs dans ces simples paroles connaĂźtre Dieu, l'aimer et le servir. Paroles admirables, dont les consĂ©quences sont immenses, et qui font appel aux facultĂ©s qui sont tout l'homme l'intelligence, qui peut nous Ă©lever jusqu'Ă  la connaissance des attributs de la divinitĂ©; la sensibilitĂ©, qui nous la fait aimer, et l'activitĂ©, qui lui consacre toutes nos forces. Vous pressentez, Messieurs, quels rĂŽles doivent jouer les beaux-arts dans les rapports de l'homme Ă  Dieu. L'art est un envoyĂ© de Dieu, " disait RaphaĂ«l, je dois donc Ă©tudier l'art pour » servir Dieu. » La religion a pour base l'amour de Dieu, centre du beau et de toute perfection. C'est au feu de cet amour divin que les beaux-arts ont allumĂ© leur flambeau. MĂ©priser," dit notre vertueux compatriote dans un saint enthousiasme, dĂ©laisser » les beaux-arts, en dĂ©guiser ou en altĂ©rer les bien» faits, c'est insulter Ă  Dieu. » JĂ©sus-Christ est venu enseigner sur la terre l'amour de Dieu, amour d'oĂč rĂ©sulte la charitĂ©; et les beauxarts, en nous dirigeant dans cette voie, tendent Ă  satisfaire les premiers besoins du coeur de l'homme, savoir la reconnaissance envers Dieu, et la fraternitĂ© envers les hommes. Aussi, pour Paillot de Montabert, s'initier aux beaux-arts, c'est apprendre Ă  connaĂźtre la dignitĂ© et les devoirs de l'homme, DE PAILLOT DE MONTABERT. 125 c'est apprendre Ă  estimer, puis Ă  chĂ©rir nos semblables; c'est tendre Ă  l'union sociale, Ă  l'unitĂ© humanitaire par la charitĂ© ; c'est s'initier au culte de Dieu; c'est s'Ă©clairer dans la vraie religion; c'est aspirer Ă  Dieu, notre principe et notre fin ultĂ©rieure ; c'est, en un mot, connaĂźtre, aimer et seconder les lois et les dĂ©crets de la Providence. Jetant maintenant une sorte de coup-d'oeil rĂ©trospectif sur tout ce que nous venons de voir, nous ne pouvons, Messieurs, sans entrer dans la discussion de toutes ces doctrines, tĂąche beaucoup trop au-dessus de nos forces, nous ne pouvons, disonsnous, nous empĂȘcher de faire quelques rĂ©flexions. Que voyons-nous, en effet ? Les uns ne nous donnent du beau qu'une idĂ©e incomplĂšte, quand ils nous disent le beau, c'est l'ordre; le beau, c'est l'expression. Nous ne saurions voir lĂ  des dĂ©nominations suffisantes; ce sont des termes vagues, qui ne rĂ©pandent qu'une bien faible lumiĂšre sur la question. D'autres font intervenir, dans leurs dĂ©finitions, une idĂ©e qui n'est ni plus claire ni plus intelligible que, celle du beau luimĂȘme, telle que celle de perfection, par exemple, qualitĂ© qui n'entre nullement, d'une maniĂšre nĂ©cessaire, dans la constitution du beau; car, combien d'ĂȘtres sont susceptibles de la derniĂšre perfection sans ĂȘtre susceptibles de la moindre beautĂ© ? Ceuxci prennent l'effet pour la cause, et le plaisir que le beau nous produit pour le beau lui-mĂȘme; et, cependant, combien d'ĂȘtres sont beaux sans plaire, et combien d'ĂȘtres aussi qui plaisent sans ĂȘtre beaux! Ceux-lĂ  nous donnent des principes qui peuvent bien convenir dans quelques cas particuliers, mais 126 RAPPORT SUR L'ARTISTAIRE qui sont loin d'ĂȘtre d'une application gĂ©nĂ©rale; tels que l'uniformitĂ© dans la variĂ©tĂ©, l'unitĂ© dans la variĂ©tĂ©, l'ordre dans l'unitĂ©, l'unitĂ© et la simplicitĂ©; car la simplicitĂ©, l'uniformitĂ©, la variĂ©tĂ©, ou l'ordre rĂ©uni Ă  l'unitĂ©, que l'on peut, il est vrai, considĂ©rer comme une condition gĂ©nĂ©rale importante, ne peuvent, dans bien des cas, servir Ă  complĂ©ter la dĂ©finition du beau. On peut, en effet, satisfaire Ă  toutes ces conditions de simplicitĂ©, d'uniformitĂ©, de variĂ©tĂ©, et mĂȘme d'unitĂ©, toutes choses qui peuvent se faire avec de la volontĂ© et du calcul, et cependant ne pas produire le beau. D'autres ne voient le beau que dans les modifications de notre esprit, lorsque celuici est soumis Ă  son influence; telles que l'instantanĂ©itĂ© du jugement, la perception de rapport. Le beau, il est vrai, est senti et jugĂ© instantanĂ©ment dans la plupart des cas. Dans toute idĂ©e du beau, il est vrai, il y a perception de rapport; mais combien, parmi nos jugements, n'y en a-t-il pas qui ont l'instantanĂ©itĂ© comme attribut, sans ĂȘtre nullement provoquĂ©s par le beau; combien d'idĂ©es sont le rĂ©sultat d'une perception de rapports, et cependant combien qui sont loin d'entraĂźner, aprĂšs elles, la notion du beau ! Que dire de ceux qui ne voient le beau que dans l'utile, et de ceux qui ne voient le beau que dans les corps, et seulement dans les corps qui produisent l'amour ? Quant Ă  ceux qui, pour nous donner une idĂ©e du beau, remontent Ă  la source de toute beautĂ©, ceuxlĂ  ne font que constater que nous avons en nous le sentiment et l'amour du beau; ils nous donnent tout autant une idĂ©e de la perfection, du bon, du vrai, qu'ils DE PAILLOT DE MONTABERT. 127 nous donnent celle du beau, mais ils ne le dĂ©finissent pas. L'absolu, l'infini, Dieu, en un mot, ne peut ĂȘtre embrassĂ© dans nos dĂ©finitions. Le mot de Platon, le beau est la splendeur du vrai; et celui de saint Augustin, le beau est l'Ă©clat du bon, sont, ou des inspirations sublimes, ou des subtilitĂ©s plus ou moins ingĂ©nieuses; mais ce ne sont pas lĂ  des dĂ©finitions, et ce n'est pas dĂ©finir le beau que de dire qu'il rĂ©side en Dieu. Cependant, Messieurs, dans toutes ces opinions, dans toutes ces dĂ©finitions, il doit y avoir un grain de vĂ©ritĂ©. Une opinion complĂštement fausse n'eĂ»t pas eu cours. Nous allons donc, pour nous rĂ©sumer, essayer de formuler une opinion sur cet important sujet, en faisant un peu d'Ă©clectisme et en prenant le vrai lĂ  oĂč nous croyons le voir. Il y a un beau supĂ©rieur, essentiel, suprĂȘme,, absolu; ce beau, c'est Dieu. Par la nature toute divine de la partie spirituelle de notre ĂȘtre, nous sommes en contact avec Dieu; aussi trouvons-nous dans le fond de notre Ăąme cette idĂ©e du beau suprĂȘme, aussi bien que celle du bon et du vrai absolus. Le beau supĂ©rieur et le sentiment du beau que nous avons en nous ne sont pas choses stĂ©riles, inactives; tous deux ont leur mode de manifestation l'un se traduit dans les merveilles de la nature, l'autre par les productions des arts. Nous avons donc dĂ©jĂ  un beau essentiel, suprĂȘme, invariable, comme tout ce qui est absolu, et un beau manifestĂ© qui comprend le beau naturel ou le beau de la nature, et le beau artificiel ou le beau de l'art, le beau artistique. De ces deux sortes de beau, l'un est invariable 128 RAPPORT SUR L'ARTISTAIRE aussi, parce que les lois de la nature sont invariables et Ă©ternelles; mais l'autre est variable, parce qu'il participe de la nature imparfaite de l'homme, parce qu'il est soumis aux influences extĂ©rieures, Ă  l'incertitude des jugements, aux illusions des sens, aux. habitudes individuelles et nationales, Ă  la mode, aux prĂ©jugĂ©s, Ă  l'ignorance et Ă  la corruption. Nous aurons une idĂ©e d'autant plus complĂšte du beau, que nous entrerons plus avant dans la connaissance de ses caractĂšres constitutifs. Or, les caractĂšres constitutifs du beau absolu sont, en quelque sorte, les attributs de la divinitĂ©, dont la connaissance est au-dessus des forces de notre intelligence, et dont nous n'avons en nous qu'un sentiment vague, confus, accablant. Si nous observons maintenant quels sont les caractĂšres constitutifs du beau manifestĂ©, Ă©tude qui est Ă  notre portĂ©e, nous aurons Ă  le considĂ©rer, et dans les objets qui le prĂ©sentent, et dans notre esprit qui le conçoit. Ainsi, dans tous les objets de la nature ou de l'art qui manifestent le beau, nous trouvons, tantĂŽt sĂ©parĂ©es, tantĂŽt rĂ©unies, les qualitĂ©s suivantes l'ordre, la symĂ©trie, la convenance, la proportion, l'harmonie, la grandeur, l'uniformitĂ©, la simplicitĂ©, l'unitĂ©, la majestĂ©, la variĂ©tĂ©, la rĂ©gularitĂ©, l'Ă©galitĂ©, la similitude, et, par-dessus tout, l'expression qui, d'ailleurs, n'est que le rĂ©sultat de la combinaison heureuse de plusieurs de ces qualitĂ©s. Si nous considĂ©rons les caractĂšres du beau, par rapport Ă  l'esprit qui le conçoit ou le produit, nous trouvons dans notre Ăąme des idĂ©es d'approbation dans nos jugements, d'instantanĂ©itĂ© dans nos conceptions, des notions de rapport, de bontĂ©, de vĂ©ritĂ©, de perfection, des sentiments DE PAILLOT DE MONTABERT. 129 agrĂ©ables, des sentiments de plaisir, l'aspiration de l'Ăąme, l'amour de la beautĂ© absolue, enfin la force ou l'intensitĂ© d'action, la richesse ou l'abondance des moyens, et l'intelligence ou la maniĂšre utile et sage de les appliquer, et, au fond de tout cela, un sens intĂ©rieur, un rayon de la lumiĂšre divine, une facultĂ© esthĂ©tique, la bosse, en un mot, pour nous servir d'une expression vulgaire. Si, ne nous attachant maintenant qu'au beau dĂ©pendant de l'homme, au beau artificiel ou artistique, nous le considĂ©rons par rapport Ă  son origine, Ă  sa nature, et par rapport Ă  la maniĂšre dont il est rendu sensible, nous aurons le beau conçu, qui comprend le beau intellectuel et le beau moral; et le beau rĂ©alisĂ©, matĂ©riel, plastique, qui comprend tous les moyens d'expression que l'art a Ă  sa disposition, et produit divers genres secondaires, tels que les beaux Pictural, Sculptural, Musical, Architectural, Mimique et Gymnastique. Quant aux autres sortes de beau, tels que le beau rĂ©el, apparent, le beau relatif, le beau particulier, le beau gĂ©nĂ©ral, le beau idĂ©al, les beaux de gĂ©nie, de goĂ»t, de caprice, toutes ces sortes de beaux, il ne faut les considĂ©rer que comme des modifications, des transformations, des combinaisons diverses des genres de beau que nous avons indiquĂ©s. Et maintenant s'il fallait nous ranger sous une banniĂšre, nous adopterions celle du philosophe chrĂ©tien, celle de notre compatriote. Elle est l'Ă©cho des opinions des philosophes des plus beaux temps de la GrĂšce ; mais les idĂ©es des anciens ont encore gagnĂ© en simplicitĂ©, en grandeur et en majestĂ©, en passant Ă  travers l'intelligence d'une Ăąme Ă©clairĂ©e T. XXII. 9 190 RAPPORT SUR L'ARTISTAIRE, ETC. par la lumiĂšre nouvelle Ă©manĂ©e de la croix du Christ. Nous ajouterons, de plus, que la loi de l'intelligence, pour l'artiste, est la loi mystique; que l'intuition qui s'Ă©lĂšve soudainement aux idĂ©es gĂ©nĂ©rales et la facultĂ© esthĂ©tique, ont beaucoup d'analogie, si elles ne se confondent pas en une seule et mĂȘme facultĂ©. En effet, Messieurs, amour ardent, union intime de l'Ăąme avec Dieu, foi enthousiaste, intuition des vĂ©ritĂ©s Ă©ternelles, c'est-Ă -dire, aspiration vers le beau absolu, et reflet dans l'Ăąme de ce beau suprĂȘme, voilĂ , pour l'artiste, les seules conditions d'existence et de dĂ©veloppement; Troyes, le 16 avril 1858. NOTÉ L'ANALYSE DU LAIT FALSIFIÉ, Par M. DOULIOT, Professeur de Chimie au LycĂ©e ImpĂ©rial de Troyes. Pour juger de la puretĂ© des substances commerciales sujettes Ă  ĂȘtre falsifiĂ©es, on suit communĂ©ment certains procĂ©dĂ©s d'une exĂ©cution prompte et facile, et qui n'exigent de la part de l'opĂ©rateur aucune connaissance spĂ©ciale. Parmi ces procĂ©dĂ©s, celui qui consiste Ă  employer l'instrument que les physiciens nomment arĂ©omĂštre est devenu trĂšs-vulgaire. Aussi cet instrument est-il rĂ©pandu dans le commerce; il y en a plusieurs espĂšces, chacune avec un nom et des usages particuliers. Tels sont les pĂšse-esprits, les pĂšse-sirops, les pĂšse-sels, dĂ©jĂ  anciens et trĂšscommuns ; tels sont encore l'oenomĂštre pour les vins, l'Ă©laĂŻomĂštre et l'olĂ©omĂštre pour les huiles. Le lait, pour sa part, a plusieurs arĂ©omĂštres. Il existe, en effet, des pĂšse-lait, des lactomĂštres, des lactodensimĂštres, des galactomĂštres. Ces instruments sont 132 NOTE SUR L'ANALYSE DU LAIT FALSIFIÉ, extrĂȘmement commodes, puisqu'il suffit de les plonger dans le liquide suspect pour obtenir immĂ©diatement le renseignement qu'on dĂ©sire. Mais il ne faut pas se mĂ©prendre sur la nature des renseignements qu'ils donnent. C'est une erreur de croire qu'ils prouvent, d'une maniĂšre incontestable, que le lait soumis Ă  l'Ă©preuve est falsifiĂ© et qu'il renferme un tiers, un quart ou un cinquiĂšme d'eau, selon que l'affleurement a lieu en tel ou tel point dĂ©terminĂ© Ă  l'avance sur la tige de l'instrument. Un arĂ©omĂštre, quel que soit le nom qu'il porte, s'enfonce d'autant plus dans le liquide oĂč il est plongĂ©, que la densitĂ© de ce liquide est moins grande, et il s'enfonce exactement de la mĂȘme quantitĂ© dans deux liquides de nature diffĂ©rente qui ont la mĂȘme densitĂ©. Il ne peut donc servir qu'Ă  dĂ©terminer la densitĂ© des liquides pour lesquels on l'emploie, et non pas leur nature. Il est Ă©vident que si la densitĂ© du lait Ă©tait constante, et si on ne pouvait le falsifier qu'en y ajoutant de l'eau pure, la densitĂ© du mĂ©lange aurait, avec la quantitĂ© d'eau qu'il contient, un rapport tel que de la connaissance de la densitĂ© on pourrait, avec certitude, dĂ©duire la quantitĂ© d'eau ajoutĂ©e. Or, la densitĂ© du lait n'est pas constante, en ce sens qu'elle varie suivant les vaches, et mĂȘme chez une seule vache, suivant les moments; les limites entre lesquelles cette densitĂ© varie sont reprĂ©sentĂ©es par les nombres 1,029 et 1,033, la densitĂ© de l'eau Ă©tant 1,000. Non-seulement le lait prĂ©sente une densitĂ© variable, mais encore on peut le falsifier sans changer sa densitĂ©. Que l'on dissolve, par exemple, dans l'eau une petite quantitĂ© de dextrine, de gomme ou NOTE SUR L'ANALYSE DU LAIT FALSIFIÉ. 133 de sucre, on pourra en Ă©lever la densitĂ© jusqu'Ă  ce qu'elle se trouve comprise entre les limites de celle du lait pur, et l'on pourra mĂȘler cette dissolution au lait en toute proportion, sans que le pĂšse-lait cesse de donner l'indication du lait pur. Si on enlĂšve la crĂšme qui monte Ă  la surface du lait aprĂšs quelques heures de repos, la crĂšme Ă©tant moins dense que le lait pur, ce qui restera aprĂšs l'Ă©crĂ©mage aura une densitĂ© plus grande que le lait pur ; mais en remplaçant la crĂšme enlevĂ©e par une quantitĂ© convenable d'eau, on rendra au lait sa densitĂ© primitive, et l'arĂ©omĂštre sera encore impuissant pour dĂ©celer la fraude. Il est donc certain que les instruments qui nous donnent la densitĂ© du lait ne suffisent pas pour nous indiquer son degrĂ© de puretĂ©. Ce n'est pas Ă  dire pour cela qu'ils doivent ĂȘtre abandonnĂ©s la densitĂ© est par elle-mĂȘme un renseignement utile; mais on ne doit alors se servir que d'instruments graduĂ©s avec soin, et ne pas nĂ©gliger de dĂ©terminer, en mĂȘme temps que la densitĂ©, la tempĂ©rature du liquide pour faire la correction indiquĂ©e dans les tables construites Ă  cet effet par M. QuĂ©venne. Nous pourrions dire la mĂȘme chose du lactoscope et du crĂ©momĂštre l'un sert Ă  mesurer l'opacitĂ© du lait, et l'autre fait connaĂźtre la quantitĂ© relative de crĂšme qui monte Ă  sa surface au bout de 24 heures. Ces instruments ne mesurant encore qu'une des propriĂ©tĂ©s du lait, on pourra rendre leurs indications vaines, par l'addition d'un mĂ©lange d'eau et de matiĂšres qui lui donneraient de l'opacitĂ©, ou qui, par le repos, iraient se mĂȘler Ă  la crĂšme et en augmenteraient le volume. Il faut donc se mĂ©fier de ces procĂ©dĂ©s empiriques, d'autant moins exacts qu'ils 134 NOTE SUR L'ANALYSE DU LAIT FALSIFIÉ. sont plus simples, et se faire, avant de les employer, une juste idĂ©e de ce qu'on peut leur demander. L'analyse chimique seule conduit Ă  des conclusions prĂ©cises; ce n'est, en effet, que par la dĂ©composition du lait suspect en ses principes immĂ©diats qu'on peut acquĂ©rir une connaissance exacte de sa nature. On a proposĂ© plusieurs moyens d'analyser le lait; voici, en quelques mots, celui qui est le plus gĂ©nĂ©ralement suivi On fait Ă©vaporer dans une Ă©tuve ou au bain-marie, Ă  la tempĂ©rature de 110°, un poids dĂ©terminĂ© de lait; le rĂ©sidu bien dessĂ©chĂ© est pesĂ©, son poids doit ĂȘtre de 12 Ă  14 pour cent delait. La perte reprĂ©sente la quantitĂ© d'eau. La matiĂšre sĂšche est Ă©puisĂ©e par l'Ă©ther ; celui-ci dissout le beurre, dont le poids se dĂ©termine par l'Ă©vaporation de la dissolution Ă©thĂ©rĂ©e. Le rĂ©sidu du traitement prĂ©cĂ©dent est Ă©puisĂ© par l'eau chaude; la perte de poids qu'il Ă©prouve donne le poids du sucre et des sels solubles 1; enfin, ce qui reste aprĂšs ces . divers traitements donne le poids de la casĂ©ine, de l'albuminĂ© et des sels insolubles. C'est d'aprĂšs cette mĂ©thode qu'ont Ă©tĂ© obtenus les rĂ©sultats inscrits dans le tableau suivant 1 On dose gĂ©nĂ©ralement le sucre et les sels solubles en mĂȘme temps on pourrait dĂ©terminer le poids du sucre seul ; mais cette recherche, qui aurait de l'importance dans des Ă©tudes spĂ©ciales sur la composition du lait, n'en a pas dans te question qui nous occupe ici. NOTE SUR L'ANALYSE DU LAIT FALSIFIÉ. 135 TABLEAU DE DIVERSES ANALYSES DU LAIT DE VACHE. NOMS DES CHIMISTES. Eau .87,2 86,8 87,4 87,0 87,3 85,6 86,3 85,8 87,6 BeurrĂ© 5,4 3,6 4,5 3,1 3,0 3,9 4,4 3,8 3,2 Sucres et Sels solubles. . 5,8 4,0 5,0 5,4 4,6 3,5 5,5 3,6 4,3 CasĂ©ine, Albumine et Sels 4,20 insolubles 3, 6 5, 6 3, 6 4, 5 5, 1 7,0 3, 8 6, 8 sels 0,70 Lait 100 100 100 100 100 100 100 100 100 En opĂ©rant avec le lait suspect, comme il a Ă©tĂ© dit plus haut, et en comparant les principes qu'on en extrait Ă  ceux que fournit le lait pur, on ne peut manquer d'y dĂ©couvrir les substances Ă©trangĂšres qui auraient Ă©tĂ© ajoutĂ©es; et, si le lait suspect a Ă©tĂ© allongĂ© d'eau ou Ă©crĂ©mĂ©, il y aura un dĂ©saccord entre les proportions de ses principes immĂ©diats et les proportions dans lesquelles se rencontrent ces mĂȘmes principes dans le lait pur. La question revient alors Ă  dĂ©duire de ce dĂ©saccord le genre de falsification, c'est-Ă -dire Ă  rĂ©soudre les trois questions suivantes Le lait suspect est-il Ă©crĂ©mĂ©? Est-il seulement allongĂ© d'eau? A-t-il Ă©tĂ© Ă©crĂ©mĂ© et allongĂ© d'eau 1 ? 1 C'est sur ce point que les chimistes qui ne sont pas ha- 136 NOTE SUR L'ANALYSE DU LAIT FALSIFIÉ. Pour arriver Ă  la solution de ces questions, voyons de quelle maniĂšre on modifie les proportions dans lesquelles sont mĂȘlĂ©s les principes du lait pur, soit qu'on y ajoute de l'eau, soit qu'on l'Ă©crĂ©me. Le lait, abandonnĂ© pendant vingt-quatre heures dans un endroit frais, se divise en deux couches la couche supĂ©rieure, qui est la crĂšme, contient la presque totalitĂ© du beurre et une grande partie de la casĂ©ine ; le sucre et l'eau forment une dissolution sucrĂ©e dont une partie est mĂȘlĂ©e Ă  la crĂšme, et dont l'autre constitue, avec le reste de la casĂ©ine et l'albumine, la couche infĂ©rieure. Il en rĂ©sulte que, dans le lait Ă©crĂ©mĂ©, le beurre et la casĂ©ine n'entrent que pour une trĂšs-faible part, tandis que l'eau et le sucre y sont dans une plus grande proportion que dans le lait pur 1. Or, en examinant le tableau qui prĂ©cĂšde, on remarque que le poids du beurre n'est jamais infĂ©rieur Ă  3 pour 100, et que celui du sucre et des sels insolubles n'est jamais supĂ©rieur Ă  5,8; en forçant ce dernier nombre, nous pouvons dire que le rapport du poids du beurre Ă  celui du sucre est plus petit que celui de 3 Ă  6 ou de 1 Ă  2; en d'autres termes, le poids du beurre n'est jamais au-dessous de la moitiĂ© de celui du sucre et des sels solubles. Donc, si on trouve par l'analyse du lait suspect un poids de beurre moindre que la moitiĂ© de celui du bituĂ©s aux discussions mathĂ©matiques se trouvent arrĂȘtĂ©s; les ouvrages qui traitent de l'analyse du lait n'indiquant aucun moyen de dĂ©duire de la composition du lait suspect le genre de falsification. 1 Le rapport du poids de l'eau Ă  celui du sucre restant le mĂȘme que dans le lait pur. NOTE SUR L'ANALYSE DU LAIT FALSIFIÉ. 137 sucre et des sels solubles, on en concluera, avec certitude, que le lait suspect provient d'un lait Ă©crĂ©mĂ©. On remarque encore, en examinant le tableau, que le poids de l'eau n'est jamais supĂ©rieur Ă  88 pour 100 puisque, dans les rĂ©sultats fournis par les analyses que nous citons, il n'atteint pas ce nombre, et que le poids du sucre et des sels solubles n'est jamais infĂ©rieur Ă  3,5. Or, le rapport de 88 Ă  3,5 est environ Ă©gal Ă  celui des nombres 23 et 1 ; donc le poids de l'eau n'est jamais plus de 23 fois celui du sucre et des sels solubles dans le lait pur ou dans le lait Ă©crĂ©mĂ©. On concluera donc qu'il y a eu addition d'eau, si, en comparant le poids de l'eau et le poids du sucre du lait suspect, on trouve que le premier surpasse 23 fois le second. Ces considĂ©rations permettent donc de reconnaĂźtre si le lait soumis Ă  l'analyse est falsifiĂ©, et de quelle nature est la falsification. Les consĂ©quences qu'on en tire peuvent ĂȘtre contrĂŽlĂ©es par le pĂšse-lait, qui donnera une densitĂ© forte pour le lait Ă©crĂ©mĂ©, faible pour le lait non Ă©crĂ©mĂ© et allongĂ© d'eau, et peu diffĂ©rente de celle du lait pur pour le lait Ă©crĂ©mĂ© et allongĂ© d'eau. Lorsque la falsification ne consiste que dans une addition d'eau et c'est le cas le plus frĂ©quent, on peut Ă©valuer, avec une approximation d'un dixiĂšme environ, quelle est la quantitĂ© d'eau ajoutĂ©e. On y arrive en effectuant les opĂ©rations indiquĂ©es par les formules suivantes 100 x p. Poids du lait pur = - 13,59 Poids de l'eau ajoutĂ©e = 100 — poids du lait pur trouvĂ©. T. XXII. 10 138 NOTE SUR L'ANALYSE DU LAIT FALSIFIÉ. Dans ces formules, p est le poids de matiĂšre sĂšche que donne l'Ă©vaporation de 100 grammes du lait suspect. Tel est le procĂ©dĂ© qui prĂ©sente le plus de certitude dans la recherche des falsifications du lait; il exige malheureusement un temps assez long, ce qui le rend inapplicable par les agents de l'autoritĂ© chargĂ©s de prĂ©venir la fraude. Troyes, le 21 mai 1858. MAUDIT NOVEMBRE. BOUTADE, PAR M. LE BARON DOYEN, MEMBRE RÉSIDANT. Savez-vous quel mois dans l'annĂ©e Me rend triste, et souvent rĂȘveur? C'est le mois oĂč chaque journĂ©e Emporte une feuille, une fleur ; Celui qui de leur chevelure Aime Ă  dĂ©couronner les bois, L'ennemi de toute verdure ; C'est Novembre ; oh! le vilain mois. I. XXII. 140 MAUDIT NOVEMBRE. Mes fleurs Ă©taient fraĂźches et belles, Et, de tous mes yeux, le matin, J'admirais des couleurs nouvelles NaĂźtre sous un pinceau divin. Pauvre rose, oĂč t'entraĂźne Eole, Toi, la perle de mon éçrin? Oh ! le vilain mois, qui me vole La parure de mon jardin. Et vous, gĂ©ants au noir feuillage, Grands arbres si beaux et si frais, Qu'avez-vous fait de cet ombrage, OĂč le soleil n'entra jamais ? OĂč donc est la verte coupole Que je trouvais sur mon chemin? Oh! le vilain mois, qui me vole Tous les abris de mon jardin. Je n'entends plus dans mes allĂ©es Tous ces harmonieux dĂ©fis, Que se jetaient des voix ailĂ©es, Comme un Ă©cho du paradis. Plus de ces chants dont je raffole, Avec la bise ils ont pris fin; Oh ! le vilain mois, qui me vole Tous les concerts de mon jardin. MAUDIT NOVEMBRE. 141 Pauvres familles voyageuses, Allez sous des climats plus doux, RĂ©chauffer vos plumes frileuses, Mais revenez au rendez-vous. Il ne vous faut pas de boussole Pour retrouver votre chemin ; Oh! le vilain mois, qui me vole Tous les hĂŽtes de mon jardin. Va-t-en, mois maudit, va-t-en vite, Ton rĂšgne a durĂ© trop longtemps, Et surtout emmĂšne Ă  ta suite La neige, la pluie et les vents. Je crois au printemps qui console, Avril me rendra ton butin ; Oh ! le vilain mois, qui me vole Tous les trĂ©sors de mon jardin. Novembre 1858. MOLLUSQUES MARINS DES ILES AÇORES, PAR HENRI DROUET, Membre rĂ©sidant. PRÉAMBULE. Des quatre groupes d'Ăźles qui se trouvent dans l'OcĂ©an Atlantique au nord de PĂ©quateur, Ă  une distance plus ou moins grande des cĂŽtes d'Afrique et d'Europe, les Açores et les Ăźles du Cap-Vert paraissent avoir Ă©tĂ© jusqu'ici nĂ©gligĂ©es par les malacologistes. Bowdich, Lowe et Albers ont, Ă  diffĂ©rentes Ă©poques, explorĂ© les Ăźles de MadĂšre et de Porto-Santo, et ils ont donnĂ© dans diverses publications le rĂ©sultat de leurs recherches en ce qui concerne les mollusques 144 MOLLUSQUES MARINS terrestres. On connaĂźt peu les espĂšces marines de ces parages. En second lieu, Webb et Berthelot ont Ă©tudiĂ© les mollusques des Canaries ; et M. d'Orbigny, rĂ©unissant les matĂ©riaux rapportĂ©s par ces deux naturalistes et ceux qu'il avait lui-mĂȘme amassĂ©s, a publiĂ© un fort beau travail d'ensemble sur la conchyliologie marine et terrestre de cet archipel. Depuis, Blauner paraĂźt avoir explorĂ© de nouveau ce groupe, et le rĂ©sultat de ses recherches a Ă©tĂ© mis au jour par M. Shutlleworth. Seules, les Açores et les Ăźles du Cap-Vert n'ont encore Ă©tĂ© l'objet d'aucune publication spĂ©ciale; et pourtant ce sont peut-ĂȘtre les deux groupes les plus importants de cette partie du globe. Les Açores, qui appartiennent au Portugal, se composent de neuf Ăźles ainsi nommĂ©es San-MigĂčĂšl, Santa-Maria, Terceira, San-Jorge, Pico, Fayal, Graciosa, FlorĂšs, Corvo ; elles sont comprises entre 39° 45' et 36° 50' de latitude Nord, et entre 27° et 33° 40' de longitude Ouest. Pendant le printemps et l'Ă©tĂ© de l'annĂ©e qui vient de s'Ă©couler, j'ai explorĂ© ces Ăźles avec M. Arthur MĂŽrelet, de Dijon, et durant les cinq mois de mon sĂ©jour dans cet archipel oĂč bien peu de naturalistes ont encore pĂ©nĂ©trĂ©, j'ai recueilli les mollusques terrestres, les mollusques marins, les vertĂ©brĂ©s, les insectes colĂ©optĂšres, les zoophytes, les plantes et les roches. Mon savant compagnon de voyage devant publier bientĂŽt une histoire des mollusques terrestres que nous avons observĂ©s il n'y a pas une seule coquille fluviatile aux Açores, je laisserai en- DES ILES AÇORES. 145 tiĂšrement de cĂŽtĂ© cette partie de mon exploration, pour ne m'occuper ici que des mollusques marins. Les conchyliologues remarqueront sans doute une certaine analogie entre la faune des Açores et celles de la Corse, de la Sicile, du golfe de Naples, et il leur suffira, pour apprĂ©cier ces rapports, d'ouvrir les catalogues de Payraudeau, de Requien, de Philippi, de Maravigna et de Scacchi. Il sera facile Ă©galement de se convaincre que la plupart des espĂšces mentionnĂ©es dans notre opuscule se retrouvent soit dans la MĂ©diterranĂ©e, soit aux Ăźles Canaries, soit enfin dans a mer des Antilles, fait que la position des Açores, intermĂ©diaire entre ces diffĂ©rents points, explique parfaitement. D'un autre cĂŽtĂ©, on sera surpris peut-ĂȘtre de trouver cette faune moins riche que celles des rĂ©gions que je viens de citer, moins riche aussi que celles des cĂŽtes du midi de la France, de la Sardaigne, du golfe Adriatique,et de plusieurs autres contrĂ©es analogues par leur constitution gĂ©ologique et leur latitude. SpĂ©cialement, elle est plus restreinte que celle,des Ăźles Canaries, oĂč l'on trouve, selon M. d'Orbigny, 196 espĂšces de mollusques, dont 139 marines et 57 terrestres ou fluviatiles, tandis que notre catalogue ne comprend que 75 espĂšces marines, dont cinq, seulement sont nouvelles 1; mais l'archipel canarien, par sa proximitĂ© du tropique et du continent 1 L'ouvrage de M. Morelet comprendra l'indication de 70 espĂšces environ de mollusques terrestres, dont prĂšs de 30 sont inĂ©dites! 146 MOLLUSQUES MARINS africain, se trouve Ă©videmment dans des conditions plus heureuses. En outre, je n'ai observĂ© aucune des espĂšces rares du Portugal, telles que le Fusus contrarius, le Priamus stercus-pulicum, le Donax fragilis, le Panopoea Aldrovandi, et plusieurs autres qui se rencontrent quelquefois sur les cĂŽtes occidentales de la PĂ©ninsule, et que j'avais l'espoir de retrouver dans l'archipel açorĂ©en ; enfin, il n'y a point d'huĂźtre dans ces parages, tandis qu'on en trouve au moins deux ou trois sur les cĂŽtes de Portugal, et deux aussi aux Canaries les Ostrea cochlear et crista-galli. A quoi donc attribuer le peu de dĂ©veloppement de la vie malacologique s'il est permis de s'exprimer ainsi dans l'ocĂ©an qui baigne des rivages enveloppĂ©s par un ciel si doux ?... Est-ce Ă  la nature des roches, qui sont toutes basaltiques et trachytiques, ou bien Ă  la profondeur Ă©norme de la mer le long des cĂŽtes, ou bien Ă  la conformation mĂȘme de ces cĂŽtes, qui sont accores, presque toujours Ă  pic et sans plage, ou bien encore, et surtout, Ă  la violence continuelle des vagues qui battent sans cesse les rivages avec une fureur extrĂȘme ?... Sont-ce toutes ces causes rĂ©unies qui produisent ce rĂ©sultat?... Je ne saurais me prononcer ; mais je ne puis mieux comparer la raretĂ© de la vie animale sur les cĂŽtes de cet archipel qu'Ă  celle reprochĂ©e, par M. de Quatrefages, Ă  certains points de la Sicile 1. J'ai quelquefois parcouru plusieurs lieues de cĂŽte et des plages d'une 1 Souvenirs d'un naturaliste. Paris, 1854; 2 vol. in-18; passim. DES ILES AÇORES. 147 certaine Ă©tendue sans voir une seule coquille, soit vivante, sur les rochers, soit morte, sur le sable, apportĂ©e par les flots. Cependant la tempĂ©rature de la mer est extrĂȘmement douce et Ă©gale dans ces parages, et elle est encore entretenue dans cet Ă©tat par le passage du Gulf-stream, dont la prĂ©sence a Ă©tĂ© signalĂ©e au nord et Ă  l'ouest de l'archipel 1. J'avais d'abord pensĂ© au manque de vĂ©gĂ©tation sous-marine comme pouvant ĂȘtre une des causes de la raretĂ© des mollusques dans ces localitĂ©s. Mais j'ai bien vite abandonnĂ© cette idĂ©e quand j'ai songĂ© aux masses Ă©normes de Fucus dont on a constatĂ© l'existence dans ces mers au point de les faire nommer mar de Sargasso!, et quand j'ai pu vĂ©rifier moimĂȘme ce fait autour des Ăźles de FlorĂšs et de Corvo, oĂč la mer est littĂ©ralement couverte d'algues Ă  certaines Ă©poques de l'annĂ©e 2. Peut-ĂȘtre aurais-je fait une moisson plus abondante si j'avais pu mettre Ă  profit la rencontre que je fis de 1 Voyez de Humboldt, Voyage aux rĂ©gions Ă©quinoxiales du Nouveau Continent; Tableaux de la Nature, etc. — J'ai recueilli, sur les cĂŽtes de FlorĂšs, des graines de Mimosa scandens charriĂ©es par ce courant depuis l'AmĂ©rique tropicale. 2 Les AçorĂ©ens donnent le nom de Sargasso Ă  plusieurs plantes marines de la famille des Algues et de l'ordre des Fucus, particuliĂšrement aux Sargassum vulgare Ag., bacciferum Ag. et stenophyllum Mart. Dans les parages de FlorĂšs et de Corvo, la mer est quelquefois couverte d'une telle quantitĂ© de ces Fucus, que les insulaires l'ont appelĂ©e mer de Sargasso mar de Sargasso; c'est ce que les anciens navigateurs espagnols nommaient des prairies praderias de yerva. Cest avec ces plantes, de petits coquillages et des fragments de polypiers que les jeunes 148 MOLLUSQUES MARINS ces prairies de la mer, comme les appellent les anciens auteurs espagnols, et si j'avais pu porter mes investigations a une certaine profondeur. Malheureusement, les circonstances ne m'ont pas servi pour tout cela, et mes recherches ne se sont guĂšre Ă©tendues qu'aux espĂšces qui habitent le littoral. Je me suis adressĂ© aux pĂȘcheurs, qui sont nombreux, notamment dans les Ăźles de San-Miguel et de Pico ; mais leur concours a Ă©tĂ©, je puis le dire, on ne peut pas plus faible, ils ne comprenaient pas qu'on pĂ»t venir de si loin pour ramasser de semblables choses, et je n'ai jamais pu les dĂ©cider, ni pour or ni pour argent, Ă  me rendre, sous ce rapport, de vĂ©ritables services. Ils n'aiment pas, d'ailleurs, Ă  rien changer Ă  leurs habitudes. C'est un pĂȘcheur de Pico qui, me voyant dĂ©ployer une certaine ardeur Ă  la recherche des petits mollusques terrestres, dit un jour confidentiellement Ă  mon muletier C'est bien dommage, mais ce seigneur français est pris de lĂ  ! » et en disant ces mots, il se touchait le front d'une maniĂšre trĂšs-significative. Au reste, il faut bien le reconnaĂźtre, pour Ă©tudier convenablement la conchyliologie marine, il est indispensable d'habiter longtemps une contrĂ©e. Ce n'est pas au bout de quelques mois de sĂ©jour et de recherches plus ou moins suivies, qu'on peut se flatter de connaĂźtre la faune d'une rĂ©gion un peu Ă©tenfilles Ă©tenfilles Fayal lesquelles, pour le dire en passant, sont avec celles de San-Miguel les plus industrieuses et les plus adroites de l'archipel composent, avec infiniment de goĂ»t et d'habiletĂ©, des groupes trĂšs-remarquables par l'heureuse combinaison des couleurs et la dĂ©licatesse des matĂ©riaux. DES ILES AÇORES. 149 due, surtout d'un archipel. L'on pourra signaler les espĂšces vulgaires et sĂ©dentaires, mais combien d'espĂšces rares ou voyageuses vous auront Ă©chappĂ© ! Il est donc nĂ©cessaire de ne considĂ©rer ce catalogue que comme un premier essai, un premier jalon plantĂ© sur la route, indiquant les mollusques marins les plus communs des Açores, et je ne serais point Ă©tonnĂ© si le nombre en Ă©tait un jour doublĂ©. D'ailleurs, j'aurais pu enrichir ma liste de plusieurs autres espĂšces signalĂ©es dans des rĂ©gions voisines et analogues ; mais je ne l'ai pas voulu faire, me bornant Ă  indiquer ce que j'ai moi-mĂȘme observĂ©. Quoiqu'il en soit, il est Ă  remarquer que certaines espĂšces prĂ©dominent dans ces parages, et reparaissent frĂ©quemment sur les cĂŽtes au prĂ©judice ou Ă  l'exclusion de toutes autres. Elles y sont presque toujours rĂ©unies par groupes assez nombreux, et depuis longtemps dĂ©jĂ  les indigĂšnes ont tirĂ© parti de ces-espĂšces sĂ©dentaires, dont la prise de possession des localitĂ©s est parfaitement assise et assurĂ©e, au point de vue de l'alimentation. Telles sont, par exemple, le Patella crenata et les autres espĂšces du genre, qui peuvent ĂȘtre regardĂ©es comme les mollusques essentiellement prĂ©dominants sur les cĂŽtes açorĂ©ennes ! , le Balanus tintinnabulum, le Purpura hoemastoma, le Littorina striata, toutes Ă©dules, et trĂšs-abondantes sur presque toutes les cĂŽtes de l'archipel ; telles sont encore l' Anatifa loevis et les Haliotis, non moins rĂ©pandues que les prĂ©cĂ©dentes ; et enfin, les Pecten pusio, Cardium fasciatum et Columbella rustica, qui pullulent Ă©galement sur le littoral de plusieurs Ăźles. D'-autres, au contraire, sont fort rares et ne se rencontrent pour ainsi dire qu'accidentellement, 150 MOLLUSQUES MARINS amenĂ©es de lointains rivages par les courants, ou soulevĂ©es des profondeurs de l'OcĂ©an par la tempĂȘte. Tel est le cas, par exemple, du Carinaria fragilis, dont on ne connaĂźt guĂšre qu'une capture ou deux prĂšs de l'archipel, du Janthina exigua, du Solarium luteum, du Nassa Deshayesii, des Litiopa nitidula et Gratelupeana, du Solen marginatus, et de quelques autres encore, qui ne sont que de passage ou accidentelles, si l'on peut s'exprimer ainsi. Cependant, de la raretĂ© des mollusques en gĂ©nĂ©ral, il ne faudrait pas conclure Ă  la complĂšte extinction de la vie animale dans la mer des Açores et sur ces cĂŽtes Ă©minemment volcaniques, trop souvent Ă©prouvĂ©es par des tremblements de terre. C'est ainsi que l'on rencontre frĂ©quemment dans ces parages plusieurs grands mammifĂšres de l'ordre des CĂ©tacĂ©s, notamment le Catodon macrocephalus ou cachalot, qui fait l'objet d'une pĂȘche active et Ă©tendue de la part des baleiniers amĂ©ricains, le Phocoena communis marsouin qui est abondant, et d'autres espĂšces des genres Delphinus, Physeter et Baloenoptera. Une centaine environ de bĂ timents croisent annuellement dans la mer des Açores pendant la belle saison, c'est-Ă  dire depuis le mois d'avril jusqu'en novembre, et se livrent exclusivement Ă  cette pĂȘche, ou plutĂŽt Ă  ce genre de chasse, qui a ses dangers. L'on pĂȘche souvent, et l'on mange une tortue d'assez forte taille et de grands crustacĂ©s correspondant Ă  nos homards et Ă  nos langoustes. Les poissons sont nombreux en espĂšces et extrĂȘmement abondants en individus. C'est la base de la nourriture de toutes les classes, riches et pauvres, et la profession de pĂȘcheur est, entre toutes, celle qui DES ILES AÇORES. 151 compte le plus de reprĂ©sentants. Chaque matin, des centaines de barques s'Ă©loignent de la cĂŽte et vont demander aux innombrables phalanges qui sillonnent l'OcĂ©an un pain quotidien. Quelquefois la pĂȘche a lieu pendant la nuit, surtout pour les tortues, les langoustes et les homards, et plus d'une fois j'ai vu les cĂŽtes Ă©clairĂ©es, de distance en distance, par des feux dont la signification m'Ă©tait d'abord inconnue, mais que le navigateur voit toujours avec plaisir. — Il n'est pas un voyageur, dit M. Berthelot, qui, en traversant l'Atlantique, n'ait observĂ© comme moi ces brillantes coryphĂšnes et les bonites lĂ©gĂšres qui se jouent dans le remou, les poissons pilotes qui s'attachent au vaisseau et se plaisent dans son Ă©cume, les lĂ©gions de thons, dont la pĂȘche providentielle fait la joie de l'Ă©quipage, et ces dauphins navigateurs que le marin signale de loin comme un heureux prĂ©sage avant-coureurs d'un vent frais, ils arrivent du bout de l'horizon, bondissent sur la lame comme pour saluer le navire, plongent sous sa quille, le croisent dans sa marche, s'Ă©loignent et reviennent dans un clin-d'oeil pour recommencer vingt fois leurs Ă©volutions. Et le terrible requin, aux sinistres traditions, toujours de l'arriĂšre, prĂȘt Ă  engloutir ce que la fatalitĂ©, le hasard ou la ruse viendront offrir Ă  sa voracitĂ© 1. » — Ces poissons paraissent appartenir plus particuliĂšrement aux genres Zeus, Mugil, Thynnus, Zigoena, Xiphias, Serranus, Scomber, Caranx, Sparus, Boops, etc. Je me souviens d'en 1 De la PĂȘche sur la cĂŽte occidentale d'Afrique, par Sabin Berthelot. Paris, 1840; in-8°, page 57. 152 MOLLUSQUES MARINS avoir vu sur les marchĂ©s qui ressemblaient,; pour la forme, Ă  de grands serpents marbrĂ©s de noir et de jaune. Les polypes et les coraux paraissent aussi assez rĂ©pandus, surtout autour de San-Miguel, de Fayal et de Pico. Hien de plus Ă©lĂ©gant que le Gorgonia verrucosaet plusieurs autres espĂšces coralligĂšnes qui Ă©tendent leurs rameaux tantĂŽt flexibles, tantĂŽt rigides, comme des palmes dĂ©licates ou comme des fleurs pĂ©trifiĂ©es. On rencontre encore assez communĂ©ment plusieurs Ă©chinides et stellĂ©rides, notamment les Echinus brevispinosus et lividus, dont les baigneurs redoutent les pointes acĂ©rĂ©es, et les Asterias glacialis et loevigata vulgairement Ă©toiles de mer, dont les formes insolites causent un certain effroi Ă  l'ignorance et Ă  la crĂ©dulitĂ©. Enfin la mer est souvent parsemĂ©e, sur des espaces considĂ©rables, d'acalĂšphes de toutes les couleurs, surtout de MĂ©duses jaunĂątres et de BĂ©roĂ©s. La gĂ©ographie zoologique est une science d'une haute importance et d'un intĂ©rĂȘt majeur elle indique la sphĂšre d'activitĂ© de chaque espĂšce animale, et circonscrit les limites qui lui sont propres. C'est une des branches principales de la philosophie de l'histoire naturelle, et son perfectionnement se poursuit, de nos jours, avec une louable ardeur. Tel est le but que se sont proposĂ© tous les auteurs de catalogues locaux travail ingrat et aride!; tel est celui que je me propose encore aujourd'hui en publiant DES ILES AÇORES. 153 le Catalogue des Mollusques marins des Ăźles Açores, pour lequel j'ai adoptĂ© la classification proposĂ©e dans le Genera de Sander Rang. Je dois une mention spĂ©ciale Ă  M. ERNEST DO CANTO, de San-Miguel, pour l'obligeance avec laquelle il m'a secondĂ© dans mes recherches et fait part de ses propres dĂ©couvertes je la lui donne avec le sentiment d'une amitiĂ© sincĂšre et le plaisir de la reconnaissance. Le savant M. DESHAYES, de Paris, a bien voulu se charger du soin de rĂ©viser et de nommer la plupart de mes espĂšces je saisis avec empressement cette occasion de publiquement ma gratitude, et je suis heureux de pouvoir m'appuyer sur l'autoritĂ© de son nom et de son talent, comme la garantie la plus sĂ»re de l'exactitude des dĂ©terminations spĂ©cifiques inscrites dans cet opuscule. Arcis-sur-Aube, aoĂ»t 1858. 154 MOLLUSQUES MARINS PRINCIPAUX OUVRAGES CONSULTÉS AUTEURS CITÉS. ADANSON. Histoire naturelle du SĂ©nĂ©gal. Coquillages. Paris, 1757; in-4° avec planches. LIMNÉ. Systema naturx. Ed. XII. Holmiae, 1766-1767; 3 vol. in-8°. GMELIN. Systema naturae. Ed. XIII Leipsig, 4788-4790; 10 vol. in-8°. BRUGUIERE. Histoire naturelle des Vers. EncyclopĂ©die mĂ©thodique, tome VI. Paris, 4789-1792; in-4° av. pl. MONTAGU. Testacea Britannica. London, 1803; 2 vol. in4° av. pl. BROCCHI. Conchyliologia fossile subapennina. Milan, 4844 ; 2 vol. in-4°. LAMARCK. Histoire naturelle des Animaux sans vertĂšbres. Paris, 1843-4822 ; 7 vol. in-8°. FÉRUSSAC. Tableaux systĂ©matiques des Animaux mollusques. Paris 4824; in-40. TURTON. Conchylia insularum Britannicarum. Exeter, 4822; in-4°av. pl. PAYHAUDEAU. Catalogue descriptif et mĂ©thodique des AnnĂ©lides et des Mollusques de l'Ăźle de Corse. Paris, 4 826 ; in-8° av. pl. DES ILES AÇORES 155 Risso. Histoire naturelle des principales productions de l'Europe mĂ©ridionale. Paris, 4826; 5 vol. in-8° av. pl. RANG. Manuel de l'histoire naturelle des Mollusques. Paris, 4829; in-48. A. D'ORBIGNY. Mollusques, Echinodermes, ForaminifĂšres et Polypiers, recueillis aux Ăźles Canaries par MM. Webb et Berthelot. Paris, 4839 ; in-4° av. pi. In Webb et Berthelot, Histoire naturelle des Ăźles Canaries. REEVE. Conchologia iconica. London, 4843-4858; in-4° av. pl. DUNKER. Index molluscorum quse in itinere ad Guineam inferiorem collegit Georgius Tams. Cassel, 4853; in-4° av. pl. A. D'ORBIGNY. Mollusques vivants et fossiles. Paris, 4855 ; in-8°. Volume contenant la Monographie des CĂ©phalopodes acĂ©tĂ bulifĂ©res. T. XXII. 12 156 MOLLUSQUES MARINS CÉPHALOPODES. Genre ARGONAUTE, ARGONAUTA Lam. t. Argonatrta Argo Lin. Cette belle espĂšce, rĂ©pandue dans les collections, et connue vulgairement sous le nom de Nautile papyracĂ©, se rencontre de temps Ă  autre aux Açores, surtout dans les parages de Fayal et de Pico. J'en ai vu de trĂšs-grands exemplaires chez M. Dabney, Ă  Fayal, ainsi que de charmants polypiers. L'Argonaute est un des plus beaux animaux marins que l'on puisse observer. Sans parler de la coquille, qui est l'Ă©lĂ©gance mĂȘme, l'animal est blanc dans toutes ses parties, mais ornĂ© de fines mouchetures et pointillures des couleurs les plus vives et les plus agrĂ©ables. Il y en a de rouges, de brunes, de violettes, lie-de-vin, argent, or, bleues, et plusieurs autres nuances ; le tout disposĂ© avec art, suivant les diverses parties du corps. L'exemplaire que j'ai rapportĂ© a Ă©tĂ© capturĂ© prĂšs d'Horta, et il vivait encore quand je le reçus Ă  Pico. En dĂ©tachant l'animal que je dĂ©sirais conserver dans l'alcool de sa fragile enveloppe, je trouvai dans celle-ci une masse d'oeufs, petits, ovalaires, d'un blanc un peu laiteux. Certains tests mesurent jusqu'Ă  2 dĂ©cimĂštres de grand diamĂštre. DES ILES AÇORES. 157 Genre POULPE, OCTOPUS Lam. 2. Octopus vulgaris LAM. Grande et belle espĂšce, d'un gris violet, marbrĂ©e de,taches de rouille foncĂ©es. Hauteur 5 dĂ©cimĂštres, et mĂȘme plus. Habite en abondance les cĂŽtes de San-Miguel; Ă©dule pour le bas peuple. Les pĂȘcheurs m'ont dit que ce mollusque rĂ©pandait une lumiĂšre phosphorescente pendant la nuit, mais je n'ai pu m'assurer du fait. Observation. J'ai tout lieu de croire que ce n'est pas lĂ  la seule espĂšce du genre Octopus ou mĂȘme des genres voisins qui se trouve aux Açores. On m'en a signalĂ© une autre plus petite et d'une couleur diffĂ©rente, que je n'ai pu rĂ©ussir Ă  me procurer. Je suppose que c'est l'Octopus Cuvieri d'Orb. qu'on rencontre Ă©galement sur les cĂŽtes des Ăźles Canaries. Genre ONYCHOTEUTHIS, ONYCHOTEUTHIS Licht. 3. Onychoteuthis cardioptera PÉR. LOLIGO. M. d'Orbigny Mollusques des Ăźles Canaries, 1839, p. 25 dĂ©signe ce CĂ©phalopode comme se trouvant dans les parages des Açores, principalement dans les bancs de sargasso ; je l'indique sur la foi de cet auteur. 158 MOLLUSQUES MARINS Genre CALMAR, LOLIGO Lam. 4. Loligo vulgarle LAM. EspĂšce trĂšs-connue, commune dans l'OcĂ©an Atlantique. Les pĂȘcheurs de San-Miguel la capturent frĂ©quemment je l'ai vue sur le marchĂ© Ă  Porita-Delgada, avec l' Octopus vulgaris. Genre SEICHE, SEPIA Lin. 5. Septa officinulis LIN. Avec la prĂ©cĂ©dente cĂŽtes de San-Miguel et de Pico. Genre SPIRULE, SPIRULA Lam. 6. Spirula Peronli Lui. Quelques rares exemplaires ont Ă©tĂ© recueillis dans la petite baie de Rosto-de-CĂąo, Ă  San-Miguel, par M. Ernesto do Canto. La prĂ©sence de cette espĂšce, sous cette latitude, est un fait intĂ©ressant. Lamarck ne l'avait signalĂ©e que comme appartenant aux mers australes et Ă  l'OcĂ©an des Moluques. Depuis, d'Orbigny l'a rencontrĂ©e en grande abondance aux Canaries, Ă  SantaCruz-de-TĂ©nĂ©riffe Mollusques des Canaries, 4839, p. 24 et 25, et elle. est indiquĂ©e par Dunker Index moll. ilin. ad Guineam, 1853, p. 1, comme ayant Ă©tĂ© recueillie dans le voisinage de l'Ăźle Saint-Vincent. DES ÎLES AÇORES. 159 Suivant d'Orbigny Moll. viv. et foss. 1855, p. 316, cette coquille serait mĂȘme jetĂ©e quelquefois sur les cĂŽtes d'Europe par les vents et les courants. C'est ainsi que, de jour en jour, l'arĂ©a des espĂšces tend Ă  s'agrandir et prend une extension nouvelle. MÉTÉROPODES. Genre CARINAIRE, CARINARIA Lam. 7. Carinarla fragilis LAM. J'ai vu, chez M. Dabney, un exemplaire de cette rare et curieuse espĂšce. Il avait Ă©tĂ© capturĂ© dans la mer des Açores. non loin de l'Ăźle de Fayal. C'est Ă  peu prĂšs, m'a ton dit, la seule rencontre qui en ait Ă©tĂ© faite dans ces parages. Quoique je n'aie pas rapportĂ© cette coquille, et que ce soit de mĂ©moire et d'aprĂšs mes notes que je la dĂ©signe ainsi, je crois pouvoir affirmer que ma dĂ©termination est exacte. GASTEROPODES Genre BULLE, BULLA Lam. 8. Bulla striata BRUG. Habite lĂ©s rivages de Fayal et de Pico. — Me paraĂźt une variĂ©tĂ© chez laquelle les stries caractĂ©ristiques du type sont Ă  peine apparentes. 160 MOLLUSQUES MARINS Genre PIÉTIN, PEDIPES Adans. 9. pedipes afra FÉR. Jolie petite coquille de forme ovoĂŻde, imperforĂ©e, profondĂ©ment et rĂ©guliĂšrement striĂ©e dans le sens de la spire stries espacĂ©es, d'un gris jaunĂątre, terne, solide ; six tours de spire sĂ©parĂ©s par une suture peu sensible, le dernier trĂšs-grand; ouverture grimaçante, munie de quatre Ă  cinq dents ou lames d'un blanc de lait trĂšs-luisantes, savoir deux plis et une lame trĂšs-saillante sur le bord columellaire, et une ou deux dents sur le bord droit, lequel est tranchant quoique lĂ©gĂšrement Ă©paissi. Suivant Adanson Histoire naturelle du SĂ©nĂ©gal; Coquillages; p. 11, pl, 1 ; 1757 qui,, le premier, a fait connaĂźtre le PiĂ©tin et qui l'a trĂšs-bien dĂ©crit et figurĂ©, la grosse lame de la columelle partage le pied de l'animal en deux talons, sĂ©parĂ©s par un large sillon transversal. Ce mollusque habite le creux des rochers au bord de la mer, Ă  Pico, dans la partie occidentale de l'Ăźle. Il peut rester un certain temps hors de l'eau, car les rochers sur lesquels on le rencontre sont tantĂŽt envahis par les vagues et tantĂŽt Ă  dĂ©couvert. Il vit en compagnie de l'Auricula oequalis Lowe 1 que, par parenthĂšse, je suis portĂ© Ă  considĂ©rer comme un mollusque tout aussi marin que le Pedipes afra, et 1 L'Auricula oequalis, ainsi que je viens de le dire, vit avec le Pedipes afra, sur les rochers au bord de la mer, particuliĂšrement prĂšs des sources d'eau saumĂątre. Selon la violence des vagues et les marĂ©es, ces rochers sont tantĂŽt submer- DES ILES AÇORES. 161 se nourrit des algues qui croissent en abondance dans ces localitĂ©s. Genre LITTORINE, LITTORINA FĂ©r. 10. Littorina coerulescens LAM. TURBO. Habite sur les rochers, le plus souvent hors de l'eau, Ă  Santa-Maria et Ă  Pico. Peu abondante. Le Littorina Basterotii, dĂ©crit par Payraudeau, Mollusques de l'Ăźle de Corse, 1826; p. 115, pl. 5, fig. 19-20, paraĂźt n'ĂȘtre qu'une variĂ©tĂ© diffĂ©remment colorĂ©e de cette espĂšce. 11. Littorina striata Kiso. Habite les cĂŽtes de San-Miguel et de Pico, sur les rochers submergĂ©s. TrĂšs-abondante. Les AçorĂ©ens la mangent et l'appellent caramujo. Facile Ă  distinguer de la prĂ©cĂ©dente espĂšce par sa taille beaucoup plus forte et par les cĂŽtes transversales dont sa surface est ornĂ©e. Le bord droit du pĂ©ristĂŽme est lĂ©gĂšrement plissĂ©-ondulĂ©. Genre VERMET, VERMETUS Adans. 12. Vermettut triqueter LIN. SERPULA. Habite fixĂ© sur les , rochers et sur d'autres coquilles plus grosses le Pinna rudis, par exemple, Ă  gĂ©s. tantĂŽt laissĂ©s Ă  dĂ©couvert. Que penser de la place Ă  assigner Ă  un mollusque vivant dans de semblables conditions? Est-il aquatique,' est-il terrestre, ou n'est-il pas plutĂŽt amphibie?....' 162 MOLLUSQUES MARINS San-Miguel. – Deux variĂ©tĂ©s l'une d'un jaune rosĂ©, trĂšs-cĂŽtelĂ©e; l'autre blanchĂątre, moins rugueuse peut-ĂȘtre une autre espĂšce?.... Genre JANTHINE, JANTHINA Lam. 13. janthina communis LAM. Cette Ă©lĂ©gante coquille, violette et blanche, se rencontre; assez frĂ©quemment sur les cĂŽtes, Ă  Pico. Quelquefois on trouve, implantĂ©s sur lĂ  suture du deuxiĂšme tour de spire, de trĂšs-jeunes individus d'Anatifa. L'animal, qui est d'un violet foncĂ©, rĂ©pand, quand on le tourmente, une bave abondante, incolore, assez consistante; et en outre, au bout de quelque temps, une belle teinture violette. Les gens de Pico appellent ces mollusques agda viva eau vive, et ils prĂ©tendent qu'ils s'attachent aux jambes des baigneurs. 14. Janthina exigua LAM. TrĂšs-petite coquille ovale-conoĂŻde, subperforĂ©e, finement et rĂ©guliĂšrement striĂ©e-cĂŽtelĂ©e dans le sens longitudinal ces stries forment angle au milieu du dernier tour de spire, ce qui fait paraĂźtre la coquille comme trĂšs-lĂ©gĂšrement carĂ©nĂ©e, violette et blanchĂątre dans la partie supĂ©rieure du dernier tour, mince et fragile; cinq Ă  six tours de spire convexes, suture assez profonde, dernier tour trĂšs-grand, les deux premiers lisses et brillants, sommet assez aigu; columelle rectiligne, pĂ©ristĂŽme tranchant, sinuĂ©. — Hauteur 5, diamĂštre 4 millimĂštres DES ILES AÇORES. 163 Rare; deux ou trois individus trouvĂ©s Ă  Pico, sur les rochers au bord de la mer, avec le Pedipes afra. J'en ai vu encore quelques exemplaires sur les groupes en sargasso 1 que composent avec tant d'art et d'adresse les jeunes filles de Fayal. Facile Ă  distinguer de la prĂ©cĂ©dente par sa taille beaucoup plus petite et par l'absence des stries transversales. Observation. — Les Janthines sont des mollusques flottants. Je les ai vues souvent dans le voisinage des cĂŽtes tenir leur coquille renversĂ©e comme pour ramper Ă  la surface de la mer, et se laisser aller au grĂ© des vagues, en attendant sans doute la rencontre de quelque plante. Souvent aussi elles deviennent la proie d'animaux supĂ©rieurs en force ou en gloutonnerie. Genre LITIOPE, LITIOPA Rang. 15. Litiopa nitidula PREIFF. Testa ovato-turrita, solidula, loevigata, nitide alba vel flavida, soepe punctorum rubrorum seriebus ornata ; anfractibus sex convexiusculis ; columella torta, truncala; labro subincrassato. — Long. 2 1/2, diam. 1 1\4 lin. Pfeiff. Wiegm. Arch. 1840, I, page 255. Sur le sargasso, Ă  l'ouest et au sud de l'archipel des Açores. Rare. 16. Litiopa Crafelupeana Nos. FigurĂ©e. Testa oblonga, acutissima, lucida, cornea, anfractibus 8-9 sutura superficiali separatis, ultimo maximo, aper1 aper1 le prĂ©ambule, page 147, note en bas de page. 164 MOLLUSQUES MARINS tura obliqua, angusta, marginibus distinctis. — Haut. 5, diam. 2 mill. Habite sur le sargasso, entre FlorĂšs et Corvo; peu abondante. Je dĂ©die cette espĂšce Ă  mon excellent collĂšgue et ami, M. le docteur de Grateloup, de Bordeaux, auteur de plusieurs travaux remarquables sur la conchyliologie. Genre TROQUE, TROCHUS, Lin. 17. Trochus conulus Lin. Habite la cĂŽte mĂ©ridionale, Ă  San-Miguel. Coquille variable dans sa coloration ; le le plus souvent elle est,d'un roux brunĂątre avec des taches bleuĂątres. 18. Trochus erythroleucos GMEL. Coquille petite, conique-aigue, imperforĂ©e, fortement striĂ©e-cĂŽtelĂ©e dans le sens de la spire, avec des pointillures entre les stries, surtout Ă  la rĂ©gion supĂ©rieure, roussĂątre ou rosĂątre, avec de petites flammules jaunes ou blanches; sommet aigu, rougeĂątre; pĂ©ristĂŽme rose.— Hauteur 10, diamĂštre de la base 5 millimĂštres. Habite San-Miguel, particuliĂšrement sur la cĂŽte mĂ©ridionale. 19. Trochus magus LIN. Quelques individus jeunes ont Ă©tĂ© recueillis dans la baie de Rosto-de-CĂąo, Ă  San-Miguel. 20. Trochus En outre des trois espĂšces qui prĂ©cĂšdent, j'ai re- DES ILES AÇORES. 165 cueilli dans le sable, Ă  Pico, un Trochus plus grand et distinct, mais tellement roulĂ© et endommagĂ©, que sa dĂ©termination spĂ©cifique a Ă©tĂ© impossible. Genre CADRAN, SOLARIUM Lam. 21. Solarium luteum LAM. Coquille sous-conoĂŻde, ombiliquĂ©e ombilic ornĂ© de crans blancs, lisse, bicarĂ©nĂ©e, jaunĂątre, avec des taches blanches sur les carĂšnes, plus pĂąle en dessous ; cinq tours de spire convexes; bord columellaire blanc, un peu rĂ©flĂ©chi. — Hauteur 5, diamĂštre 7 1/2 millimĂštres. Habite la cĂŽte mĂ©ridionale de San-Miguel. TrĂšsrare. Genre SCALAIRE, SCALARIA Lam. 22. Scalaria pseudoscalaris Risso. Charmant coquillage Ă  test brun ornĂ© de cĂŽtes blanches, trĂšs-Ă©lĂ©gantes; sommet blanc, trĂšs-aigu; pĂ©ristĂŽme blanc, bordĂ©. — Hauteur 13, diamĂštre grand 6 millimĂštres. Habite lĂšs cĂŽtes de San-Miguel. Genre CÉRITE, CERITHIUM Adam. 23. Cerithium zebrum KIEN. Un exemplaire, roulĂ© et dĂ©colorĂ©, a Ă©tĂ© recueilli dans le sable Ă  Rosto-de-CĂąo, de San-Miguel ; un autre Ă  Magdalena, de Pico. 166 MOLLUSQUES MARINS 24. Cerithium tunerculare MONT. ElĂ©gante et jolie petite coquille subfusiforme, grisĂątre et brunĂątre, fortement striĂ©e transversalement, et cĂŽtelĂ©e tuberculeuse; ouverture rĂ©trĂ©cie aux deux extrĂ©mitĂ©s, canaliculĂ©e infĂ©rieurement ; 8-9 tours de spire, suture trĂšs-superficielle. — Hauteur 10, diamĂštre 4 millimĂštres'. Habite Fayal. Rare. Genre BUCCIN, BUCCINUM Adans. 25. Buccinum vulgatuni GMEL. Gmelin Sysl. nat., Ă©d. XIII, p. 3496, n° 120 caractĂ©rise ainsi cette coquille, commune, suivant lui, aux Açores Testa ventricoso-oblonga, striis longitudinalibus pliciformibus transversas subtiliores undulatas decussantibus, et il cite des figures de SĂ©ba et de Martini rapportĂ©es au Buccinum reticulatum L. Dilwyn Descr. Catal, t. II, p. 637, n° 120 rapporte ce Buccin au B. reticulatum de LinnĂ©, et il cite des figures de Pennant et de Da Costa qui cadrent Ă©galement avec l'espĂšce linnĂ©enne. Il indique les Açores, d'aprĂšs-Adanson. Adanson Hist. nat. SĂ©nĂ©g., p. 114, t. 8, f. 9 lui donne le nom de Covet, et l'a observĂ© Ă  Fayal. Je n'ai pas vu ce Buccin aux Açores. Genre POURPRE, PURPURA Lam. 26. Purpura hoemaatoma LIN. BUCCINUM. TrĂšs-commune sur les rochers du littoral de San- DES ILES AÇORES, 167 Miguel et de Santa-Maria. Se trouve Ă©galement dans les autres Ăźles de l'archipel. Edule. Les indigĂšnes nomment ce mollusque buzio. Coquille facile Ă  reconnaĂźtre Ă  son ouverture orangĂ©e, et aux plis de son bord droit; recouverte de son drap marin, elle est d'un cendrĂ© blanchĂątre. De jeunes Balanus vivent souvent sur cette espĂšce. Genre NASSE, NASSA Lam. 27. Nassa Ascantas BRUG. BUCCINUM. TrĂšs-rĂ©pandue dans tout l'archipel, mais surtout sur le littoral de San-Miguel et de Pico. — Varie beaucoup dans sa coloration. 28. Nassa aspcrula BROCCHI. BUCCINUM. Habite San-Miguel. Peu abondante. Se distingue de la prĂ©cĂ©dente par sa forme plus allongĂ©e, moins ventrue, par ses cĂŽtes moins saillantes, et en gĂ©nĂ©ral par un faciĂšs plus Ă©lĂ©gant. Sa coloration est, le plus souvent, rosĂątre ou roussĂątre. 29. Nassa neshayesii NOB. FigurĂ©e. Testa conico-acuta, grosse coslata, violacea cum fasciis brunneis minulis, crassa, solida; anfractibus 8; apertura ovali-acuta, crassissima, candida, plicata; margine columellari reflexo, altero marginato, 8-plicato. Coquille conique-aiguĂ«, munie de fortes cĂŽtes longitudinales, d'un gris-violacĂ©, avec des linĂ©oles brunes spirales faisant paraĂźtre le test comme striĂ©-plissĂ©, 168 MOLLUSQUES MARINS Ă©paisse et trĂšs-solide ; huit tours de spire ; ouverture ovale-aiguĂ«, trĂšs-Ă©pĂąissie, blanche, plissĂ©e-crĂ©nelĂ©e, bord columellaire trĂšs-rĂ©flĂ©chi, bord droit muni d'un fort bourrelet et de huit plis. —Hauteur 15, diamĂštre diamĂštre 9 millimĂštres. Habite la cĂŽte mĂ©ridionale de San-Miguel, sur les rochers submergĂ©s. Peu abondante. DĂ©diĂ©e Ă  M. Deshayes, continuateur ides ouvrages de BruguiĂšre, de FĂ©russac et de Lamarck, auteur du TraitĂ© de Conchyliologie ouvrage malheureusement interrompu, l'un des premiers conchyliologistes de notre Ă©poque. Genre CASQUE, CASSIS Brug. 30. Cassis sulcosa LAM. Se rencontre de temps Ă  autre Ă  Pico, sur la cĂŽte qui regarde Fayal. Peu abondant. Genre ROCHER, MUREX Lin. 31. Murex imbricatus BROCCHI. Coquille grisĂątre, fortement plissĂ©e dans le sens de la spire, et munie en outre de grosses cĂŽtes longitudinales. L'ouverture est blanche et le bord droit garni de plis nombreux. – Hauteur 18 diamĂštre 12 millimĂštres. — Elle paraĂźt aussi voisine des Fusus que des Murex. Habite les cĂŽtes de Pico. Assez rare. 32. Murex erinaceus LIN. ? 33. Murex distinctus PHIL. ? 34. Murex varius Sow. ? Ces trois espĂšces, recueillies avec la prĂ©cĂ©dente Ă  DES ILES AÇORES. 169 Pico, dans le sable, n'ont pu ĂȘtre rigoureusement dĂ©terminĂ©es Ă  cause de leur mauvais Ă©tat de conservation. Ce n'est donc qu'avec doute que je donne ces dĂ©nominations, surtout pour les deux derniĂšres espĂšces. Genre TRITON, TRITONIUM Fabr. 36. Tritonium nodirerum LAM. La mer apporte quelquefois quelques beaux exemplaires de cette coquille sur les cĂŽtes de Pico, entre Area-Larga et Magdalena. Je l'ai recueillie aussi Ă  San-Miguel, dans la baie de Rosto-de-CĂąo. 36. Tritonium scroblculator LIN. MUREI. Se trouve avec le prĂ©cĂ©dent, Ă  Pico. Genre COLUMVBELLE, COLUMBELLA Lam. 37. Columbella rustica LIN. VOLUTA. Var. Azorica NOB. FigurĂ©e. Cette variĂ©tĂ© remarquable tient le milieu entre le type du Columbella rustica et le Columbella mercatoria. Elle est lĂ©gĂšrement striĂ©e, marquĂ©e de nombreuses taches d'un brun-rougeĂątre sur un fond jaunĂątre, quelquefois flammulĂ©e. Son ouverture est Ă©troite et trĂšs-dentelĂ©e. TrĂšs-commune dans tout l'archipel. Je l'ai recueillie abondamment sur les cĂŽtes de FlorĂšs, de Graciosa, de San-Miguel, de Fayal et de Pico. Les femmes de FlorĂšs, qui sont trĂšs-coquettes, prĂ©parent avec ce coquillage diffĂ©rents ornements, notamment des colliers. 170 MOLLUSQUES MARINS 38. Columbella mercatoria LIN. VOLUTA. Le fond de cette espĂšce est blanc avec des marbrures ou chinures, d'un brun-roux ; elle est striĂ©e et mĂȘme sillonnĂ©e. Avec la prĂ©cĂ©dente, mais beaucoup moins abondante. Genre FUSEAU, FUSUS Lam. 39. Fusus corallinus SCACCHI. Cette jolie coquille, haute de 8 millimĂštres, large de quatre, est rouge de corail ou jaune orangĂ©, ou mĂȘme brunĂątre. Elle est trĂšs-rugueuse, portant tout Ă  la fois des stries transversales et de fortes cĂŽtes longitudinales. L'ouverture en est rose. Elle habite les cĂŽtĂ©s de San-Miguel. Genre MITRE, MITRA Lam. 40. Mitra loricea LAM. TrĂšs-abondante dans les parages de San-Miguel et de Pico. Elle est ventrue dans toutes ses parties et aiguĂ« au sommet. Son Ă©piderme est d'un brun-olivĂątre. Sept tours, de spire planes, Ă  peine sĂ©parĂ©s par la suture, le dernier trĂšs-grand, formant plus de la moitiĂ© de la hauteur totale; cinq plis sur la columelle.— Hauteur 35, diamĂštre 13 millimĂštres. Genre OLIVE, OLIVA Brug. 41. Ollva ? Il a Ă©tĂ© impossible de dĂ©terminer d'une maniĂšre DES ILES AÇORES. 171 prĂ©cise l'espĂšce Ă  laquelle se rapporte un seul individu de ce genre, roulĂ© et dĂ©colorĂ©, recueilli sur les cĂŽtes de Fayal. Sa taille et des vestiges de coloration le rapprochent des Oliva candida et oriola. Genre PORCELAINE, CYPRAEA Lin. 42. Cyprsea Iurida Lin. Habite les cĂŽtes de Santa-Maria, Fayal et Pico. N'est pas rare. Cette espĂšce est aisĂ©ment reconnaissable Ă  sa couleur gris-de-souris, Ă  ses deux zones transversales trĂšs-pĂąles, et surtout aux deux taches noires qui se trouvent Ă  chaque extrĂ©mitĂ©. Les femmes de Pico emploient ce coquillage en guise d'anneau Ă  clefs. Elles le perforent Ă  la partie antĂ©rieure, passent un fil et suspendent leur trousseau de clefs Ă  cet anneau d'un nouveau genre. 43. Cyproea pediculus LIN. Quelques rares exemplaires ont Ă©tĂ© rencontrĂ©s sur le littoral mĂ©ridional de San-Miguel. Coquille grisĂątre, un peu rosĂ©e, avec quelques taches brunes; le sillon dorsal n'atteint pas les extrĂ©mitĂ©s. 44. Cyproea pulex SOLAKD. Habite, avec la prĂ©cĂ©dente, Ă  San-Miguel ; recueillie Ă©galement sur le rivage occidental, Ă  Pico. Cette petite Porcelaine est d'un gris violacĂ© en dessus, blanche en dessous; elle est Ă©lĂ©gamment striĂ©e sur les cĂŽtes, lisse Ă  la partie supĂ©rieure. — Longueur 9 millimĂštres. T. XXU. 13 172 MOLLUSQUES MARINS 45. Cypraea producta GASK. D'une taille encore plus rĂ©duite que la prĂ©cĂ©dente, cette Porcelaine est trĂšs-bombĂ©e, Ă©lĂ©gamment striĂ©e dans toutes ses parties et entiĂšrement blanche. — Longueur 8 millimĂštres. Habite San-Miguel ; recueillie sur la plage Ă  Rostode-CĂ o. Genre HALIOTIDE, HALIOTIS Lin. 48. Haliotis tuberculata LIN. TrĂšs-abondante sur les cĂŽtes de Fayal et de Pico. On la trouve appliquĂ©e contre les rochers submergĂ©s. Les AçorĂ©ens l'appellent lapa burra. Animal noir; quand on l'irrite, il laisse Ă©chapper par toutes ses parties une humeur laiteuse. Suivant d'Orbigny Mollusques des Ăźles Canaries, 1839, p. 95, on le mange aux Canaries et sur les cĂŽtes de Bretagne il n'est pas Ă©dule aux Açores. Le test est presque toujours recouvert de nombreux parasites appartenant aux genres Serpula,Vermelus, Vermilia, Balanus, et de polypiers microscopiques. 47. Ballotta striata LAM. RencontrĂ©e sur les cĂŽtes de Fayal. Peu abondante. Distincte de la prĂ©cĂ©dente, en ce qu'elle n'offre pas de tubercules entre les rides et les stries ; n'est peut-ĂȘtre, cependant, qu'une variĂ©tĂ©. Elle est toujours moins grande. DES ILES AÇORES. 173 48. Haliotis coccinea REEVE. Abondante sur le littoral de San-Miguel. Recueillie Ă©galement Ă . Fayal et Ă  Pico. Se distingue des prĂ©cĂ©dentes par sa taille trĂšsinfĂ©rieure, son test moins Ă©pais, un peu rougeĂątre, beaucoup moins rugueux. Ses plis spiraux sont larges, fortement accusĂ©s; ils sont traversĂ©s par des stries trĂšs-fines, surtout visibles dans la partie postĂ©rieure, vers le sommet. Sa nacre est fort brillante et porte trĂšs-visiblement l'empreinte des plis de la surface. — Longueur 40-45, hauteur 20-25 millimĂštres. Genre PATELLE, PATELLA Lin. Observation. — Toutes les espĂšces de ce genre sont Ă©dules aux Açores; elles sont connues vulgairement sous le nom de lapa. J'aurais pu en multiplier le nombre; mais j'ai prĂ©fĂ©rĂ© me tenir dans une prudente rĂ©serve et ne signaler que les types parfaitement distincts et nettement caractĂ©risĂ©s. 49. Pattella candei D'ORB. Coquille plus ou moins convexe suivant l'Ăąge et la taille plus convexe dans le jeune Ăąge, rugueuse, portant des rides longitudinales Ă  peine apparentes, plus ou moins Ă©paisse, mate, grisĂątre, ou d'un cendrĂ© brunĂątre; sommet assez aigu; pĂ©ristĂŽme formant un ovale rĂ©gulier; intĂ©rieur roussĂątre, lisse, un peu nacrĂ© surtout vers le sommet. — Longueur 60, diamĂštre 45, hauteur 20 millimĂštres. 174 MOLLUSQUES MARINS Habite les cĂŽtes de Santa-Maria, notamment la baie de San-Lourerizo. Peu abondante] 60. Patella Gomesil NOB. FigurĂ©e. Testa majuscula, subdepressa, rugnsa, costutalo-plicatula, solidula, extus griseo-brunnea vel rufescens, intus nitida, brunnea, margaritacea; vertice ad tertiam longitudinis partent sito, obtuso; apertura ovali, integra. Habite les rochers Ă  fleur d'eau, Ă  Santa-Maria baie de San-Lourenzo et Ă  Pico. Rare. Cette Patelle est assez grande, un peu dĂ©primĂ©e, rugueuse, plissĂ©e-cĂŽtelĂ©e plis et cĂŽtes plus ou moins apparents, peu Ă©paisse; son sommet est obtus et rapprochĂ© du bord antĂ©rieur; l'Ă©piderme autant que l'on peut juger sous les vĂ©gĂ©tations qui recouvrent ces coquilles et qui varient leur coloration suivant leur nature est d'un gris roussĂątre ou brunĂątre, plus rarement rougeĂątre ; l'ouverture est un ovale assez rĂ©gulier, un peu arrondi, quelquefois un peu attĂ©nuĂ© a la partie postĂ©rieure; l'intĂ©rieur est roussĂątre ou brunĂątre, avec une couche lĂ©gĂšre de nacre bleuĂątre, trĂšs-brillante. — Longueur 50-60, diamĂštre 50-53, hauteur 12-15 millimĂštres. Il est aisĂ© de la distinguer de la prĂ©cĂ©dente espĂšce Ă  sa forme plus dĂ©primĂ©e et moins allongĂ©e, Ă  ses. plis et Ă  ses cĂŽtes plus saillants, enfin Ă  l'Ă©tat mousse et obtus de son sommet. Je la dĂ©die Ă  M. le docteur Bernardino Antonio GomĂšs, premier mĂ©decin de Sa MajestĂ© le Roi de Portugal, et botaniste distinguĂ©, comme un faible tĂ©moignage de mon sincĂšre attacheraient pour lui. DES ILES AÇORES. 175 51. Patella apectabills DUNK. Habite les cĂŽtes de Pico. Rare. Cette Patelle est assez grande, plus ou moins Ă©paisse, convexe, trĂšs-rugueuse, fortement plissĂ©e et cĂŽtelĂ©e; son pĂ©ristĂŽme est trĂšs-sinueux et crĂ©nelĂ©. Son Ă©piderme est d'un brun-rougeĂątre. 52. Patella crenata GMEL. Abondante sur les cĂŽtes de Santa-Maria. Coquille trĂšs-Ă©lĂ©gante, peu Ă©levĂ©e, rayonnĂ©e de roussĂątre et de brunĂątre, extrĂȘmement rugueuse, ornĂ©e de plis nombreux, imbriquĂ©s, saillants, faisant paraĂźtre le test comme hĂ©rissĂ©; son intĂ©rieur est bleuĂątre, sauf le fond qui est blanchĂątre; le pĂ©ristĂŽme est crĂ©nelĂ© et sinueux. 53. Patella Lowei D'ORB. Commune Ă  Pico et Ă  Santa-Maria, sur les rochers du littoral. Elle est plus grande que la prĂ©cĂ©dente, roussĂątre ou brunĂątre, presque toujours recouverte de fucus et de mousses marines, beaucoup moins rugueuse. Elle est fortement striĂ©e et plissĂ©e, mais Bon lamelleuse ni hĂ©rissĂ©e ; l'intĂ©rieur est bleuĂątre avec une grande tache blanche au fond, et quelquefois tout-Ă fait blanc. — Longueur 70, diamĂštre 60, hauteur 20 millimĂštres. Suivant le Catalogue du docteur John Jay 4e Ă©dition, 1852, p. 100, n° 2798, le Patella Azorica Nutt. est identique Ă  cette espĂšce, qu'il indique comme se trouvant Ă  Fayal. 176 MOLLUSQUES MARINS 54. Patella Baudonil NOB. FigurĂ©e. Testa majuscula, subelevata, grosse costata, plicata, crassa, solida, extus griseo-viridula, intus candidula; vertice subacuto, submedio; apertura ovali, crenatula. Coquille assez grande, passablement Ă©levĂ©e, trĂšsrugueuse, fortement plissĂ©e et cĂŽtelĂ©e, Ă©paisse, solide; sommet conique, un peu aigu, pas trĂ©s-Ă©loignĂ© du centre; Ă©piderme grisĂątre ou verdĂątre; ouverture ovalaire, avec les bords plissĂ©s et crĂ©nelĂ©s; nacre blanchĂątre, avec une grande tache blanche vers le sommet. Cette Patelle est souvent recouverte de Balanes, de Serpules, de Vermets et de divers fucus, de façon qu'il est assez difficile de se faire une idĂ©e exacte de sa coloration rĂ©elle. — Longueur 60, diamĂštre 50, hauteur 25 millimĂštres. Habite les rochers Ă  fleur d'eau, Ă  Santa-Maria et Ă  Pico. Assez abondante. Je la dĂ©die Ă  mon excellent ami le docteur Baudon, de Mouy-de-1'Oise, auteur de diffĂ©rents travaux conchyliologiques, anatomiste et dessinateur trĂšs-distinguĂ©. Cette dĂ©dicace n'est qu'un faible hommage rendu Ă  l'amitiĂ© et au talent. Les planches qui accompagnent cet opuscule sont dues Ă  son crayon habile et Ă  son pinceau dĂ©licat. 55. Patella nigro-squamosa DUNK. Variet. minor. Dunker rapporte que cette jolie espĂšce a Ă©tĂ© dĂ©couverte par le docteur Tams, aux environs de Horta, oĂč elle est rare. Elle est d'un blanc sale ou jaunĂątre, et munie de petites cĂŽtes portant des Ă©cailles noires, comme hĂ©rissĂ©es. — Longueur 20-35, diamĂštre 15-20, hauteur 8-12 millimĂštres. DES ILES AÇORES. 177 Conf. Dunker Index moll. Guin. infer., 1853, p. 41, n° 110, tab. vu, fig. 4, 5, 6, 7, 8, 9. Je n'ai point rencontrĂ© cette coquille, mais mon compagnon de voyage, a rapportĂ© une Patelle qui en est extrĂȘmement voisine, sinon identique. 55. Patella Moreletl NOB. FigurĂ©e. Testa subdepressa, rugosissima, coslulato-imbricata, solidula, extus brunneo-viridula, intus subbrunnea, margaritacea, nitidissima; vertice acuto; apertura ovata, plicata. Habite les rochers des bords de la mer, Ă  Fayal. Peu abondante. Celte Patelle n'est pas grande, mais un peu surbaissĂ©e, trĂšs-rugueuse, fortement plissĂ©e-cĂŽtelĂ©e, avec les cĂŽtes chargĂ©es d'aspĂ©ritĂ©s imbriquĂ©es rendant le test Ăąpre au toucher, comme une lime ou une rĂąpe, peu Ă©paisse ; l'Ă©piderme est brunĂątre, entrecoupĂ© de tons verdĂątres produits par des vĂ©gĂ©tations; l'ouverture est ovoĂŻde, plissĂ©e-crĂ©nelĂ©e ; nacre brunĂątre ou roussĂątre, avec un glacis irisĂ© et une tache blanchĂątre au sommet; sommet aigu, projetĂ© en avant. Longueur 40, diamĂštre 30, hauteur 12 millimĂštres. Elle est voisine, mais cependant distincte, du Patella granularis L. teste cl. Deshayes. DĂ©couverte par M. Arthur Morelet, mon compagnon de voyage et ami, auteur de la Description des Mollusques du Portugal, du Voyage dans l'AmĂ©rique centrale, Ă  qui je me fais un plaisir de la dĂ©dier. 178 MOLLUSQUES MARINS Genre LOTTIA, LOTTIA Gray. 57. Lottia virginea MULL. PATELLA. Coquille trĂšs-petite, blanchĂątre ou rosĂątre, quelquefois blanche avec des rayons roses, ovale-oblongue, assez Ă©levĂ©e, avec le sommet dirigĂ© en avant. Pour la forme, elle ressemble beaucoup Ă  un fort Ancylus. — Longueur 10, diamĂštre 7, hauteur 4 millimĂštres. Habite Pico, sur le littoral occidental, entre AreaLarga et Magdalena. ACEPHALES. Genre HINNITE, HINNITES Defr. 68. Hinnites sinuosus GMEL. OSTREA. Habite en petit nombre les cĂŽtes de San Miguel et de Pico. EspĂšce aisĂ©ment reconnaissable aux difformitĂ©s de ses valves. Rayons nombreux, serrĂ©s, rugueux. Couleur roussĂątre avec des taches violettes. Genre PEIGNE, PECTEN Brug. 69. Pecten puslo LIN. OSTREA. Habite les cĂŽtes de San-Miguel. Commun. Cette espĂšce est extrĂȘmement variable dans sa co- DES ILES AÇORES. 179 loration elle est tantĂŽt jaune, tantĂŽt orange, tantĂŽt rouge, souvent blanche, quelquefois blanche et violette, ou brune, ou violacĂ©e, souvent mouchetĂ©e de violet, de rouge ou de brun, avec des passages entre toutes ces nuances. Elle n'atteint pas une forte taille, et sa forme gĂ©nĂ©rale est assez constante. 60. Pecten nodulifer Sow. Habite San-Miguel. Peu abondant. Jolie espĂšce, le plus souvent rouge ou rougeĂątre, striĂ©e-plissĂ©e, portant de grosses cĂŽtes inĂ©gales, sinueuses et comme noueuses. Genre LIME, LIMA Brug. 61. lima tenera TURT. Coquille blanche, allongĂ©e, un peu translucide, fragile, finement et Ă©lĂ©gamment rayonnĂ©e, Ă  bords crĂ©nelĂ©s. — Longueur 25, hauteur 14 millimĂštres. Habite San-Miguel. Genre PERNE, PERNA Brug. 62. Perna Rang Manuel, 1829, p. 283 indique, sans la nommer, une espĂšce de ce genre comme se trouvant aux Açores et aux Ăźles du Cap-Vert. Je n'ai pas Ă©tĂ© assez heureux pour la rencontrer. Genre AVICULE, AVICULA Brug. 63. Avicula Tarenttna LAM. Jolie espĂšce, Ă  forme oblique et Ă  test mince, fra- 180 MOLLUSQUES MARINS gile, grisĂątre, transparente avec des rayons bruns ; aile obliquement arrondie; valves de grandeur Ă©gale, couvertes d'un grand nombre de petites pointes Ă©cailleuses. M. Morelet l'a vue sur des polypiers pĂȘchĂ©s sur les cĂŽtes de Fayal. 64. Avicula Atlantica LAM. Coquille brunĂątre, Ă  valves inĂ©gales; aile large, arrondie, Ă  peine oblique. Avec la prĂ©cĂ©dente et dans les mĂȘmes conditions. Genre ARCHE, ARCA Lin. 65. Arca navicularis BRUS. Habite les cĂŽtes de Pico et de San-Miguel. Assez rare. — L'Arca tetragona, de Lamarck, paraĂźt identique Ă  cette espĂšce. Genre PINNE, PINNA Lin. 66. Pinna rudis LIN. Quelques individus ont Ă©tĂ© recueillis sur les cĂŽtes de San-Miguel et de Pico. C'est la plus grande coquille marine de ces parages. Lors de mon passage Ă  Lisbonne, au retour de mon exploration des Açores, j'ai eu l'honneur de remettre un magnifique exemplaire de cette espĂšce Ă  S. M. le Roi de Portugal, qui a bien voulu l'accepter pour son MusĂ©e particulier. Depuis mon retour en France, j'ai Ă©galement eu l'honneur d'adresser Ă  Sa MajestĂ©, de concert avec M. Morelet, une collection des coquilles tant terrestres que marines de l'archipel des Açores, collection destinĂ©e au MusĂ©e du Roi. DES ILES AÇORES. 181 Genre CARDITE, CARDITA Brug. 67. Cardita sinuata BRUG. Habite Pico, sur la plage, entre Area-Larga et Magdalena. Rare. Plus abondante Ă  San-Miguel, sur la cĂŽte du sud. Coquille grisĂątre ou blanchĂątre, avec des bandes brunes transversales, sinueuse infĂ©rieurement; cĂŽtes trĂšs-Ă©levĂ©es, rugueuses, imbriquĂ©es; intĂ©rieur blanc et brun. Genre BUCARDE, CARDIUM Lin. 68. Cardium fasciatum MONT. Habite les cĂŽtes de San-Miguel. TrĂšs-commune. Petite coquille globuleuse, subarrondie, trĂšs-solide, blanche avec des zĂŽnes roussĂątres, munie de cĂŽtes larges, aplaties, portant de petits tubercules en avant et en arriĂšre, et dont les interstices sont ponctuĂ©s; crochets aigus, recourbĂ©s ; intĂ©rieur blanc et violet, striĂ© sur les bords. Genre ERVILIE, ERVILIA Turt. 69. Ervilia castanea MONT. DONAX. TrĂšs-commune sur la cĂŽte mĂ©ridionale de SanMiguel. Genre TELLINE, TELLINA Lin. 70. Tellina incarnata LIN. TrĂšs-abondante Ă  San-Miguel, sur le littoral mĂ©ridional. Jolie espĂšce trĂšs-aplatie, lisse, luisante, blanche 182 MOLLUSQUES MARINS en dehors, le plus souvent orangĂ©e ou saumonĂ©e en dedans quelquefois toute blanche ou toute saumonĂ©e, trĂšs-faiblement rayonnĂ©e. Sa longueur est de 30 Ă  35 millimĂštres. Genre CYTHÉRÉE, CYTHEREA Lam. 71. Cytherea Chlone LIN. VENUS. De jeunes exemplaires ont Ă©tĂ© rĂ©coltĂ©s Ăą San-Miguel, avec les espĂšces qui prĂ©cĂšdent. Peu abondante. Genre SOLEN, SOLEN Lin. 72. Solen marginatus PULT.. Habite les cĂŽtes de San-Miguel; assez rare. Longueur 10 centimĂštres. CIRRHOPODES. Genre ANATIFE, ANATIFA Brug. 73. Anatifa loevis LAM. Habite Graciosa et San-Miguel ; abondante. Pendant une traversĂ©e entre les Ăźles de Graciosa et de FlorĂšs, dans le courant de juillet, j'ai Ă©tĂ© Ă  mĂȘme de constater avec quelle abondance cette espĂšce se multiplie au milieu de certaines circonstances favorables. Les matelots du yacht sur lequel j'Ă©tais DES ILES ACORES. 183 montĂ© le Santa-Cruz, de Fayal aperçurent une Ă©norme poutre flottante, amenĂ©e sans doute des cĂŽtes d'AmĂ©rique par le Gulfslream ou dĂ©bris de quelque navire naufragĂ©, et s'empressĂšrent de la capturer. Quand cette poutre fut hissĂ©e sur le pont, quelle ne fut pas la surprise de tout l'Ă©quipage en reconnaissant qu'elle Ă©tait recouverte de toutes parts par des masses compactes d'Anatifes ! Ces animaux Ă©taient tellement serrĂ©s les uns contre les autres, qu'il eĂ»t Ă©tĂ© impossible d'en placer de nouveaux individus, Ă  moins de les superposer, et cela, sur toutes les faces du madrier. J'en mis un bon nombre dans l'esprit-de-vin, aprĂšs quoi les matelots s'Ă©tant armĂ©s de hachettes et de couteaux, dĂ©barrassĂšrent leur prise de sa bizarre enveloppe. Ils appellent l'Anatife buzano. Sur ce singulier asile vivaient Ă©galement des annĂ©lides, de petits crabes, et d'autres animaux infĂ©rieurs. Genre BALANE, BALANUS Brug. 74. Balanus tintinnabulum LIN. LEPAS. TrĂšs-abondant sur les rochers des cĂŽtes de tout l'Archipel, mais surtout Ă  San-Miguel. Les AçorĂ©ens sont trĂšs-friands de ce mollusque, qu'ils appellent vulgairement craca; ils le mangent aprĂšs l'avoir fait cuire simplement Ă  l'eau avec un peu de sel. J'ai goĂ»tĂ© de ce mets par curiositĂ© ; mais je dĂ©clare que, bien que je lui aie trouvĂ© un peu de ressemblance pour le goĂ»t avec les crevettes, je n'ai pu partager leur engoĂ»ment pour lui. Cependant les amateurs prĂ©tendent que c'est un mets fort agrĂ©able, et c'est comme tel qu'il nous fut offert dans plusieurs 184 MOLLUSQUES MARINS localitĂ©s. A Furnas Ăźle de San-Miguel, on en fait une grande consommation Ă  l'Ă©poque de la saison des bains on les tire de Ribeira-Quente, qui a la rĂ©putation de les produire meilleurs que sur les autres points de l'Ăźle. Dans les cavitĂ©s qui se trouvent autour des groupes de Balanes, j'ai souvent remarquĂ© de jeunes individus de l'Echinus brevispinosus Risso. 75. Balanus semiplicatus LAM. ? TrĂšs-petite espĂšce, courte, ramassĂ©e, cĂŽtelĂ©e, vivant par groupes nombreux sur les rochers volcaniques de l'Ăźlot de Villa-Franca San-Miguel. Je ne suis pas tout-Ă -fait certain de cette dĂ©termination spĂ©cifique. DES ILES AÇORES. 185 APPENDICE. mollusques fossiles. Sur les neuf Ăźles de l'archipel des Açores, huit semblent ĂȘtre exclusivement le rĂ©sultat d'une action volcanique sous-marine. Celles-ci portent Ă  leur surface l'empreinte irrĂ©cusable de leur origine, et chez plusieurs encore, l'action des feux souterrains se manifeste au dehors par des phĂ©nomĂšnes fort remarquables. C'est ainsi que le fameux Pic de l'Ăźle de Pico, cĂŽne immense qui ne mesure pas moins de 7,000 pieds de haut, fume encore quelquefois et dĂ©gage presque constamment des vapeurs sulfuriques et des gaz inflammables.' C'est ainsi encore que le voyageur admire, non sans Ă©motion, dans le val de Fumas, Ă  San-Miguel, des volcans d'eau bouillante en pleine activitĂ©, dont les vapeurs brĂ»lantes entretiennent dans la vallĂ©e une humiditĂ© permanente, et qui s'Ă©chappent quelquefois de leurs gouffres souterrains avec un bruit terrible, recouvrant le sol brĂ»lant et presque mouvant, qui les environne, de dĂ©pĂŽts de soufre et de stalagmite siliceuse. Les Ă©lĂ©ments gĂ©ologiques composant les chaĂźnes de montagnes de ces Ăźles et leurs masses Ă©normes de rochers sont le basalte, le trachyte, des laves, des pierres ponces, des conglomĂ©rats de scories, de 186 MOLLUSQUES MARINS ponce et d'obsidienne, des tufs variĂ©s. Les roches et les laves basaltiques et trachytiques contiennent toutes plus ou moins de pyroxĂšne, d'amphibolie, d'olivine et de mica; mais aucune trace, bien entendu, de corps organisĂ©s fossiles. La gracieuse Ăźle de SANTA-MARIA, la plus mĂ©ridionale de toutes 36° 50' de latitude N. et la plus rapprochĂ©e du continent, prĂ©sente seule un autre aspect et des conditions gĂ©ologiques qui sembleraient indiquer, ou une origine diffĂ©rente, pu la combinaison chez elle de certains phĂ©nomĂšnes de natures diverses, qui auraient sensiblement modifiĂ© sa structure et sa composition. Ce qui porta certains gĂ©ologues Ă  la considĂ©rer comme une dĂ©pendance de l'Ăźle MadĂšre, tandis que d'autres la regardent simplement comme un prolongement de la partie orientale de San-Miguel. Quoi qu'il en soit, la base des roches est encore le basalte et le trachyte mais elle ne porte point Ă  sa surface les traces rĂ©centes de l'effort des feux souterrains, ni courant de lave, ni cratĂšre de volcan. De plus, j'y ai rencontrĂ©, en plusieurs localitĂ©s et sur un grand espace, des couches assez puissantes de terrain calcaire, abondamment pourvues de nombreux fossiles. Malheureusement ces roches calcaires sont extrĂȘmement dures et compactes. DĂ©pourvu des instruments nĂ©cessaires, et donnant d'ailleurs tous mes soins Ă  la zoologie et Ă  la botanique, je n'ai pu recueillir qu'un trĂšs-petit nombre de fossiles, la plupart en mauvais Ă©tat de conservation et presque mĂ©connaissables. Voici les seules espĂšces que j'aie pu reconnaĂźtre d'une façon certaine, et dont je puis garantir la dĂ©termination comme exacte Ă  l'exception DES ILES AÇORES. 187 toutefois des Anomia ephippium et Cardium loevigatum, qui me laissent encore dans le doute. J'ai soumis le tout Ă  l'examen de M. Deshayes, et aussi Ă  celui de M. Bronn, professeur Ă  Heidelberg. 1. Terebratula capnt-serpentls LIN. 2. Anomia ephippium LIN. ? 3. Pecten latissimus BBOCCHI. 4. Pecten Burdigalensia LAM. 5. Pecten scabrellus LAM. OSTREA DUBIA Brocchi. 6. Arca Noae LAM. 9. Cardium loevigatum LIN. ? La prĂ©sence du Pecten latissimus, propre jusqu'ici au terrain tertiaire supĂ©rieur de l'Italie et des autres points du littoral mĂ©diterranĂ©en, n'indiquerait-elle pas une corrĂ©lation d'Ăąge entre certaines couches du terrain de Santa-Maria et le terrain subapennin ?... On pourrait ĂȘtre tentĂ© de former Cette hypothĂšse. Cependant, me dit M. Deshayes Ă  propos de mes fossiles, en considĂ©rant ces formes dans leur ensemble, on reconnaĂźt aisĂ©ment qu'elles appartiennent Ă  des espĂšces rĂ©centes, et que le terrain oĂč elles gisent doit ĂȘtre trĂšs-moderne. Tels sont les seuls documents que je puisse Ă  prĂ©sent fournir sur les mollusques marins fossiles de Santa-Maria. L'un de mes compagnons de voyage, M. Hartung, s'occupant exclusivement de gĂ©ologie, a recueilli des Ă©chantillons plus nombreux et aussi en meilleur Ă©tat de conservation. Ces spĂ©cimens ont Ă©tĂ© remis Ă  M. Bronn, d'Heidelberg, qui a reconnu bon nombre d'espĂšces inĂ©dites, et qui se propose, si je suis bien informĂ©, de publier prochainement un mĂ©moire spĂ©cial sur cet intĂ©ressant sujet; I. XXII. 14 188 MOLLUSQUES MARINS DES ILES AÇORES. EXPLICATION DES PLANCHES. Planche Ire. Fig. 1-2, Litiopa Gratelupeana DrouĂ«t. Fig. 3-4, Nassa Deshayeii DrouĂ«t. Fig. 5, Columbella rustica, var. Azorica. Fig. 6-7, Patella Gomesii DrouĂ«t. Planche 2me. Fig. 8-9, Patella Baudonii DrouĂ«t. Fig. 10-11, Patella-Moreleti DrouĂ«t. MĂ©n de la SocAcad. de l'Aube. T. XXII. 1858. Baudon Lackerbauer del. Lith Bouquot Ă  Troyes. MOLLUSQUES MARINS DES AÇORES . Pl. 1Ăšre MĂ©m. de la Soc Acad. de l' 1858. Baudon pinxt Lackerbauer del. Lith. Bouquot Ă  Troyes. MOLLUSQUES MARINS DES AÇORES. Pl. 2e DE LA MÉTHODE DITE DE DÉPLACEMENT, APPLIQUEE AUX TISANES D'HOPITAL, Par M. OUDART, Pharmacien Ă  Troyes, Membre du Jury mĂ©dical de l'Aube. Les moyens les plus simples sont toujours les meilleurs, et donnent ordinairement de bons rĂ©sultats ; c'est ce que je vais tĂącher de dĂ©montrer une fois de plus. La mĂ©thode de dĂ©placement, qui a dĂ©jĂ  rendu d'immenses services Ă  l'industrie, Ă  la mĂ©decine et surtout Ă  la pharmacie, d'oĂč elle est sortie, mieux comprise, mieux appliquĂ©e, est appelĂ©e, je n'en doute pas, Ă  en rendre de plus grands encore. GrĂące Ă  cette mĂ©thode, les extraits pharmaceutiques, ces hĂ©roĂŻques mĂ©dicaments, si souvent usitĂ©s, sont aujourd'hui obtenus sans altĂ©ration, sans mĂ©lange, et reprĂ©sentent au centuple la substance qui les a fournis. 190 MÉTHODE DITE DE DÉPLACEMENT L'industrie y trouvera bientĂŽt, je l'espĂšre, une source immense de richesses, pour l'extraction Ă  peu de frais des matiĂšres tinctoriales ou sucrĂ©es. AppliquĂ©e Ă  la prĂ©paration des vins, des teintures et surtout des tisanes usitĂ©es en mĂ©decine, elle sera un utile progrĂ©s. C'est de ces derniĂšres que je veux parler aujourd'hui. On sait sans doute, dĂ©jĂ , que cette mĂ©thode consiste Ă  soumettre Ă  l'action dissolvant d'un liquide appropriĂ© un corps quelconque Ă  l'Ă©tat d'extrĂȘme division, afin d'en extraire plus facilement les principes solubles dans le liquide choisi. Le plus souvent, on humecte Ă  froid la substance bien divisĂ©e avec un peu de liquide, on lasse plus, ou moins le tout dans un vase ad hoc, ayant Ă  sa partie infĂ©rieure une ouverture armĂ©e d'un robinet pour faciliter l'opĂ©ration, la ralentir ou l'activer. AprĂšs quelques instants de contact, suivant la duretĂ© ou la porositĂ© du corps soumis Ă  l'action du liquide, on dĂ©place ce dernier, tenant en dissolution beaucoup de matiĂšre soluble, en versant tout doucement Ă  la partie supĂ©rieure du vase une nouvelle quantitĂ© du mĂȘme liquide,; et ainsi de suite jusqu'Ă  Ă©puisement complet, ou jusqu'Ă  ce que la liqueur passe Ă  peu prĂšs incolores, inodore et insipide. L'Ă©puisement de la matiĂšre a lieu trĂšs-promptement et nĂ©cessitĂ© trĂšs-peu de liquide, vu l'Ă©tat de division de la substance Ă  attaquer, et la pression constante exercĂ©e par le liquidĂ© supĂ©rieur! Par cette mĂ©thode, on Ă©puisĂ© Ă  froid tous les principes solubles, on obtient des liqueurs trĂšs-chargĂ©es, APPLIQUÉE AUX TISANES D'HÔPiTAL. 191 ordinairement limpides, et surtout sans mĂ©lange de corps Ă©trangers. Il ne s'agit plus que d'utiliser le produit en l'Ă©vaporant avec mĂ©nagement, si on a pour but un extrait, ou en l'allongeant de beaucoup d'eau pure, si on se propose une tisane, une boisson. Comme l'on opĂšre Ă  froid, Ă  l'abri du contact de l'air, les principes solubles passent avec le liquide sans altĂ©ration, et l'opĂ©ration est arrĂȘtĂ©e Ă  temps avec indice certain de l'Ă©puisement de la substance. Cette mĂ©thode si simple, appliquĂ©e Ă  la prĂ©paration de la tisane de rĂ©glisse, seule boisson Ă©conomique du malade pauvre, offre des avantages si incontestables au triple point de vue de l'Ă©conomie, de l'amĂ©lioration et de la santĂ© du pauvre, que j'ai cru bien faire en m'en occupant. Puis j'ai trouvĂ© son application si commode et si utile, que je crois devoir en faire le sujet d'une sĂ©rieuse communication Ă  la SociĂ©tĂ© AcadĂ©mique de l'Aube, jalouse de tout progrĂšs utile, — mettant ainsi Ă  profit mes loisirs et ma vieille expĂ©rience en cette matiĂšre. Ainsi donc du bois de rĂ©glisse grossiĂšrement pulvĂ©risĂ©, et traitĂ© ainsi que je viens de le dire par de l'eau froide, donne beaucoup plus d'extrait que par la dĂ©coction du bois non divisĂ©; cet extrait est pur de tout mĂ©lange, est entiĂšrement soluble, a bon goĂ»t, bon aspect, n'est pas noir, et n'est pas Ăącre comme celui du commerce autant de preuves du bien opĂ©rĂ©. La tisane obtenue par ce mĂȘme moyen est limpide, douce, agrĂ©able, sans ĂącretĂ©, ne provoque pas la soif, mais l'apaise, est parfaitement supportĂ©e par 192 MÉTHODE DITE DE DÉPLACEMENT l'estomac, se conserve longtemps sans altĂ©ration autant de qualitĂ©s qu'on ne trouve pas dans la tisane faite par dĂ©coction de cette substance. Tout le monde sait, en effet, et les marchands de coco, plus particuliĂšrement, que l'infusion de rĂ©glisse dans l'eau froide est plus agrĂ©able que celle provenant de l'infusion dans l'eau chaude, et que cette derniĂšre est elle-mĂȘme bien prĂ©fĂ©rable Ă  celle obtenue par dĂ©coction. J'ajouterai qu'on amĂ©liorerait encore cette boisson Ă©conomique, si on se donnait la peine de ratisser la rĂ©glisse avant que de l'employer. L'expĂ©rience nous a appris qu'il existait dans le bois de rĂ©glisse, dans l'Ă©corce surtout, un principe Ăącre soluble dans l'eau chaude, insoluble Ă  froid, et qui communique Ă  la tisane faite par dĂ©coction une ĂącretĂ© qui irrite la gorge, et rend cette tisane insupportable deux jours de suite. Par la dĂ©coction, la matiĂšre amylacĂ©e ou amidon, contenue dans cette racine, est dissoute, donne Ă  la tisane un aspect louche et la rend lourde Ă  l'estomac, peu appĂ©tissante, et d'une difficile conservation. L'amidon dissous, susceptible de fermenter, pendant la chaleur surtout, fait qu'on est obligĂ© de renouveler la tisane toutes les vingt-quatre heures. Par la mĂ©thode de dĂ©placement Ă  froid, le principe Ăącre n'est point entraĂźnĂ©, la tisane obtenue est limpide, douce, agrĂ©able, n'irrite point la gorge, Ă©tanche la soif, et nĂ© la provoque pas. L'absence d'amidon en fait une boisson lĂ©gĂšre, d'une facile digestion, agrĂ©able Ă  l'oeil et au goĂ»t, le principe sucrĂ© lĂ©gĂšrement aromatique s'y trouve APPLIQUÉE AUX TISANES D'HÔPITAL. 193 tout entier, car il n'a point Ă©tĂ© altĂ©rĂ©, volatilisĂ© par la chaleur; l'eau n'ayant point Ă©tĂ© soumise Ă  l'Ă©bullition est aĂ©rĂ©e, et nous savons tous qu'il n'est pas d'eau potable sans un peu d'air interposĂ©, et que c'est cette absence d'air qui est en partie cause que l'eau tiĂšde provoque le vomissement, et que l'eau de puits est plus lourde que celle de riviĂšre ou de fontaine. Par la mĂ©thode de dĂ©placement, on Ă©puise complĂštement, sans perte aucune, un kilogramme de rĂ©glisse pulvĂ©risĂ©e par quatre ou cinq fois son volume d'eau, soit quatre Ă  cinq litres. La liqueur ainsi obtenue est brune, limpide, trĂšsĂ©paisse, trĂšs-sucrĂ©e, c'est un vĂ©ritable sirop de rĂ©glisse qu'il ne s'agit plus que d'Ă©tendre de beaucoup d'eau, pour avoir une boisson agrĂ©able et utile que rĂ©clame la santĂ© du malade. Cette liqueur, ou sirop de rĂ©glisse, est, de plus, d'une extrĂȘme commoditĂ© pour Ă©dulcorer les autres tisanes mĂ©dicinales ; ainsi, il suffira d'une cuillerĂ©e ou deux de ce sirop pour rendre agrĂ©able un litre de tisanes pectorales, de bouillon blanc, de tilleul orangĂ©, etc., etc., et d'un peu plus pour les tisanes amĂšres de gentiane, de houblon, etc., etc. Ces derniĂšres tisanes se font encore aujourd'hui par l'infusion de la substance dans l'eau bouillante, sans dĂ©coction, il est vrai ; mais le temps n'est pas Ă©loignĂ©, je l'espĂšre, oĂč la mĂ©thode de dĂ©placement, mieux comprise, leur sera appliquĂ©e et l'eau chaude supprimĂ©e, au profit du malade et du mĂ©dicament. Enfin, avec dix centimes de rĂ©glisse divisĂ©e, j'obtiens facilement, et presque sans travail, trente litres de tisane de bonne qualitĂ©. 104 MÉTHODE DITE DE DÉPLACEMENT Ces trente litres eussent coĂ»tĂ© cinquante centimes et plus, faite par dĂ©coction, en tenant compte de la marchandise, du combustible, de l'altĂ©ration des vases, du temps et des soins employĂ©s. Or, il se consommait autrefois soixante Ă  quatrevingts litres par jour de tisane commune Ă  l'hĂŽpital de Troyes; il en est de mĂȘme Ă  la maison centrale de Clairvaux, ainsi que dans les hospices du dĂ©partement; c'est une notable Ă©conomie de chaque jour Ă  ajouter Ă  l'amĂ©lioration d'une boisson reconnue indispensable. En effet, que faudra-t-il dĂ©sormais, avec la mĂ©thode que je propose, pour faire chaque jour cent litres de tisane et plus ? Un vase en Ă©tain de la capacitĂ© de quatre litres, armĂ© d'un robinet Ă  sa partie infĂ©rieure, au-dessous une terrine d'Ă©gale capacitĂ©, le tout placĂ© dans un coin de la pharmacie ou du laboratoire, sous un filet d'eau provenant du rĂ©servoir commun. Tout en circulant, occupĂ© d'autre chose, on versera doucement Ă  la partie supĂ©rieure du vase renfermant de la rĂ©glisse, un peu d'eau froide toutes les fois que l'on s'apercevra que le premier liquide est Ă©coulĂ©. Si le tassement de la poudre de rĂ©glisse humectĂ©e a Ă©tĂ© convenablement fait, l'Ă©coulement; du liquide devra ĂȘtre lent, et c'est ce que la pratique indiquera bien vite. Il y a donc, on le voit, amĂ©lioration notable de la boisson, Ă©conomie complĂšte de soins, de temps, de combustible et d'emplacement. Je me rĂ©sume en peu de mots APPLIQUÉE AUX TISANES D'HÔPITAL. 195 AmĂ©lioration notable d'une boisson utile, indispensable aux malades ; Bons rĂ©sultats mĂ©dicaux obtenus par suite de cette amĂ©lioration ; Economie de cinquante pour cent et plus sur lĂ  fabrication de cette tisane ; Economie de temps, de soins, et surtout de combustible. RĂ©sumĂ© de l'opĂ©ration. Un kilogramme de rĂ©glisse bien divisĂ©e a demandĂ©, pour ĂȘtre bien humectĂ©, 2 kilogrammes d'eau, soit deux litres. AprĂšs une demi-heure de contact, pour permettre Ă  la rĂ©glisse de se gonfler par l'absorption de l'eau, le tout a Ă©tĂ© placĂ© dans un vase convenable et lĂ©gĂšrement tassĂ©. J'ai versĂ© Ă  la partie supĂ©rieure du vase de l'eau froide, et une heure aprĂšs, le premier liquide chassĂ© s'Ă©tait Ă©coulĂ© dans le rĂ©cipient, soit deux litres. Ce liquide, noir-brun, Ă©pais, sucrĂ©, marquait sept degrĂ©s au pĂšse-sirop. Deux nouveaux litres de liquide, dĂ©placĂ©s Ă  leur tour, ne marquaient plus que cinq au pĂšse-sirop. Deux idem, trois. Deux idem, deux. Deux idem, un. Total 10 litres qui, mĂ©langĂ©s, ne marquaient plus que quatre et demi au pĂšse-sirop. Il a fallu Ă©tendre ce dernier liquide de vingt fois son volume d'eau pour avoir une tisane convenable, sucrĂ©e, lĂ©gĂšre, soit 210 litres. 196 MÉTHODE DITE DE DÉPLACEMENT APPLIQUÉE, ETC. En continuant l'opĂ©ration, qui alors marche trĂšsvite, j'ai encore pu extraire 20 litres de liquide parfaitement sucrĂ©, mais ne marquant presque plus au pĂšse-sirop, et qu'il n'a pas Ă©tĂ© nĂ©cessaire d'allonger d'eau, soit, au total, 230 litres. Un honorable et savant confrĂšre, pharmacien en, chef d'un hĂŽpital important, qui a bien voulu en faire l'expĂ©rience, m'assure avoir obtenu 300 litres de tisane. COUP-D'OEIL SUR LES INSTITUTIONS CIVILES DU COMTÉ DE CHAMPAGNE, SOUS THIBAUT IV, DIT LE CHANSONNIER, PAR M. L'ABBÉ ETIENNE GEORGES, Membre associĂ©. A l'Ă©poque oĂč vivait Thibaut 1201-1253, le mouvement d'Ă©mancipation communale se communiquait de proche en proche, et produisait des rĂ©volutions partout oĂč se rencontrait une population assez nombreuse pour oser entrer en lutte avec la puissance fĂ©odale. Les habitants des villes, que cet esprit d'indĂ©pendance avait gagnĂ©s, se rĂ©unissaient dans la grande Ă©glise ou sur la place du MarchĂ© ; et lĂ , ils prĂȘtaient sur les choses saintes, le serment de se soutenir les uns les autres, et se liaient entre eux par des devoirs rĂ©ciproques de dĂ©voĂ»ment et de fi- 198 INSTITUTIONS CIVILES dĂ©litĂ©. Pour garantie de leur association, ils constituaient, d'abord tumultuairement, ensuite avec des formes rĂ©guliĂšres, un gouvernement Ă©lectif qui ressemblait, sous quelque rapport, Ă  l'ancienne administration municipale des Romains. La Champagne, pas plus que les autres provinces de France, ne demeura Ă©trangĂšre Ă  cette transformation sociale. DĂšs l'annĂ©e 1146, les bourgeois de Sens, ayant fondĂ© une association de dĂ©fense mutuelle, l'adoptĂšrent avec l'agrĂ©ment du roi Louis VII. Mais le clergĂ© paroissial de la vieille citĂ© sĂ©nonaise, et surtout les religieux de Saint-Pierre-le-Vif, poussĂšrent un cri d'alarme sur l'abolition de leurs justices. Le pape EugĂšne III intervint de concert avec le roi de France. La nouvelle commune fut immĂ©diatement dissoute; les bourgeois, outrĂ©s de fureur, coururent aux armes, se rassemblĂšrent autour du monastĂšre, enfoncĂšrent les portes et massacrĂšrent l'abbĂ©. Des troupes, envoyĂ©es par le roi, investirent la ville de Sens, et arrĂȘtĂšrent en grand nombre les auteurs et les complices de cette Ă©meute excitĂ©e par la frĂ©nĂ©sie du dĂ©sespoir et souillĂ©e par le meurtre. Plusieurs furent mis Ă  mort sans forme de procĂšs; par une sorte de raffinement de tortures, on les fit monter au haut de la tour de Saint-Pierre-le-Vif, d'oĂč ils furent prĂ©cipitĂ©s. Les autres, emmenĂ©s et jugĂ©s Ă  Paris, eurent la tĂȘte tranchĂ©e par la main du bourreau. Il y avait trop de vie et d'avenir dans l'institution des communes, pour que celle de Sens pĂ©rĂźt par ce seul Ă©chec; elle se rĂ©tablit spontanĂ©ment sous le rĂšgne de Philippe-Auguste, qui la tolĂ©ra d'abord, et plus tard la sanctionna par un acte datĂ© de 1189. DU COMTÉ DE CHAMPAGNE. 199 Une querelle non moins implacable avait Ă©clatĂ© presqu'en mĂȘme temps Ă  Reims, entre les partisans des libertĂ©s bourgeoises et ceux de la seigneurie Ă©piscopale. Les conjurĂ©s aspiraient Ă  s'organiser en sociĂ©tĂ© indĂ©pendante, non de l'autoritĂ© spirituelle, mais de la puissance temporelle des archevĂȘques qui, d'abord magistrats eux-mĂȘmes et dĂ©fenseurs de la citĂ©, avaient transformĂ© Ă  la longue ce patronnage lĂ©gal en une domination absolue comme celle des princes fĂ©odaux. Les bourgeois coalisĂ©s rĂ©solurent de reconstituer, par un effort commun, et de rendre inattaquables les attributions politiques dont les dĂ©bris s'Ă©taient conservĂ©s chez eux pendant plusieurs siĂšcles. La vacance du siĂ©ge mĂ©tropolitain, en 1138, favorisa cette audacieuse entreprise. Les diffĂ©rents corps du clergĂ© de Reims, alarmĂ©s des progrĂšs rapides que l'esprit d'insurrection faisait hors des murs de la ville, adressĂšrent des plaintes amĂšres aux Ă©vĂȘques suffragans de la province rĂ©moise, aux lĂ©gats du siĂ©ge apostolique et au roi. La commune n'avait encore qu'une seule annĂ©e d'existence; mais l'ardeur et l'opiniĂątretĂ© de ses membres fondateurs en rendaient la destruction impossible, sans beaucoup de violence et sans une abondante effusion de sang. Les archevĂȘques Sanson de Malvoisin, Henri de France, Guillaume de Champagne, Aubry de Humbert, Henri de Braine, qui se succĂ©dĂšrent sur le siĂ©ge de la ville du sacre, luttĂšrent vainement contre les prĂ©tentions de la bourgeoisie. Ils possĂ©daient, Ă  l'extrĂ©mitĂ© septentrionale de la citĂ©, une forteresse oĂč ils entretenaient continuellement une garnison nombreuse de chevaliers et d'archers. Du cĂŽtĂ© de la campagne, les fortifications 200 INSTITUTIONS CIVILES consistaient en quelques tours Ă©levĂ©es sur le fossĂ© mĂȘme de la ville ; mais le cĂŽtĂ© opposĂ© prĂ©sentait des dĂ©fenses formidables. Les murailles plus Ă©paisses, les fossĂ©s plus profonds et plus larges, les remparts mieux terrassĂ©s et tout garnis de machines, indiquaient que cette citadelle avait pour destination, non-seulement de protĂ©ger la ville contre les attaques extĂ©rieures, mais surtout de contenir et d'effrayer les citoyens turbulents. C'Ă©tait dans ce donjon, appelĂ© le chĂąteau de Porte-Mars, parce qu'un ancien arc de triomphe, consacrĂ© au dieu Mars, se trouvait enclos dans sa construction, que se tenaient les plaids de la cour archiĂ©piscopale. On tremblait d'ĂȘtre citĂ© devant elle ; car, une fois entrĂ© dans les sombres profondeurs de la forteresse, personne n'Ă©tait sĂ»r d'en sortir. Les officiers de l'archevĂȘque, poussĂ©s Ă  des mesures violentes par une opposition ombrageuse, opiniĂątre, toujours menaçante, enlevaient au jugement des Ă©chevins la plupart des causes criminelles; ils multipliaient ces causes, en qualifiant de fĂ©lonie la moindre plainte contre leurs sentences ou leurs excĂšs d'autoritĂ©. Si quelqu'un refusait de se rendre aux sommations de leurs sergents, ils fondaient sur la ville Ă  la tĂȘte d'une troupe armĂ©e, parcouraient les rues, fouillaient les maisons ; et, s'ils ne trouvaient pas de dĂ©linquant, s'emparaient du premier venu et le retenaient en ĂŽtage. Le sort tombait ordinairement sur un bourgeois puissant par ses richesses et par ses alliances. Les parents de ce prisonnier, afin de le dĂ©livrer le plus promptement possible, se faisaient persĂ©cuteurs de l'accusĂ© ; ils lĂ© cherchaient de retraite en retraite, l'arrachaient des bras de sa DU COMTÉ DE CHAMPAGNE. 201 femme et de ses enfants; ils le soumettaient aux dures Ă©preuves du cachot, des fers et, quelquefois mĂȘme, de la faim. Telles furent les plaintes adressĂ©es Ă  Louis IX, par les habitants de Reims, sous l'archevĂȘque Henri de Braine, contemporain de notre Thibaut-le-Chansonnier. Comme rĂ©paration de tant de violences, ils demandĂšrent, maisr inutilement, que l'ancien palais des archevĂȘques redevĂźnt le centre de leur seigneurie temporelle, et que les malheureux, citĂ©s en justice, ne fussent pas obligĂ©s de comparaĂźtre au chĂąteau de Mars. Les communes de la province rĂ©moise profitĂšrent de cette effervescence pour hĂąter leur complet affranchissement. A Noyon, de frĂ©quentes Ă©meutes Ă©clataient contre les chanoines. A Soissons, pour la moindre dispute survenue entre les citoyens et des membres du clergĂ©, on prenait les armes. A Reims, les nouveaux ouvrages, que Henri de Braine ajouta au formidable chĂąteau des archevĂȘques, furent le signal d'une insurrection gĂ©nĂ©rale. Tous les bourgeois, rĂ©unis en armes, au son de la cloche, attaquĂšrent les ouvriers qui creusaient des fossĂ©s ou plantaient des palissades. Henri de Braine, toujours en voyage auprĂšs de ses suffragants pour les engager Ă  ne point faiblir dans la dĂ©fense des privilĂšges ecclĂ©siastiques, n'Ă©tait pas Ă  Reims pendant cette Ă©meute. Le chapitre, restĂ© sans chef au milieu des troubles, hĂ©sitait Ă  se prononcer contre les bourgeois. Quelques-uns de ses membres se rĂ©pandaient dans les groupes populaires formĂ©s Ă  toute heure sur les places publiques et dans les rues. Ils faisaient appel Ă  la prudence, contestaient la valeur des privilĂ©ges de la bourgeoisie, et cherchaient Ă  affaiblir le 202 INSTITUTIONS VIVILES parti communal. De semblables tentatives fĂ©rmĂšrent toutes les voies de conciliation; et les hostilitĂ©s recommencĂšrent avec un nouvel acharnement. Le pape GrĂ©goire IX et le roi Louis IX intervinrent dans cette lutte perpĂ©tuelle de deux puissances rivales. Mais l'ascendant des pontifes, pas plus que l'autoritĂ© des monarques, ne put terminer cette guerre sans cesse renaissante entre les prĂ©rogatives seigneuriales et les libertĂ©s bourgeoises. Le naturel dĂ©bonnaire, du moins en apparence, des comtes de Champagne, et les habitudes d'obĂ©issance et de fidĂ©litĂ© qui caractĂ©risaient les populations de la partie mĂ©ridionale de cette province, rendirent presqu'impossibles les conflits violents et les tragiques reprĂ©sailles qui ensanglantaient l'Ă©tablissement des communes du nord. Thibaut, loin de s'opposer au dĂ©veloppement des associations municipales, en fut un des plus ardents promoteurs; il montra, selon la curieuse rĂ©vĂ©lation du moine AlbĂ©ric, chroniqueur contemporain, plus de confiance dans ces sortes de ligues que dans ses armĂ©es elles-mĂȘmes. Il organisa, d'abord, par un diplĂŽme de 1230, sa commune de Troyes. Rien ne prouve, sans doute, que ce diplĂŽme soit prĂ©cisĂ©ment un Ă©tablissement de commune Ă  Troyes. Son objet principal consiste Ă©videmment dans la mise en jurĂ©e des contribuables ; l'idĂ©e d'une organisation communale n'y apparaĂźt que dans un ordre secondaire. D'oĂč l'on pourrait conclure que la ville avait, dĂšs les temps antĂ©rieurs, son administration municipale. Seulement il faut croire que jusque-lĂ  ce gouvernement local avait Ă©tĂ©, pour ainsi dire, naturel et spontanĂ©, et qu'il ne fut lĂ©gĂą- DU COMTÉ DE CHAMPAGNE. 203 lement consacrĂ© que par la constitution de Thibautle-Chansonnier. Les termes de cet acte fondamental dĂ©montrent que c'Ă©tait l'oeuvre personnelle du comte de Champagne, Ă©manĂ©e de son propre mouvement et de sa seule volontĂ©. On connaĂźt les moeurs essentiellement dociles des Champenois du moyen-Ăąge, peuple laborieux et pacifique qui savait concilier une obĂ©issance parfaite et une entiĂšre soumission avec l'administration seigneuriale. Le diplĂŽme de Thibaut, si habile en l'art de faire valoir, dans ses chartes, toute la reconnaissance que lui devaient ses sujets, ne renferme aucune expression qui autorise Ă  croire que les bourgeois eussent mĂȘme Ă©tĂ© consultĂ©s pour l'obtenir. D'ailleurs, parmi les diverses dispositions de ce rĂšglement, quelle clause aurait pu provoquer leurs sollicitations? Le maire, aussi bien que ses douze collĂšgues, n'est, en dĂ©finitive, que le trĂšshumble et trĂšs-dĂ©pendant serviteur du comte suzerain. A peine attache-t-on quelqu'ombre d'autoritĂ© morale Ă  ses fonctions plus pĂ©rilleuses que dignes d'envie. Enfin, cette charge Ă©tait si peu l'objet de l'enthousiasme et des voeux populaires, que, dans l'article mĂȘme qui rĂšgle la nomination du maire, l'insouciance des citoyens est formellement prĂ©vue, et que le roi de Navarre prend sur lui d'y supplĂ©er. La commune nrissante se trouvait obĂ©rĂ©e d'une dette considĂ©rable; elle avait empruntĂ© Ă  des chanoines, Ă  des bourgeois, Ă  des femmes, Ă  des filles," vraisemblablement pour les frais de la guerre que Thibaut soutenait alors contre les princes coalisĂ©s. Parmi, ces divers crĂ©anciers, un habitant de Reims, nommĂ© Chasier, et Aveline, sa femme, envers qui T. XXII. 15 204 INSTITUTIONS CIVILES la citĂ© Troyenne Ă©tait dĂ©bitrice de soixante livres parisis de rente viagĂšre, plus exigeants que les autres prĂȘteurs, ne se contentĂšrent pas des garanties fournies par le souverain temporel de la Commune; ils demandĂšrent Ă  l'analhĂšme Ă©piscopal sa sanction comminatoire, et obtinrent, au mois de dĂ©cembre 1232, une charte de l'Ă©vĂȘque Robert, successeur d'HervĂ©e, le fondateur de la cathĂ©drale. Il est Ă  remarquer que dans tous ces actes on ne voit jamais figurer nominativement GĂ©rard le Melletier, Pierre Legendre, Bernard de MontĂ©cut, qui occupĂšrent successivement alors la mairie de Troyes. Les Ă©chevins, reprĂ©sentants de l'autoritĂ© municipale, y gardent Ă©galement l'anonyme; en sorte qu'on serait portĂ© Ă  croire qu'il s'agit ici d'obligations pĂ©cuniaires souscrites par suite d'Ă©normes dĂ©penses faites pour le compte de Thibaut, et non pour celui de la ville. Plus tard, en 1242, le comte de Champagne, publiait une seconde charte, dans laquelle les noms de maire et de commune Ă©taient impitoyablement biffĂ©s de tous les passages oĂč ils se trouvaient dans celle de 1230, et qui confĂ©raient Ă  des crĂ©atures directes du prince toutes les fonctions que remplissaient prĂ©cĂ©demment les magistrats municipaux. La commune fut-elle supprimĂ©e Ă  la requĂȘte des bourgeois, ou le comte dĂ©truisit-il lui-mĂȘme cette CrĂ©ation dont il Ă©tait l'auteur? ProblĂȘme difficile Ă  rĂ©soudre! Si, d'une part, ce dĂ©nouement semble conciliable avec la conduite versatile de Thibaut-le-Chansonnier, d'un autre cĂŽtĂ©, l'indiffĂ©rence des bourgeois, puis la crainte d'une faillite qui retombait sur eux de tout son poids, offrent une explication trĂšs-admissible. Ainsi, par un DU COMTÉ DE CHAMPAGNE. 205 concours de circonstances frappantes, cet Ă©pisode de notre histoire municipale nous montre, dit un archiviste palĂ©ographe, une commune, ailleurs le prix de tant de sanglants efforts, s'Ă©tablissant au milieu d'une apathie profonde, puis tombant, en quelque sorte, du consentement au moins passif des citoyens eux-mĂȘmes.; il nous rĂ©vĂšle encore les Ă©lĂ©ments divers et souvent fort peu moraux qui prĂ©sidĂšrent maintes fois, comme causes premiĂšres, Ă  l'origine de ces fameux privilĂ©ges; il mesure enfin combien il y a loin de cette libĂ©ralitĂ© chevaleresque, dont la renommĂ©e semble historiquement acquise Ă  la puissante lignĂ©e des comtes de Champagne, Ă  notre libĂ©ralisme des temps modernes. Provins, qui, comme Troyes, Ă©tait la rĂ©sidence de prĂ©dilection des Thibaut, eut aussi une large part dans les sollicitudes du comte. La charte de franchise qu'il accorda Ă  celle antique capitale de la Brie, s'exprime dans les mĂȘmes termes et renferme les mĂȘmes dispositions Ă  peu prĂšs que celle de la capitale de la Champagne. En lisant isolĂ©ment cette piĂšce, on pourrait penser que Thibaut-le-Chansonnier n'Ă©tait pas le premier qui eĂ»t octroyĂ© Ă  la ville de Provins des libertĂ©s municipales, et qu'il n'avait fait que confirmer, en 1230, moyennant finance, des privilĂ©ges dĂ©jĂ  existants en partie, et qu'il lui Ă©tait loisible de dĂ©truire. On trouve, en effet, dans la charte d'affranchissement, les phrases suivantes Est Ă  savoir que tuit de la commune de Provins, puent et pourront vendre et acheter hĂ©ritaiges et autres choses, si comme il les ont heues devant.... » Cette possession prĂ©alable de privilĂ©ges par la ville de Provins devient Ă©vidente Ă  la vue d'une charte 206 INSTITUTIONS CIVILES de 1190, dans laquelle le comte Henri-le-Jeune supprime Ă  perpĂ©tuitĂ© la taille qu'il avait droit de lever sur la ville et la chĂątellenie de Provins, moyennant une pension annuelle de six cents livres. A cette condition, il jure et fait jurer Ă  sa mĂšre, et Ă  son frĂšre Thibaut, sur les saints Evangiles, que jamais lui, ni ses successeurs, ne lĂšveront de taille sur la commune du chĂąteau et de la chĂątellenie, quelqu'accroissement qu'ils puissent prendre. Ainsi, depuis 1190, et mĂȘme depuis 1153, comme le constate, une charte par laquelle le comte Henri accorde de beaux privilĂ©ges aux moines de SaintAyoul, la ville de Provins avait le nom de commune, et Ă©tait libre de toute taille envers les comtes de Champagne et de Brie. Peut-ĂȘtre possĂ©dait-elle alors quelques libertĂ©s commerciales, comme les villes de loi du moyen-Ăąge, au nombre desquelles il faut la compter. Ce dut ĂȘtre une nĂ©cessitĂ© sentie depuis le commencement de son opulence, qu'un peu de franchises dans une citĂ© populeuse oĂč la richesse industrielle Ă©tait trop profitable aux seigneurs, pour qu'ils hĂ©sitassent Ă  sacrifier Ă  son dĂ©veloppement une portion de leur puissance. Dans ce cas, probablement, l'agrandissement de Provins, l'extension de son commerce, exigĂšrent un nouveau rĂšglement, une constitution plus large ; et ce fut notre Thibautle-Chansonnier qui en gratifia les Provinois. Mais la charte de franchise de 1230, quoique bien plus explicite que celle dĂ© 1190, et constituant une commune complĂšte, n'a, dans sa forme, rien qui ressemble Ă  ces concessions seigneuriales arrachĂ©es par des bourgeois rebelles ou redoutables. Les privilĂ©ges qu'elle octroie, et qui sont encore dĂ©veloppĂ©s DU COMTÉ DE CHAMPAGNE. 207 dans une autre charte de Thibaut, datĂ©e de 1252, sont d'ailleurs peu Ă©tendus; elle porte sur des droits plutĂŽt pĂ©cuniaires que politiques. On n'y voit pas trace de ce principe de fraternitĂ©, si heureusement exprimĂ© dans la charle communale de la ville de Meaux, rendue par Henri-le-LibĂ©ral en 1179, et confirmĂ©e par Thibaut-le Chansonnier en 1232. On n'y trouve pas non plus de ces idĂ©es d'associations qui firent naĂźtre la libertĂ© au moyen-Ăąge. La nomination des Ă©chevins n'appartient pas aux hommes de la commune, mais au prince ou Ă  ses officiers ; le maire, Ă©tabli Ă  cĂŽtĂ© du prĂ©vĂŽt, vĂ©ritable magistrat du comte, le maire qui a prĂšs de lui aux foires sa loge de justicier, et qui, comme lui, reste soumis pendant huit jours, chaque annĂ©e, Ă  la puissance des moines de Saint-Ayoul, n'exerce, d'aprĂšs la volontĂ© du fondateur de la commune de Provins, qu'une juridiction fort restreinte. Lorsque, pour raison de leurs attributions respectives, il s'Ă©levait quelque contestation entre le prĂ©vĂŽt et le maire, elle Ă©tait portĂ©e devant le bailli, et l'appel ressortissait aux grands jours de Troyes. Le prĂ©vĂŽt Ă©tait obligĂ©, en certains cas, de comparaĂźtre devant les maires et Ă©chevins. Le comte se rĂ©servait tous les cas importants le meurtre, le rapt, le larcin, la justice et la garde de ses Ă©glises, de ses fiefs et de ses juifs ; il obligeait les bourgeois de Provins, que, plus tard, les coutumes de Champagne appellent les bourgeois du roi, Ă  moudre Ă  ses moulins et Ă  cuire Ă  ses fours. Ces dispositions se retrouvent, avec quelques lĂ©gĂšres variantes, dans les chartes municipales que Thibaut-le-Chansonnier octroya aux habitants de Saint-Florentin, en 1231; de Villeneuve-l'Arche- 208 INSTITUTIONS CIVILES VĂȘque, en 1228; de Vitry-le-François, en 1230; de Bar-sur-Seine, en 1234; de Dormans et de ChĂątillonsur-MĂąrne, en 1231; de Bray-sur-Seine, en 1227; de Coulommiers et de Villemaur, en 1231; de Sainte-Menehould, en 1238; de Bar-sur-Aube, en 1231, et d'autres bourgades d'un rang infĂ©rieur. Ce mouvement d'Ă©mancipation communale, que Thibaut imprima spontanĂ©ment Ă  ses peuples de Champagne et de Brie, a cela de particulier qu'il s'effectua, presque dans chaque ville, tranquillement et sans brusque secousse. LĂ , sans doute, les seigneurs avaient laissĂ© Ă  leurs vassaux une libertĂ© assez grande pour se livrer fructueusement aux opĂ©rations industrielles et commerciales; et cela suffisait dans un temps oĂč le besoin d'ndĂ©pendance n'Ă©tait guĂšre qu'une passion d'individualitĂ©. Aussi, quand Ă©clate une rĂ©sistance organisĂ©e par la bourgeoisie, comme Ă  Reims, c'est que le seigneur, l'Ă©vĂȘque ou le chapitre, ou quelque autocrate jouit d'une influence antipathique aux populations de la classe moyenne. Mais, sous la puissance immĂ©diate des comtes de Champagne, le bienfait de la libertĂ© descend presque toujours du seigneur Ă  ses vassaux; presque toujours aussi les chartes communales, octroyĂ©es par le comte, ont un caractĂšre de vĂ©nalitĂ© qui leur ĂŽte une partie de leur noblesse ; il semble, en effet, que le besoin d'argent, lui seul, ait fait rendre toutes ces fameuses ordonnances d'Ă©mancipation. Dans chacune de ces piĂšces, la concession de la justice et de la prĂ©vĂŽtĂ© se trouve taxĂ©e selon l'importance des lieux. Tant d'exigences financiĂšres s'expliquent, quand on considĂšre qu'elles datent de l'Ă©poque oĂč Thibaut Ă©tait en guerre avec la DU COMTÉ DE CHAMPAGNE. 209 formidable ligue du puissant duc de Bretagne. Le comte de Champagne avait aussi Ă  soutenir ses droits contre les prĂ©tentions ambitieuses de quelques-uns de ses vassaux. Le gouvernement de Barsur-Seine se trouvait alors abandonnĂ© Ă  deux femmes, Elissindre, veuve du comte Milon, et Elisabeth de Courtenay, veuve de Gaucher. L'indomptable Erard de Brienne voulut s'emparer du comtĂ© de Bar-surSeine. La comtesse, impuissante Ă  lutter contre ce puissant compĂ©titeur, et, pour ne pas rester spectatrice indiffĂ©rente des dĂ©sastres que pouvaient amener les difficultĂ©s pendantes, prit la rĂ©solution d'abandonner son douaire et ses droits Ă  Thibaut, son parent et son ami, qui se prĂ©sentait comme acquĂ©reur. Le comte de Champagne offrit immĂ©diatement le secours qu'il s'Ă©tait engagĂ© Ă  fournir par le traitĂ© offensif et dĂ©fensif contre Erard, signĂ© avant le dĂ©part de Milon pour la croisade. Il vint mettre le siĂšge devant Bar-sur-Seine, oĂč son implacable rival s'Ă©tait renfermĂ© avec un nombreux corps d'armĂ©e; il l'emporta d'assaut ; mais, en se retirant, les vaincus exercĂšrent d'affreux ravages. Thibaut, usant de reprĂ©sailles, fit dĂ©vaster les seigneuries qu'Erard possĂ©dait dans le comtĂ© et ses environs, entre autres les Riceys. Il resta tranquille possesseur de ce vaste et riche domaine, l'administra pendant plusieurs annĂ©es; puis, le donna en dot Ă  sa fille AgnĂšs, Ă©pouse de Ferrey, duc de Lorraine. Sous Thibaut-le-Chansonnier, la lĂ©gislation de Champagne reçut de notables amĂ©liorations. Les comtes, ses prĂ©dĂ©cesseurs, distinguĂ©s surtout par leur piĂ©tĂ© gĂ©nĂ©reuse et par leur attachement au siĂ©ge apostolique, avaient laissĂ© peu Ă  peu le clergĂ© pren- 210 INSTITUTIONS CIVILES dre beaucoup d'influence et s'attribuer presqu'exclusivement la justice du pays. Quelques-uns d'entre eux, moins dĂ©vouĂ©s Ă  l'Eglise, avaient parfois tĂąchĂ© de restreindre la puissance clĂ©ricale; mais elle Ă©tait trop profondĂ©ment enracinĂ©e; et ils avaient Ă©tĂ© obligĂ©s de transiger avec elle. On avait eu alors le bizarre spectacle d'une sorte de partage de la justice et d'association dans le gouvernement; l'adminislration de la province se trouvait mi-partie ecclĂ©siastique, mi-partie laĂŻque. Tel revenu, tel impĂŽt appartenait au comte; tel autre, au clergĂ©; tel dĂ©lit Ă©tait justiciable des officiers de l'Ă©vĂȘqĂče ; tel autre ressortissait de la justice du seigneur. En gĂ©nĂ©ral, les grands criminels, les homicides, les adultĂšres, les ravisseurs Ă©taient du ressort de la justice civile. On peut citer, comme exemple de ces associations administratives, celles de 1223, entre Thibaut et l'abbaye de Saint-BĂ©nigne, de Dijon, pour le domaine de Montruel; celles de 1220, entre l'abbĂ© de MontiĂ©ramey et la rĂ©gente Blanche de Navarre, pour la terre de Pargues; celles de 1219, entre la mĂȘme rĂ©gente et le monastĂšre de Saint-Val 1. Tandis que les seigneurs se plaignaient de voir s'Ă©lever en face de leur puissance une puissance rivale, qui apportait plus de sagesse et d'Ă©quitĂ© dans 1 Au-dessus de ces juridictions locales avait toujours existĂ© une cour suprĂȘme; c'Ă©tait celle des grands jours. Elle se tenait, Ă  Troyes, et Ă©tait prĂ©sidĂ©e par le comte palatin luimĂȘme. LĂ , se rĂ©unissaient tous les pairs de Champagne, les comtes de Joigny, de Rhetel, de Brienne, de Boucy, de GrandPrĂ©, de Bar-sur-Aube, de Bar-sur-Seine. D'autres seigneurs de la province, et leurs principaux vassaux, venaient se joindre Ă  eux et complĂ©ter cette assemblĂ©e solennelle que prĂ©sidait, en DU COMTÉ DE CHAMPAGNE. 211 ses jugements, le peuple s'en rĂ©jouissait parce qu'il trouvait enfin, devant les tribunaux ecclĂ©siastiques, de sĂ©rieuses garanties pour ses droits. Aussi rĂ©clamait-il, comme une faveur, la compĂ©tence de ces tribunaux, et s'adressait-il Ă  eux dans toutes les causes oĂč il avait le choix de ses juges. Cette popularitĂ©, dont jouissait depuis des siĂšcles la juridiction ecclĂ©siastique, souleva des haines qui se traduisirent souvent par les rĂ©criminations les plus violentes. Les seigneurs, ne pouvant supporter cette justice rivale, dans laquelle les populations trouvaient une protection efficace contre leur domination arbitraire et cruelle, dirigĂšrent des attaques incessantes contre la juridiction du clergĂ©. Parmi les monuments qui rappellent ces conflits sous le rĂšgne de Thibaut-leChansonnier, il suffit de citer les ordonnances que ce prince rendit, en 1236, pour faire rentrer le clergĂ© dans le droit commun. Il voulut que les prĂȘtres fussent tenus de rĂ©pondre devant les tribunaux laĂŻcs toutes les fois qu'il s'agirait de causes civiles; et, en mĂȘme temps, il dĂ©cida que les laĂŻcs pourraient se dispenser de rĂ©pondre devant les tribunaux purement ecclĂ©siastiques. Mais le pouvoir spirituel se trouvait tellement liĂ© au pouvoir temporel par l'organisation fĂ©odale, l'absence du comte, le doyen de ses pairs, le comte de Joigny. Dans la suite, un des premiers actes de souverainetĂ© de Philippe-le-Bel fut de convoquer les grands jours de Troyes, en 1288; il les tint encore en 1295, et deux fois en 1312; mais alors il nomma, pour exercer cette juridiction, des membres du parlement, et sembla ainsi dĂ©pouiller les sept pairs de Champagne d'une de leurs plus belles prĂ©rogatives. Les grands jours, dĂšs-lors, ne furent plus que ceux du roi de France. 212 INSTITUTIONS CIVILES qu'il Ă©tait extrĂȘmement difficile de modifier ses attributions sans porter atteinte Ă  ses droits. VoilĂ  pourquoi les rĂ©formes hardies de Thibaut provoquĂšrent de lĂ©gitimes rĂ©clamations au sein du clergĂ© de la Champagne. Ainsi, l'Ă©vĂȘque de Meaux jeta, en 1231, un interdit sur les terres oĂč se trouvait le comte, Ă  cause d'un pĂ©age levĂ© sur les vassaux des Ă©glises de son diocĂšse, qui se prĂ©tendaient exempts de cet impĂŽt par privilĂ©ge spĂ©cial. En 1233, deux frĂšres prĂȘcheurs, commissaires du Souverain Pontife, mandĂšrent Ă  Thibaut de rendre au ÇhapĂźtre de Saint-Quiriace de Provins l'abbesse Hilelte, qu'il avait fait mettre en prison. En 1252, le concile provincial de Sens porta de graves plaintes contre les nombreuses usurpations du prince sur les biens ecclĂ©siastiques. Ces mesures attentatoires aux immunitĂ©s de l'Eglise provenaient de la versatilitĂ© de son caractĂšre et de son dĂ©sir immodĂ©rĂ© d'influence, plutĂŽt que d'une hostilitĂ© systĂ©matique; il se montra mĂȘme en plusieurs occasions le zĂ©lĂ© dĂ©fenseur du sacerdoce; il se signala surtout par ses fondations pieuses. Pendant plusieurs nuits, dans des instants d'insomnie, il avait vu, d'une des fenĂȘtres de son chĂąteau de Provins, une clartĂ© mystĂ©rieuse sur la Colline qui regarde la partie septentrionale de la ville haute ; au milieu de cette lueur divine paraissait une. dame d'une merveilleuse beautĂ© qui, de la pointe de son Ă©pĂ©e, traçait sur la terre un circuit lumineux. Thibaut crut reconnaĂźtre dans cette apparition sainte Catherine, vierge et martyre, pour laquelle il avait une dĂ©votion particuliĂšre. Il comprit que, par cette vision, Dieu lui enseignait le lieu oĂč il voulait ĂȘtre DU COMTÉ DE CHAMPAGNE. 213 servi, et il rĂ©solut d'y bĂątir un monastĂšre de filles de l'ordre des Clarisses. Sainte Claire, qui vivait encore, lui en envoya, sur sa demande, six des plus recommandables de son institut de Saint-Damien d'Amboise, qui demeurĂšrent dans le palais des comtes, Ă  Provins, l'espace de quatre annĂ©es. Elles prirent possession du nouveau cloĂźtre en 1248, et reçurent, comme donation, de Thibaut, trente muids de froment Ă  prĂ©lever Ă  perpĂ©tuitĂ© au mois d'aoĂ»t sur ses greniers de Provins, Ă  la mesure du lieu. Le comte de Champagne eut toujours de la prĂ©dilection pour ce couvent du mont Sainte-Catherine; il s'y fit construire un bel appartement dĂ©tachĂ© du corps de l'abbaye, oĂč il allait passer les grandes fĂȘtes de l'annĂ©e et les autres jours de dĂ©votion. Toutes ses affections pieuses le ramenaient vers celte maison dont la splendeur Ă©teinte se rĂ©vĂšle Ă  peine aujourd'hui par quelques dĂ©bris Ă©pars. C'est lĂ , dans cette tranquille demeure, Ă  l'ombre de ce cloĂźtre chĂ©ri, dĂ©positaire discret de ses larmes et de ses priĂšres, que fut portĂ© son coeur ; lĂ  aussi fut enseveli le corps de son fils en un cercueil de plomb. Les religieuses cordeliĂšres de Sainte-Catherine n'existaient pas encore, que dĂ©jĂ  un monastĂšre de Cordeliers avait Ă©tĂ© Ă©tabli Ă  Provins, sous les auspices de Thibaut et de son Ă©pouse, Marguerite de Bourbon. En 1241, le comte leur accorda trois quartiers de terre pour leur servir de cimetiĂšre, et le droit d'acquĂ©rir dans sa censive. On voyait, dans le nĂ©crologe de ces religieux, l'Ă©pitaphe Ă©logieuse de la femme de Thibaut-le-Chansonnier, morte Ă  Provins en 1258. L'abbaye de Saint-Jacques, peuplĂ©e par les rĂ©guliers de Saint-Quiriace, malgrĂ© la libre 214 INSTITUTIONS CIVILES facultĂ© que lui donnaient les anciennes constitutions d'Ă©lire un abbĂ©, supplia humblement le comte de Champagne de lui confĂ©rer le droit de s'en choisir un. En 1232, l'abbaye de Lagny fit solennellement amende honorable Ă  Thibaut, de ce que son couvent avait traitĂ© de l'Ă©lection d'un abbĂ© sans lui en demander prĂ©alablement l'autorisation. Les comtes de Champagne, au reste, ne donnaient pas l'investiture des abbayes qui Ă©taient dans leur garde. Les monastĂšres de l'Argonne champenoise ne furent pas oubliĂ©s dans les largesses de Thibaut. En 1226, il s'unit aux chanoines de Reims pour donner une charte au village de Florent, qui s'Ă©tait formĂ©, prĂšs de Sainte-Menehould, sur une hauteur, au milieu des bois. Par celte charte, Thibaut assujettit les habitants Ă  servir dans son armĂ©e comme ses hommes de Sainte-Menehould. Il termina par une transaction les difficultĂ©s survenues entre les abbayes de Moiremont et de la ChalĂąde, dont les forĂȘts Ă©taient contiguĂ«s. Les religieux de Montier; dĂ©s l'annĂ©e 1224, avaient mis toutes leurs propriĂ©tĂ©s sous la protection de ce prince. L'abbĂ© et les moines de ChĂątrices, en 1239, lui cĂ©dĂšrent l'usage qu'ils avaient dans les bois de VerriĂšres ils s'associĂšrent mĂȘme Ă  lui pour Ă©tablir un village dans un endroit de leur forĂȘt, nommĂ© Rotomond. Il fut statuĂ© que les habitants de cette nouvelle localitĂ© iraient aux chevauchĂ©es et aux armĂ©es du comte et de ses successeurs, suivant les coutumes de Sainte-Menehould. Les religieux consentirent que Thibaut y fĂźt construire un chĂąteau-fort, dont on voit encore les ruines. L'annĂ©e suivante, 1240, le comte, qui aimait Ă  venir dans ce chĂąteau, placĂ© Ă  mi-cĂŽte au-dessus du vil- DU COMTÉ DE CHAMPAGNE. 215 lage, en belle vue et Ă  l'abri des vents du nord, y bĂątit une chapelle, qu'il donna, par un acte du mois de mars 1241, Ă  Aubert, abbĂ© de ChĂątrices et Ă  ses successeurs, Ă  perpĂ©tuitĂ©. Trois ans aprĂšs, il gratifia l'abbaye de Moiremont de soixante arpents de bois dans une contrĂ©e appelĂ©e CoĂŻnche, entre le territoire de cette communautĂ© et ceux de Vienne-la-Ville et de Vienne-le-ChĂąteau. On a de Thibaut-le-Chansonnier plusieurs chartes en faveur des chapitres, des Ă©glises, des monastĂšres et des hĂŽpitaux. Le Chapitre de Vitry, l'HĂŽtel-Dieu de Provins, les abbayes de Larrivour et du Val-desEcoliers, l'hospice de Bar-sur-Aube, eurent part Ă  ses libĂ©ralitĂ©s. Ce dernier Ă©tablissement, si bien administrĂ© dans son origine, tombait alors en dĂ©cadence. Thibaut, dans le dessein de lui rendre sa splendeur primitive, lui concĂ©da, en 1222, le droit d'usage dans les bois de Lignol ; et, l'an 1239, il confia le service de la maison aux religieuses de l'ordre de Saint-Victor, de Paris, qui formaient Ă  celte Ă©poque une petite congrĂ©gation Ă  Boulancourt. En 1251, il leur octroya une sauvegarde pour tous leurs biens. Il rĂ©compensa, en 1224, les bons-hommes de l'ordre de Grammont qui demeuraient dans les bois d'Hervi; et, comme la princesse Blanche, sa mĂšre, les avait dĂ©pouillĂ©s, pendant la guerre, du revenu que le comte Henri II leur avait accordĂ©, il leur concĂ©da, pour le remĂšde de son Ăąme et pour le salut de sa mĂšre, quarante livres provinoises de rente. L'abbĂ© de CĂźteaux Ă©crivit, en 1235, au ComteTroubadour Que votre Grandeur sache que nous avons exaucĂ© vos priĂšres Ă  l'Ă©gard de votre anniversaire ; quant Ă  l'incorporation de la maison dans 216 INSTITUTIONS CIVILES notre ordre, nous avons voulu qu'elle fĂ»t fille de Clairvaux, conformĂ©ment Ă  votre demande; mais nous enverrons les abbĂ©s de Trois-Fontaines et de Cheminon, pour examiner si le lieu est propice. » Ce fut le monastĂšre de Saint-Jacques de Vitry, dont l'abbesse Havide Ă©crivit, en 1237, au roi de Navarre pour le prier de consentir Ă  l'achat que l'abbĂ© de Saint-Jacques avait fait de l'eau de Merlau. Ainsi, des indemnitĂ©s gĂ©nĂ©reuses, d'abondantes aumĂŽnes, des secours de tout genre, attestaient partout le pieux zĂšle de Thibaut-le-Chansonnier. Vers la mĂȘme Ă©poque, il y eut entente parfaite entre le comte de Champagne et l'Ă©vĂȘque de Langres, pour abattre la puissance des petits barons du Bassigny. On n'Ă©prouva de rĂ©sistance sĂ©rieuse que de la part de Renier III, sire de Nogent. Renier, qui s'Ă©tait, comme Jobert, son alliĂ©, rendu coupable de . fĂ©lonie envers Thibaut, luttait depuis longtemps avec l'Ă©vĂȘque pour la dĂ©fense de certaines prĂ©tentions fĂ©odales. A propos d'une tour bĂątie Ă  Nogent sur un appartenait au Chapitre de Langres, il y avait un conflit; et l'Ă©vĂȘque, pris pour arbitre, avait donnĂ© tort Ă  Renier. Plus que jamais la querelle allait devenir violente, quand Thibaut, de concert avec l'Ă©vĂȘque, vint sommer le chĂątelain de Nogent de reconnaĂźtre la suzerainetĂ© du comte de Champagne. Renier refusa opiniĂątrĂ©ment, et Thibaut mit le siĂ©ge devant le chĂąteau, vieille forteresse bĂątie sur un roc escarpĂ©, avec d'inexpugnables tours et de solides murailles bordĂ©es d'un triple fossĂ©. RĂ©nier, Ă©puisĂ© aprĂšs un an de rĂ©sistance, accepta, en Ă©change de sa chĂątellenie, la baronnie de Chappelaines. DĂšs-lors, personne ne s'opposa plus aux en- DU COMTÉ DE CHAMPAGNE. 217 vahissements du comte de Champagne. En 1238, il acquit Montigny et le fortifia, du consentement de l'Ă©vĂȘque de Langres, qu'il promit solennellement de prolĂ©ger, et Ă  qui il renouvela, en 1239, l'hommage qu'il lui avait rendu Ă  Troyes, lorsqu'il Ă©tait encore enfant; il reconnut qu'il tenait en fiefs, du prĂ©lat, les comtĂ©s de Bar-sur-Seine, de Bar-sur-Aube; les seigneuries de Chaumont, de LafertĂ©, de Nogent, de Montigny, et la garde de MolĂȘme et de ses dĂ©pendances. Depuis cette Ă©poque, on dit Nogent-le-Roi, Monligny-le-Roi; c'Ă©tait une flatterie Ă  l'adresse du roi de Navarre, le nouveau seigneur de ces contrĂ©es. Le comte Thibaut acheva d'assurer la tranquillitĂ© de ses Ă©tats et la puissance de son gouvernement par la rĂ©forme des diverses branches de la lĂ©gislation. Ce fut lui qui, avec le concours de son grand sĂ©nĂ©chal, Simon de Joinville, rĂ©digea les coutumes de Champagne et de Brie; il rassembla les dĂ©cisions de la cour des grands jours, les coordonna, les rĂ©unit en corps de jurisprudence. Les rois de France, devenus possesseurs de la Champagne, adoptĂšrent ce code, et le firent publier dans chaque bailliage et sĂ©nĂ©chaussĂ©e. A la faveur de ces rĂ©formes lĂ©gislatives, le commerce, l'industrie et l'agriculture prirent une rapide extension en Champagne. Les foires, qui se tenaient Ă  Reims, Ă  Troyes, Ă  Provins, Ă  Bar-sur-Aube, Ă  Lagny-sur-Marne, Ă©taient les plus florissantes de l'Europe. Ces immenses entrepĂŽts de toutes sortes de marchandises, ces grandes assemblĂ©es de gens qui, de toutes parts, venaient en caravanes, rapportaient de riches bĂ©nĂ©fices aux comtes de Champagne, quoique les droits n'en fus- 218 INSTITUTIONS CIVILES sent pas rĂ©servĂ©s Ă  eux seuls, et se partageassent entre un grand nombre de personnes nobles ou ecclĂ©siastiques. Il Ă©tait facile, au reste, d'obtenir des sommes considĂ©rables, en taxant, mĂȘme Ă  bas prix, les diffĂ©rentes marchandises qui se fabriquaient dans le pays, ou qu'on apportait du dehors. Mais les princes Champenois, tout en cherchant Ă  tirer le plus d'argent possible des nĂ©gociants qui frĂ©quentaient leurs foires, devaient s'attacher en mĂȘme temps Ă  ne pas les Ă©loigner, pour l'avenir, par la privation d'un droit lĂ©gitime ; et l'on sait avec quelle chaleureuse Ă©nergie ils rĂ©clamaient contre tout acte commis au prĂ©judice des vendeurs. Ainsi, en 1243, Thibaut-le-Chansonnier Ă©crit Ă  son lieutenant de mander, aux habitants de Plaisance, de faire restituer Ă  des marchands qui se rendaient aux foires de Champagne, l'argent et les objets que des voleurs de cette ville leur avaient enlevĂ©s en chemin. Il se faisait alors, dans les villes commerçantes de la Champagne et de la Brie, un perpĂ©tuel mouvement d'exportation et d'importation ; mais, aux fĂȘtes de PĂąques et de la Saint-RĂ©mi, Ă©poques principales des foires de la province, les marchĂ©s redoublaient d'activitĂ©. Les nĂ©gociants du Midi de la France, ceux de la Lombardie, du pays de GĂšnes, de Lucques, apportaient les soies, les vins spiritueux, les huiles, les fruits secs, les aromates, les plantes mĂ©dicinales de l'Arabie, les Ă©pices et les bois de teinture de l'Inde, et d'autres produits exotiques, tels que poivre du BrĂ©sil, citron, cannelle, girofle, anis, alun, gingembre, Contre ces denrĂ©es et ces richesses des pays mĂ©ridionaux, le Nord de la France, le Flamand, le Hollandais, l'Allemand, venaient Ă©changer les DU COMTÉ DE CHAMPAGNE. 219 chanvres, les lins, les toiles, les draps, les fourrures, les fers, les aciers, les cuirs, les huiles de graines et de poisson, les poix et les rĂ©sines des contrĂ©es septentrionales. Tandis que les juifs y accouraient pour s'enrichir par l'usure, les Italiens, dĂ©jĂ  initiĂ©s au mĂ©canisme de la banque, s'y livraient Ă  des opĂ©rations plus licites, et introduisaient, par cette voie, en France, les coutumes financiĂšres de leur pĂ©ninsule. Le pape lui-mĂȘme protĂ©geait leurs actes; et, lorsqu'ils rĂ©clamaient auprĂšs de lui pour quelque lĂ©sion de leurs intĂ©rĂȘts, le Souverain Pontife lançait aussitĂŽt une menace d'excommunication contre les coupables. En 1237, GrĂ©goire IX enjoignit Ă  Thibaut de remplir scrupuleusement les clauses d'un traitĂ© conclu avec des marchands romains, sous peine, s'il n'obĂ©issait pas, d'une sentence d'interdiction contre les chĂąteaux de Provins et de Bar. Aussi, sous l'Ă©gide pontificale, les commerçants de l'Italie frĂ©quentĂšrent longtemps et avec succĂšs les foires champenoises; ils y possĂ©daient, moyennant une taxe annuelle, comme les autres nĂ©gociants de l'Ă©tranger, des magasins pour mettre en sĂ»retĂ© leurs marchandises, et des hĂŽtels pour loger leurs voyageurs. L'industrie, qui est au commerce ce qu'est l'Ăąme au corps humain, dut attirer aussi l'attention particuliĂšre deThibaut-le-Chansonnier. DĂšs l'annĂ©e 1173, Henri-le-Large avait partagĂ© la Seine en une infinitĂ© de ramifications qui, par des canaux savamment distribuĂ©s, portĂšrent les eaux du fleuve dans tous les ateliers et firent mouvoir de nombreuses usines. La sollicitude administrative de Thibaut s'Ă©tendit spĂ©cialement sur Troyes et sur Provins; il attira les T. XXll. 16 220 INSTITUTIONS CIVILES meilleurs ouvriers de l'Europe, en toutes sortes, de professions, dans ces foyers les plus actifs de nĂ©goce et d'industrie. A Troyes, la Franche-ComtĂ©, la Lorraine et l'Allemagne alimentaient les blanchisseries de toiles. De nombreux moulins Ă  papier tournaient Ă  l'aide de la Seine qui, dans ses plis multipliĂ©s, et par la force de son abondant cours d'eau, les mettait en mouvement au grĂ© des propriĂ©taires. La pelleterie formait une branche de commerce Ă©galement productive; elle consistait en menu-vair, Ă©cureuil, lapin, liĂšvre, chevrotin, agneau, fouine, loutre, chat sauvage et domestique, castor, hermine, renard, et autres animaux, dont quelques-uns paraissent ne plus habiter le territoire de la Champagne. Les produits de sa bonneterie et de sa tisseranderie, rĂ©pandus dans toute l'Europe, entretenaient plusieurs maisons de commerce aussi solides au-dedans que peu brillantes au dehors. Les bouchers, les tanneurs, les corroyeurs, cĂ©lĂšbres par leur opulence, jouaient un rĂŽle importante Troyes, qu'ils enrichissaient par leur prospĂ©ritĂ© industrielle. Provins rivalisait avec Troyes pour la perfection des arts mĂ©caniques et pour l'Ă©coulement de leurs produits. Ses fabriques de draps le disputaient aux plus fameuses de l'Europe; et l'on citait, du temps de Thibaut-le-Chansonnier, les nerfs de Provins Ă  cĂŽtĂ© de l'Ă©carlate de Gand et du drap bleu de Nicole. Les drapiers provinois, renommĂ©s en France et Ă  l'Ă©tranger, firent, pendant deux siĂšcles au moins, la richesse de leur ville, et leur organisation eut une influence certaine sur son affranchissement. Thibaut ordonna, par une charte, sur la requĂȘte des bourgeois de la commune, qu'il ne serait permis Ă  aucun DU COMTÉ DE CHAMPAGNE. 221 ouvrier en laine d'y fabriquer des draps, s'il n'avait pas acquis domicile en cette ville. Il y avait alors trois mille mĂ©tiers battants, autant de foulons et de cardeurs, sans y comprendre les artisans qu'occupaient les fabriques de couvertures et de cuirs façonnĂ©s. Les ouvriers Ă©taient rĂ©pandus dans les deux villes, en raison de leur population respective; mais ce n'Ă©tait qu'Ă  la ville basse qu'on manufacturait les cuirs, et c'Ă©tait lĂ  seulement qu'on mettait les draps en teinture, autre branche importante de l'industrie provinoise. Les gens de mĂ©tier, surtout de celui de la draperie, formaient des corporations presqu'indĂ©pendantes, et qui se gouvernaient en partie par elles-mĂȘmes. Cette organisation rangeait Provins parmi les citĂ©s qu'on appelait alors villes de loi. C'Ă©taient les villes qui, soit par un reste du rĂ©gime municipal romain, soit par un acte spontanĂ© de leurs habitants, se trouvaient avoir une juridiction de police sur le fait des mĂ©tiers et des dĂ©lits qui s'y commettaient, avec la facultĂ© d'Ă©lire ceux qui devaient l'exercer selon des statuts particuliers. Les progrĂšs de l'agriculture, de la viniculture et de l'horticulture n'eurent pas une moindre part Ă  la protection de Thibaut ; il favorisait de tout son pouvoir ceux qui s'adonnaient Ă  ces sortes de travaux. Les plaines et les campagnes, les forĂȘts et les prairies,les cours d'eau, les Ă©tangs furent entretenus avec soin et exploitĂ©s avec habiletĂ© par les religieux, ces premiers fondateurs de fermes-Ă©coles; et Thibaut, par l'empressement qu'il mit Ă  leur concĂ©der des terres spĂ©cialement les plus sauvages et les plus ingrates, contribua au dĂ©veloppement du labourage, Ă  l'assainissement des marais, et au dĂ©frichement des bois 222 INSTITUTIONS CIVILES de sa province. Les hauts barons de la Ligue, qui se l'Ă©taient partagĂ©e comme une riche proie, l'avaient transformĂ©e en un champ de bataille. Les manants, attachĂ©s Ă  la glĂšbe, Ă©puisĂ©s par les corvĂ©es, dĂ©sespĂ©rĂ©s par une longue suite d'annĂ©es calamiteuses, voyant sans cesse leurs moissons ravagĂ©es par des bandes errantes, dĂ©sertaient de toutes parts. Les cĂ©nobites, encouragĂ©s par Thibaut, se multipliĂšrent au milieu de ses terres fĂ©odales; et, Ă  force de labeurs, ils rĂ©parĂšrent les dĂ©sastres de la guerre et exercĂšrent une heureuse influence sur l'Ă©conomie rurale. Les croisĂ©s avaient rapportĂ© en France d'excellents plants de vignes des environs de JĂ©rusalem. Les vins n'avaient pas encore atteint leur qualitĂ© actuelle. Le comte, dans les Etats duquel ils commençaient Ă  s'amĂ©liorer, s'appliqua Ă  y propager les vignobles. C'est Ă  la rare habiletĂ© d'un moine de Hautvilliers, dom PĂ©rignon, natif de Sainte-Menehould, que l'on est redevable en partie de la perfection des vins de Champagne. Thibaut fit dĂ©fricher prĂšs de Sainte-Menehould un long cĂŽteau en amphithéùtre Ă  l'aspect du midi, et il y planta de la vigne. Pour que les habitants pussent l'imiter, il donna Ă  quelques manoeuvres d'autres petits coteaux Ă  essarter, sous la seule condition dĂ© les convertir en terres vinicoles. Il agit de mĂȘme en faveur de ceux de la Neuville-au-Pont et de Passavant, qui, depuis longues annĂ©es, avaient fait des essais en ce genre. De son cĂŽtĂ©, le prieur de Chaude-Fontaine, voyant les vignes fructifier, imita le prince, et dĂ©dommagea par les mĂȘmes concessions les vassaux de son prieurĂ©. Les habitants de Sainte-Menehould, par DU COMTÉ DE CHAMPAGNE. 223 honneur pour le titre de roi de Navarre que portait le comte Thibaut, imposĂšrent Ă  sa vigne le nom de CĂŽte-le-Roi. Thibaut savait mĂȘler ce qui plaĂźt et embellit au productif et Ă  l'utile. On lui doit la culture des roses dites roses de Provins, qu'il apporta de Damas en Syrie; cette fleur d'origine orientale rĂ©ussit Ă  merveille dans les jardins de la capitale de la Brie. Il se fit un grand commerce de ces plantes d'une beautĂ© incomparable. Elles ont une couleur, un parfum et des propriĂ©tĂ©s mĂ©dicinales qui les distinguent des autres espĂšces de roses, et de celles de la mĂȘme espĂšce qui ont poussĂ© dans un autre terrain. Les tiges perdent trĂšs-promptement leurs aiguillons. Les feuilles sont composĂ©es de cinq folioles assez grandes, ovales, un peu pubescentes en dessous, bordĂ©es de dents glanduleuses. Les fleurs sont d'un pourpre foncĂ©, panachĂ©es de blanc dans une des variĂ©tĂ©s. L'odeur qu'elles exhalent, se conserve aprĂšs mĂȘme qu'elles ont Ă©tĂ© sĂ©chĂ©es et rĂ©duites en poudre. On les emploie avantageusement comme tonique. Aussi ont-elles Ă©tĂ© longtemps une des principales branches du commerce horticole. On en exportait jusqu'aux Indes. Elles y Ă©taient si estimĂ©es, qu'on les y payait quelquefois au poids de l'or. On conteste Ă  notre Thibaut la gloire d'avoir rapportĂ© en France ce prĂ©cieux arbrisseau. Il en est mĂȘme qui prĂ©tendent que le rosier de Provins appartient Ă  l'espĂšce fameuse dont HomĂšre a tant vantĂ© les vertus dans son Iliade. Mais la critique a fait justice de ces allĂ©gations, et a restituĂ© Ă  Thibaut l'honneur de cette utile importation. RAPPORT SUR LA QUESTION DE L'ÉCHELLE MOBILE, Fait au nom de la Section d'Agriculture. M. DOSSEUB, Membre rĂ©sidant. MESSIEURS, Chacun de vous, et principalement ceux de nos collĂšgues qui s'occupent d'exploitations rurales, connaissent l'Ă©chelle mobile, et depuis longtemps en ont Ă©tudiĂ© l'ingĂ©nieux mĂ©canisme. Vous savez que la lĂ©gislation de 1819, divisant, d'aprĂšs l'Ă©valuation du produit ordinaire du sol arable, l'agriculture de la France en quatre zones, avait introduit un systĂšme de bascule qui tenait constamment en balance l'intĂ©rĂȘt rival du producteur et du consommateur. Celle institution avait pour but de faire, selon le 226 RAPPORT SUR LA QUESTION cours du blĂ©, pencher ou monter la balance, et tendait autant que possible Ă  Ă©galiser les prix en Ă©levant progressivement les droits d'importation Ă  mesure que les cours Ă©taient plus bas, en les rĂ©duisant en quelque sorte Ă  rien, quand les cĂ©rĂ©ales Ă©taient en faveur sur les halles. Le mĂȘme systĂšme Ă©tait appliquĂ© Ă  la sortie des cĂ©rĂ©ales, et le prix rĂ©gulateur des marchĂ©s de l'intĂ©rieur se traduisait sur les degrĂ©s du tarif de l'exportation, en prenant pour point d'appui et pour base la mĂȘme loi d'Ă©quilibre, la mercuriale des denrĂ©es. Le cadre de cette Ă©tude ne doit donc pas comprendre, mĂȘme en raccourci, l'historique de l'Ă©chelle mobile, de ses variations, de sa suspension momentanĂ©e, ni la liste des services qu'elle a rendus pendant sa vie active de trente et quelques annĂ©es. La jurisprudence agricole et la science Ă©conomique sont, depuis quelques semaines surtout, saisies de cette question qu'elles ont traitĂ©e sous toutes les formes et jugĂ©e dans tous les sens. Par les dĂ©veloppements qu'ils comportent et la profondeur des intĂ©rĂȘts qu'ils remuent, la thĂ©orie du libre Ă©change en matiĂšre de cĂ©rĂ©ales et le systĂšme de la protection, suivant les procĂ©dĂ©s de l'Ă©chelle mobile, semblaient en effet devoir agiter les populations et la presse. Il Ă©tait Ă  dĂ©sirer peut-ĂȘtre qu'une controverse qui, en Angleterre, pendant une pĂ©riode de dix annĂ©es, a mis en oeuvre tant de millions et tant d'idĂ©es, qui a sĂ©parĂ© le peuple en deux camps, divisĂ© le Parlement, et tenu incertain et dans le doute le ministre le plus Ă©nergique, le rĂ©formateur le plus audacieux DE L'ÉCHELLE MOBILE. 227 de la Grande-Bretagne, pĂ»t chez nous, avant d'ĂȘtre amenĂ©e Ă  une solution dĂ©finitive, ĂȘtre traduite pendant quelques jours Ă  la barre de l'opinion publique,et que le dossier de l'affaire n'arrivĂąt Ă  la tribune lĂ©gislative que revĂȘtu du visa des majoritĂ©s, et portant parmi ses piĂšces l'avis des intĂ©ressĂ©s. Mais, en prĂ©sence de l'agriculture aux abois, on ne pouvait perdre le temps Ă  dĂ©libĂ©rer, et Son Excellence le Ministre de l'Agriculture et du Commerce, en renvoyant d'urgence au Conseil d'État l'examen de la question qui nous occupe, a tout Ă  la fois donnĂ© satisfaction Ă  une nĂ©cessitĂ© prĂ©sente et aux plus chers instincts du pays. NĂ©anmoins, quoique prise Ă  l'improviste, l'agriculture, Ă  la veille d'une loi qui peut ĂȘtre pour elle une loi de vie ou de mort, ne pouvait rester indiffĂ©rente. Par l'organe des journaux et des revues dont elle dispose, par la voix de ses comices et des sociĂ©tĂ©s savantes, au sein desquelles il lui est accordĂ© de s'asseoir, elle a formulĂ© ses plaintes et ses espĂ©rances, et paraĂźt vouloir ouvrir dans la presse spĂ©ciale une sorte de meeting pacifique, oĂč toute idĂ©e entre sans contrĂŽle, toute discussion sans entraves. M. de Tramecourt, dont je dĂ©pose sur votre bureau le remarquable travail, a, dans la polĂ©mique soulevĂ©e par la question des cĂ©rĂ©ales, su prendre dĂšs le principe une place de choix, et s'est enrĂŽlĂ© parmi les ouvriers de la premiĂšre heure ; c'est justement pour cela que l'exĂ©cution du mandat que vous m'avez confiĂ© se prĂ©sente Ă  moi sous un cĂŽtĂ© trĂšs-dĂ©licat. Dans cette enceinte consacrĂ©e, Ă  l'abri de toute prĂ©occupation extĂ©rieure, Ă  l'adoration du gĂ©nie 228 RAPPORT SUR LA QUESTION des arts et au culte pur des belles-lettres, oĂč les questions agricoles ne sont guĂšre admises qu'au point de vue thĂ©orique et ornĂ©es de toutes les grĂąces du style, il me faut rompre avec la coutume admise, garder mes rudes allures, vous sortir vousmĂȘmes des habitudes acadĂ©miques, et vous jeter, je ne dirai pas dans un dĂ©bat politique, mais dans une question sociale. En un mot, ce n'est pas une apprĂ©ciation littĂ©raire que je vous prĂ©sente Ă  propos de l'Ă©crit de M. de Tramecourt; c'est votre concours actif pour arriver au but qu'il se pose, c'est l'impulsion, de votre autoritĂ© morale pour donner, s'il se peut, cours forcĂ© aux idĂ©es qu'il Ă©met, que je vous demande ; je dois vous dire que vous n'aurez pas l'initiative de la mesure. Et si je voulais, avant d'entrer en matiĂšre, passer la revue de nos forces, nous trouverions, il faut bien l'avouer, dans le camp des partisans de la franchise absolue du commerce des grains, des organes accrĂ©ditĂ©s dans la presse, des Ă©conomistes dont la pensĂ©e est une puissance avec laquelle il faut compter quand il s'agit de libre Ă©change. Mais nous pouvons dire que les sociĂ©tĂ©s savantes, les institutions agricoles et les comices, ceux d'entre nous surtout dont les mains tiennent plus souvent la charrue que la plume, n'ont dans la pensĂ©e qu'un dĂ©sir, sur les lĂšvres qu'une formule Protection Ă  l'agriculture. Mais comment s'exercera cette protection? La majoritĂ© des prohibitionnistes passez-moi l'expression consacrĂ©e et avec eux M. de Tramecourt, dont votre rapporteur, pour n'y plus revenir, dĂ©clare partager complĂštement les idĂ©es, rĂ©clament l'Ă©chelle mobile avec quelques modifications dont nous aurons Ă  DE L'ÉCHELLE MOBILE. 229 vous entretenir plus tard. L'Ă©tablissement d'un droit fixe pesant sur les grains, soit Ă  l'entrĂ©e, soit Ă  la sortie, selon les cours, paraĂźt aux autres une garantie suffisante. Mais on reproche Ă  ce mode de protection, plus simple Ă  la vĂ©ritĂ©, mais ayant un caractĂšre Ă©minemment fiscal et par cela mĂȘme frappĂ© d'impopularitĂ© dĂšs son origine, d'avoir peu de chances de durĂ©e. Les libres Ă©changistes enfin ne voient que dans, l'affranchissement complet du commerce des grains un avenir de prospĂ©ritĂ© pour l'agriculteur. Je craindrais, en reportant vos esprits sur les dĂ©tails d'une controverse qui me paraĂźt loin cependant d'ĂȘtre Ă©puisĂ©e, d'avoir Ă  vous entretenir d'idĂ©es et de faits qui sont depuis longtemps du domaine de l'histoire. Mais je vous dois de m'arrĂȘter sur quelques objections que les publications du jour reproduisent Ă  chaque page, et dont votre commission pense qu'on exagĂšre la portĂ©e. Le libre-Ă©change cite l'exemple de l'Angleterre; il voit dans toute mesure prohibitive Ă©dictĂ©e par la loi, une menace pour la consommation, un obstacle pour le commerce, une entrave pour le producteur. J'avoue que l'argumentation tirĂ©e de la rĂ©forme anglaise des cĂ©rĂ©ales en 1846, bien que prĂ©sentĂ©e souvent, me paraĂźt peu concluante. Vous savez, messieurs, Ă  quelle lĂ©gislation indĂ©cise avait Ă©tĂ© soumise, avant l'Ă©poque dont je vous parle, le commerce des blĂ©s dans les Ăźles britanniques. L'histoire de ces variations, tachĂ©es de sang sur plus d'une page, serait longue, en admettant que nous en lisions aujourd'hui le dernier volume. En 1815, Ă©poque Ă  laquelle il suffit de faire re- 230 RAPPORT SUR LA QUESTION monter cette Ă©tude, la production paraissant suffire Ă  la demande, une loi qui, malgrĂ© les attaques de Whitmore et de Canning au sein du Parlement, et celle de Hunt au milieu des assemblĂ©es populaires, dura jusqu'en 1828, avait fixĂ© le prix rĂ©munĂ©rateur dn blĂ© Ă  80 sh. le quarter 34 fr. 40 c. l'hectolitre; elle prohibait l'importation au-dessous de ce chiffre. Il faut faire la part du temps. En 1828, les progrĂšs de l'agriculture anglaise et les besoins d'une population toujours croissante dont les mains semblaient se multiplier pour demander du pain, avaient nĂ©cessitĂ© de nouvelles mesures. A cette Ă©poque, l'Ă©chelle mobile, modifiĂ©e en 1842 par Robert Peel qui put fixer le taux rĂ©munĂ©rateur Ă  56 sh. 24 fr. 08 l'hectolitre, entrait dans les institutions du pays et, bien souvent remuĂ©e, y restait debout pendant 18 annĂ©es, c'est-Ă -dire jusqu'en 1846, Ă©poque oĂč le bill d'exportation libre ouvrit le port de Londres et des trois royaumes aux blĂ©s du dehors, moyennant un droit fixe de 43 c. par hectolitre. Je n'ai certes pas la prĂ©tention de discuter le mĂ©rite d'une rĂ©forme fondamentale, patronnĂ©e en fin de compte par une des intelligences les plus pratiques des temps modernes ; mais j'avoue ĂȘtre un peu du nombre de ceux qui pensent qu'il y a des choses vraies ou fausses selon la position des PyrĂ©nĂ©es, sages ou funestes au-delĂ  de la Manche ou en deçà. En France, ce qui frappe la vue Ă  vol d'oiseau c'est la ferme; en Angleterre c'est l'usine. L'agriculture mĂȘme a besoin de s'y faire industrielle et d'Ă©tudier la mĂ©canique. Depuis hier la locomotive bat les blĂ©s, aujourd'hui elle les sĂšme, elle les fauchera demain. Le machi- DE L'ÉCHELLE MOBILE. 231 niste a remplacĂ© le valet de charrue ; un ingĂ©nieur pose dans le domaine de Vand-Worth les rails du labour Ă  la vapeur de Halkett, et trouve moyen mĂȘme de confier au tender le travail si minutieux du sarclage. Aussi je comprends trĂšs-bien que la lĂ©gislation anglaise, avant tout manufacturiĂšre, industrielle, commerçante, mais agricole seulement par exception, ait risquĂ© de compromettre le sort de deux cent cinquante mille fermiers au profit de vingt-six millions de marchands. Quand on a la prĂ©tention de monopoliser le commerce du monde; quand une nationalitĂ© ne peut vivre qu'Ă  la condition que, pour elle, toute idĂ©e soit une valeur commerciale, toute conquĂȘte remplacement d'un comptoir; quand elle donne au chancelier de l'Ă©chiquier pour siĂ©ge d'honneur un sac de laine, il faut avant tout tuer la concurrence au dehors, et, pour produire Ă  bas prix au-dĂ©dans, nourrir l'ouvrier de peu ou du moins Ă  bon compte. Quand Ă  l'agriculteur, qu'importe ! pourvu que le pain et le gigot du Sowth-Down abonde aux Ă©taux de Londres ou de Liverpool. Aussi, le libre Ă©changiste anglais, que l'histoire le place Ă  la tribune Ă  Westminster, ou sur les trĂ©teaux du Free-tread Hall Ă  Manchester, avait une excellente raison pour lui, celle dĂ» nombre, celle du plus fort; nous devons lui savoir grĂ© d'en avoir donnĂ© d'autres. DĂ©jĂ , Ă  l'Ă©poque dont je parle, les libertĂ©s commerciales Ă©taient chez nos voisins dans les idĂ©es et en partie dans les faits. Le monde industriel et commerçant avait fait et allait faire Ă  l'agriculteur 232 RAPPORT SUR LA QUESTION la leçon du sacrifice, en exilant le monopole. Le libre-Ă©change, avant de frapper au grenier de la ferme, avait ouvert en Angleterre presque toutes les portes de la boutique et de l'usine; il s'Ă©tait assis sur le comptoir avant d'envahir la ferme. La douane ne tarifait pas sur les docks de Londres l'habit du gentleman farmer ou lĂ© fer de sa charrue. EntrĂ©s depuis longtemps en franchise, les guanos du Chili avaient doublĂ© le produit du sol anglais. Le sacrifice imposĂ© Ă  l'agriculture nationale lui Ă©tait donc escomptĂ© Ă  l'avance, et ce n'Ă©tait pas sans raison que les organes Ă©loquents de la ligue du libreĂ©change , Cobden, Georges Wilson et autres, dĂ©veloppaient sous les yeux du fermier les horizons d'un avenir peu inquiĂ©tant. En effet, le dĂ©veloppement de la production, quelque rapide et intelligent qu'il fĂ»t, se laissait distancer par l'accroissement d'une population qui, d'aprĂšs les donnĂ©es de Robert Peel, s'augmentait de 380 mille Ăąmes chaque annĂ©e; qui s'Ă©tait, d'aprĂšs sir James Graham, Ă©levĂ©e de dix millions pendant la pĂ©riode de trente ans qui a prĂ©cĂ©dĂ© la lĂ©gislation des cĂ©rĂ©ales de 1846. Ceci admis, et la consommation devant dĂ©passer le produit, l'offre ne pouvant suffire Ă  la demande, l'utilitĂ© de l'importation libre pouvait-elle ĂȘtre discutĂ©e quand, chiffres sur table, on prouvait qu'elle Ă©tait nĂ©cessaire, et qu'on posait pour dernier argument la vie du peuple. La question des cĂ©rĂ©ales, Ă  ce point de vue, recevait des circonstances fortuites une merveilleuse impulsion. De 1839 Ă  1843, l'insuffisance de la rĂ©colte avait DE L'ÉCHELLE MOBILE. 233 inspirĂ© des inquiĂ©tudes cruelles. L'agitation des districts manufacturiers, entretenue dans les salons des ladies et dans le club par les publications de la ligue du libre-Ă©change, dans la rue et dans le mgeting par les philippiques de Cobden et de John Brigt, par John Russell dans la Chambre des Communes, pouvait avec une apparence de raison Ă©voquer le souvenir des mauvais jours des lois agraires. AprĂšs deux annĂ©es de rĂ©pit, la dĂ©tresse de 1845, une famine du XIIIe siĂšcle dans une population du XIXe siĂšcle, dit John Russell, citĂ© par Henri Richelot, devait donner le dernier coup de bĂ©lier Ă  la lĂ©gislation des cĂ©rĂ©ales dĂ©jĂ  tout en ruine. Pouvait-il en ĂȘtre autrement, quand d'un cĂŽtĂ©, portĂ©e pour ainsi dire par les vents de la mer du Nord, la voix frĂ©missante d'O'connell venait dĂ©poser au seuil de Westminster les plaintes de celte Irlande affamĂ©e que la maladie de la pomme de terre plongeait dans la plus affreuse dĂ©tresse; que de l'autre,la foule hĂąve et souffrante sortie le soir de la fabrique pour demander du pain, d'une main montrait Ă  la pairie d'Angleterre consternĂ©e les produits agricoles du continent impatients d'entrer dans le port de Londres, et de l'autre Ă©crivait sur les murs de la Chambre des Communes Marchands de blĂ©? J'esquisse n'ayant pas le temps d'Ă©crire, mais c'est l'histoire de l'Angleterre en 1845 et en 1846. Penchez-vous sur la sociĂ©tĂ© française pour y trouver quelque chose d'analogue. LĂ , l'aristocratie terrienne, assise au large, et prenant ses aises Ă  l'abri d'une lĂ©gislation protectrice du patrimoine des grandes familles, et l'industriel 234 RAPPORT SUR LA QUESTION devenu millionnaire, dĂ©coupant par larges bandes la terre que les soldats de Guillaume-le-ConquĂ©rant se partageaient avec leur Ă©pĂ©e, Ă©touffent, chacun d'un cĂŽtĂ©, la petite propriĂ©tĂ© sous la grande. Chez nous la proposition se renverse; le morcellement continue son oeuvre. C'est la grande chose qui est en train d'ĂȘtre tuĂ©e par la petite, et qui le sera dans un temps donnĂ©. Ce n'est plus l'exception qui possĂšde, mais la masse. Il suit de lĂ  que toute lĂ©gislation qui entame le sol, est un fait grave dans une nation de propriĂ©taires, et l'amoindrissement de la valeur des terres et du revenu foncier peut devenir un Ă©branlement de la fortune publique. L'agriculture a donc pour elle en France, dans la question des cĂ©rĂ©ales, ce que l'industrie et le commerce avaient contre elle en Angleterre la puissance du nombre. N'a-t-elle pas aussi celle de la raison et du bon sens? En Ă©mancipant le commerce des grains, Robert Peel Ă©tait dur pour le fermier, sans doute, mais il Ă©tait inexorable pour lui-mĂȘme, sachant d'avance que le bill de la libertĂ© des cĂ©rĂ©ales serait le dernier acte de sa vie politique et la condamnation du ministĂšre Tory; de plus, il Ă©tait logique. La libertĂ© industrielle et commerciale se promenant sur la MĂ©diterranĂ©e et l'OcĂ©an avec la flotte anglaise, la question agricole devait subir l'entraĂźnement des idĂ©es gĂ©nĂ©rales. Mais en France, quand la douane pĂšse et tarife le sac de guano Ă  la Joliette ou sur le quai du Havre, quand le monopole est assis Ă  cĂŽtĂ© de toutes nos industries dont il garde les issues, quand il veille Ă  DE L'ÉCHELLE MOBILE. 235 la porte de l'usine oĂč se forge le fer de la bĂȘche 1, Ă  celle de la fabrique oĂč se tisse la veste de l'agriculteur, est-ce bien le moment de retirer Ă  ce dernier la protection de l'Ă©chelle mobile, et de lui conseiller, au nom d'une libertĂ© commerciale dont il n'est plus le protĂ©gĂ©, mais la victime, d'attendre pour vendre ses blĂ©s qu'il n'en reste plus au pacha d'Egypte dans les magasins de Marseille? Si du moins une semblable mesure d'exception trouvait Ă  se justifier dans les circonstances ! Mais le pain Ă  bon marchĂ© peut nourrir aujourd'hui tout le monde, Ă  l'exception bien entendu de celui qui le produit. Pour nous rĂ©sumer, entre l'Angleterre, oĂč l'offre manque Ă  la demande, oĂč le peuple agriculteur se perd dans la foule des marchands, oĂč la population qui monte assure le dĂ©bouchĂ© du produit, oĂč la propriĂ©tĂ© terrienne, presque toute entiĂšre Ă  l'aristocratie du nom et du privilĂ©ge ou Ă  celle de l'argent, peut supporter sans inconvĂ©nient l'abaissement passager du revenu; Entre l'Angleterre, condamnĂ©e en matiĂšre de cĂ©rĂ©ales par l'exiguitĂ© relative du sol Ă  l'importation forcĂ©e Ă  perpĂ©tuitĂ©, ou Ă  mourir de faim; en matiĂšre d'industrie, ne craignant rien du libre-Ă©change, parce que ses manufactures couvrent de leurs produits tous les marchĂ©s du monde; Entre l'Angleterre, Ă  laquelle la supĂ©rioritĂ© de 1 La consommation de l'agriculture en fer, dit M. Michel Chevalier, est tout Ă  fait exiguĂ«, et c'est une des causes de son infĂ©rioritĂ©. T. XXII. 17 236 RAPPORT SUR LA QUESTION sa marine, assure des marchĂ©s de grains toujours libres Ă  Odessa comme Ă  Alexandrie, sur les cĂŽtes de la MĂ©diterranĂ©e, comme sur les rives de la Baltique; Et la France, terre de cĂ©rĂ©ales, oĂč la production moyenne dĂ©borde la demande, Ă©chiquier divisĂ© Ă  l'infini sur lequel vingt-deux millions d'ouvriers du sol trouvent leur case et devraient trouver leur salaire, pas de rapprochement possible. La France ne doit pas d'ailleurs, comme on l'a dit, s'exposer Ă  ce qu'une mauvaise rĂ©colte de son agriculture rebutĂ©e, et six mois de blocus maritime puissent rationner ses besoins. C'est surtout, Messieurs, en arrĂȘtant voire pensĂ©e sur cette derniĂšre considĂ©ration qu'il sera facile Ă  votre rapporteur d'Ă©tablir que, dans l'intĂ©rĂȘt mĂȘme du consommateur, la production, des cĂ©rĂ©ales a dans les annĂ©es d'abondance besoin d'une protection contre l'invasion des blĂ©s Ă©trangers. Nous sommes avant tout un peuple de laboureurs; chez nous l'industrie et le commerce pourront ĂȘtre la source honorable de grandes fortunes privĂ©es; mais, c'est selon moi dans la division et le produit progressif de la terre que gĂźt l'Ă©lĂ©ment le plus sĂ»r de la prospĂ©ritĂ©,nationale. C'est lĂ  que tout gouvernement porte ses regards quand il a besoin d'ordre et de sĂ©curitĂ©. De nos jours, l'ouvrier de la campagne a, de son bras robuste, arrachĂ© des mains qui la brandissaient l'arme de la guerre civile; il a avec un bulletin de vote prĂ©parĂ© l'empire. En remontant plus haut dans l'histoire, nous voyons tout ce qui doit avoir vie et force s'appuyer sur le sol. Mais il est juste que l'agriculture, qui assure Ă  la DE L'ÉCHELLE MOBILE. 237 sociĂ©tĂ© son existence collective, en mettant sa force Ă  la disposition de l'ordre public, Ă  l'individu son existence matĂ©rielle, en dĂ©posant ses produits sur le pavĂ© des halles ou des abattoirs, obtienne le salaire lĂ©gitime dĂ» au travail, surtout si la production et la consommation sont rattachĂ©es au mĂȘme noeud et liĂ©es par des intĂ©rĂȘts similaires. C'est ce qui nous fait dire que, dans l'intĂ©rĂȘt du consommateur surtout, il faut au fermier un prix rĂ©munĂ©rateur pour qu'il donne suite Ă  son oeuvre. La denrĂ©e avilie fait le sol dĂ©laissĂ©; il serait dangereux que, dans le dĂ©bat qui nous occupe, la nation comprĂźt trop tard que ses besoins sont en cause, et je tremblerai avec M. de Tramecourt pour les destinĂ©es du pays, quand l'agriculteur aura calculĂ© quer le prix de la vente Ă©tant infĂ©rieur Ă  celui du prix de revient, la terre en friche peut ĂȘtre une opĂ©ration commerciale comme une autre. Il faut, en dehors des semences, de l'alimentation du bĂ©tail, des fournitures faites Ă  la distillerie, etc., Ă  la France par annĂ©e cent millions d'hectolitres de blĂ©, pour qu'elle soit sĂ»re de son pain quotidien. Je ne sache pas que l'importation libre en ait jamais, dans ces derniĂšres annĂ©es de misĂšre, versĂ© plus de sept millions en douze mois. Demanderez-vous le reste Ă  l'agriculture que vous aurez par une concurrence impossible, appauvrie et dĂ©couragĂ©e ? L'importation libre, une ruine pour le fermier dans l'annĂ©e d'abondance, un palliatif impuissant aux calamitĂ©s des masses dans les annĂ©es de disette, se chargera-t-elle de combler le dĂ©ficit? Nous l'avons vu au milieu des faits contemporains et dans la pĂ©riode difficile que nous venons de tra- 238 RAPPORT SUR LA QUESTION verser, le libre-Ă©change a donnĂ© la mesure de ses forces. Les statistiques dressĂ©es par ses apĂŽtres Ă©tablissent l'insuffisance de ses ressources ; il est jugĂ© en dernier ressort par ses actes. Et notez que ses embarcations pouvaient charger en paix sur toutes les cĂŽtes, sillonner toutes lĂ©s mers; que serait-ce, si touchant un point mis en relief avec tant de raison par M. de Tramecourt, j'allais vous montrer le libre-Ă©change en prĂ©sence d'un malentendu politique qui nous fermerait les ports des États-Unis, et le pain d'Alexandrie ou de Smyrne n'arrivant sur nos marchĂ©s que sous la protection d'une escadre française ? MĂȘme dans les annĂ©es d'abondance, le consommateur a donc un intĂ©rĂȘt palpable Ă  ce que la production nationale soit rĂ©tribuĂ©e pour qu'elle continue Ă  ĂȘtre suffisante. Je ne renouvellerai pas une observation fondĂ©e sans doute, mais banale Ă  force d'avoir Ă©tĂ© faite. C'est qu'avec des intĂ©rĂȘts opposĂ©s en apparence, l'industrie et l'agriculture sont solidaires, le produit manufacturĂ© ayant besoin, pour sortir de l'usine, que le blĂ© vienne au marchĂ© sous des conditions rĂ©munĂ©ratrices. J'ajouterai que, dans cette obligation synallagmatique, dans ce contrat de rĂ©ciprocitĂ©, la prospĂ©ritĂ© commerciale dans le sens ordinaire du mot est soumise Ă  des nĂ©cessitĂ©s plus Ă©troites, en ce sens que le laboureur gĂȘnĂ© peut ne dĂ©cider la question d'un habit ou d'un chapeau Ă  rajeunir qu'aprĂšs l'avoir soumise au prĂ©liminaire d'une temporisation sage, tandis que le morceau de pain et le pot au feu de l'artisan ne s'ajournent pas Ă  huitaine. Si l'utilitĂ© d'une lĂ©gislation protectrice en matiĂšre DE L'ÉCHELLE MOBILE. 239 de cĂ©rĂ©ales, telle que l'Ă©chelle mobile, par exemple, peut se prouver en se plaçant au point de vue du consommateur, elle me paraĂźt incontestable Ă  celui de l'intĂ©rĂȘt de la production, et, chose Ă©tonnante ! il n'y a rien de plus controversĂ© sous le soleil. Je trouve nĂ©anmoins un chiffre sur lequel tout le monde est d'accord. C'est que, mĂȘme en annĂ©e de rendement favorable, le prix du blĂ© pour ĂȘtre rĂ©munĂ©rateur doit s'Ă©lever en France de 20 Ă  21 fr. l'hectolitre. Au-dessus, pour le consommateur la chertĂ© commence, au-dessous, le producteur est en perte. Celte donnĂ©e admise, si le prix rĂ©munĂ©rateur en Egypte ou Ă  New-York, soit Ă  cause des facilitĂ©s locales pour l'acquisition ou le fermage, soit Ă  raison du peu d'exigence de la main-d'oeuvre peut ĂȘtre fixĂ©e de 12 Ă  13 fr. l'hectolitre, l'entrĂ©e en franchise Ă  Marseille des produits agricoles des rives du Nil ou du Misissipi, m'explique trĂšs-bien la satisfaction du vendeur amĂ©ricain et du Fellaz, mais le fermier de Beauce me paraĂźt moins convaincu. Que la crise agricole actuelle tienne en partie Ă  des causes Ă©trangĂšres Ă  l'absence d'une loi protectrice, je le veux bien; mais l'entrĂ©e en franchise de neuf millions d'hectolitre de blĂ© depuis vingt mois, n'est cependant pas que je sache un fait de nature Ă  enrayer le mouvement en baisse des cĂ©rĂ©ales. L'effet matĂ©riel fĂ»t-il arrĂȘtĂ©, l'effet moral continue l'impulsion donnĂ©e, et le cours des denrĂ©es, fĂ»t-il Ă  Odessa plus Ă©levĂ© qu'Ă  cĂŽtĂ© de vous, Ă  Troyes, le producteur ne joue guĂšre Ă  la hausse avec les marchands de blĂ© que le moindre vent de reprise fait tourner vers la mer Noire. En dĂ©sepoir de cause, on conseille Ă  l'agriculture 240 RAPPORT SUR LA QUESTION de modifier le sens de son action, d'Ă©tendre brusquement la sole des fourrages et des plantes industrielles aux dĂ©pens de la sole destinĂ©e aux cĂ©rĂ©ales, de remplacer le froment par l'alcool ou l'huile, produits plus avantageux Ă  la vente. Sans doute une papareille mesure adoptĂ©e d'ensemble, rĂ©duisant la production d'un cinquiĂšme, et creusant sous le pied de la spĂ©culation un dĂ©ficit de vingt millions d'hectolitres que le libre-Ă©change serait trĂšs-impuissant Ă  combler, rendrait bien vite l'offre plus rare sur la place, et permettrait au blĂ© de dĂ©battre son prix au lieu de le subir. Mais malgrĂ© l'autoritĂ© qui s'attache au grand nom de M. ThĂ©nard, dont M. de Tramecourt ne reproduit du reste les avis qu'avec rĂ©serve, si nous devons voir en France ce phĂ©nomĂšne que la production subisse un mouvement de recul en prĂ©sence des besoins d'une population qui va croissant, il vaut mieux que ce pas en arriĂšre ne soit pas l'exĂ©cution d'une consigne, mais le rĂ©sultat de la force des choses. Qui de nous, Messieurs, pour le cas oĂč la dĂ©sertion d'une partie du sol, ou son application Ă  la production de denrĂ©es qui ne sont pas de nĂ©cessitĂ© premiĂšre, coĂŻnciderait avec une rĂ©colte mauvaise, voudrait s'exposer Ă  avoir contribuĂ© Ă  ce rĂ©sultat dĂ©sastreux? Ne vaudrait-il pas mieux pour ses enfants et pour soi abandonner une industrie qui, pour Ă©tablir un bĂ©nĂ©fice sur ses livres d'inventaire, aurait besoin d'escompter la misĂšre publique, et qui ne saurait entr'ouvrir Ă  nos yeux les horizons d'un avenir prospĂšre qu'Ă  travers les larmes et les privations de nos concitoyens? DE L'ÉCHELLE MOBILE. 241 La France d'ailleurs, comme le faisaient trĂšs-bien remarquer quelques membres de vĂŽtre Commission et comme l'observait avant eux M. de Tramecourt, ne peut changer en un jour lĂ©s conditions Ă©conomiques de sa culture. La nature du terrain refuse Ă©nergiquement de se prĂȘter partout Ă  ces mĂ©tarmophoses. Il faut bien laisser ses tabacs en ligne Ă  l'Alsace, ses plaines jalonnĂ©es de betteraves au nord dĂ© lĂ  France, oĂč l'usine Ă  fabriquer le sucre et la distillerie sont les annexes de la ferme. L'exploitation assise sur un sol mĂ©diocre tourne avec raison le dos Ă  ces merveilles, et vanne ses blĂ©s de semence Ă  la vĂ©ritĂ© moins peut-ĂȘtre en vue des grains que de la paille, ce principal Ă©lĂ©ment de son systĂšme d'engrais. C'est donc avec raison que M. de Tramecourt interdit la culture industrielle au laboureur de Champagne, sĂ©parĂ© qu'il est de la craie par une mince couche arable, sur laquelle, trop souvent renouvelĂ©e, la prairie artificielle hĂ©sitĂ© Ă  prendre pour cause d'abus. C'est cependant dans ces conditions qu'on nous dit encore faites moins de grains, plus de bestiaux. Encore une idĂ©e d'importation anglaise et datant de la rĂ©forme, juste peut-ĂȘtre sur lĂ©s bords dĂ© la Tees et dans les Ă©tables opulentes dĂšs frĂšres Collins, des Jonas Webb ou de Mechi, vraie dans un pays d'herbages, de population concentrĂ©e habituĂ©e au rĂ©gime de la viande, oĂč le Durham et le Dishley graissent vite et se vendent cher, mais fausse sur les bords de la Barse et dans les Ă©curies de nos fermiers appauvris, obligĂ©s, par la chertĂ© dĂ©s fourrages et le bon marchĂ© du blĂ© russe, de vendre la gĂ©nisse d'Ă©le- 242 RAPPORT SUR LA QUESTION vage pour le marĂ©chal et le bourrelier, et la meilleure vache pour payer le prix du fermage. Il rĂ©sulte de ce qui prĂ©cĂšde que tant que la science Ă©conomique n'aura pas prouvĂ© au dernier de nos paysans en sabots, que, dans des; conditions Ă©gales de superficie et de fertilitĂ©, un champ coĂ»te aussi cher Ă  l'acheteur ou au fermier sur les rives du Danube et du Volga que dans les clos de son village;. Instruit qu'il est, d'une part, que le serf russe, hier affranchi du knout, travaille une semaine complĂšte pour les trois francs de la journĂ©e de nos manoeuvres ; apprenant, de l'autre, que la construction du rĂ©seau du chemin de fer moscovite et le progrĂšs de la navigation par la rapiditĂ© et le bon marchĂ© des arrivages, font un lac français de la mer d'Azof, et d'Archangel un appendice des greniers de la Brie, le cultivateur de France fermera l'oreille au sophisme du libre-Ă©change. C'est ce qui fait qu'en demandant que le dĂ©cret de la suppression de l'Ă©chelle mobile reçoive le caractĂšre permanent d'une loi, on cherche Ă  rattacher la question agricole, une chose colossale, Ă  la question de sĂ©curitĂ© de huit Ă  neuf cents spĂ©culateurs en blĂ©, un argument de dĂ©tail, on fait flotter la fortune publique Ă  la remorque des combinaisons du calcul privĂ©. Nous n'avons pas besoin de vous dire que moins que personne nous ne voulons pour le marchand de blĂ© la peine de l'ostracisme. Il est le ressort indispensable des affaires dans un pays qui, annĂ©e moyenne, exporte plus qu'il ne demande. Une industrie qui ne peut vivre qu'Ă  la condition de DE L'ÉCHELLE MOBILE. 243 prendre le trop-plein pour combler le trop-vide, qui ne saurait prospĂ©rer qu'Ă  la charge de tendre sans relĂąche Ă  Ă©tablir le niveau gĂ©nĂ©ral des subsistances, est tout Ă  la fois digne de la sympathie de la classe qui produit et de celle qui consomme Et pourquoi donc le nĂ©gociant en blĂ© ne pourrait prĂ©tendre Ă  des bĂ©nĂ©fices raisonnables? Dans les jours nĂ©fastes, Ă  la foule aveuglĂ©e qui lui jetait la pierre, il a souvent rendu le pain Ă  des conditions inespĂ©rĂ©es. C'est lui qui se charge de redresser les erreurs du soleil et de la pluie; il dissimule de son mieux les fautes de la gelĂ©e, en combinant comme de juste son oeuvre de bienfaisance avec son oeuvre commerciale, de maniĂšre qu'Ă  chaque fin de mois la balance puisse ĂȘtre placĂ©e avec un Ă©quilibre rassurant sur le grand livre du doit et avoir. Je dĂ©clare donc demander, pour le commerce des cĂ©rĂ©ales, des lettres de grande franchise et toute l'indĂ©pendance que peut comporter une protection rassurante due Ă  l'agriculture. Quant Ă  la libertĂ© absolue, fĂ»t-elle couronnĂ©e d'Ă©pis, nous ne la dĂ©sirons pas dans la loi, parce qu'elle mĂšne Ă  la guerre des intĂ©rĂȘts, comme nous ne dĂ©sirons pas dans la rue la libertĂ© coiffĂ©e du bonnet phrygien, parce qu'elle mĂšne Ă  la guerre civile. Mais l'intĂ©rĂȘt du nĂ©gociant paraĂźt-il exiger que certains dĂ©tails de l'Ă©chelle mobile soient supprimĂ©s? le trop grand nombre de circonscriptions territoriales gĂȘne-t-il l'action du spĂ©culateur ? Les oscillations du cours doivent-elles ĂȘtre moins souvent comptĂ©es pour laisser plus grandes marges aux transactions? Je ferai bon marchĂ© de la forme, pourvu 244 RAPPORT SUR LA QUESTION que le fond reste maintenu dans nos institutions par une loi. En un mot, le prix rĂ©munĂ©rateur dĂ» blĂ© fixĂ© Ă  20 ou 21 fr. l'hectolitre, nous voulons avec les auteurs de l'Ă©chelle mobile, Ă  mesure que le cours monte au-dessus du chiffre acceptĂ© comme niveau, l'importation progressivement dĂ©grevĂ©e, l'exportation paralysĂ©e dans la mĂȘme mesure, dans l'intĂ©rĂȘt des masses. Mais quand la denrĂ©e encombre le marchĂ©, que le prix de vente est infĂ©rieur Ă  l'avance des dĂ©boursĂ©s, que l'agriculture souffre, il serait Ă  dĂ©sirer, je crois, que la lĂ©gislation fĂźt monter la garde, non Ă  la sortie des grains, mais Ă  leur entrĂ©e; on donnerait pour mot d'ordre Ă  cette sentinelle avancĂ©e Subsistance assurĂ©e Ă  la consommation, aisance garantie Ă  l'agriculture. La SociĂ©tĂ©, aprĂšs avoir entendu ce rapport, et aprĂšs une discussion approfondie de la question qu'il soulĂšve, a pris la dĂ©libĂ©ration suivante La SociĂ©tĂ© AcadĂ©mique de l'Aube, oui le rapport prĂ©sentĂ© par M. Dosseur, au nom de la section d'Agriculture, sur la question de l'Echelle mobile, et les observations faites par plusieurs membres, ConsidĂ©rant que l'Ă©tude de cette question emprunte aux circonstances actuelles et au projet de DE L'ÉCHELLE MOBILE. 243 loi soumis au Conseil d'Etat un intĂ©rĂȘt tout exceptionnel ; Qu'il est du devoir des SociĂ©tĂ©s savantes, placĂ©es au centre des populations pour en reflĂ©ter les idĂ©es et en formuler au besoin les dĂ©sirs, de se faire, auprĂšs du Gouvernement qui les protĂšge, l'Ă©cho de l'opinion publique; ConsidĂ©rant qu'il est tout Ă  la fois de l'intĂ©rĂȘt de l'agriculture et de la population de voir les institutions transitoires qui rĂ©gissent les grains faire place Ă  une lĂ©gislation d'un caractĂšre stable et permanent; ConsidĂ©rant qu'en prĂ©sence de la double nĂ©cessitĂ© d'assurer au produit agricole un taux rĂ©munĂ©rateur, et Ă  la consommation une sauve-garde contre l'exagĂ©ration du prix des denrĂ©es, la loi Ă  intervenir ne saurait mieux faire que de remettre en vigueur les dispositions de l'Ă©chelle mobile avec les modifications que permet l'Ă©tat actuel des choses ; ConsidĂ©rant que, retirĂ©e de la lĂ©gislation anglaise, sous la pression de circonstances exceptionnelles et pour la satisfaction de besoins locaux qui ne sont' pas les nĂŽtres, l'Ă©chelle mobile laissait encore Ă  l'agriculture britannique, en dehors mĂȘme du cours alors trĂ©s-Ă©levĂ© des denrĂ©es alimentaires, un avenir certain de prospĂ©ritĂ© ; Que le fermier anglais, placĂ© dans un pays d'herbages, oĂč la viande, Ă  cause des habitudes de la consommation, est d'un produit plus grand et plus facile que le blĂ©, sur un sol dont la rĂ©colte en cĂ©rĂ©ales ne saurait guĂšre fournir Ă  une population de plus en 246 RAPPORT SUR LA QUESTION plus pressĂ©e que les deux tiers du nĂ©cessaire, profitait, en outre, de tous les avantages du libre Ă©change au moment d'en subir les inconvĂ©nients; Que d'ailleurs, avertie par une discussion publique de dix annĂ©es que le commerce anglais, fort de son nombre et de son argent, imposerait la rĂ©forme du libre Ă©change Ă  l'agriculture, cette derniĂšre avait eu le temps de modifier ses conditions Ă©conomiques, de maniĂšre Ă  recevoir le nouvel Ă©tat de choses sans que la secousse fĂ»t trop sensible ; ConsidĂ©rant qu'en France, terre de cĂ©rĂ©ales, la moyenne de la rĂ©colte dĂ©passe au contraire la moyenne des besoins; que la constitution du sol, la nature du climat et les habitudes de la vie alimentaire empĂȘchent l'agriculteur, appauvri par le bas prix des grains, de trouver une compensation suffisante dans l'Ă©levage et l'engraissement des bestiaux ; Qu'en prĂ©sence de l'Ă©tat actuel de souffrance des classes agricoles, il serait funeste d'abroger la loi de protection qui n'Ă©tait Ă  leurs yeux que momentanĂ©ment suspendue, lorsque le monopole reste dans toute nos industries, tarifant le vĂȘtement et les machines, le fer qui creuse le sol et l'engrais qui le fĂ©conde; ConsidĂ©rant que, dans l'intĂ©rĂȘt du fabricant et de l'ouvrier, il est nĂ©cessaire que, mĂȘme dans les annĂ©es d'abondance, le cours des marchĂ©s soit rĂ©munĂ©rateur pour que l'artisan du sol vive dans la ferme au lieu d'encombrer l'usine, et pour que le commerce puisse conserver auprĂšs des populations agricoles l'Ă©coulement sĂ»r et facile de ses produits ; DE L'ÉCHELLE MOBILE. 247 ConsidĂ©rant enfin que, simplifiĂ©e dans son action, soit par la suppression ou la rĂ©duction des zĂŽnes territoriales que la facilitĂ© des communications rend inutiles, soit par une application moins frĂ©quente de son mĂ©canisme aux variations des cours, l'Ă©chelle mobile ne saurait ĂȘtre une entrave pour le commerce de blĂ© et une gĂȘne pour la spĂ©culation, Exprime le voeu que le dĂ©cret qui proroge au 30 septembre 1859 la libre entrĂ©e du blĂ© Ă©tranger soit rapportĂ©, et que la lĂ©gislation dite de l'Echelle Mobile, avec les modifications que le commerce rĂ©clame et que les facilitĂ©s du transport Ă  l'intĂ©rieur permettent, rĂšgle Ă  l'avenir d'une maniĂšre permanente la question des cĂ©rĂ©ales en France. Troyes, 18 fĂ©vrier 1859. ESSAI DE STATISTIQUE SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE, Par M. MONCHAUSSÈ, ANCIEN INSTITUTEUR A PLANTT. On le veut, je l'essaie ; un plus savant le fasse. LA FONTAINE. AVANT-PROPOS. La SociĂ©tĂ© d'Agriculture, des Sciences, Arts et. Belles-Lettres de l'Aube, a mis au concours, pour l'annĂ©e 1858, la Statistique de l'un des cantons du dĂ©partement de l'Aube. J'ai osĂ© entreprendre ce travail, peut-ĂȘtre un peu tĂ©mĂ©raire, mais avec la meilleure volontĂ© possible ; heureux si je puis rĂ©unir quelques suffrages, sinon pour toutes les parties de mon ouvrage, du moins pour quelques-unes. J'ai, tĂąchĂ© de me conformer au programme, tout 250 ESSAI DE STATISTIQUE en suivant quelquefois mes propres idĂ©es dans le classement des matiĂšres Ă  traiter. Faire la statistique d'un pays, c'est faire le dĂ©nombrement de la population, en dĂ©finir aussi nettement que possible la situation morale et matĂ©rielle ; c'est aussi faire un inventaire exact de tous les produits agricoles et industriels tel a Ă©tĂ© le plan que je me suis proposĂ©. J'y ai ajoutĂ© quelques considĂ©rations sur l'Agriculture qui, je l'espĂšre, ne paraĂźtront pas entiĂšrement inutiles. Mon travail est divisĂ© en trois parties La premiĂšre comprend la Topographie, la GĂ©ologie, l'Etat sanitaire du canton, la Botanique, la Zoologie; La seconde partie traite spĂ©cialement de l'Agriculture, de la Division territoriale, du Commerce, de l'Industrie ; La troisiĂšme comprend la Statistique particuliĂšre de chaque commune, son Histoire; Dans une quatriĂšme partie, j'ai rĂ©uni divers paragraphes, quelques dĂ©tails biographiques, et enfin divers rĂ©sumĂ©s. Il serait prĂ©somptueux Ă  moi de m'attribuer tout le mĂ©rite de ce petit ouvrage. J'avais sous la main presque tous les matĂ©riaux nĂ©cessaires. M. Leymerie m'a fourni sa GĂ©ologie ; les considĂ©rations sur l'Agriculture, je les ai puisĂ©es dans divers auteurs; pour l'Histoire, j'avais un manuscrit de M. ChĂšvre, de la Charmotte, ancien curĂ© de Villemaur, que M. l'abbĂ© Coffinet a gracieusement mis Ă  ma disposition. MM. les Maires, pour la plupart, se sont prĂȘ- SUR LE CANTON DAIX-EN-OTHE. 251 tĂ©s de bonne grĂące Ă  toutes les questions que je leur ai adressĂ©es. Je dois mentionner aussi les personnes dont les conseils et la coopĂ©ration m'ont Ă©tĂ© d'un grand secours ce sont MM. EugĂšne d'Ambly, maire de Saint-BenoĂźt-sur-Vannes; Salmon , de Rigny-leFerron, juge de paix actuel d'Ervy; Drouot, receveur-buraliste Ă  Saint-Mards; Delaune-Guyard, nĂ©gociant Ă  Rigny-le-Ferron, archĂ©ologue et numismate zĂ©lĂ©. Je ne dois pas oublier les instituteurs d'Aix, de Rigny, de BĂ©rulles, non plus que M. Fayard fils, Ă  Maraye-en Othe. Chacun de ces Messieurs a apportĂ© une pierre Ă  l'Ă©difice, et je profite de cette occasion pour les remercier. Planty, le 1er mars 1858. T. XXII. 18 252 ESSAI DE STATISTIQUE PREMIERE PARTIE. ÉTAT PHYSIQUE DU PAYS. § Ier. — Situation, Etendue. L'arrondissement de Troyes, dĂ©partement de l'Aube, comprend neuf cantons les trois cantons de Troyes, et ceux d'Aix-en-Othe, de Bouilly, d'Ervy, d'Estissac, de Lusigny et de Piney. Le canton d'Aix-en-Othe, qui, avec le canton de Marcilly-le-Hayer, forme la partie ouest du dĂ©partement, est limitĂ© au nord et Ă  l'est par le canton d'Estissac, au sud par les cantons d'Ervy et de Cerisiers Yonne; Ă  l'ouest par celui de Villeneuvel'ArchevĂȘque, aussi du dĂ©partement de l'Yonne. Les limites naturelles du canton d'Aix-en-Othe, dont la forme est Ă  peu prĂšs un quadrilatĂšre allongĂ© Ă  lignes brisĂ©es vers l'ouest, sont les bois du Fays et de la Croisette au nord-est ; la route impĂ©riale n° 60 de Nancy Ă  OrlĂ©ans au nord-ouest; la route impĂ©riale n9 77 de Sedan Ă  Nevers par Auxon au sudest; et enfin, Ă  l'ouest, le chemin de grande communication n° 4 de Nogent-sur-Seine Ă  Saint-Florentin. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 253 La plus grande longueur du canton est d'environ 24 kilomĂštres des confins du finage de Maraye-enOthe aux limites du finage de Vulaines, du sud-est au nord-ouest ; et la largeur, de 8 kilomĂštres des extrĂȘmes limites du finage d'Aix Ă  celles de BĂ©rulles. La superficie totale est de 20,759 hectares, la vingthuitiĂšme partie dĂ© la superficie du dĂ©parlement 600,144 hectares, et la deux cent cinquante-quatriĂšme de la surface totale de la France, d'aprĂšs M. Moreau de JonnĂšs 52,768,618 hectares. Le canton d'Aix-en-Othe offre peu de surfaces planes; il est naturellement partagĂ© en trois vallons dominĂ©s par des plateaux lĂ©gĂšrement dĂ©coupĂ©s 1° la vallĂ©e de la Vannes vers l'extrĂ©mitĂ© nord-ouest, qui s'Ă©tend sous forme de surface mamelonnĂ©e jusqu'au plateau de Planty du canton de Marcilly-le-Hayer, et dont la plus grande altitude paraĂźt ĂȘtre au sommet d'un monticule au-dessus de Vulaines 192 mĂštres; 2° le vallon de la Nosle, partant des gorges de Nogenten-Othe pour venir expirer dans la vallĂ©e de la Vannes Ă  Paisy ; 3° et le vallon qui passe Ă  BĂ©rulles et Ă  Rigny-le-Ferron. Ces deux derniers vallons offrent, de chaque cĂŽtĂ©, une lisiĂšre Ă©troite festonnĂ©e sur les bords par de petites dĂ©pressions et des ravins ; de plus, la zĂŽne qui reste entre les deux sillons principaux est elle-mĂȘme accidentĂ©e par un grand nombre de petits vallons dont deux, celui de Vaujurennes et celui de la Bouille, l'entament jusque vers son centre. Il rĂ©sulte des dispositions qui prĂ©cĂšdent que le plateau supĂ©rieur, morcelĂ© d'une maniĂšre trĂšscomplexe, s'Ă©lĂšve lĂ©gĂšrement vers le sud-est, circonstance qui est, au reste, tout-Ă -fait en rapport 254 ESSAI DE STATISTIQUE avec l'inclinaison gĂ©nĂ©rale qu'offrent les terrains dans le dĂ©partement. ImmĂ©diatement au-dessus de la Vannes, dans les bois qui dominent le hameau de Courmononcle, sa cote maximum est de 224 mĂštres; vers l'angle oriental du canton, au moulin de Maraye, elle s'Ă©lĂšve jusqu'Ă  284 mĂštres. C'est l'altitude maximum du canton. L'altitude minimum serait 102 mĂštres; elle se trouve Ă  l'extrĂ©mitĂ© de la vallĂ©e venant obliquement aboutir Ă  Vulaines. Latitude nord du canton, 48° 13'; Longitude est, 1° 26'. La distance vraie du clocher d'Aix-en-Othe Ă  l'Observatoire de Paris est de 123 kilomĂštres 40 mĂštres. Le canton d'Aix-en-Othe comprend dix communes Maraye-en-Othe, sur le plateau le plus Ă©levĂ© du canton; Nogent-en-Othe, Saint-Mards-en-Othe, Villemoiron, Aix-en-Othe et Paisy-Cosdon, dans le vallon de la Nosle; Saint-BenoĂźt-sur-Vannes et Vulaines, dans la vallĂ©e de la Vannes ; BĂ©rulles et Rigny-le-Ferron, dans le vallon qui vient aboutir Ă  Vulaines. § II. — Cours d'eau, Sources. Le canton d'Aix-en-Othe possĂšde plusieurs cours d'eau alimentĂ©s par un grand nombre de sources assez abondantes. Le plus important est la Vannes qui prend nais- SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 255 sance au village de Fontvannes, du canton d'Estissac, passe Ă  Estissac, Ă  Neuville-sur-Vannes, Ă  Villemaur, Ă  Cosdon, hameau de Paisy, Ă  Saint-BenoĂźt-sur-Vannes et Ă  Vulaines, entre dans le dĂ©partement de l'Yonne Ă  Bagneaux, et va se jeter dans l'Yonne, prĂšs de Sens, aprĂšs avoir fait tourner un grand nombre de moulins, dont le plus rapprochĂ© est Ă  deux kilomĂštres seulement de sa source moulin de Cliquat, en amont d'Estissac. Les eaux de cette riviĂšre sont presque toujours Ă  fleur du sol ; on doit en attribuer la cause Ă  la grande quantitĂ© de sources qui l'alimentent, et aussi Ă  quelques sous-affluents, qui lui apportent leur tribut Ă  droite et Ă  gauche. Il rĂ©sulte de ce niveau constant des eaux de la Vannes que les bords en sont presque toujours marĂ©cageux. Le bassin de la Vannes offre, sur une longueur de 50 kilomĂštres, une largeur moyenne d'un peu plus de 19 kilomĂštres; sa superficie est de 965 kilomĂštres carrĂ©s. La vallĂ©e, proprement dite de la Vannes, n'offre qu'une largeur moyenne de 1 kilomĂštre, limitĂ©e qu'elle est par des coteaux dont l'inclinaison dĂ©passe gĂ©nĂ©ralement 0,1. Le dĂ©bit d'Ă©tiage de la Vannes, dans la partie du canton qu'elle arrose, Ă  Saint-BenoĂźt-sur-Vannes, par exemple, paraĂźt devoir ĂȘtre Ă©valuĂ© Ă  1 mĂštre 88 c. par seconde. Des infiltrations souterraines qui existent en amont de Saint-BenoĂźt, au-dessous de l'embouchure de la Nosle, occasionnent des pertes assez considĂ©rables. Sans cette dĂ©perdition, le dĂ©bit d'Ă©tiage s'Ă©lĂšverait Ă  prĂšs de 2 mĂštres. Quoique la Vannes soit trĂšs-peu encaissĂ©e et que 256 ESSAI DE STATISTIQUE les terrains qui la bordent ne soient pas, en gĂ©nĂ©ral, Ă  plus de 0m30 en contre-haut du niveau ordinaire de ses eaux, elle ne dĂ©borde que dans des circonstances extraordinaires. Les vannages de dĂ©charge de quelques-uns des moulins ont des dimensions suffisantes pour donner passage aux plus grandes eaux La Vannes roule ses eaux sur un fond tourbeux, mĂ©langĂ© par place d'un peu de gravier; mais c'est l'exception. Les eaux des sources de ce ruisseau sont trĂšs-limpides et excellentes Ă  boire. D'aprĂšs une analyse sommaire faite par M. Belgrand, ingĂ©nieur en chef, elles renferment environ 0g20 de sels calcaires par litre ; les sulfates n'y sont presque pas apprĂ©ciables. La tempĂ©rature de ces eaux est d'environ 13 degrĂ©s centigrades; elle varie peu. De Villemaur Ă  Saint-BenoĂźt la pente de la Vannes est de 4m95 et 1m 38 de chute ; de Saint-BenoĂźt Ă  Vulaines 4m05, et 0m75 de chute. La longueur du parcours, dans le canton d'Aix, est d'environ 9 kilomĂštres. Le lit de la Vannes est assez rĂ©gulier; sa largeur varie de 5 Ă  10 mĂštres; sa profondeur, de 1m50 et 2m50. Les affluents principaux de la Vannes, dans le canton d'Aix, sont la Nosle et le ruisseau de Cerilly. La Nosle prend sa source Ă  Saint-Mards, passe Ă  Villemoiron, Ă  Druisy, Ă  La Vosve, deux hameaux d'Aix, Ă  Aix-en-Othe, Ă  Paisy-Cosdon, et vient se jeter dans la Vannes, prĂšs de la route impĂ©riale n° 60 de Nancy Ă  OrlĂ©ans. Elle fait tourner des moulins dans chacun des lieux que je viens de citer. Ses eaux SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 257 claires et limpides roulent tantĂŽt sur un lit de gravier, tantĂŽt sur un lit argileux. Le poisson n'y est pas trĂšs-abondant; nĂ©anmoins, on y trouve la truite, le vĂ©ron, le chabot, la chatouille, et quelques Ă©crevisses. Le parcours de la Nosle est d'environ 10 kilomĂštres. Le ruisseau de Cerilly prend sa source au village de ce nom dans le dĂ©partement de l'Yonne, Ă  quatre kilomĂštres de Rigny, fait tourner un moulin Ă  Cerilly mĂȘme, alimente l'usine de Gerbeau, passe contre Rigny oĂč elle fait aussi tourner un moulin, et va se jeter dans la Vannes Ă  Vulaines, aprĂšs un cours d'environ sept kilomĂštres. Ce ruisseau ne nourrit aucun poisson, Ă  l'exception du vĂ©ron et de la chatouille. Nous avons dit, au commencement de ce paragraphe, que le bassin de la Vannes renfermait un grand nombre de sources. Peu de vallĂ©es, en effet, en offrent de plus abondantes, et en plus grande quantitĂ©. C'est sur le territoire de Courmononcle, hameau de Saint-BenoĂźt, qu'elles sont le plus nombreuses le langage vulgaire les dĂ©signe sous le nom de BĂźmes. Les plus belles fontaines sont dans le vallon de la Nosle ; Saint-Mards, Villemoiron et Aix sont bien partagĂ©s sous ce rapport. § III. — Nature du sol, GĂ©ologie. D'aprĂšs M. Leymerie, le canton d'Aix-en-Othe ne prĂ©sente que trois genres de terrains. La craie, qui joue le rĂŽle de roche fondamentale ; 258 ESSAI DE STATISTIQUE le terrain tertiaire, et les terrains d'alluvion et de dĂ©tritus, auxquels viennent naturellement s'annexer les blocs Ă©pars de grĂšs sauvage. Terrain d'alluvion. — Le terrain d'alluvion, qu'on trouve gĂ©nĂ©ralement dans la vallĂ©e de la Vannes, est une pĂąte blanche argileuse, renfermant 80 p. 0/0 de carbonate de chaux et 20 p. 0/0 d'argile, et ordinairement recouverte par des marĂ©cages tourbeux. ImmĂ©diatement au-dessous de cette pĂąte argileuse, on trouve des dĂ©bris de silex. La prĂ©sence du silex Ă  cette profondeur peut s'expliquer ainsi, je le prĂ©sume A l'Ă©poque du bouleversement de cette contrĂ©e, les dĂ©tritus des coteaux ayant Ă©tĂ© entraĂźnĂ©s dans la vallĂ©e, il en rĂ©sulta que les silex, se trouvant plus pesants que l'argile et la craie qui Ă©taient en suspension dans l'eau, furent tout naturellement prĂ©cipitĂ©s au-dessous. La vallĂ©e de la Vannes ne fut pas le théùtre d'un bouleversement unique ; car, tout rĂ©cemment, M. EugĂšne d'Ambly, faisant des sondages sur le territoire de Saint-BenoĂźt, au milieu du domaine d'ArmentiĂšres, fut tout surpris de rencontrer deux couches de tourbe et deux couches de terrain d'alluvion superposĂ©es. La vallĂ©e de la Nosle prĂ©sente un dĂ©pĂŽt assez diffĂ©rent de celui de la vallĂ©e de la Vannes. C'est un limon noir, facile Ă  pĂ©nĂ©trer, qui se trouve recouvert par un conglomĂ©rat trĂšs-solide, probablement ComposĂ© de fragments de silex et de craie cimentĂ©s par du calcaire. Le terrain dĂ©tritique consiste ordinairement en une terre rougeĂątre, argilo calcaire, mĂ©langĂ©e de silex. Sur les coteaux, vers Planty, ce dĂ©pĂŽt est ssez peu dĂ©veloppĂ©. Dans la rĂ©gion qui s'Ă©tend au midi de la Vannes, il est bien plus important et son SUR LE CANTON DAIX-EN-OTHE. 259 Ă©paisseur devient d'autant plus considĂ©rable qu'on s'avance plus Ă  l'ouest et au sud. Du cĂŽtĂ© de BĂ©rulles et de Rigny, il offre en abondance du sable, des fragments de fer gĂ©odique et des blocs de grĂšs; Ă  Rigny surtout, les silex qu'il contient offrent souvent la forme de diffĂ©rents genres d'oursins. Les ravins et les cĂŽtes situĂ©s sur la partie ouest du canton offrent partout beaucoup de blocs de grĂšs sauvage ; mais Maraye et Rigny sont les localitĂ©s qui en renferment le plus; l'exploitation s'en est emparĂ©e pour les constructions. Terrain tertiaire. — Cette partie du sol du canton occupe naturellement le plateau de la rĂ©gion sud. Elle est reprĂ©sentĂ©e par le dĂ©pĂŽt argilo-sableux qu'on trouve dans les terriers du Jars oĂč il se compose de masses enchevĂȘtrĂ©es d'argile panachĂ©e et de sables diversement colorĂ©s. En certains points, ce sable forme Ă  lui seul tout le dĂ©pĂŽt. Cette circonstance est remarquable du cĂŽtĂ© de BĂ©rulles oĂč cette roche offre une couleur rouge d'une grande vivacitĂ©. Sur le territoire de Maraye, au hameau de la PerriĂšre, sur les bords du plateau, ce terrain offre une argile impure d'une couleur jaune-brun uniforme, mĂ©langĂ©e de silex. Craie. — Cette roche qui forme, comme dĂ©jĂ  nous l'avons dit, le fond du sol du canton, prĂ©sente tous les caractĂšres de la craie blanche. Elle contient peu de silex; nĂ©anmoins, Ă  SaintBenoĂźt et Ă  Paisy, ils s'y trouvent assez abondamment disposĂ©s en couches horizontales. On y trouve quelques rognons de pyrites et quelques nids de limonife et d'argilite. Les seuls fossiles qu'on remarque sont le Spatangus coranguinum et les genres 260 ESSAI DE STATISTIQUE Inoceramus, Ventriculites, Spongus. Ces derniers fossiles sont gĂ©nĂ©ralement remplis par une craie siliceuse. Dans les environs d'Aix, les silex sont presque tous crayeux, comme si la silice, dit M. Leymerie, avait manquĂ© pour les former complĂštement. Toutes les communes du canton, ou Ă  peu prĂšs, possĂšdent une crayĂšre d'oĂč on extrait les matĂ©riaux qui entrent dans la construction des bĂątiments. Les unes sont Ă  ciel ouvert, les autres souterraines. § IV. — Aspect du pays. Pris dans son ensemble, le canton d'Aix-en-Othe offre Ă  l'oeil du voyageur un tableau pittoresque et animĂ©. Collines et vallons, ravins et coteaux, tout se succĂšde, se lie, s'enchevĂȘtre, se dĂ©coupe sans cesse. Il est ornĂ© de forĂȘts magnifiques, ou couronnĂ© d'arbres Ă  fruits dont les produits font la richesse de ses habitants. C'est au mois de mai, surtout, que les campagnes sont belles Ă  voir, au moment oĂč les arbres Ă©panouissent leurs fleurs blanches ou purpurines. Du haut des collines, l'oeil du spectateur se repose charmĂ© sur cet immense tapis de fleurs. Ajoutez Ă  cela soixante-dix fermes ou hameaux groupĂ©s autour de leurs centres respectifs, et formant comme autant de haltes au milieu de cet immense jardin oĂč les bois et les arbres fruitiers se disputent Ă  l'envi une place au soleil. Si vous aimez la nature agreste, sauvage, Nogenten-Othe vous l'offre abondante et variĂ©e ce ne sont que ravins, fondriĂšres, maisonnettes Ă©parses sur un sol hĂ©rissĂ© de roches; vous croiriez presque voir des SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 261 chĂąlets suisses. Si vous aimez la vie animĂ©e, rieuse, trouvez-vous Ă  Aix, le chef-lieu de canton, vers les deux heures de relevĂ©e, vous verrez sortir une fourmiliĂšre d'ouvriers en bonneterie, cherchant l'ombre ou le soleil, suivant la saison; Aix, qui possĂšde ses poĂštes, ses improvisateurs, sa compagnie de pompiers modĂšle, qui ne trouve de rivale que dans Maraye, assis bien loin dans la forĂȘt d'Othe, et qui ne craint pas d'envoyer son orphĂ©on jeter un dĂ©fi Ă  de populeuses citĂ©s. Saint-Mards, bourgade sans cesse remuante depuis la querelle des huguenots, comme si ces derniers, en disparaissant du sol, avaient voulu lui laisser en hĂ©ritage leur esprit d'agitation, Saint-Mards, avec sa fontaine jaillissante, vous offrira l'aspect d'une ville essentiellement marchande, alimentĂ©e par six foires fort achalandĂ©es. Tout au contraire des communes prĂ©cĂ©dentes, Rigny-le-Ferron, claquemurĂ© dans un Ă©troit vallon avec ses maisons en pierres de roche, serrĂ©es, compactes, vous fait l'effet d'une citĂ© bourgeoise d'un pays de rentiers, quoique pourtant la classe ouvriĂšre y soit nombreuse et gĂ©nĂ©ralement peu aisĂ©e. Il n'y a point d'activitĂ©, point de mouvement, tout y est morne, silencieux. A quoi peut tenir cet Ă©tat de torpeur, de somnolence dans lequel Rigny se trouve enveloppĂ©? A mon avis, en voici la cause. La plus grande partie des ouvriers de ce bourg appartient Ă  la classe des maçons, des charpentiers, des scieurs de long; chaque jour ces ouvriers quittent leur mĂ©nage pour se rĂ©pandre dans les pays voisins, et ne rentrent que le soir. Que dirai-je de BĂ©rulles, dont l'Ă©glise a mĂ©ritĂ© d'ĂȘtre classĂ© parmi les monuments historiques; de 262 ESSAI DE STATISTIQUE Vulaines, que Danville et Pasumot disent ĂȘtre l'ancien Clanum des Romains ; de Saint-BenoĂźt-sur-Vannes, paisiblement assis entre la vieille voie romaine de Troyes Ă  Sens, et la route impĂ©riale n° 60 de Nancy Ă  OrlĂ©ans; de Paisy, qui dort, sans s'en douter, sur les ruines d'une ville gallo-romaine ? Ces villages, essentiellement agricoles, mĂšnent une vie paisible, retirĂ©e, peu soucieux de l'agitation, partage ordinaire des centres populeux. Foies de communication. — Oberkampf a dit quelque part Un pays traversĂ© de grandes routes et » de riviĂšres, porte dans son sein les plus sĂ»rs Ă©lé» ments de sa prospĂ©ritĂ©. Toutes les voies de com» munication, quelles qu'elles soient, sont autant » d'artĂšres qui font couler le sang et la vie dans le » grand corps qu'elles sillonnent et qu'elles ali» mentent. » Sous ce rapport, le canton d'Aix-en-Othe a peu de chose Ă  envier aux pays les mieux favorisĂ©s. IndĂ©pendamment de la route impĂ©riale de Nancy Ă  OrlĂ©ans, qui traverse Saint-BenoĂźt et Vulaines, se dirigeant vers Villeneuve-l'ArchevĂȘque, on trouve la route dĂ©partementale n° 4 de Tonnerre Ă  Nogentsur-Seine, passant par Maraye, Saint-Mards, Villemoiron, Aix-en-Othe, se doublant de la route impĂ©riale n° 60, prĂšs de Cosdon, traversant Villemaur pour aller aboutir Ă  Marcilly-le-Hayer, oĂč elle s'adjoint le chemin de grande communication n° 4 de Nogent-sur-Seine Ă  Saint-Florentin. Ce mĂȘme chemin de grande communication n° 4, qui se confond un instant avec la route impĂ©riale n° 60 Ă  Vulaines, traverse Rigny-le-Ferron; et, comme s'il fallait que les plus petites parties du SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 263 canton eussent leur part dans le systĂšme de bonne viabilitĂ©, il forme deux embranchements qui se dirigent l'un vers BĂ©rulles, l'autre vers l'usine Gerbeau, Cerilly et Fournaudin de l'Yonne, pour se rejoindre Ă  la JarronnĂ©e. Mentionnons aussi le chemin n° 3 de Villeneuve-au-Chemin Ă  la route n° 60, par Maraye et Vauchassis. Le canton possĂšde encore le chemin n° 5 de Maraye Ă  Estissac par Chennegy; le chemin n° 12 de Maraye Ă  Bouilly par Sommeval; le chemin n° 17 de Saint-Mards Ă  Sormery Yonne, par Nogent-en-Othe. Le canton est sillonnĂ©, en outre, par plusieurs chemins d'intĂ©rĂȘt commun Le n° 17 d'Aix-en-Othe Ă  Estissac par Neuvillesur-Vannes ; le n° 22 d'Ervy Ă  Saint-Mards par Vosnon; et un autre projetĂ© de BĂ©rulles Ă  Estissac par Aix-en-Othe, etc. De plus, chaque commune possĂšde un grand nombre de chemins vicinaux entretenus au moyen de prestations, et reliant les hameaux Ă  leur chef-lieu, ou les communes entre elles. Peu de cantons peuvent se flatter de possĂ©der un plus riche rĂ©seau de chemins. Et si, Ă  toutes ces lignes nous ajoutons celle trĂšsprobable d'OrlĂ©ans Ă  Vitry-le-Français, et qui, trĂšscertainement, si elle a lieu, traversera le canton dans l'une ou l'autre de ses parties, ne serons-nous pas autorisĂ©s Ă  dire Ă  toutes ces populations La civilisation vient Ă  vous Ă  grands pas ; elle veut, Ă  toute force, vous faire sortir de l'orniĂšre, hĂątez-vous, profitez du mouvement ; secouez vos prĂ©jugĂ©s ; dĂ©barrassez-vous de votre vieille routine, entrez lestement dans la voie du progrĂšs; devenez agriculteurs et industriels. 264 ESSAI DE STATISTIQUE ConsidĂ©rĂ© sous le rapport des constructions, le canton d'Aix ne reste pas en arriĂšre les vieilles masures disparaissent graduellement. On voit partout s'Ă©lever de belles maisons larges, vastes, aĂ©rĂ©es; la tuile et l'ardoise remplacent le chaume; le sol du canton, riche en argile, a permis d'Ă©tablir de nombreux fourneaux qui livrent la tuile et la brique Ă  des prix modĂ©rĂ©s. NĂ©anmoins, Saint-Mards, Maraye et Nogent-en-Othe laissent encore Ă  dĂ©sirer sous le rapport des toitures. Le chaume y est encore trop abondant. § V. — mĂ©tĂ©orologie. Les vents qui rĂ©gnent le plus habituellement dans le canton d'Aix sont les vents d'est et d'ouest dans la vallĂ©e de la Vannes, les vents du nord et du sud dans les vallons longitudinaux. L'air est vif et pur, et les marais de la Vannes, qu'on a tant dĂ©criĂ©s, n'exercent aucune influence dĂ©lĂ©tĂšre sur la santĂ© des individus qui habitent le long de son cours. Paisy, Saint-BenoĂźt et Vulaines n'ont aucune maladie locale, et les affections qui y rĂšgnent leur sont communes avec toutes les autres parties du canton. Il rĂ©sulte des observations faites par l'administration des ponts et chaussĂ©es que, pendant les neuf premiers mois de l'annĂ©e, la pluie tombe plus abondante que pendant les trois autres mois, et que la moyenne de l'eau tombĂ©e peut ĂȘtre Ă©valuĂ©e Ă  48 millimĂštres de hauteur. Maintenant, de quelques observations mĂ©tĂ©orolo- SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 265 giques locales faites par M. Gallois, instituteur Ă  Ă  Rigny-le-Ferron, il rĂ©sulte qu'en 1855 il y a eu, dans le bassin de la Vannes, 81 jours de gelĂ©e, 97 jours de pluie ou de neige, 38 jours de temps froid sans gelĂ©e, vent nord et nord-est; 119 jours de beau temps et 30 jours de temps brumeux. Le mois oĂč il a plu davantage est le mois d'octobre 14 jours; celui oĂč il a plus le moins, septembre 2 jours. En 1856, 50 jours de gelĂ©e, 120 jours de pluie, 106 jours de beau temps, 66 jours de temps brumeux, 17 jours de neige. Le mois de janvier a eu 19 jours de pluie, septembre 15 jours, et octobre 2 jours seulement. En 1857, de janvier Ă  septembre exclusivement, 40 jours de gelĂ©e, 52 jours de pluie, 13 jours de neige, 8 jours de temps variable et 103 jours de beau temps. Il est Ă  remarquer que l'hiver 1857-58 a Ă©tĂ© fort long sans ĂȘtre rigoureux. Il est tombĂ© fort peu d'eau depuis la moisson. Au 1er mars 1858 on n'avait pas encore vu de neige. Les cours d'eau tarissaient sensiblement, et beaucoup de petits moulins Ă©taient arrĂȘtĂ©s. On constate peu d'inondations dans le canton d'Aix ; la grande quantitĂ© de bois dont il est implantĂ© est un obstacle naturel Ă  l'Ă©coulement des eaux pluviales. Le dĂ©boisement seul pourrait amener des dĂ©sastres. La seule commune oĂč l'on ait Ă  signaler de fortes inondations, Ă  des Ă©poques assez Ă©loignĂ©es les unes des autres, est Rigny-le-Ferron placĂ© au point de jonction de plusieurs vallons. On trouve consignĂ©e, dans les registres de l'Ă©tat civil, la relation d'une grande inondation au mois de septembre 1720. Il 266 ESSAI DE STATISTIQUE se forma un abĂźme profond prĂšs de Rigny, sur le chemin qui conduit Ă  Aix-en-Othe le nommĂ© Jean Pierret y pĂ©rit. Le 30 aoĂ»t 1775, jour de saint Fiacre, la ferme de Gattot, situĂ©e proche le bois de Chevrets dans la vallĂ©e qui conduit de Rigny Ă  Aix, a Ă©tĂ© enlevĂ©e par le courant. — Elle n'a pas Ă©tĂ© reconstruite. En 1834, une nouvelle inondation faillit engloutir le bourg de Rigny, Ă  la suite d'un orage. L'eau avait atteint plus de deux mĂštres dans les rues. C'est immĂ©diatement aprĂšs cet orage qu'on creusa le GrandFossĂ© destinĂ© Ă  protĂ©ger les habitations et Ă  faciliter le dĂ©gorgement des eaux torrentielles, et leur Ă©coulement dans la Vannes. Parmi les orages dĂ©sastreux qui ont laissĂ© des traces dans les souvenirs des habitants de la vallĂ©e de la Vannes, on signale celui du jour de l'Ascension 1818. Cet orage, d'une immense Ă©tendue, commença vers les trois heures du matin. BientĂŽt les campagnes verdoyantes n'offrirent plus qu'une immense jonchĂ©e d'herbes et d'Ă©pis abattus; une grĂȘle Ă©norme avait, en un clin-d'oeil, tout brisĂ©, tout dĂ©truit, des milliers de peupliers gisaient arrachĂ©s le long de la Vannes. On trouvait les liĂšvres et les lapins tuĂ©s dans les champs. L'orage de 1824 fut moins dĂ©sastreux, la moisson Ă©tait faite. Le 3 aoĂ»t 1855, un ouragan vint assaillir de nouveau ces contrĂ©es avec cette particularitĂ© remarquable qu'il ne contenait ni grĂȘle, ni pluie. C'Ă©tait un vent terrible accompagnĂ© d'Ă©clairs incessants et de coups de tonnerre. On pouvait presque croire Ă  un bouleversement gĂ©nĂ©ral de la nature. La foudre SUR LE CANTON DAIX-EN-OTHE. 267 frappa un nombre considĂ©rable d'arbres dans les bois ; le vent dĂ©racina les peupliers dans la vallĂ©e, les arbres fruitiers dans les jardins, renversa les portes charretiĂšres chez beaucoup de cultivateurs. Cet orage Ă©tait limitĂ© au bassin de la Vannes. Parti de Malay-le-Vicomte, il embrassa tout le plateau qui domine la Vannes au midi, balaya tout sur son passage et vint aboutir Ă  la cĂŽte de Messon ; il avait durĂ© une demi-heure seulement. — A part les orages exceptionnels, les Ă©tĂ©s, dans la contrĂ©e, se passent fort tranquilles. A raison de la nature argileuse du sol, les gelĂ©es de printemps causent souvent de grands dĂ©gĂąts dans le canton. Les vignes, les arbres Ă  fruits, les poiriers surtout, subissent l'influence du froid avec une dĂ©sespĂ©rante facilitĂ©. Aussi faut-il voir avec quelle anxieuse attention le propriĂ©taire d'arbres Ă  cidre Ă©tudie le dĂ©veloppement de ses boutons Ă  fruits. N'allez pas lui parler de la rĂ©colte tant que le 11 mai, jour de saint Gengoult, n'est pas passĂ©. Dans son esprit, aprĂšs ce jour redoutable, les gelĂ©es n'ont plus d'effet. Parmi les gelĂ©es les plus funestes, on signale celle du 5 au 6 mai 1856 fruits, vignes, seigles, tout fut gelĂ©. En gĂ©nĂ©ral, il est trĂšs-rare de voir la premiĂšre dizaine du mois de mai se passer sans gelĂ©e plus ou moins funeste. § VI. - Etat sanitaire. Rien, que nous sachions, ne constate que le canton d'Aix ait Ă©tĂ© ravagĂ© par des Ă©pidĂ©mies. T. XXII. 19 268 ESSAI DE STATISTIQUE NĂ©anmoins, nous trouvons dans les registres de la paroisse d'Aix, pour l'annĂ©e 1661, que M. Malier, ayant tenu un synode le 1er septembre, il ne s'y trouva presque point de curĂ©s Ă  cause des maladies a fui ont estĂ© si fresquentes, que depuis le mois de juillet n jusques Ă  ta fin d'aoĂ»t, Ă  peine trente ou quarante per» sonnes en ont estĂ© exemptes dans celle paroisse. » Ces maladies Ă©taient peut-ĂȘtre la consĂ©quence d'un temps pluvieux et humide, car il est dit plus loin Les » grains qui estoient fort beaus au commencement de la » moisson ont estĂ© tellement gastĂ©s, qu'Ă  la fin d'aoĂ»t le » grand boisseau de fourment valait un escu, le grand " boisseau de soigle trente sois, le grand boisseau d'a» vent vingt sols. Les vignes paraissent belles, pourveu " qu'elles ne trompent point, COE la moisson, diminuA tion d'un tiers. ». Cependant, les mĂ©moires du temps signalent, vers le milieu du seiziĂšme siĂšcle, l'apparition de la peste Ă  Saint-Mards. Comme on ne fait mention que de ce bourg, il est probable que les autres parties de la contrĂ©e en furent exemptes. Le cholĂ©ra, dans ses diverses apparitions, a fait peu de ravages dans le canton ; Rigny seul a eu quelques victimes. Cette Ă©pidĂ©mie a sĂ©vi avec plus d'intensitĂ© dans le canton de Villeneuve-l'ArchevĂȘque, qui est limitrophe. Les maladies les plus communes, dans le canton d'Estissac, sont Les fiĂšvres intermittentes, Ă  divers degrĂ©s; — les nĂ©vralgies gĂ©nĂ©rales ; — les catarrhes pulmonaires ; — les pleurĂ©sies ; — les phthisies pulmonaires ; — les entĂ©rites ; – la fiĂšvre typhoĂŻde. — Les hernies sont frĂ©quentes. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 269 La fiĂšvre typhoĂŻde a sĂ©vi, en 1857, avec une grande intensitĂ© dans la commune de Rigny-le-Ferron. Il y a eu beaucoup de dĂ©cĂšs. La mort paraissait frapper avec plus de prĂ©dilection les jeunes gens de 20 Ă  30 ans. Je comptais sur de plus amples renseignements, ils m'ont manquĂ©. § VII. — Botanique. Je n'ai pas la prĂ©tention de faire, un traitĂ© de botanique. Je me suis bornĂ© Ă  mentionner les plantes les plus communes, en suivant la nomenclature de la flore française de Lamarek et de Candolle, et spĂ©cialement la liste des plantes de l'Aube, insĂ©rĂ©e dans les MĂ©moires de la SociĂ©tĂ© d'Agriculture de l'Aube annĂ©e 1844. Autant qu'il m'a Ă©tĂ© possible, j'ai tĂąchĂ© de faire suivre le nom spĂ©cifique de chaque plante, du nom populaire sous lequel elle est le plus gĂ©nĂ©ralement connue. PLANTES DES CHAMPS. Peigne de VĂ©nus Scandix pecten Veneris, vulg. Aiguillette. Ail des vignes Allium vineale, Ail bĂątard. Les graines de cette plante rĂ©pandent une odeur fort pĂ©nĂ©trante, et lorsqu'elles se trouvent mĂȘlĂ©es avec le grain Ă  moudre, elles forcent presque toujours les meuniers Ă  laver leurs meules. VipĂ©rine commune Echium vulgare, Langue de Boeuf. ChicorĂ©e sauvage Cichorium intybus. 270 ESSAI DE STATISTIQUE CentaurĂ©e scabieuse Scabiosa arvensis, TĂȘte d'alouette. Mercuriale annuelle Mercurialis annua, FoirĂŽle. Chardon des blĂ©s Cirsium arvense. C'est Ă  ce chardon que les cultivateurs soigneux font une guerre acharnĂ©e dans les champs ensemencĂ©s vers le mois de mai. Carline commune Carlina vulgaris Chardon marnat. Panicaut des champs Eryngium campestre, chardon roulant. MĂ©lampyre des champs Melampyrum arvense, Chaqueuse. Cerfeuil sauvage Chcerophyllum sylvestre, CiguĂ«, SguĂš. CiguĂ« tachĂ©e Conium maculatum, grande SguĂ«. Bardane Ă  petites fleurs Lappa minor, Coupeau, coupiau. AnĂ©mone Pulsatile AnĂ©mone pulsalilla, Ecorcheviau. Cette plante est un poison ; ses fleurs servent Ă  teindre les oeufs de PĂ ques. CentaurĂ©e Bluet Centaurea cyanus, Bluel, cornillat. Jusquiame noire Hyoscyamus niger, Herbe aux dents. Valerianelle potagĂšre et Valerianelle carĂ©nĂ©e Valerianella olitoria, Valerianella carinata, MĂąche, Doucette. CentaurĂ©e chaussetrape Centaurea calcitrapa, Echadre, chaussetrape. Laitue vivace Lactuca perennis, Ecravole, Loge. On mange cette plante en salade au printemps. Avoine folle Avena fatua, Varvoine. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 271 Mauve Ă  feuilles rondes Malva rolundifolia, Fromageot. Vesce multifiore Vicia cracca, Georgerie. Lampsane commune Lapsana communis, Gras de mouton. Gaillet gratteron Galium aparine, Gratton, Herbe grasse. Herniaire glabre Herniaria glabra, Turquette. Brome stĂ©rile Bromus sterilis, Herbe grenasse. Ornithogale en ombelle Ornithogalamumbellatum, GuĂšgne-Midi, Tourne-Midi. Pastel des teinturiers Isatis tinctorial, GuĂšde. Fumeterre officinale Fumaria officinalis, TrempĂ©e au vin. On donne cette plante en nourriture aux dindonneaux. AchillĂ©e millefeuille Achillea millefolium, Herbe Ă  la coupure, Saigne-Nez. Liseron des champs Convolvulus arvensis, Lignot. Carotte sauvage Daucus carotta, Morange. Les gens de la campagne mangent la racine en guise de carottes. On donne aussi le nom de Morange au panais sauvage Pastinaca savita; on en mange Ă©galement la racine. Bryone dioĂŻque Bryonia dioĂŻca, Navet fou. Nielle des blĂ©s Lychnis githago, NĂšle, LĂšne. Lamier pourpre Lamium purpureum. Ortie dioĂŻque Urtica dioĂŻca. Les oisons et les canards sont trĂšs-friands des jeunes pousses de cette derniĂšre plante. Renoncule rampante Ranunculus repens, Pourpier bĂątard. Dauphinelle consoude Delphinium consolida, Pied d'alouette. 272 ESSAI DE STATISTIQUE Pavot Coquelicot Papavet rhoeas, Pavot. VĂ©ronique Ă  feuilles de lierre Veronica hedermfolia, Herbe traĂźnasse. PrĂȘle des champs Equisetum arvense, Queue de renard. Armoise commune Artemisia vulgaris, Herbe de la Saint-Jean. On se sert volontiers du suc de cette plante pour aborder les abeilles. Moutarde dĂ©s champs Sinapis arvensis, Sanve. Chiendent ordinaire Triticum repens, Suard. Cuscute Ă  petites fleurs Cuscuta epithymum, RĂąche, Teigne. Bugrane rampante Qnonis repens, Tendon. Cette plante est trĂšs-redoutĂ©e des moissonneurs Ă  cause de ses Ă©pines. Ivraie enivrante Lolium temulentum, Verge. PLANTES DES PATURES MARECAGEUSES. Le MĂ©nyanthe trĂšfle-d'eau ; — la CentaurĂ©e noire ; — PAunĂ©e Ă  feuille de saule; — la Renoncule rampante; — le Populage des marais; — la Cardamine des prĂ©s ; — le Sisymbre cresson ; — le Sisymbre amphibie; — le Lychnide fleur de coucou; — le Lotus corniculĂ©; — le TrĂšfle des prĂ©s; —la Salicaire commune; — la ValĂ©riane dioĂŻque; — la Serophulaire aquatique; — le Rhinanthe crĂȘte de coq; — le PĂ©diculaire des marais; — la VĂ©ronique Beccabunga ; — le Plantain Ă  grandes feuilles ; — le Plantain lancĂ©olĂ© ; — le Rumex crĂ©pu ; — le Rumex Ă  feuilles obtuses; —le Rumex des riviĂšres Patience, langue de boeuf ; — le Fluteau plantain d'eau ; — l'Orchis Ă  larges feuilles ; — l'Iris faux- SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 273 açore; — le Jonc commun Pilat; — la Massette Ă  larges feuilles Matelas, — le Rubanier rameux ; — le Scirpe des marais; — de nombreuses espĂšces de Carex; — le Paturin aquatique; — la FĂ©tuque bleue Lande, dont on se sert pour faire des nattes Ă  fromages et des balais Ă  foyer ; — le Roseau commun, etc. PLANTES LIGNEUSES, ARBRES ET ARBUSTES. Les bois du canton d'Aix renferment Le Sorbier Allouchier Sorbus aria, Alisier blanc. Cet alisier se distingue du suivant par ses feuilles qui sont blanches en dessous. Le Sorbier torminal Sorbus torminalis, Alisier rouge. Le Sorbier domestique Sorbus domestica, Cormier. Le ChĂȘne pĂ©donculĂ© Quercus pedunculata, Le ChĂȘne Ă  fruits sessiles Quercus sessiliflofa, ChĂȘne rouvre. Le Charme commun Garpinus betulus Le HĂȘtre des forĂȘts Fagus sylvatica, FaĂŻtre, faĂŻte. Le fruit se nomme faine ou fayenne, et on en lire une huile trĂšs-passable. — Le n° 77 des MĂ©moires de la SociĂ©tĂ© d'Agriculture de l'Aube signale le tourteau de faine, comme un poison pour les chevaux. L'Erable champĂȘtre Acer campestris. Le Cornouiller mĂąle Cornus mas, le fruit se nomme Cornille. Le Peuplier Tremble Populus tremula. Le Peuplier noir Populus nigra, Poplin. Le Peuplier d'Italie Populus fastigiata. 274 ESSAI DE STATISTIQUE Le Bouleau blanc Betula alba. On le nomme Boulin, et BouliniĂšre le lieu oĂč il est plantĂ©. — Cet arbre est gĂ©nĂ©ralement rĂ©pandu dans tout le canton, mais plus abondamment pourtant au nord qu'au midi. La commune de Nogent-en-Othe possĂšde, quelques hectares de chĂątaigniers. Ils appartiennent, je crois, Ă  la famille de Chavaudon. Les arbres Ă  fruits sauvages sont Le Merisier Cerasus avium, qui sert de sujet pour greffer toute espĂšce de cerises. Le Poirier commun Pyrus communis, Poiratier. — Les poiriers Ă  cidre et ceux Ă  manger sont greffĂ©s sur cet arbre. Le Pommier commun Pyrus malus, Pomatier. Il remplit pour les pommiers les mĂȘmes fonctions que le poiratier pour les poiriers. L'Epine vinette Berberis vulgaris. Le Fusain d'Europe Evonymus europoeus, Bonnet carrĂ©. Le Nerprun Rhamnus frangula, NĂȘprun. Le TroĂ«ne commun Ligustrum vulgare, Punayat. Le Coudrier noisetier Corylus avellana, Coudre. La Viorne mencienne Viburnum lantana. L'Epine blanche Cratoegus oxyacantha, le fruit se nomme Sinelle. L'Epine noire Prunus spinosa, le fruit se nomme Prunelle. Quand le cidre ou le vin manquent, les habitants du canton d'Aix font avec la prunelle une espĂšce de vin que certains palais trouveraient fort Ăącre, mais qu'ils trouvent eux fort potable, et surtout trĂšsĂ©conomique. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 275 On trouve encore dans les bois le Houx piquant Ilex aquifolium. Le GenĂȘt velu Genista pilosa, GenĂȘtre, GinĂȘtre; sec, on s'en sert pour clore des cĂŽtĂ©s de granges, et pour allumer le feu. Le bord des ruisseaux est ordinairement plantĂ© de Saule marceau Salix caproea, Massault, de Saule blanc Salix alba, de Saule fragile Salix fragilis, de Peuplier grisard Populus canescens, de Saule amandier Salix amygdalina, d'Aulne glutineux Alnus glutinosa, Aulnelle. — Une rĂ©union de plusieurs aulnelles forment une Aulnaie. § VIII. — Zoologie. Loin de moi la pensĂ©e de faire un cours de zoologie. — Je signale seulement les espĂšces les plus connues dans le canton, en m'aidant du Catalogue de la Faune de l'Aube, par M. Jules Ray. J'ai fait simplement un appel Ă  mes souvenirs, et j'espĂšre qu'on me pardonnera facilement une omission, surtout si elle ne porte que sur des espĂšces connues seulement des naturalistes. 1°. CLASSE DES MAMMIFÈRES. Ordre des Carnassiers. La Chauve-Souris murin VespertilĂźo murinus. La Chauve-Souris noctule Vespertilio noctula. L'Oreillard commun Plecotus auritus. Le grand Fer-Ă -Cheval Rhinolophus unihastatus. 278 ESSAI DE STATISTIQUE Le petit Fer-Ă -Cheval Rhinolophus bihastatus. Le HĂ©risson d'Europe Erinaceus europoeus. On fait Ă  cet innocent animal une guerre acharnĂ©e, qu'on ne s'explique guĂšre que par l'ignorance oĂč l'on est gĂ©nĂ©ralement du service incessant qu'il rend dans les jardins, en dĂ©truisant tous les insectes rongeurs des plantes. — Il paraĂźt que ce mammifĂšre est le seul qui puisse impunĂ©ment se nourrir de cantharides qui sont un poison violent. La Musaraigne carrelet Sorex letragonurm. Elle habite les bois, les haies. — Le renard la chasse, mais ne la mange pas. La Musaraigne d'eau Sorex fodiens, habite les bords de la Vannes. La Musaraigne commune Crocidura aranea. Ces deux espĂšces portent indistinctement le nom de Merlusine. On remarque que les chats les tuent, mais ne les mangent pas. La Taupe commune Talpa europoea. M. Jules Ray, dans une ingĂ©nieuse dissertation, a cherchĂ© Ă  rĂ©habiliter cet insectivore. Il a dĂ©montrĂ© son utilitĂ© dans les prairies, en prouvant qu'il ne nuisait nullement aux plantes fourragĂšres qu'il ne mange pas, puisqu'il ne se nourrit que d'insectes. Il en rĂ©sulte au contraire un avantage; c'est que les taupiniĂšres Ă©tant formĂ©es de terre neuve, on pourrait avec fruit les rĂ©pandre sur le sol, et rĂ©gĂ©nĂ©rer pour ainsi dire la surface du prĂ©. Je suis de l'avis de M. Ray, mais je garde toute ma haine pour la taupe des jardins. Le Blaireau ordinaire Meles vulgaris, il devient rare. NĂ©anmoins on en voit quelques-uns dans les bois de Saint-BenoĂźt-sur-Vannes. On recherche sa graisse pour les douleurs rhumatismales. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 277 La Marte Mustela martes. On distingue facilement cette espĂšce, Ă  sa gorge jaune, de la Fouine dont la gorge est blanche. On la trouve dans les environs de Maraye. La Fouine Mustela foina, sa peau est fort recherchĂ©e en hiver. Le Putois Mustela pulorius, cet animal est fort redoutĂ© des fermiers dont il dĂ©truit la volaille. La Fouine et le Putois sont gĂ©nĂ©ralement dĂ©signĂ©s sous le nom de la BĂȘte. Le Furet Mustela furo, on l'Ă©lĂšve en domesticitĂ© pour chasser le lapin. La Belette Mustela vulgaris, on la connaĂźt sous le nom de BĂącole. Quelques fermiers mĂ©nagent cet animal, parce que, dit-on, il dĂ©truit les souris dans les granges; mais il fait une guerre bien plus acharnĂ©e Ă  la volaille, aux oeufs de perdrix et de caille. Il y a bĂ©nĂ©fice Ă  sa destruction. L'Hermine Mustela erminea. Elle est trĂšs-rare, mais on la voit dans les bois de Saint-Mards et de Maraye. En Ă©tĂ©, elle a quelque ressemblance avec la Belette, mais elle s'en distingue facilement par sa grosseur et par le bout de sa queue qui est toujours noir. La Loutre d'Europe Lutra vulgaris assez commune sur les bords de la Vannes. Sa peau est fort recherchĂ©e. Le Loup commun Canis lupus, assez commun dans la forĂȘt d'Othe, plus rare dans les bois qui dominent la Vannes. Le Renard rouge Canis vulpes, et le Renard charbonnier Canis alopex sont assez communs dans les bois de Courmononcle. Les chasseurs reconnaissent 278 ESSAI DE STATISTIQUE facilement celui-ci Ă  sa queue, dont l'extrĂ©mitĂ© est noire. On possĂšde une grande partie des variĂ©tĂ©s du chien domestique et du chat ordinaire. La forĂȘt d'Othe renferme quelques chats sauvages Felis catus. Ordre des Rongeurs. L'Ecureuil ordinaire Sciurus vulgaris, trĂšs commun dans les bois d'Aix-en-Othe, de Saint-Mards, de Maraye. Il place son nid, composĂ© de feuilles, Ă  l'extrĂ©mitĂ© d'une branche de chĂȘne. Le Rat commun Mus rattus, trop rĂ©pandu. Le Mulot Mus sylvaticus habite les haies. La Souris Mus musculus, bien plus commune encore que le rat, pour le dĂ©sespoir des mĂ©nagĂšres. Le LĂ©rot Myoxus nitela. On l'appelle dans nos contrĂ©es Rat dormant. Le Rat d'eau Arvicola amphibius. Il vit le long des ruisseaux. Le Campagnol ordinaire Arvicola vulgaris. C'est un vĂ©ritable flĂ©au pour les campagnes, lorsque l'hiver a Ă©tĂ© sec. Le Campagnol roussĂ tre Arvicola rubidus. Je crois qu'il existe le long de la Vannes, prĂšs du moulin de Saint-BenoĂźt. Le LiĂšvre Lepus timidus et le Lapin sauvage Lepus cuniculus, seraient assez communs si ce n'Ă©tait le braconnage. Il est vrai que le lapin est un vĂ©ritable flĂ©au pour les champs voisins des bois, et que les indemnitĂ©s qu'il provoque sont quelquefois SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 279 insuffisantes. Depuis quelques annĂ©es, des arrĂȘtĂ©s prĂ©fectoraux sont venus au secours de la propriĂ©tĂ© en prolongeant la durĂ©e de la chasse aux lapins. Ordre des Pachidermes. Le Sanglier Sus scrofa. Il Ă©tait naguĂšre trĂšscommun dans la forĂȘt d'Othe. On en voit encore quelques-uns dans les environs de Saint-Mards et de Maraye. On doit attribuer sa disparition aux grandes chasses qui se faisaient dans nos contrĂ©es avant 1848. Ordre des Ruminants. On voyait autrefois dans la forĂȘt d'Othe, beaucoup de Cerfs Cervus elaphus et quelques Daims Cervus dama; aujourd'hui il n'en existe plus. On y voit encore le Chevreuil Cervus capreolus, mais en moins grande quantitĂ© que dans le canton de Marcilly-le-Hayer. 2°. CLASSE DES OISEAUX. Ordre des Rapaces. Nous avons de passage le Faucon Hobereau Falco subbuteo. Il habite la lisiĂšre des bois et nous quitte Ă  la fin de septembre. Le Faucon Cresserelle Falco tinnunculus. On le dĂ©signe sous le nom de Emerillon, mais Ă  tort. Il habite volontiers les clochers. L'Epervier Falco nisus connu sous le nom d'Emouchet, Faumouchet, Tiercelet. Le Milan royal Falco milvus. On le reconnaĂźt 280 ESSAI DE STATISTIQUE aux cercles gracieux de son vol. Il niche dans les bois qui longent la Vannes. La Buse commune Falco buteo. Lorsqu'elle est repue, elle se tient immobile une journĂ©e entiĂšre. Le Busard des marais Falco rufus. Il habite les marais de la Vannes. Il disparaĂźt l'hiver. Le Busard Saint-Martin Falco cyaneus. M, Jules Ray l'a vu nicher dans les prĂ©s de Courmononcle. Son nom lui vient de ce qu'il est toujours de passage vers la Saint-Martin. Le mĂąle est d'un gris cĂ©leste avec les ailes noires. La femelle est brune. Il niche Ă  terre. La Chouette Hulotte Strix aluco. On la reconnaĂźt Ă  son cri qui imite celui d'un homme Ă©garĂ©. La Chouette Effraie Strix flammea. Elle niche dans les combles des Ă©glises. C'est cet oiseau qu'on accroche Ă  tort, aux portes des fermes. On commet un acte de cruautĂ© bien inutile, car cette chouette fait une grande destruction de souris et de campagnols. La Chouette ChevĂȘche Strix passerina. Elle habite les masures. Le Hibou grand-duc Strix bubo. C'est le plus grand de nos oiseaux de nuit. J'en ai vu un vivant, chez un bijoutier de Villeneuve l'ArchevĂȘque. Il avait Ă©tĂ© pris dans les bois de BĂ©rulle. Le Hibou, moyen-duc Strix otus. Il niche dans les bois. Le Hibou petit-duc Strix scops. Il habite les bois de Maraye et de Nogent-en-Othe. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 281 Ordre des Grimpeurs. Le Pic vert Picus viridis; il grimpe sans cesse le long des arbres. Le Pic EpeĂźche Picus major. On le reconnaĂźt Ă  son plumage noir variĂ© de blanc et Ă  sa nuque rouge. On l'appelle Toc-bois. Le Coucou gris Cuculus canorus, trĂšs-commun dans les bois du canton, oĂč il fait entendre ses deux notes Ă  satiĂ©tĂ© pendant tout le mois de mai. Chacun sait que cet oiseau fait couver ses oeufs par les fauvettes. À ce sujet, il a Ă©tĂ© fait bien des conjectures plus ou moins bien raĂźsonnĂ©es. Il paraĂźt, nĂ©anmoins, que le vĂ©ritable motif est que cet oiseau est polygame, et qu'Ă  l'inverse des autres oiseaux, il y a beaucoup plus de mĂąles que de femelles ; celles-ci alors, sans cesse poursuivies par une foule de mĂąles, n'auraient pas le temps de se construire un nid, et dĂ©poseraient leurs oeufs dans le premier nid venu. Je ne hasarderai pas d'opinion sur cette question. Le Torcol Yunx torquilla. Son nom lui vient de qu'il a l'habitude de renverser la tĂȘte sur son dos quand il est perchĂ©. La Huppe Upupa epops. Le nom de Huppe lui vient de la magnifique aigrette qui orne sa tĂȘte. J'en ai vu trĂšs souvent dans les bois de Saint-BenoĂźt. Le Grimpereau familier Certhia familiaris. On le nomme aussi Gravichat. Il est fort commun sur les arbres de la route de Troyes Ă  Sens. La Sitelle Torchepot Sitta europoea, commune dans tous les bois du canton. Le Martin-PĂȘcheur Alcedo ispida. On le nomme 282 ESSAI DE STATISTIQUE aussi PĂ©che-VĂ©ron, trĂšs-commun le long de la Vannes. On suspendait autrefois cet oiseau par le bec dans les habitations pour annoncer la pluie ou le beau temps. Cet usage, assez ridicule, n'existe plus. L'Hirondelle de fenĂȘtres Hirundo urbica. On reconnaĂźt cette hirondelle Ă  son croupion blanc. L'Hirondelle de cheminĂ©e Hirundo rustica. On la reconnaĂźt Ă  sa queue fourchue et Ă  sa gorge rousse. Le Martinet des murailles Cypselus murarius. On le distingue facilement Ă  son cri aigu et dĂ©sagrĂ©able; il niche dans les trous des clochers. L'Engoulevent Caprimulgus europoeus . On le nomme aussi Crapaud-Volant. Ordre des Passereaux. La Corneille noire Corvus corone. On la nomme Ă  tort Corbeau 1. La Corneille mantelĂ©e Corvus cornix. On la reconnaĂźt Ă  son plumage mi partie noir et gris. Le Freux Corvus frugilegus. C'est cette espĂšce que les laboureurs craignent tant aux semailles de printemps. Le Geai Corvus glandarius. Commun dans les bois. La Pie Corvus pica. Cet oiseau conserve encore, parmi nos cultivateurs, l'absurde rĂ©putation de porter malheur. L'Etourneau Sturnus vulgaris. On le nomme aussi 1 Le Corbeau Corvus corax, type du genre, n'existe pas dans le dĂ©partement. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 283 Sansonnet. On le voit, Ă  l'automne, se rassembler par bandes immenses autour des troupeaux. Le Loriot Oriolus galbula. Cet oiseau, au plumage jaune-dorĂ© et aux ailes noires, est un des plus beaux de nos climats. On le dit trĂšs-friand de cerises et de merises. Chacun connaĂźt son nid admirablement suspendu Ă  une branche d'arbre. La Draine Turdus viscivorus. Elle habite les bois et les vergers. Elle revient en fĂ©vrier, et fait son nid au mois de mars. La Litorne Turdus pilaris. On la reconnaĂźt Ă  sa tĂȘte cendrĂ©e. On la nomme Tiatia, Ă  cause de son cri. La Grive Turdus musicus niche dans tous les bois, et est trĂšs-commune en automne. Le Mauvis Turdus iliacus. Cette espĂšce se distingue des autres par ses flancs roussĂątres. A l'automne, on peut la tuer dans les vignes de Rignyle-Ferron. Le Merle noir Turdus merula. Le merle Ă  bec jaune est le mĂąle adulte. La Pie-GriĂšche, grise Lanius excubitor habite les garennes, les lisiĂšres des bois. La Pie-GriĂšche rousse Lanius rufus. On trouve cette espĂšce sur les arbres qui bordent les grandes routes. La Pie-GriĂšche Ă  poitrine rose Lanius minor. On la reconnaĂźt Ă  la bande noire qu'elle porte sur le front. La Pie-GriĂšche Ă©corcheur Lanius collurio. Son nom lui vient de son habitude d'accrocher les grilT. grilT. 20 284 ESSAI DE STATISTIQUE Ions et les sauterelles aux Ă©pines et aux buissons. Elle habite les haies, les broussailles. Le Gobe-Mouche gris Muscicapa grisola. Il a le cri aigu et plaintif. Le Gobe-Mouche bec-figue Muscicapa luctuosa. Il habite les vergers. TrĂšs-commun Ă  l'automne. Le Bec-Fin Rousserole Sylvia turdoĂŻdes. Elle niche dans les marais de la Vannes, oĂč elle fait entendre son cri, Racaca. Le Bec-Fin aquatique Sylvia aquatica. On le distingue des autres becs-fins Ă  la bande blanchĂątre qu'il porte au sommet de la tĂȘte. Il se voit dans les marais de la Vannes. — Rare. Le Bec-Fin Efarvate Sylvia arundinacea. Il niche dans les joncs. Le Bec-Fin Rossignol Sylvia luscinia. Chacun sait qu'il ne fait entendre sa voix mĂ©lodieuse que pendant la ponte et l'incubation. Le Bec-Fin Ă  tĂȘte noire Sylvia atricapilla. Cette fauvette, dont le chant est trĂšs-agrĂ©able, habite les bosquets et les jardins. Le Bec-Fin Fauvette Sylvia hortensis. Son plumage est uniforme, son chant ne manque pas d'harmonie. Le Bec-Fin Grisette Sylvia cinerea. Son nom lui vient de la couleur cendrĂ©e de son plumage. Cet oiseau est toujours en mouvement. Le Bec-Fin rouge-gorge Sylvia rubecula. On le reconnaĂźt facilement Ă  sa gorge d'un beau roux. Le Bec-Fin de murailles Sylvia phoenicurus. On le reconnaĂźt Ă  sa queue rousse et Ă  sa gorge noire. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 285 Le Bec-Fin Ă  poitrine jaune Sylvia hippolaĂŻs. Le Bec-Fin siffleur Sylvia sibilatrix. Le Bec-Fin Pouillot Sylvia trochilus. Le Bec-Fin vĂ©loce Sylvia rufa. TrĂšs commun dans les bois de la forĂȘt d'Othe. Le Roitelet huppĂ© Regulus cristatus. On ne le rencontre que l'hiver. Il est remarquable par la huppe d'un jaune ardent qui orne sa tĂȘte. Il voyage par bandes. Le Troglodyte Troglodytes vulgaris. C'est lui qu'on nomme, dans nos contrĂ©es, Royat. Il se tient l'hiver le long des riviĂšres, et vient voltiger autour des habitations. Le Traquet cul-blanc Saxicola oenanthe. La Bergeronnette grise Motacilla alba et la Bergeronnette de printemps Motacilla flava; celle-ci se distingue de la premiĂšre par son ventre jaune. Toutes les Bergeronnettes, en gĂ©nĂ©ral, portent le nom de Hoche-queue. Le Pipit Farlouse Anthus pratensis et le Pipit des buissons Anthus arboreus. Celui-ci devient trĂšs-gras Ă  l'automne. L'Alouette des champs Alauda arvensis. Ou la reconnaĂźt Ă  son champ agrĂ©able, au lever du soleil. L'Alouette Lulu Alauda arborea. L'Alouette Cochevis Alauda cristata. C'est l'alouette huppĂ©e qu'on rencontre sur le bord des routes dans les environs d'Aix, de Saint-BenoĂźt et de Rigny-le-Ferron. La MĂ©sange charbonniĂšre Parus major, la MĂ©sange bleue Parus coeruleus; la MĂ©sange nonnette 286 ESSAI DE STATISTIQUE Parus palustris, plumage gris et noir. Elle perche les saules des marais de la Vannes. La MĂ©sange Ă  longue queue Parus caudatus. Elle habite les bois, les garennes. Son nid, de forme sphĂ©rique, est percĂ© d'un seul trou. Le Bruant jaune Emberiza citrinella, appelĂ© communĂ©ment VerdiĂšre. Le Bruant Proyer Emberiza miliaria, connu sous le nom de Trille. J'ai trouvĂ© son nid Ă  terre dans les roseaux. Le Bouvreuil commun Pyrrhula vulgaris. Le Gros-Bec Fringilla coccothraustes, remarquable Ă  son gros bec, d'oĂč lui vient son nom. Le Verdier Fringilla chloris, on le confond souvent avec le Bruant jaune. Le Verdier a le bec gros et bombĂ©, le bec du Bruant est Ă©troit et Ă  bords rentrants. Le Moineau Fringilla domestica. On fait au moineau une guerre acharnĂ©e pour les quelques grains qu'il dĂ©robe au laboureur dans son grenier, sans lui tenir compte de la guerre qu'il fait Ă  son tour aux insectes. J'ai vu quelque part que, dans une contrĂ©e d'Allemagne, on avait fait une telle chasse Ă  cette espĂšce qu'elle avait entiĂšrement disparu. On fut assailli d'une telle quantitĂ© d'insectes que le gouvernement se vit obligĂ© de proposer des primes pour la rĂ©intĂ©gration du Moineau. Le Friquet Fringilla montana loge dans les trous d'arbres fruitiers. Le Pinson Fringilla coelebs; le Pinson d'Ardennes Fringilla montifringilla ; ce dernier habite nos climats l'hiver. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 287 La Linotte des vignes Fringilla cannabina j on l'appelle aussi Linotte rouge. Le Chardonneret Fringilla carduelis il niche volontiers sur les pruniers. Le Tarin Fringilla spinus ; son plumage est vert et noir. Ordre des GallinacĂ©s. Le grand Ramier Columba palumbus. Il nous arrive par bandes Ă  l'automne, et paraĂźt avoir du goĂ»t pour la graine de colza. La Tourterelle sauvage Columba turtur. Elle arrive Ă  la fin d'avril et repart pour le midi en septembre. Le Faisan Phasianus colchicus, autrefois commun dans lĂ  forĂȘt d'Othe, semble avoir disparu. La Perdrix rouge Perdix rubra assez commune dans la forĂȘt d'Othe, mais beaucoup moins que la Perdrix grise Perdix cinerĂ©a. La Caille Perdix coturnix. Cette espĂšce nous arrive au mois d'avril pour repartir en automne. Elle Ă©tait trĂšs-abondante dans le canton d'Aix en 1856 et 1857. Ordre des Échassiers. L'OEdicnĂȘme criard OEdicnemus crepitans. On le connaĂźt dans le canton sous le nom de Courlis de terre. Le Pluvier dorĂ© Charadrius pluvialis. Il habite les prĂ©s marĂ©cageux de la Vannes. 188 ESSAI DE STATISTIQUE Le Vanneau huppĂ© Vanellus cristalus plus commun que le prĂ©cĂ©dent, habite les mĂȘmes lieux. Le HĂ©ron cendrĂ© Ardea cinerea. Marais de la Vannes. Le Blongios ou petit Butor Ardea minuta. Il en a Ă©tĂ© tuĂ©, il y a quelques annĂ©es prĂ©s de la ferme de Cosdon, par le fils Saviniat. Le Chevalier cul-blanc Totanus ochropus. On en tue assez souvent le long de la Vannes. La BĂ©casse Scolopax rusticola de passage dans nos bois. La BĂ©cassine Scolopax gallinago, on la rencontre dans les marĂ©cages. Le RĂąle d'eau Rallus aquaticus, on le distingue du RĂąle des genĂȘts Ă  son long bec. Le RĂąle des genĂȘts Gallinula crex assez commun le long de la Vannes. La Marouette Gallinula porzana remarquable Ă  son manteau brun, tachetĂ© de blanc. La Poule d'eau ordinaire Gallinula choropus trĂšsabondante dans les canaux du chĂąteau de SaintBenoit, oĂč les maĂźtres la laissent vivre en paix. Ordre des PalmipĂšdes. L'Oie cendrĂ©e Anser ferus, elle a le bec couleur orange. On en tue quelquefois. L'Oie sauvage Anser segetum est plus commune. On la reconnaĂźt Ă  son bec noir, colorĂ© de jaune dans le milieu. On l'Ă©lĂšve en domesticitĂ©. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 289 Le Canard sauvage Anas boschas, il niche plus rarement qu'autrefois dans les marais de la Vannes. Le Canard Ă  longue queue Anas acula; on le reconnaĂźt Ă  sa queue pointue. La Sarcelle d'hiver Anas crecca; on la connaĂźt sous le nom de Racanette. Le mĂąle a la tĂȘte marron. Le grand Harle Mergus merganser a Ă©tĂ© tuĂ© par M. EugĂšne d'Ambly Ă  Saint-BenoĂźt. On reconnaĂźt les Harles Ă  leur bec dentelĂ© en scie. Le GrĂšbe Castagneux Podiceps minor et la Foulque Morelle Fulica atra, nichent dans les marais submergĂ©s. 3°. CLASSE DES REPTILES. ordre des Sauriens. Nous avons dans le canton trois espĂšces de lĂ©zards Le LĂ©zard vert Lacerta viridis, le LĂ©zard des souches Lacerta stirpium, et le LĂ©zard des murailles Lacerta muralis. Le lĂ©zard vert est le plus long de tous. Le lĂ©zard des souches se distingue des autres par des taches blanches entourĂ©es de noir. On le trouve dans les broussailles, dans les souches d'aunelle le long de la Vannes. Le peuple redoute les lĂ©zards et les croit venimeux ; ces reptiles sont tout Ă  fait inoffensifs. L'Orvet fragile Anguis fragilis connu sous le nom de Lanveau. Ce reptile n'est pas plus dangereux que le lĂ©zard. 290 ESSAI DE STATISTIQUE Ordre des Ophidiens. La Couleuvre Ă  collier Tropidonotus natrix, c'est l'Anguille des haies; on la reconnaĂźt Ă  trois taches blanches qu'elle porte sur le cou ; elle n'a pas de venin, pas plus que les deux suivantes. La Couleuvre vipĂ©rine Tropidonotus viperinus. LĂ©s taches noires qu'elle a sur la tĂȘte et qui ont la forme d'un V, la font ressembler Ă  la vipĂšre ; mais elle en diffĂšre par son ventre tachetĂ© comme un damier. Je l'ai vue dans les bois de Paisy et de Courmononcle. La Couleuvre lisse Coronella austriaca. Elle est d'un gris roussĂątre et porte une moustache noire derriĂšre les yeux ; commune dans tous les bois de la forĂȘt d'Othe. La VipĂšre commune Vipera aspis Je crois qu'il ne sera pas inutile de donner quelques dĂ©tails sur ce reptile assez commun dans le canton, avec d'autant plus de raison qu'il inspire une lĂ©gitime horreur et que nous confondons souvent la vipĂšre avec les inoffensifs reptiles dont je viens de parler prĂ©cĂ©demment. On ne rencontre guĂšre en France d'autres serpents que les Orvets, les Couleuvres et les VipĂšres. Les Orvets et les Couleuvres ne sont nullement dangereux. Ils n'ont point de venin, cherchent rarement Ă  mordre, et leur morsure serait sans consĂ©quence. Beaucoup de personnes s'imaginent que les reptiles ont un dard au bout de la langue ; d'autres croient que le dard est au bout de la queue. La SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 291 queue d'un serpent ne pique pas plus que celle d'un lĂ©zard. Sa langue n'en est pas plus capable, attendu que c'est un organe mou comme la langue des autres animaux. Dans les espĂšces venimeuses, outre le systĂšme des dents ordinaires, il existe gĂ©nĂ©ralement deux dents mobiles attachĂ©es Ă  la mĂąchoire supĂ©rieure et beaucoup plus longues que les autres dents. Ces deux piĂšces, qui ont reçu le nom de crochets, sont lĂ©gĂšrement recourbĂ©es et creusĂ©es dans toute leur longueur d'un sillon qui se termine Ă  leur extrĂ©mitĂ© par un orifice trĂšs-fin, et qui prend son origine Ă  la base de la dent oĂč se trouve une glande imprĂ©gnĂ©e de suc venimeux. Quand l'animal veut blesser, il redresse ses crochets, qu'il enfonce vivement dans le membre saisi. Il en rĂ©sulte une pression de la glande sur laquelle s'appuie la dent, et le venin exprimĂ© par cet effort, suit le canal intĂ©rieur du crochet et pĂ©nĂštre dans la plaie qu'il a faite. Maintenant dĂ©crivons la vipĂšre et nĂ© la confondons pas avec la couleuvre. D'abord il n'y a pas de vipĂšre qui dĂ©passe en longueur 60 Ă  70 centimĂštres, tandis que les couleuvres atteignent le double de cette longueur. En second lieu, la vipĂšre est de couleur sombre sur le dos, tandis que son ventre est gris d'acier et garni de grandes Ă©cailles. A partir de la nuque et tout le long du dos jusqu'Ă  l'extrĂ©mitĂ© de la queue, il existe une sĂ©rie de taches foncĂ©es se reliant les unes aux autres de maniĂšre Ă  former un cordon en zig-zag; puis il rĂšgne sur les flancs deux autres sĂ©ries de taches en lignes parallĂšles. 292 ESSAI DE STATISTIQUE Enfin, sur la tĂȘte, qui est large et s'amincit vers le museau, il existe deux taches partant de l'entre-deux des yeux, et affectant la forme d'un V. Nous ajouterons que le dessus du corps est garni d'Ă©caillĂ©s imbriquĂ©es dont chacune est relevĂ©e dans son milieu par une petite arĂȘte. La vipĂšre a les yeux vifs et hardis ; toutefois elle n'attaque jamais l'homme ni les gros animaux, Ă  moins d'ĂȘtre provoquĂ©e. Elle rampe lentement et ne saute jamais, particularitĂ© importante pour la sĂ©curitĂ© de l'homme. Sa colonne vertĂ©brale est articulĂ©e de maniĂšre Ă  n'ĂȘtre que trĂšs-peu flexible. Aussi, lorsqu'on la prend par la queue et qu'on la suspend la tĂȘte en bas, elle ne peut se redresser pour mordre la main. La vipĂšre se nourrit d'insectes, de mulots, de lĂ©zards, de limaçons. Dans la saison froide elle s'engourdit. II est bon de remarquer que le venin de la vipĂšre est sans action sur la peau, sur la langue et sur les membranes muqueuses, lorsqu'il n'y a pas de plaie. Quand on est mordu par une vipĂšre, il faut sucer la plaie, ce qui est tout-Ă -fait sans danger. Puis on fera, s'il est possible, au-dessus de la plaie, une ligature serrĂ©e; on appliquera une ventouse dont on augmentera l'effet par des scarifications profondes. L'antidote par excellence est l'ammoniaque alcali volatil dont on fait pĂ©nĂ©trer quelques gouttes dans la plaie. On l'administre Ă©galement Ă  l'intĂ©rieur lorsque les accidents gĂ©nĂ©raux se sont dĂ©clarĂ©s. Les SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 293 chasseurs font sagement de porter sur eux un petit flacon d'ammoniaque. Ordre des Batraciens. La Grenouille verte Rana esculenta. On la distingue par les trois plis jaunes formĂ©s par la peau du dos. La Grenouille rousse Rana temporaria. On la reconnaĂźt Ă  une grande tache noire qu'elle porte sur les tempes, d'oĂč son nom de temporaria. La Grenouille ponctuĂ©e Pelodytes punctatus. On reconnaĂźt cette espĂšce aux taches verdĂątres qui recouvrent son dos et ses cuisses. La Rainette verte Hyla arborea. Elle se tient souvent sur les feuilles des arbres, sur lesquels elle monte au moyen des pelottes visqueuses de ses doigts. C'est cette grenouille qu'on met dans un bocal pour indiquer les variations de l'atmosphĂšre. Le Crapaud accoucheur Alytes obstetricans. On l'appelle accoucheur parce que le mĂąle aide la femelle Ă  pondre ses oeufs. On le reconnaĂźt Ă  son cri qui ressemble au son d'une petite clochette. Le Crapaud commun Bufo vulgaris. Ce sont les jeunes de cette espĂšce qu'on voit pulluler sur les* chemins aprĂšs une pluie succĂ©dant Ă  une grande sĂ©cheresse. Le Crapaud vert Bufo viridis moins commun que les prĂ©cĂ©dents, mais plus abondant que le Crapaud sonnant Bombinalor igneus ; celui-ci se trouve dans les mares des bois. Trois espĂšces de Salamandres la Salamandre 294 ESSAI DE STATISTIQUE terrestre Salamandra maculosa, noire avec des taches jaune vif sur le dos ; dans les bois humides. La Salamandre ponctuĂ©e Lissotriton punctatus, commune dans les mares du plateau de la Vannes. La Salamandre crĂ©tĂ©e Triton cristalus. On la trouve dans les trous humides de toute la forĂȘt d'Othe. 4°. CLASSE DES POISSONS. La Vannes est Ă  proprement parler, le seul cours d'eau qui nourrisse des poissons. La Nosle possĂšde quelques truites, mais en faible quantitĂ©. La Perche commune Perca flaviatilis. On la reconnaĂźt aux bandes noirĂątres verticales qu'elle porte sur le dos, et Ă  ses nageoires infĂ©rieures rouges. Le Chabot Cottus gobio ; il habite sous les pierres. L'Epinoche aiguillonnĂ©e Gasterosteus aculeatus, vulgairement appelĂ©e Epingale. On la reconnaĂźt aux trois Ă©pines qu'elle porte sur le dos, et qui la protĂšgent contre les autres poissons. La Chevanne ou Meunier Cyprinus dobula. On le connaĂźt sous le nom de Cheneviau. La Vandoise Cyprinus leuciscus. Le VĂ©ron Cyprinus phoxinus. La Loche ordinaire Cobitis barbatula. Le Brochet Esox lucius. La Truite commune Salmo fario, assez abondante. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 298 L'Anguille Maroena anguilla. Tout le monde sait que l'anguille quitte nos riviĂšres Ă  l'automne pour aller frayer dans l'OcĂ©an. Le Lamprillon Ammocoetes branchialis, connu sous le nom de Chatouille. La Nosle et le ruisseau de Cerilly le possĂšdent ainsi que la Vannes. En ce moment M. EugĂšne d'Ambly, membre du Conseil d'Arrondissement et maire de Saint-BenoĂźtsur-Vannes,qui s'occupe activement de pisciculture, vient d'introduire dans ses propriĂ©tĂ©s deux nouvelles espĂšces de poissons la Truite du Rhin et le Saumon. Tout porte Ă  croire que ses essais seront couronnĂ©s de succĂšs. 5°. MOLLUSQUES. Je manque de renseignements sur cette partie intĂ©ressante de notre histoire naturelle. Je ne doute pas que nos forĂȘts et nos rĂ©gions paludĂ©ennes ne renferment une grande partie des mollusques signalĂ©s dans le dĂ©partement. Consulter Ă  cet Ă©gard le Catalogue des Mollusques vivants de la Champagne mĂ©ridionale, par MM. J. Ray et H. DrouĂ«t. On peut constater l'existence de la Limace marginĂ©e Limax marginatus, qu'on voit sortir de la mousse dans les temps pluvieux. Parmi les limaçons la Vitrine transparente Vitrina pellucida qu'on trouve dans les bois. Une grande partie des HĂ©lices l'HĂ©lice blanchĂątre HĂ©lix candidula ; l'HĂ©lice Ă  petites cĂŽtes HĂ©lix costata sur les pierres et les Ă©corces ; l'HĂ©lice roussĂ tre HĂ©lix rufescens qui se cache dans les 296 ESSAI DE STATISTIQUE fraisiers et la violette des bois; l'HĂ©lice lampe HĂ©lix lapicida ; l'HĂ©lice luisante HĂ©lix nitens ; le Maillot ombiliquĂ© Pupa umbilicata ; le Maillot seigle Pupa secale; la BalĂ©e fragile Balea fragilis qu'on trouve sur l'Ă©corce des saules ; la Clausilie noirĂątre Clausilia nigricans; une partie des Planorbes le Planorbe cornĂ© Planorbis corneus ; le Planorbe entortillĂ© Planorbis contortus; la LimnĂ©e auriculaire Limnea auricularia ; et dans les sources de la Vannes la Physe fontinale Physa fontinalis. La classe des AcĂ©phales est assez largement reprĂ©sentĂ©e dans les marais de la Vannes, qui renferment quelques Anodontes. On voit aussi plusieurs Mulettes vulgairement appelĂ©es Moules; leur longueur varie de huit Ă  quinze centimĂštres. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 297 DEUXIEME PARTIE. AGRICULTURE, COMMERCE, INDUSTRIE. 298 ESSAI DE STATISTIQUE § Ier. - Tableau des diffĂ©rente Aix-en-Othe. Saint-Mards. Maraye-en-Othe. Nogent en-Othe. hect. ar. c. hect. ar. c. hect. ar. c. hect ar. c. Terres labourables . . 2404 33 36 1638 38 74 4438 48 84 332 50 59 CheneviĂšres 20 47 24 » » » 47 26 23 2 89 00 Jardins 18 59 49 » » » 40 75 78 4 23 47 PrĂ©s 92 63 48 27 45 60 54 42 46 » » » PĂątures 7 27 84 » » » 43 03 54 » » » Vignes. . . . 35 44 67 59 84 40 49 86 64 » » » Aulnaies 4 60 62 » » » » » » » » » Peupliers 4 25 70 » » » " » » » » » Vergers 4 38 24 » » » 2 43 77 » » » Epines 0 35 45 » » » » » » » » » Broussailles ...... 0 38 30 8 22 70 44 60 42 » » » Bois 4042 77 35 4309 96 43 2909 45 98 535 87 20 Canaux 0 95 02 » » » » » » » » » Ravins 2 37 34 » » » » » » » » » Friches 64 87 95 » » » 8 95 43 » » » Sols, cours, bĂątiments. 20 65 54 22 » » 43 54 25 2 25 02 Grandes routes, etc. . 56 75 90 72 84 47 » » » 44 36 90 RiviĂšres, ruisseaux. , . 4 34 37 » » » » » » » » » Mares, piĂšces d'eau . . » » » 2 » » 0 48 34 » » » BruyĂšres » » » » » » 27 47 70 » » » Routoirs. . » » » » » » 0 06 20 » » » Avenues, places.... » » » » » » » » » » » » Revenu territorial . . . 34,944f 42c 36,964f 70c 59,789f 44c 43,509f 83c Superficie totale. . . . 3476h 63e 58e 3440h38a74c 4477h64a86c 906h42a48c Nombre de propriĂ©taires 732 574 547 265 Nombre de parcelles. . 44,333 8,997 7,89 3 2,495 En totalitĂ©, 4,046 propriĂ©taires ; 54,842 parcelles Aix-en-Othe se trouve avoir le terrain le plus morcelĂ©; Saint-BenoĂźt, le moins. Le plus grand revenu territorial est Ă  Maraye-en-Othe 59,789 fr. 41 c; le moindre, Ă  Vulaines 4,530 fr. 90 c. Ce dernier chiffre me paraĂźt manquer de justesse et dĂ©ranger l'Ă©quilibre gĂ©nĂ©ral des apprĂ©ciations. Car, prenons les deux communes limitrophes, Vulaines et SaintBenoĂźt, avant l'adjonction de Courmononcle Ă  cette SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 299 tures de propriĂ©tĂ©s, etc. Villemoiron. Paisy-Cosdon. Saint-BenoĂźt-sur- Vulaines. Rjgny-le-Ferron. BĂ©rulles. Vannes. hect. ar. c. hect. ar. c. hect. ar. c. hect. ar. c. hect. ar. c. hect. ar. c. 697 92 74 899 09 77 4088 88 72 609 48 49 4363 27 94 4409 44 22 43 56 47 2 54 73 5 83 24 9 29 00 » » » 4 65 29 6 70 80 4 39 94 7 05 53 2 68 30 9 38 04 6 89 48 30 74 44 62 42 59 54 65 26 30 65 97 92 26 48 » » » 6 36 59 34 50 69 448 90 08 50 92 44 40 50 45 7 23 89 44 53 45 » » » 2 84 05 43 68 40 38 67 96 46 46 3 » » » 33 43 84 52 00 46 43 74 20 » » » » » » » » » » » » 4 47 02 » » » 4 08 56 » » » 0 02 38 3 07 90 0 22 89 » » » 4 30 83 » » » » » » » » " »»»»»» » » » » » » » » » » » » » » » 9 44 64 0 47 20 » » » 446 44 55 62 42 59 240 28 74 77 52 64 345 89 58 462 75 68 0 04 87 » » » » » » » " » » » » 3 40 40 » » » » » »»»»»» » » » » » » 4 04 47 44 28 90 24 80 68 4 56 38 » » » 40 57 94 5 87 68 7 42 92 5 82 58 3 00 46 8 57 20 » » » 49 86 22 34 27 05 33 72 04 44 99 48 56 69 42 34 40 40 4 04 35 3 20 47 3 94 95 4 94 74 5 98 40 0 29 28 0 00 47 0 09 36 0 65 66 » » », 0 04 20 3 40 40 » » » » » » » » » » » » » » » " » » 0 07 4 4 » » » » » » » » » 0 07 42 » » » 0 64 27 » » » » » » » » » » » » » » » 4,374f 87c 49,246f 45c 44,544f58c 4,530f90c 24,204f44c 10,848f 66c 249h48a54c 4783h66a78c 4667h93a05c 874h69a33c 4904h23a05c 4649h49a88c 294 457 206 480 432 392 4,048 3,862 2,345 2,669 4,540 6,988 236,948 fr. 63 c. de revenu territorial. derniĂšre Saint-BenoĂźt avait une superficie de 872 hectares, et un revenu cadastral de 8,861 fr. 72 c. Vulaines possĂšde 871 hectares, et n'a un revenu cadastral que de 4,530 fr-. 90 c. S'il y a de bonnes terres Ă  Saint-BenoĂźt, il y en a d'excellentes Ă  Vulaines, et en somme, les deux communes sont Ă©gales en richesse territoriale, Ă  trĂšs-peu de chose prĂšs. T. XXII. 21 300 ESSAI DE STATISTIQUE § II. — RĂ©flexions sur l'Agriculture en gĂ©nĂ©ral. L'agriculture est une profession qui exige beaucoup de savoir ; toutes les connaissances humaines y trouvent des applications plus ou moins directes les constructions rurales, les travaux d'amĂ©lioration fonciĂšre, les dĂ©frichements, les irrigations, l'arpentage, le cubage, les relations de commerce pour la vente ou l'achat de denrĂ©es, de bestiaux, d'objets de toute nature, une comptabilitĂ© Ă  tenir, si Ă©lĂ©mentaire qu'elle soit, les modifications Ă  apporter dans les opĂ©rations, suivant les circonstances; toutes ces occupations si diverses et si multiples, exigent des connaissances spĂ©ciales, un jugement sĂ»r, un esprit d'observation dont ne se doute pas en France la majoritĂ© de ceux-lĂ  mĂȘmes qui sont les plus intĂ©ressĂ©s Ă  les possĂ©der. VoilĂ , je crois, une des causes principales de l'infĂ©rioritĂ© de notre agriculture. Cependant, nous devons le dire, le gouvernement actuel, qui, dans l'espace d'un petit nombre d'annĂ©es, a dĂ©jĂ  accompli tant de grandes et utiles choses, se prĂ©occupe sĂ©rieusement d'ouvrir une nouvelle Ăšre Ă  notre agriculture. Partout l'Ă©lan est donnĂ©; la pressĂ© pĂ©riodique, les administrations centrales, dĂ©partementales et communales, sont entraĂźnĂ©es par les idĂ©es nouvelles qui tendent Ă  replacer l'agriculture au rang qui fui appartient, Les annĂ©es de chertĂ© et de disette que SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 301 nous venons de traverser, contribuent puissamment Ă  ce rĂ©veil de la sollicitude publique pour le premier des arts. Dans les meilleures annĂ©es, la production du froment ne s'Ă©lĂšve en France qu'Ă  97 millions d'hectolitres; ce qui reprĂ©sente la nourriture de 32 millions d'hommes. Il s'en suit que si nous Ă©tions limitĂ©s Ă  nos propres ressources, 4 millions de Français ne mangeraient pas de pain de froment, ou, en d'autres termes, que la production du froment prĂ©sente un dĂ©ficit d'un douziĂšme environ. Il est vrai que ce dĂ©ficit se trouve comblĂ© par le seigle. DĂ©velopper la production des denrĂ©es alimentaires, crĂ©er de nouveaux et de plus larges dĂ©bouchĂ©s Ă  notre agriculture dans les annĂ©es d'abondance, tel est le premier besoin de notre Ă©poque, besoin qui intĂ©resse non-seulement le prĂ©sent, mais l'avenir. Comment pourvoir au salut de la gĂ©nĂ©ration prĂ©sente et de celles qui lui succĂ©deront? Par la suppression de tous droits Ă  l'entrĂ©e et Ă  la sortie des cĂ©rĂ©ales qui deviendraient l'objet d'un trĂšs-grand commerce, lequel puiserait constamment dans les contrĂ©es les plus favorisĂ©es pour alimenter celles qui le seraient moins. Ce systĂšme est pratiquĂ© avec avantage par les Anglais. Par l'accroissement de la richesse territoriale; cet accroissement peut s'opĂ©rer, soit en dĂ©veloppant l'Ă©tendue des terres cultivĂ©es, soit en augmentant leurs produits, et cela par un judicieux emploi des irrigations, du drainage, des engrais et des instruments perfectionnĂ©s. Sur 52,768,618 hectares dont se compose, d'aprĂšs M. Moreau de JonnĂšs, la superficie totale de 302 ESSAI DE STATISTIQUE la France, on constatait naguĂšre que 7,171,205 hectares Ă©taient encore Ă  l'Ă©tat de terrains vagues, de landes, de pĂątis, etc., dont il serait possible de tirer parti. Il est vrai que ce chiffre tend Ă  diminuer de plus en plus, grĂące Ă  l'iniative d'hommes gĂ©nĂ©reux, d'administrations municipales intelligentes. Il faut que la science passe dĂ©sormais dans la pratique ; il faut que les idĂ©es, les dĂ©couvertes profitent Ă  tous, et qu'on s'efforce partout de produira le plus possible avec la plus grande Ă©conomie de temps et de capitaux. Mais ce n'est point par le raisonnement que l'on persuadera l'homme des champs, habituĂ© depuis des siĂšcles Ă  voir grandir ses moissons, fleurir ses prĂ©s dans les mĂȘmes conditions de culture, ayant en face de lui la nature dont les lois et les phĂ©nomĂšnes semblent invariables ; Ă©loignĂ© des centres oĂč s'Ă©laborent et d'oĂč rayonnent les doctrines nouvelles, il est naturellement peu disposĂ© Ă  admettre que les thĂ©ories, qu'il qualifie de rĂȘves, puissent ajouter quelque puissance Ă  ses travaux, quelques Ă©cus Ă  sa bourse. S'il a Ă©tĂ© induit en erreur par quelques utopistes, il se mĂ©fie de toute innovation. Il sait oĂč il arrivera avec la route qu'il a adoptĂ©e, quelque mal tracĂ©e qu'elle soit; il ignore oĂč le conduirait celle qu'on veut lui indiquer. C'est donc par des faits qu'il faut vaincre sa dĂ©fiance et triompher de ses prĂ©ventions. Il ne croit guĂšre qu'Ă  ce qu'il voit, qu'Ă  ce qu'il peut apprĂ©cier avec son simple bon sens. Les exemples donnĂ©s par les grands propriĂ©taires feront plus d'impression sur lui que tous les livres, que tous les conseils. Ce qui prĂ©cĂšde peut gĂ©nĂ©ralement s'appliquer au cultivateur du canton d'Aix, quoiqu'il soit SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 303 vrai de dire que, rempli de bonne volontĂ©, avide d'instruction, il ne tardera pas Ă  se dĂ©barrasser des entraves qui gĂȘnent sa marche, et qu'il ne restera pas indiffĂ©rent aux conseils qui lui viendront de plus haut que lui, lorsque les conseils seront appuyĂ©s par des exemples; il veut toucher du doigt. Je citerai un exemple entre autres, dont j'ai Ă©tĂ© tĂ©moin Le Maire de Saint-BenoĂźt-sur-Vannes possĂšde prĂšs d'une de ses fermes un pĂątis d'un rapport tout Ă  fait nul. Ses connaissances pratiques et l'Ă©tude spĂ©ciale qu'il a faite du drainage, la position mĂȘme du champ l'engagĂšrent Ă  l'assĂ©cher. Il se met Ă  l'oeuvre. Les laboureurs du pays, aux explications que leur donnait M. d'Ambly, souriaient d'un air de doute, et restaient convaincus que leur maire se livrait Ă  un travail inutile. Jamais cette terre n'a rapportĂ© quoique ce soit, donc le sol ne vaut rien, et il n'est pas possible que quelques tuyaux alignĂ©s donnent Ă  ce sol connu mauvais une force de vĂ©gĂ©tation productive. » L'opĂ©ration se fit et rĂ©ussit parfaitement, et les incrĂ©dules purent voir Ă  la place d'herbes parasites un magnifique carrĂ© de colza Ă  faire envie. La leçon a profitĂ©, et nous verrons dans quelques annĂ©es, Ă  Saint-BenoĂźt, toutes les terres susceptibles d'ĂȘtre assĂ©chĂ©es, sillonnĂ©es de rigoles souterraines qui viendront ajouter une richesse de plus au pays. Le but de l'agriculture est de produire les matiĂšres du rĂšgne vĂ©gĂ©tal et du rĂšgne animal nĂ©cessaires aux besoins de l'homme. Une exploitation agricole est une vĂ©ritable fabrique de vĂ©gĂ©taux et d'animaux, et comme les derniers se nourrissent presque exclusivement de matiĂšres vĂ©gĂ©tales, c'est Ă  la produc- 304 ESSAI DE STATISTIQUE tion de ces substances,que se ramĂšne en dĂ©finitive le problĂšme agricole considĂ©rĂ© d'une maniĂšre gĂ©nĂ©rale. La connaissance des plantes qu'un terrain produit naturellement, est l'un des caractĂšres les plus propres Ă  dĂ©terminer ses propriĂ©tĂ©s. C'est un enseignement prĂ©cieux qui permet souvent d'apprĂ©cier la valeur d'une terre que l'on veut mettre en culture; c'est ce qui me fait reproduire les listes suivantes Terrains argileux Tussilage pas-d'Ăąne. Laitue vireuse. Sureau yĂšble. Lotier corniculĂ©. Agrostis traçante. ChicorĂ©e sauvage. Orobe tubĂ©reux. Terrains argilo-calcaires Anthyllide vulnĂ©raire. Potentille ansĂ©rine. Potentille rampante. MĂ©lique bleue. Laitue vivace, Sainfoin cultivĂ©. Chondrille joncĂ©e. FrĂȘne commun. Terrain calcaire Brunelle Ă  grandes fleurs. Boucage saxifrage. GermandrĂ©e petit-chĂȘne. Gaude. Potentille printaniĂšre. Coquelicot. Chardons. Globulaire commune. Noisetier commun. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 305 Sableux Jasione des montagnes. Elyme des sables. Statice des sables. LaĂźche des sables. Roseau des sables. FlĂ©ole des sables. Sabline pourpre. FĂ©tuque rouge. Oseille petite. Spergule des champs. RĂ©sĂ©da jaune. Bouleau. Pin maritime. Terrains constamment submergĂ©s Macre. FĂ©tuque flottante. LaĂźches. Scirpes. Souchets. NĂ©nuphar. Roseau Ă  balais. FlĂ©chiĂšre. Plantain d'eau. Epilobes. Non constamment submergĂ©s SpirĂ©e ulmaire. Menthe aquatique. Joncs. LaĂźches. PrĂȘles. 306 ESSAI DE STATISTIQUE § III. — Terres labourables. FROMENT. Il se cultive dans le canton d'Aix-en-Othe environ 2,566 hect. en froment. On emploie pour la semence du grain de toute provenance. Les blĂ©s les plus communĂ©ment employĂ©s sont le BlĂ© barbu, qu'on sĂšme sur les terres lĂ©gĂšres; le BlĂ© poulette, ou sans barbe, destinĂ© aux terres fortes. Depuis quelques annĂ©es, nĂ©anmoins on voit apparaĂźtre quelques blĂ©s Ă©trangers au pays, comme le BlĂ© anglais, le BlĂ© bleu, le Rampillon, le BlĂ© de Saumur, le BlĂ© d'Ecosse, etc. Ces diffĂ©rents blĂ©s, d'une nature supĂ©rieure Ă  nos blĂ©s indigĂšnes, ne rĂ©ussissent pas Ă©galement bien dans toutes les terres ; il leur faut un terrain appropriĂ©, riche d'humus et de fonds. Nos cultivateurs ont contractĂ© depuis quelque temps l'heureuse habitude de souvent changer de semence. C'est Ă©videmment un progrĂšs. Suivant M. Royer, agriculteur distinguĂ©, la valeur totale de la production agricole en France est de six milliards et demi par an. On fait en froment 5,586,786 hect. 53 ares qui produisent 69,558,062 hectolitres; la semence entre pour 11,441,780 hectolitres au prix moyen de 15 fr. 85 c. l'hectolitre. Le produit moyen d'un hectare de froment dans le canton d'Aix peut ĂȘtre Ă©valuĂ©, annĂ©e moyenne, Ă  14 hectolitres, et le produit total Ă  35,924 hectolitres, produisant 44,900 quintaux de paille. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 307 L'hectolitre vaut,en moyenne,16fr., et pĂšse 74 kil.; le quintal mĂ©trique de paille vaut 3 fr. En 1857, avant la rĂ©colte, le blĂ© valait 28 fr. l'hect.; au mois d'octobre il Ă©tait descendu Ă  19 fr. La valeur totale du froment rĂ©coltĂ© annuellement dans le canton peut ĂȘtre Ă©valuĂ©e Ă  574,784 fr., et la paille Ă  134,715 fr. On consomme dans le canton environ 16,180 hectolitres de froment. La paille est tout entiĂšre rendue Ă  la terre. On Ă©value Ă  874 hectolitres la quantitĂ© de froment dĂ©truite par les brumes, les souris, les charançons, la grĂȘle et les pluies. Un hectare de froment coĂ»te en moyenne, en y comprenant le labourage,, le hersage, l'ensemencement, la moisson, le charroi, le battage, etc., environ 85 fr. En 1857, le prix de revient s'est Ă©levĂ© jusqu'Ă  159 fr. D'aprĂšs M. Boussingault, les deux cents parties de paille et les cent parties de grains qui composent une rĂ©colte de froment supposĂ©e sĂšche contiennent Grain. Paille. TOTAL. Carbone 46,10 96,96 143,06 OxygĂšne. 5,80 10,68 16,48 HydrogĂšne 43,40 76,58 119,98 Azote 2,29 0,70 2,99 Acide sulfurique. . . 0,02 0,14 0,16 Acide phosphorique . 1,14 0,44 1,58 Chlore traces 0,08 0,08 Chaux. 0,07 1,18 1,25 MagnĂ©sie 1,39 0,68 1,07 Potasse 0,72 1,28 2,00 Soude traces 0,04 0,04 Silice 0,03 9,42 9,45 Fer et alumine. . . . 0,00 0,14 0,14 Perte 0,00 0,00 1,72 300,00 308 ESSAI DE STATISTIQUE SEIGLE. La culture du seigle ne date pas d'aussi loin que celle du froment. On n'en trouve pas dans les tombeaux d'Egypte, et il n'en est pas question dans les auteurs d'une haute antiquitĂ©. On le cultivait en grand dans l'Auvergne et le Forez dĂšs le XVe siĂšcle. On fait en France 2,577,253 hectares 88 ares de seigle qui produisent 27,811,700 hectolitres. La semence entre pour 5,139,422 hectolitres; le prix moyen est de 10 fr. 65. On cultive dans le canton d'Aix 1,185 hectares de seigle produisant 14,220 hectolitres Ă  12 hectolitres l'hectare. Le poids ordinaire d'un hectolitre de seigle est de 70 kilog., et le prix moyen de 10 fr. Au commencement de 1857, il valait 17 fr.; en octobre, il Ă©tait descendu Ă  11 fr. Dans le canton d'Aix le produit est dĂ©passĂ© par la consommation 16,200 hectolitres. Le cultivateur, ou plutĂŽt le manouvrier propriĂ©taire, vend une partie de son froment pour acheter du seigle pour les besoins de sa maison. On tire ordinairement ce seigle du canton de Marcilly-le-Hayer. La culture d'un hectare de seigle coĂ»tait, en 1857, 134 fr. ORGE. On fait en France 1,188,189 hectares 53 ares d'orge qui produisent 16,661,462 hectolitres. La semence entre pour 2,575,615 hectolitres au prix moyen de 8 Dans le canton d'Aix, on cultive en orge 1,260 hec- SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 309 tares qui produisent, Ă  16 hectolitres l'hectare, 20,208 hectolitres de grains et 144,456 quintaux de paille. L'hectolitre d'orge pĂšse ordinairement 60 kilog., et se vend, annĂ©e commune, 7 fr. En mai 1857, il se vendait 16 fr., et en octobre 10 fr. Il se consomme annuellement dans le canton 10,000 hectolitres d'orge. Depuis quelques annĂ©es, cette culture a beaucoup augmentĂ© au dĂ©triment de l'avoine. Les manouvriers mĂȘlent cette cĂ©rĂ©ale au froment et au seigle dans la proportion d'un tiers pour leur nourriture. La culture d'un hectare d'orge, coĂ»te en 1857, 89 fr. 50. AVOINE. On fait en France 3,000,634 hectares 19 ares d'avoine qui produisent 48,899,785 hectolitres. La semence entre pour 7,015,708 hectolitres, le prix moyen est de 9 fr. 40. En 1852, on cultivait dans le canton d'Aix 2,343 hectares d'avoine. L'assolement biennal et l'augmentation de la culture de l'orge ont diminuĂ© cette proportion. NĂ©anmoins, cette culture de l'avoine paraĂźt vouloir reprendre de l'extension; on tend Ă  abandonner l'assolement biennal, qui a pour rĂ©sultat de faire, porter au sol trop souvent la mĂȘme espĂšce de grains, et par consĂ©quent d'amoindrir les produits, On revient volontiers Ă  l'assolement triennal, moins avantageux pourtant que l'assolement quadriennal. L'avoine est d'une qualitĂ© ordinaire et pĂšse environ 48 kilog. l'hectolitre. Elle se vend ordinairement 6 fr. 50 l'hectolitre, ce qui reprĂ©sente, annĂ©e commune, un chiffre de 228,442 fr. 50. En 310 ESSAI DE STATISTIQUE mai 1857, elle valait 10 fr., et en octobre, 11 fr. Il se consomme annuellement, dans le canton, 19,767 hectolitres d'avoine. La paille sert tout entiĂšre Ă  la nourriture des bestiaux. La culture d'un hectare d'avoine coĂ»te en 1857, 59 fr. TABLEAU RESUME DES GRAINS. Frais de culture PRODUIT Consom- Poids, d'un hectare, VALEUR mation Poids y compris NOMBRE PRODUIT le labour, moyen annuelle de l'ensemencement, GRAINS. TOTALE le hersage par dans le hersage, d' hectares. total. l'hec la moisson, hectare. en argent. le tolitre les charrois, etc. canton. 1852. 1857. hectares, hectolit. hectares, francs. c. hectares, kilog. francs, francs. BlĂ© 2,566 14 35,924 574,784 00 16,180 74 85 194 Seigle.. 1,185 12 14,220 142,200 00 16,200 70 85 134 Orge.. 1,263 16 20,208 141,456 00 10,000 60 65 90 Avoine. 2,343 15 35,145 228,442 50 19,767 48 45 59 PRIX DES GRAINS DE 1800 A 1855 INCLUSIVEMENT. PÉRIODES. BLÉ. MÉTEIL. SEIGLE. ORGE. AVOINE. OBSERVATIONS. 1800 Ă  1810. 15 95 12 02 9 34 7 23 5 25 Cette moyenne est basĂ©e sur le prix du grain Ă  la Saint1810 Saint1810 1820. 2158 13 43 12 79 9 05 5 76 Martin de chaque peut re1820 Ă  1830. 16 60 10 70 9 557 7 15 6 234 marquer que les pluies dĂ©satreuses de 4816 ont influĂ© 1830 Ă  1840. 17 216 1150 10 24 7 866 6 15 sur la pĂ©riode de 1810 Ă  1820. 1840 Ă  1850. 19 57 12 90 11 21 9 35 6 84 1850 Ă  1855. 24 49 17 67 13 01 9 95 6 45 SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 311 JACHERES. Il y a cinq ou six ans, on comptait encore 1,600 hectares de jachĂšres dans le canton d'Aix-enOthe. Ce nombre tend Ă  diminuer tous les ans. On utilise les terres au moyen de prairies artificielles. On ne laisse en jachĂšres que les champs entiĂšrement perdus d'herbes, afin de les nettoyer par plusieurs labours successifs. BientĂŽt il n'y aura plus de jachĂšres, on les remplacera par la culture des racines. Cette culture remplit parfaitement le but qu'on dĂ©sire atteindre la destruction des herbes parasites, par la frĂ©quence des binages et des sarclages. Chaque espĂšce de vĂ©gĂ©tal absorbe certains sels de prĂ©fĂ©rence aux autres ; lorsque les sels prĂ©fĂ©rĂ©s seront absorbĂ©s, l'espĂšce du vĂ©gĂ©tal qui s'en nourrit cessera de croĂźtre, ou au moins de prospĂ©rer dans les terres Ă©puisĂ©es. C'est sur ce principe que doivent ĂȘtre fondĂ©es les rotations de culture. Ainsi, lorsqu'une terre est Ă©puisĂ©e des sucs nourriciers du froment, elle pourra nourrir du trĂšfle; Ă©puisĂ©e des sucs nourriciers du trĂšfle, elle pourra fournir Ă  la nutrition de la pomme de terre, de la betterave, etc. C'Ă©tait faute de connaĂźtre ce principe que nos pĂšres croyaient devoir laisser leurs terres en jachĂšres. Une terre Ă©puisĂ©e retrouve dans les engrais, dans l'air,dans les eaux d'irrigation et de pluie, dans toutes les circonstances atmosphĂ©riques, les sels dont la vĂ©gĂ©tation l'avait privĂ©e. Plus elle reste longtemps sans nourrir une espĂšce de plante, plus les sucs nourriciers nĂ©cessaires Ă  cette plante s'accumulent dans son sein. La meilleure rotation de culture serait 312 ESSAI DE STATISTIQUE donc celle qui ramĂšnerait dans un champ le mĂȘme vĂ©gĂ©tal aux plus longs intervalles possibles. § IV. — Cultures diverses. 1°. POMMES DE TERRE. La culture de ce prĂ©cieux tubercule n'est pas aussi Ă©tendue dans le canton d'Aix qu'on pourrait le dĂ©sirer, et le peu que l'on cultive l'est assez mal. Cette plante, pour ĂȘtre productive, demande plusieurs binages, et il est rare qu'elle en reçoive plus d'un. On ne fait guĂšre plus de 75 hectares de pommes de terre. C'est bien peu, eu Ă©gard Ă  l'Ă©tendue des terres arables disponibles. Il est probable que la nature argileuse du sol se refuse Ă  cette culture ; et puis, le cultivateur du canton d'Aix n'est pas encore arrivĂ© Ă  comprendre les avantages de l'Ă©lĂšve des bestiaux. Il faut 17 hectolitres de pommes de terre pour ensemencer un hectare. L'hectare peut produire, en moyenne, 80 hectolitres; ce qui donne, annĂ©e moyenne, 6,000 hectolitres environ, Ă  4 francs l'hectolitre, soit 24,000 francs. Depuis quelques annĂ©es, cette plante si utile a eu Ă  souffrir d'une maladie qui dĂ©truisait annuellement plus de la moitiĂ© de la rĂ©colte. 2°. BETTERAVES. Il n'y a guĂšre que cinq ou six ans qu'on s'adonne, dans le canton d'Aix, Ă  la culture de la betterave. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 313 Le laboureur de ce pays n'a pas encore compris tous les avantages qui rĂ©sultent de la culture de cette plante fourragĂšre, et qui consistent Ă  nettoyer, par de frĂ©quents binages, les terres encombrĂ©es de mauvaises herbes; Ă  permettre au cultivateur de nourrir une plus grande quantitĂ© de bestiaux, source naturelle d'une plus grande production d'engrais. On n'en fait guĂšre que 25 hectares sur jachĂšres. Le produit moyen d'un hectare de betteraves est d'environ 350 quintaux, La betterave n'a pas, dans cette contrĂ©e, de valeur commerciale; chacun la cultive pour son besoin. Les frais de culture d'un hectare de betteraves peuvent ĂȘtre Ă©valuĂ©s, y compris la rĂ©colte, Ă  187 francs. A propos de la cueillette des feuilles de betteraves, il existe un prĂ©jugĂ© qu'il serait bon de voir disparaĂźtre. On croit gĂ©nĂ©ralement qu'il est indispensable de ne laisser Ă  la plante que les trois feuilles du centre, une plus grande quantitĂ© devant nuire Ă  l'accroissement. C'est prĂ©cisĂ©ment le contraire. Il faut qu'on se persuade bien que c'est par les feuilles que la betterave absorbe l'eau, l'acide carbonique, l'azote, qui servent Ă  son alimentation; plus vous diminuez les moyens d'absorption, moins les plantes auront de chances de vitalitĂ©. 3°. LÉGUMES SECS Haricots, Pois, Vesces, Lentilles. On cultive environ 40 hectares de lĂ©gumes secs. Les pois, les vesces et les lentilles se rĂ©coltent gĂ©nĂ©ralement comme fourrage. 314 ESSAI DE STATISTIQUE Les haricots se cultivent pour la nourriture des habitants du canton et des pays voisins. — Les foires de Saint-Mards sont renommĂ©es pour la vente de ce lĂ©gume. On estime Ă  480 hectolitres environ la rĂ©colte des lĂ©gumes secs. Les haricots se vendaient, en 1857, depuis 12 francs jusqu'Ă  24 fr. l'hectolitre; les pois et les vesces, de 16 Ă  22 francs; les lentilles, de 20 Ă  23 francs. 4°. GRAINES OLÉAGINEUSES. Colza. La culture de cette plante commence Ă  s'Ă©tendre. La graine, qui se rĂ©colte dans les premiers jours de juillet, trouve un dĂ©bouchĂ© facile, et qui permet au cultivateur d'attendre la vente de ses autres rĂ©coltes. On fait, dans le canton, environ 30 hectares de colza depuis quatre ou cinq ans seulement. L'hectare produit, en moyenne, 20 hectolitres de graines; le prix moyen de l'hectolitre est de 30 francs. — Ce prix n'a guĂšre variĂ© depuis quelques annĂ©es. Chanvre. Loin de progresser comme les colzas, la culture du chanvre diminue sensiblement. Quelle est la cause de celte interruption dans une culture trĂšs-utile pourtant ? On en donne plusieurs d'abord le dĂ©veloppement du commerce de la bonneterie, qui enlĂšve les bras nĂ©cessaires ; le prix toujours croissant de la main-d'oeuvre, et le rendement, souvent peu produc- SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 315 tif des terres Ă  chanvre. Vulaines presque seul continue cette culture sur une assez grande Ă©chelle. — Saint-BenoĂźt, qui en faisait beaucoup, n'en fait plus. Beaucoup de mĂ©nages prĂ©fĂšrent acheter la toile toute faite. Est-ce une Ă©conomie? on me permettra d'en douter. La toile qu'on achĂšte pour ĂȘtre plus blanche et d'un tissu plus fin, n'en a pas plus de durĂ©e; tout au contraire. On ne fait guĂšre plus de 40 hectares de chĂšneviĂ©res maintenant dans le canton. Ces 40 hectares produisent, en moyenne, 360 hectolitres de chĂšnevis. Un hectare produit 9 hectolitres de graine et 6 quintaux de filasse. Le prix moyen du chĂšnevis, par hectolitre, est de 12 francs ; le prix de la filassse, par quintal mĂ©trique, de 70 francs. On estime Ă  300 francs les frais de culture d'un hectare de chanvre. 5°. JARDINS. Le canton d'Aix ne possĂšde que 2 hectares 75 centiares de parcs et de jardins d'agrĂ©ment. L'Ă©tendue totale des jardins potagers, dont le produit est principalement destinĂ© Ă  la consommation du propriĂ©taire, et dont on ne vend que la portion qui excĂšde les besoins de cette consommation, s'Ă©lĂšve Ă  82 hectares, qui peuvent produire approximativement une somme de 32,800 francs. Ces jardins sont gĂ©nĂ©ralement plantĂ©s de pommiers, poiriers, pruniers et groseilliers. Ceux qui sont adossĂ©s aux bĂątiments sont ornĂ©s de quelques treilles de chasselas blanc ordinaire. T. XXII. 22 316 ESSAI DE STATISTIQUE Les frais de culture de ces 82 hectares de jardins sont Ă©valuĂ©s Ă  24,600 francs. §. V. — Fourrages. 1°. PRAIRIES NATURELLES, PATURAGES ET PACAGES. Le canton d'Aix-en-Othe renferme environ 692 hectares de prairies naturelles. Sur cette Ă©tendue, 264 hectares seulement sont susceptibles d'ĂȘtre irriguĂ©s dans l'Ă©tat actuel des choses. L'hectare de foin irriguĂ© peut produire en moyenne 35 quintaux mĂ©triques, et celui non irriguĂ© 21 quintaux seulement. Le prix moyen du quintal mĂ©trique est de 6 fr. 32. Les frais de rĂ©colte et autres peuvent ĂȘtre Ă©valuĂ©s Ă  38 francs l'hectare. On compte 70 hectares de pĂąturages et de pacages, produisant en totalitĂ© 1,095 quintaux de foin, estimĂ©s 1 franc le quintal, soit 1,095 francs. On Ă©value Ă  3,050 quintaux le fourrage recueilli dans les forĂȘts; Ă  68,669 celui qu'on peut ramasser dans les prĂ©s fauchĂ©s, les chaumes, etc. Ces diverses ressources peuvent ĂȘtre approximativement Ă©valuĂ©es Ă  103,003 fr. 50. Les foins rĂ©coltĂ©s le long des ruisseaux de la Nosle et de Cerilly sont de meilleure qualitĂ© que ceux de la Vannes. Rigny-le-Ferron, surtout, en produit d'excellents. 2°. VALLÉE DE LA VANNES. Le fond de la vallĂ©e de la Vannes est occupĂ© par SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 317 des marais ou terrains humides qui offrent une largeur moyenne de 600 mĂštres, et dont la superficie, dans la partie oĂč cette riviĂšre baigne le canton d'Aix, est Ă©valuĂ©e Ă  418 hectares 62 ares, ainsi rĂ©partis Paisy-Cosdon 84h 17a Saint-BenoĂźt-sur-Vannes. . .. 214 83 Vulaines.. ......... 119 62 418 62 On peut diviser les marais de la Vannes en deux catĂ©gories, suivant qu'ils sont quelquefois couverts d'eau, ou ordinairement secs. Les marais ordinairement couverts d'eau produisent assez abondamment des roseaux, des joncs, des laĂźches, et autres herbes de mauvaise qualitĂ©, qu'on n'emploie gĂ©nĂ©ralement que comme litiĂšres. Les manouvriers et les petits cultivateurs, dont la rĂ©colte en paille n'est pas suffisante, achĂštent volontiers cette herbe dont ils disent se bien trouver. On ne peut guĂšre entrer dans les marais que pendant les gelĂ©es d'hiver. Les marais secs sont trĂšs-froids, Ă  cause de la grande dĂ©perdition de chaleur qu'ils Ă©prouvent par l'Ă©vaporation. On ne les voit guĂšre croĂźtre qu'au mois de juin; l'herbe n'en est pas abondante et n'atteint qu'une faible hauteur. Maintenant, comment le sol composĂ© d'un peu de terre vĂ©gĂ©tale, de tourbe et de pĂąte argileuse, doit-il ĂȘtre traitĂ©? Trop humides, ces terrains sont improductifs; si on les prive totalement d'humiditĂ©, ils deviennent impropres Ă  toute culture, parce qu'ils se dĂ©litent et se dĂ©sagrĂšgent au soleil. Une compagnie, dont la raison sociale Ă©tait Vassal 318 ESSAI DE STATISTIQUE et C°, s'Ă©tait chargĂ©e de rĂ©soudre ces questions. Des Ă©tudes furent faites en 1855, et soumises aux hommes compĂ©tents ; il s'en suivit une enquĂȘte qui discuta consciencieusement et point par point tous les termes du rapport d'un ingĂ©nieur des ponts-etchaussĂ©es. Il en rĂ©sulta que l'expertise, tout en admettant, Ă  priori, la possibilitĂ© de l'amĂ©lioration de la vallĂ©e, rejeta plusieurs paragraphes du mĂ©moire, et conclut Ă  l'Ă©tablissement d'un syndicat, et Ă  l'exclusion de toute compagnie. L'affaire est aujourd'hui entre les mains de l'administration supĂ©rieure. Le rapport des experts, consciencieusement rĂ©digĂ©, appuyĂ© sur des chiffres d'une parfaite exactitude, fait ressortir clairement le but de la sociĂ©tĂ© Vassal. Ce but serait, Ă  n'en pas douter, l'exploitation en grand de toute la vallĂ©e, pour l'extraction de la tourbe ; l'assainissement ne serait qu'accessoire, et en consĂ©quence, tout-Ă -fait secondaire. Les propriĂ©taires, en demandant un syndicat sous lĂ  direction, bien entendu, de l'administration, veulent sincĂšrement la bonification de leur sol, mais subordonnĂ©e Ă  des moyens Ă©conomiques que la compagnie Vassal est loin d'offrir. DĂ©jĂ  quelques propriĂ©taires, entre autres MM. Bacquet, Ă  Villemaur, EugĂšne d'Ambly et Fruitier, Ă  Saint-BenoĂźt, ont entrepris le dessĂšchement d'une partie de leurs prĂ©s. Les rĂ©sultats seront avantageux; on ne peut en douter. Les travaux exĂ©cutĂ©s par ces messieurs le sont avec une telle prĂ©cision, qu'il est impossible que tous les terrains qui sont susceptibles d'amĂ©lioration ne changent pas de nature dans un temps peu Ă©loignĂ©. Une des premiĂšres conditions de l'assainissement SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 319 des marais de la Vannes, sera d'abaisser le plan d'eau au moins Ă  un mĂštre au dessous du niveau du sol. Dans les sols spongieux, l'exhaussement du niveau des eaux stagnantes, produit par la capillaritĂ©, atteint Ă  peu prĂšs cette hauteur. D'un autre cĂŽtĂ©, les terres lĂ©gĂšres, pour ĂȘtre productives, ne doivent pas se trouver, dans les sĂ©cheresses, Ă  plus de 45 ou 50 centimĂštres au-dessus de la nappe d'eau souterraine. Il faudra donc se mĂ©nager la facultĂ© d'humecter Ă  volontĂ© les terrains assainis, et cela au moyen de l'irrigation superficielle, parce que l'humectation souterraine offre l'inconvĂ©nient de refroidir les terres en y introduisant des eaux qui sont Ă  une tempĂ©rature moins Ă©levĂ©e que celle du sol. Si l'on s'attache Ă  suivre les idĂ©es de l'ingĂ©nieur auteur du rapport, on voit que, pour assurer l'opĂ©ration du dessĂšchement, il serait nĂ©cessaire de rejeter en dehors des marais toutes les eaux affluentes au moyen de canaux de ceinture, et de ne recevoir dans le canal de dessĂšchement que les eaux de sources et les eaux pluviales provenant de l'intĂ©rieur des marais. Les canaux de ceinture seraient Ă©tablis le long des marais, sur chacune des deux rives. Le lit actuel de la riviĂšre, rectifiĂ©, formerait le canal de la rive droite. Le canal principal d'Ă©coulement suivrait le thal weg de la vallĂ©e. Trente-un canaux transversaux d'Ă©coulement dĂ©boucheraient dans le canal principal. Des conduits secondaires porteraient les eaux des marais dans les canaux transversaux, et complĂ©teraient l'assainissement. Le cours de la riviĂšre, rectifiĂ©, formerait Ă  peu 320 ESSAI DE STATISTIQUE prĂšs partout la limite des marais sur la rive droite. Aux canaux transversaux d'Ă©coulement seraient accolĂ©es des rigoles d'amenĂ©e, destinĂ©es Ă  utiliser, pour l'humectation et l'irrigation des terrains, les eaux du canal principal d'Ă©coulement. Les terrains les plus bas seraient arrosĂ©s au moyen de prises d'eau faites directement dans le canal principal d'Ă©coulement oĂč dans les rigoles transversales. J'ai dit, plus haut, que pour rendre plus complet l'assainissement de la vallĂ©e, il serait,nĂ©cessaire d'abaisser le plan d'eau Ă  un mĂštre au moins au-dessous du sol. Pour arriver Ă  ce rĂ©sultat, il sera indispensable de recourir Ă  l'emploi du drainage, infiniment prĂ©fĂ©rable aux fossĂ©s Ă  ciel ouvert, qui trouvent un grand obstacle dans le morcellement des propriĂ©tĂ©s. D'ailleurs, l'emploi de drains peut se justifier par une Ă©conomie notable dans les dĂ©penses de premier Ă©tablissement et d'entretien. On distinguerait deux sortes de drains les drains d'assĂšchement destinĂ©s Ă  soutirer l'humiditĂ© du sol, et les drains collecteurs, qui recevraient les eaux dĂ©coulant des premiers. Tel est, sommairement, l'ensemble du projet. Maintenant, faut-il espĂ©rer une rĂ©ussite complĂšte? Nous pensons que non. A quelle cause faudrait-il attribuer la non-rĂ©ussite du projet, malgrĂ© l'excellence des moyens proposĂ©s ? Les marais, essentiellement tourbeux, privĂ©s de terre vĂ©gĂ©tale, seront assainis, il est vrai, mais ils perdront en production. Telle partie des marais, qui produisait des roseaux en abondance, ne produira plus qu'une herbe mince, chĂ©tive, courte, qui sera bien loin de compenser le produit des roseaux comme litiĂšre. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 321 En rĂ©sumĂ©, les parties les plus marĂ©cageuses aujourd'hui, de mauvaises qu'elles sont, seront, par l'effet de l'assĂšchement, tout-Ă -fait annihilĂ©es; nous croyons pouvoir l'affirmer. Il n'y aurait qu'une chose Ă  faire ce serait de marner ces terrains. Mais la plus value ne pourrait jamais compenser les frais Ă©normes que comporterait cette opĂ©ration. On fait Ă  Saint-BenoĂźt des expĂ©riences pour savoir si le chaulage ne pourrait Ă©conomiquement ĂȘtre substituĂ© au marnage. 3°. PRAIRIES ARTIFICIELLES. Les prairies artificielles se composent de Luzerne, de TrĂšfle, de Sainfoin, de Lupuline, etc. Ces diffĂ©rents herbages se rĂ©coltent dans tout le canton ; mais la plante la plus rĂ©pandue est le sainfoin, qu'on sĂšme avec succĂšs dans les terres lĂ©gĂšres, et qui prĂ©pare le sol Ă  la culture du froment. La luzerne ne dure gĂ©nĂ©ralement pas plus de 5 ou 6 ans. Le sainfoin donne une ou deux rĂ©coltes, suivant qu'il est Ă  une ou Ă  deux coupes. Le trĂšfle se sĂšme dans les terres fortes; on y mĂȘle gĂ©nĂ©ralement un peu de lupuline ou de sainfoin. Quelquefois aussi, on mĂȘle le trĂšfle Ă  la luzerne afin d'avoir, la premiĂšre annĂ©e, un fourrage plus abondant. La lupuline, qu'on sĂšme souvent avec le trĂšfle et le sainfoin, donne un excellent fourrage fort goĂ»tĂ© des bestiaux. On estime l'Ă©tendue totale des prairies artificielles, dans le canton, Ă  1,903 hectares qui produisent, Ă  23 quintaux mĂ©triques par hectare, 322 ESSAI DE STATISTIQUE 49,769 quintaux. On sait qu'il faut quatre ou cinq quintaux de fourrage vert pour produire un quintal mĂ©trique de fourrage sec. Comme le cultivateur du canton d'Aix ne s'occupe pas de l'Ă©lĂšve des bestiaux, et qu'il se contente du nombre strictement nĂ©cessaire Ă  la culture de ses propriĂ©tĂ©s, il s'en suit que la rĂ©colte est plus que suffisante, et qu'il peut en livrer Ă  la consommation des pays voisins. On estime Ă  8,000 quintaux l'exportation des fourrages artificiels. A la place du cultivateur du canton d'Aix, je ne vendrais pas de fourrage; j'achĂšterais des bestiaux, des moutons surtout ; j'augmenterais encore ma culture de prairies artificielles, et je serais certainement assurĂ© de voir doubler, tripler mes produits. Il le fera, j'en suis persuadĂ©; il y a de l'intelligence et de la volontĂ© chez lui; donnons-lui le temps de secouer les prĂ©jugĂ©s de la vieille routine, et nous verrons des merveilles. Le domaine de Pouy est trop prĂšs du canton d'Aix pour que je ne rappelle pas ici, Ă  propos des prairies artificielles, un nom qui a laissĂ© de grands et nobles souvenirs, et dans la classe des savants et dans celle du peuple ; c'est celui de M. Fortier, propriĂ©taire des fermes de Pouy. Cet habile agronome, dont la vie s'est usĂ©e Ă  la recherche de tout ce qui pouvait augmenter la production du sol, est le premier qui, dans ces contrĂ©es, ait introduit l'usage des prairies artificielles, et les races de moutons Ă  laine fine. Ce nom doit rester gravĂ© dans la mĂ©moire du cultivateur, car il rappelle une de ces heureuses rĂ©volutions qui entraĂźnent avec elles la rĂ©gĂ©nĂ©ration des populations agricoles. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 323 § VI. — Vigne. Il parait que la vigne ne se plait guĂšre dans le canton d'Aix, ou que les habitants ne connaissent pas Ă  fond cette culture. Tous les ans, il s'en arrache une certaine quantitĂ©. Le vin, du reste, n'y est pas de bonne qualitĂ©; il est dur, Ăąpre, et peu abondant. On doit pourtant excepter Rigny, qui fait du vin rouge peu colorĂ©, mais d'assez bonne qualitĂ©, et BĂ©rulle, dont le vin blanc a une certaine renommĂ©e. Les plants ordinaires sont le Gouet, le Meslier blanc et rouge, le Samoriau, le Teinturier, quelques Pineaux, le Gamais, le FromentĂ©, le Chasselas noir, le Plant de roi, le Saint Philippe. Le dĂ©partement de l'Aube possĂšde 22,222 hectares de vigne; le canton d'Aix compte dans la proportion de 1 Ă  111. Cette apprĂ©ciation est insĂ©rĂ©e dans l' Annuaire de l'Aube, 1857. Depuis le systĂšme malheureusement adoptĂ©, du dĂ©frichement des coteaux viticoles, il est permis de croire que ce chiffre a diminuĂ©. Le travail des vignes commence vers le mois de mars. On serfouit la terre et on taille. On emploie trois façons au piochage, une façon pour la taille, une façon pour paisseler et une façon pour accoler, c'est-Ă -dire attacher le cep au paisseau, au moyen d'une ligature de paille de seigle ou de jonc. L'Ă©bourgeonnement se fait'en mĂȘme temps que l'accolage. Chaque façon coĂ»te 35 fr. 55 l'hectare, soit 324 ESSAI DE STATISTIQUE 213 fr. 30. Ajoutez 337 fosses ou provins par hectare, Ă  15 centimes, 50 fr. 55. Total des frais de culture d'un hectare de vigne, 263 fr, 85. Ce chiffre est Ă©norme, si l'on considĂšre l'incertitude des rĂ©coltes ; car, qu'il y ait du raisin ou non, tous ces travaux sont indispensables, et quand la rĂ©colte a manquĂ©, rien ne vient indemniser le pauvre vigneron. Dans une annĂ©e un peu plus qu'ordinaire, un hectare de vigne peut produire 58 hectolitres Ă  11 fr. 50; soit 667 francs. La rĂ©colte de 1857, parfaite de qualitĂ©, vaut Ă  peu prĂšs un quart de rĂ©colte ordinaire. Donc, dans une bonne annĂ©e, 667f 00c de produit, Moins ....... 263 85 de travail, Il reste . . . .403f 15c C'est bien peu, comme l'on voit; car le vĂ©ritable vigneron n'a pas dĂ©pensĂ© une seule journĂ©e ailleurs que dans sa vigne. Il la quitte seulement au moment de la moisson, pour aller travailler en Champagne ou en Brie. Le peu de rapport de la vigne est donc une des causes probables de l'abandon de cette culture. Voici les accidents auxquels la vigne paraĂźt sujette 1°. La gelĂ©e d'hiver, lorsqu'un soleil trop prompt succĂ©dant au givre et au verglas, le bourgeon se trouve pĂ©nĂ©trĂ© par l'humiditĂ© et flĂ©tri par la chaleur. 2°. La gelĂ©e de printemps, lorsqu'elle est tardive et que la vĂ©gĂ©tation est avancĂ©e. Depuis quelques annĂ©es, les vignes ont eu Ă  souffrir de cet acci- SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 325 dent. On se rappellera la matinĂ©e du 6 mai 1856. 3°. La coulure. Cet accident est causĂ© par les variations atmosphĂ©riques, surtout par la continuitĂ© des pluies, qui, au printemps, occasionne une recrudescence de vĂ©gĂ©tation au profit du sarment et au prĂ©judice du fruit. 4°. Le rougiot ou rougeur. Lorsqu'il survient un coup de soleil aprĂšs une forte pluie, les feuilles rougissent et se dĂ©tachent du cep. 5°. La jaunisse, consĂ©quence d'une tempĂ©rature trop longtemps humide. 6°. La brĂ»lure, produite par des coups de soleil trop ardents au moment de la maturitĂ©. Les insectes nuisibles sont Ă  peu prĂšs les mĂȘmes que dans tous les vignobles. 1°. L'Eumolpe des vignes, petit colĂ©optĂšre noir Ă  Ăšlytres rouge sanguin, qui, au moindre bruit, se laisse tomber Ă  terre en faisant le mort. 2°. Le Rhynchite des bouleaux, connu sous le nom d'Usbeck. Cet insecte est facile Ă  reconnaĂźtre Ă  sa tĂȘte allongĂ©e, terminĂ©e par un bec. Sa robe est d'un vert cuivreux, tantĂŽt dorĂ© tantĂŽt bleuĂątre. On reconnaĂźt la prĂ©sence de cet insecte aux feuilles roulĂ©es de la vigne c'est dans ce rouleau que sont disposĂ©s ses oeufs. 3°. Un petit papillon gris qui s'attache au raisin en fleur et qui s'y loge au moyen d'une toile. L'oĂŻdium ne paraĂźt pas avoir fait de grands ravages dans les vignes du canton d'Aix. Seules les vignes en palissades et les treilles ont eu Ă  en souffrir. 326 ESSAI DE STATISTIQUE § VII— Cidre. A l'exception de Saint-BenoĂźt-sur-Vannes et de Vulaines, toutes les communes du canton possĂšdent des arbres Ă  cidre en assez grande quantitĂ© pour permettre l'exportation. On peut estimer Ă  10,000 hectolitres la quantitĂ© rĂ©coltĂ©e dans une annĂ©e ordinaire. Voici le nom local des espĂšces de fruits qui entrent dans la composition du cidre dans le canton. Pommes Pomme sauvage, — d'Avrolles, — de Bezançon,— de Verollot, — Nez-de-chat, — petit et gros Loquart, — de Trochet, — de GlĂ©non, — de Vigne, — de Rambourg, — Reinette jaune et grise, — Corpendu, — Nez plat, — ChĂątaigner, — Cul d'oison, — Calvin rouge, — Loquart blanc. Poires Poire de petit et grand Geumenat, —à deux tĂȘtes, — de Frigalet, — de Madeleine, — de Chaudronnier, — BeurrĂ©, — de Bouquin, — de Boulanger, — d'Ecrevisse, — petit et gros Malin, — Malin de Brie, — de Dondie, — de Daguenelle, — petite et grosse Sauge, — petit et gros Normand, — petit et gros Gaujard, — de Martin-Sec, — de bon ChrĂ©tien, — de Caillou rosat, etc. Il est assez rare que la mĂȘme annĂ©e la poire et la pomme rĂ©ussissent Ă©galement ; la poire surtout gĂšle facilement. Lorsque le cidre est fabriquĂ© avec de la pomme seulement, il est plus Ă©pais, plus jaune, et moins bon que mĂ©langĂ© avec la poire. Le bon cidre doit ĂȘtre composĂ© de pommes pour les deux SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 327 tiers, et de poires pour l'autre tiers. Le cidre de poire pur, plus beau Ă  l'oeil, plus clair que le. cidre de pommes, est trĂšs-Ăącre la premiĂšre annĂ©e. Il convient de le laisser deux ou trois ans en fĂ»t. La rĂ©colte des fruits se fait aux mois de septembre et d'octobre, suivant que l'annĂ©e a Ă©tĂ© plus ou moins prĂ©coce. On emploie, je crois, un mauvais procĂ©dĂ© pour la cueillette ; on se sert de longues perches pour abattre les fruits, ou on monte sur l'arbre que l'on secoue de toutes ses forces. Il arrive nĂ©cessairement que les fruits, en tombant, sont plus ou moins froissĂ©s ; et comme on est obligĂ© fort souvent de les laisser un certain temps dans les champs, en tas plus ou moins Ă©pais, il s'en suit qu'une partie, entamĂ©e par le bĂąton bu les cailloux, se trouve pourrie, et communique Ă  la boisson un goĂ»t fort peu agrĂ©able. La cueillette Ă  la main serait infiniment prĂ©fĂ©rable ; elle prendrait peut-ĂȘtre un peu plus de temps, mais la qualitĂ© supĂ©rieure du cidre compenserait largement ce retard. LĂ© cidre se fait au moyen de pressoirs Ă  manĂšge mĂ»s par un ou deux chevaux, suivant la force de pression. Chaque commune en possĂšde un plus ou moins grand nombre. On en compte dix-sept dans la commune de Saint-Mards seulement. On paie au pressureur 18 litres par chaque piĂšce de 136 litres, et 60 centimes par cheval. Le cidre, en moyenne, se vend de 10 Ă  12 francs l'hectolitre. En 1856, il a valu jusqu'Ă  25 francs et plus. Depuis deux on trois ans, on voit apparaĂźtre dans les pays Ă  cidre des spĂ©culateurs parisiens qui achĂštent tout ce qu'ils peuvent de fruits sur pied Ă  328 ESSAI DE STATISTIQUE des prix fabuleux; de sorte qu'en 1856 la rĂ©colte, qui promettait beaucoup, est devenue presque insignifiante en cidre. Les propriĂ©taires vendaient la dĂ©pouille de leurs arbres fort cher, et se trouvaient exempts de toute peine, puisque les acheteurs se chargeaient de tous les frais. Il faut ordinairement trois sacs de pommes ou 4 hectolitres et demi pour faire une feuillette de 136 litres, et deux sacs et demi de poires, ou 3 hectolitres 75 litres. § VIII. - Bois. On compte dans le canton d'Aix-en-Othe 7,583 hectares de bois. Le dĂ©partement en compte 83,107 hectares. La proportion est 1 Ă  10,9. Bois appartenant aux communes. . 2,800 hect. — aux Ă©tablissements publics. 107 — aux particuliers, .... . 4,676 Total des taillis sous futaie. 7,583 hect. Il n'y a point de bois de haute futaie. Les essences dominantes sont le ChĂȘne, le Charme, le HĂȘtre, le Tremble, le Bouleau. On comptĂ© aussi 559 hectares de taillis simples. Sept hectares seulement appartiennent aux communes, et 552 aux particuliers. Les taillis appartenant aux communes et aux Ă©tablissements publics sont exploitĂ©s Ă  25 ans. Les particuliers dĂ©passent rarement 20 ans. On estime Ă  135 stĂšres le produit moyen annuel d'un hectare de taillis sous futaie. On porte Ă  50,324 stĂšres la quantitĂ© de bois Ă  SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 329 brĂ»ler de toutes essences fournie annuellement par le canton ; le produit total annuel en bois d'oeuvre est de 1,750 stĂšres. Le prix moyen d'un stĂšre de bois de chĂȘne Ă  brĂ»ler est estimĂ© 5 francs; le stĂšre de bois d'oeuvre 40 francs. Valeur totale du bois Ă  brĂ»ler. 233,813 francs. — d'oeuvre. 70,000 On estime Ă  32,700 francs la valeur totale des Ă©corces de chĂȘne. Ces Ă©corces sont ordinairement dirigĂ©es sur Troyes et sur Sens. Les frais d'exploitation d'un hectare de taillis sous futaie sont de 160 francs. Ceux de taillis simple de 67 francs 50. Il faut Ă©valuer Ă  113 francs environ les frais de plantation d'un hectare de bois. Les frais annuels d'entretien et de surveillance sont de 1 franc 50 l'hectare. Le sol du canton, Ă©tant trĂšs-accidentĂ©, les bois suivent naturellement cette disposition du terrain. Ainsi, l'on compte 2,760 hectares de bois de plaine, et 4,823 hectares de bois de montagne. Les communes qui possĂšdent le plus de bois sont Maraye-en-Othe 2,909 hectares. Saint-Mards-en-Othe. . . 1,309 Aix-en-Othe. 1,042 Celles qui en possĂšdent le moins sont Paisy-Cosdon 62 hectares. Vulaines 97 Les plus beaux bois du canton sont ceux situĂ©s sur les communes de Maraye et de Saint-Mards-enOthe. Autrefois tous les produits des bois de ces contrĂ©es Ă©taient expĂ©diĂ©s sur Paris, au moyen du 330 ESSAI DE STATISTIQUE flottage par la Nosle et la Vannes jusqu'Ă  Sens. Maintenant que la capitale a presque abandonnĂ© le bois de chauffage pour le coke et la houille, le bois de la forĂȘt d'Othe a pris une autre direction. La plupart des expĂ©ditions se font sur Troyes. Tout porte Ă  croire que le bois diminuera de valeur, et l'exploitation des marais tourbeux de la Vannes y contribuera pour beaucoup. DĂ©jĂ  on commence Ă  utiliser la tourbe; un four Ă  chaux vient d'ĂȘtre Ă©tabli Ă  SaintBenoĂźt-sur-Vannes, alimentĂ© par ce combustible. L'expĂ©rience a rĂ©ussi, et l'annĂ©e ne se passera pas sans que l'on voie s'Ă©lever Ă  cĂŽtĂ© une tuilerie. § IX. — Animaux domestiques. MAMMIFÈRES. 1°. Chevaux. Dans le canton d'Aix, on ne se sert que de chevaux pour la culture et pour les transports. Les boeufs du Morvan n'y apparaissent qu'accidentellement pour transporter les produits des coupes de bois. On compte en tout dans le canton 953 chevaux, dont 865 au-dessus de trois ans et 59 au-dessous. On estime que les maladies et les accidents peuvent enlever annuellement 43 chevaux; on estime Ă  19 le nombre de chevaux morts de vieillesse. On ne constate pas d'Ă©pizootie dans le canton. Les maladies les plus ordinaires sont les tranchĂ©es ou coliques provoquĂ©es par des boissons trop froides quand SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 331 l'animal a chaud, ou par les vents contenus dans les intestins. La Pousse, qui a beaucoup d'analogie avec l'asthme chez l'homme. La Gourme, chez les jeunes chevaux. La Fourbure, espĂšce de rhumatisme causĂ© par la suppression d'une grande sueur. La France possĂšde aujourd'hui 3,000,000 de chevaux qui se renouvellent chaque annĂ©e dans la proportion de 1/8 Ă  110 de ce nombre. D'aprĂšs M. Payen, un cheval abattu, pesant 401 kilogr., donne en moyenne Chair 230 k. Os 50 Sang 28 ' Graisse 35 Issues 30 Peau 25 Crins 0 5 Sabots et fers 2 5 401k. 0 2°. Anes, Mulets. Bien que le canton d'Aix soit, en gĂ©nĂ©ral, un pays de montagnes, les Ăąnes et les mulets y sont peu communs. On ne compte guĂšre plus de 90 Ăąnes et 25 mulets. Les Ăąnes servent aux petits manouvriers pour ramener quelques bottes d'herbe des champs ; quelques-uns sont attelĂ©s Ă  une petite voiture, et supplĂ©ent les chevaux de charroi. L'Ăąne, tout le monde le sait, est fort sobre et trĂšs-peu exigeant; la nourriture la moins substantielle lui suffit. Je suis Ă©tonnĂ© que l'usage n'en soit pas plus rĂ©pandu. T. XXII. 23 332 . ESSAI DE STATISTIQUE Les mulets sont encore moins communs que les Ăąnes. Ils ne servent guĂšre qu'aux meuniers. Aussi bien que les Anes, les mulets rĂ©sistent Ă  la fatigue et leur nourriture n'est pas plus coĂ»teuse. Dans quelques circonstances, je crois le mulet prĂ©fĂ©rable au cheval. 3°. BĂȘtes Ă  cornes. On compte dans le canton d'Aix 58 taureaux, 10 boeufs et 2,500 vaches. Le nombre des Ă©lĂšves s'Ă©lĂšve Ă  700 ; au total 3,196 bĂȘles Ă  cornes. Il peut naĂźtre dans le canton environ 1,700 veaux, dont 1,300 sont destinĂ©s Ă  la boucherie. La race dominante paraĂźt ĂȘtre la race Morvande croisĂ©e. On engraisse les boeufs ordinairement Ă  l'Ăąge de quatre ans, et les vaches Ă  huit ans. On nourrit tout Ă  l'Ă©table, exceptĂ© pourtant Ă  Paisy et Ă  Vulaines, oĂč l'on use encore du pĂąturage, et assez infructueusement, suivant moi. On estime qu'une vache donne cinq veaux jusqu'au moment oĂč on l'abat habituellement. Elle peut fournir, en moyenne, 1,200 litres de lait par an. Le litre de lait se vend 10 c. Il faut 24 litres de lait pour faire un kilogramme de beurre. Le prix, ordinaire d'un kilogramme de beurrĂ© est de 1 fr. Il a valu, en 1857, jusqu'Ă  2 fr. et plus, au marchĂ© d'Aix-en-Othe. Il faut environ 15 litres de lait pour un kilogramme de fromage. Le fromage ne se vend pas au kilo. Un fromage maigre, c'est-Ă -dire sans crĂšme, de 0m15de diamĂštre, se paie 15 c. sortant du moule. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 333 4°. BĂȘtes Ă  laine, ChĂšvres. On compte, dans le canton, 70 bĂ©liers mĂ©rinos; 7,000 moulons de race perfectionnĂ©e, et 4,700 brebis. Il peut naĂźtre, dans l'annĂ©e, environ 2,600 agneaux. On calcule que chaque bĂȘte peut fournir annuellement, en moyenne, 1 kilo 250 grammes de laine lavĂ©e Ă  dos. On engraisse ordinairement les moutons Ă  l'Ăąge de quatre ans. Les maladies qu'on cite le plus souvent, sont la gale, le piĂ©tin, espĂšce d'ulcĂšre qui se forme au pied du mouton; la pourriture dans les lieux marĂ©cageux. Le mouton, attaquĂ© de celle maladie, a les yeux et les lĂšvres pĂąles, la contenance incertaine; la laine se dĂ©tache pour peu qu'on la tire. Les moutons qui commencent Ă  ĂȘtre attaquĂ©s de cette maladie doivent ĂȘtre mis Ă  un rĂ©gime sec et salĂ©. On compte 140 chĂšvres. Elles sont ordinairement le partage des mĂ©nages pauvres, qui se servent de leur lait pour leur nourriture quotidienne. La chĂšvre donne du lait pendant quatre ou cinq mois de l'annĂ©e. 5°. Porcs. On ne fait pas l'Ă©lĂšve des pores dans le canton; on les achĂšte Ă  des marchands qui vont eux-mĂȘmes les chercher dans le Berry. On en compte environ 600. Aujourd'hui que l'aisance est gĂ©nĂ©ralement rĂ©- 334 ESSAI DE STATISTIQUE pandue dans nos campagnes, beaucoup de mĂ©nages Ă©lĂšvent un porc qu'ils nourrissent des rĂ©sidus de leur laiterie, de pommes de terre, de son et d'orge. La combinaison de ces quatre substances compose une chair succulente et ferme qui donne au porc du poids et du prix. 6°. Chiens. Depuis la promulgation de la loi sur les chiens, le nombre de ces animaux a considĂ©rablement diminuĂ©. On en compte 604 de toutes catĂ©gories, payant un impĂŽt de 2,472 fr. Les chiens de berger comptent dans le nombre pour 250. Le reste se compose de chiens de chasse et de luxe. On emploie ordinairement pour la chasse en plaine les braques, et pour la chasse au bois aux chiens courants, les bĂątards anglais. On voit aussi quelques anglais pur sang, mais ils sont rares. OISEAUX DE BASSE-COUR. 1°. La Poule. La meilleure poule pour la ponte et l'engraissement est la poule commune Gallus domesticus, qu'on reconnaĂźt aisĂ©ment Ă  la couleur rouge-vif de la crĂȘte et Ă  sa taille basse. Nous avons encore la Poule huppĂ©e G. cristatus dont la taille est trĂšs-Ă©levĂ©e et dont les oeufs sont trĂšs-gros, mais la ponte n'est jamais abondante. Une autre espĂšce Ă  plumes frisĂ©es G. crispus, SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 335 trĂšs-frileuse, et qui, consĂ©quemment, cesse de pondre au moindre froid. La Poule pattue anglaise Cette espĂšce est fort petite et susceptible d'ĂȘtre rendue trĂšs-familiĂšre. On ne l'Ă©lĂšve guĂšre que par curiositĂ©, parce qu'elle pond de trĂšs-petits oeufs, et que les pattes, toujours remplies de boue aux moindres pluies, portent trop d'humiditĂ© dans les poulaillers. La Poule russe qui pond en toute saison. Sa chair n'est pas dĂ©licate. Les oeufs, de couleur jaunĂątre, varient suivant la force des poules. On obtient une bonne race par le croisement de cette espĂšce avec la poule commune. Et enfin la poule cochinchinoise. On n'exerce pas le chaponnage dans le canton. 2°. Le Dindon. On n'Ă©lĂšve le Dindon Meleagris gallopavo que dans quelques fermes. L'Ă©ducation des dindonneaux demande un trĂšs-grand soin. Leur nourriture ordinaire se compose d'orties, de persil, de viande hachĂ©e cuite, mĂȘlĂ©e avec des jaunes d'oeufs durcis par la cuisson. On doit Ă©viter de leur donner des vesces, des pois carrĂ©s qui sont un poison pour eux. La laitue leur est Ă©galement contraire. 3°. Le Pigeon. Il y a des voliĂšres dans toutes les communes du canton. L'espĂšce commune est le Pigeon bizet Columba livia. 4°. Le Canard. De tous les oiseaux de basse-cour, le canard est le 336 ESSAI DE STATISTIQUE plus productif; il ne demande guĂšre Ă  son maĂźtre que de l'eau pour le jour et une retraite pour la nuit. A l'Ă©tat sauvage, lĂ© canard accompagne toujours la femelle; Ă  l'Ă©tat domestique, il est polygame un mĂąle peut suffire Ă  huit ou dix canes. Outre l'espĂšce ordinaire, nous avons encore le Canard de Barbarie, plus gros du double que nos canards ordinaires. Il est remarquable par sa tĂȘte couverte de caroncules d'un rouge vif. Sa chair n'est pas dĂ©licate, et a un goĂ»t musquĂ©. 5°. L'Oie. On Ă©lĂšve quelques oies dans le canton, mais c'est plutĂŽt pour la plume que pour la chair. Chacun sait que la plume des oies maigres est prĂ©fĂ©rable Ă  celle des oies grasses. Cette plume se lĂšve en mai et en septembre. 6°. Le Paon, la Pintade. Le Paon Pavo cristatus et la Pintade Numida meleagris ne sont Ă©levĂ©s que comme oiseaux d'agrĂ©ment. Il y en a fort peu. INSECTES. Abeilles. On Ă©lĂšve des abeilles dans tous les villages du canton. On Ă©value Ă  800 le nombre de ruches. On les traite suivant la mĂ©thode ordinaire, et les produits se vendent aux Ă©piciers du canton et des arrondissements voisins. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 337 Prix des Bestiaux, en moyenne. D'un cheval de trait. ...... 500 fr. D'un cheval de selle de 4 Ă  5 ans 1,000 D'un poulain d'un an 120 D'un Ăąne 50 D'un mulet 200 D'un taureau 250 D'une vache pleine 300 D'une vache ordinaire non pleine. 140 D'un veau destinĂ© Ă  la boucherie 25 D'un bĂ©lier de 2 ans 45 D'un mouton de 2 ans 20 D'une brebis de 2 ans, 15 D'un agneau 9 D'une chĂšvre ou d'un bouc ... 10 D'un porc de 6 mois 70 Valeur totale de la volaille 13,000fr. — des oeufs et autres produits. 33,000 — des ruches 6,150 Poids des Bestiaux, en moyenne. Poids brut. Poids net d'aprĂšs StĂ©phenson. D'un boeuf 413 kil. 248 kil. D'une vache. . . . 240 444 D'un veau 48 29 D'un mouton ... 28 17 D'une brebis. . . . 20 12 D'un agneau. ... 10 6 D'un porc 91 73 D'une chĂšvre ... 22 12 338 ESSAI DE STATISTIQUE § X. — Consommation. Depuis quelques annĂ©es, la consommation de la viande dans le canton s'est dĂ©veloppĂ©e d'une maniĂšre trĂšs-sensible. L'usage de la viande de boucherie a pĂ©nĂ©trĂ© jusque dans les hameaux. Ainsi on estime qu'il se dĂ©bite annuellement 80,000 kilog. de boeuf ou de vache. 32,000 — de veau. 8,000 — de mouton. 52,000 — de porc. Le gibier, la volaille et le poisson ne peuvent guĂšre s'Ă©valuer qu'approximativement. Le braconnage pour le gibier et le poisson n'a jamais cherchĂ©, bien entendu, Ă  rendre compte de ses produits. NĂ©anmoins, on peut estimer Ă  4,000 le nombre de piĂšces de gibier consommĂ©es ; Ă  5,000 le nombre de piĂšces de volaille, et Ă  1,500 le nombre de kilos de poisson mangĂ©s. En 1856 et 1857, le boeuf se vendait . le kil. — le veau 1 00 — le mouton,la brebis. 1 20 — le porc 1 30 — le gibier 2 00 — le poisson 2 00 La valeur totale des produits animaux, en comprenant la viande, les abats, la vente des suifs et des peaux, peut ĂȘtre portĂ©e Ă  229,000 fr. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 339 Revenu brut produit par les animaux les frais, les fourrages non dĂ©falquĂ©s. On estime Ă  571,800 fr. le revenu annuel produit par les chevaux travail, reproduction, engrais. A 9,000 fr. le produit des mulets. A 10,800 fr. le produit des Ăąnes. Revenu total produit par les chevaux, Ăąnes, mulets 601,600f Revenu total produit par les bĂȘtes Ă  cornes 402,000 Revenu total produit par les bĂȘles Ă  laine 110,000 Revenu total produit par les chĂšvres. 1,400 — par les porcs. 21,000 Total gĂ©nĂ©ral 1,136,000f § XI. — Economie rurale. On compte dans le canton 737 individus possesseurs de terres et n'y demeurant pas ; 91 habitant le canton et ne cultivant pas euxmĂȘmes ; 35 cultivant pour eux-mĂȘmes ; 792 cultivant pour eux et pour les autres. Le nombre de fermiers payant un fermage fixe en argent, est de 81. 540 ESSAI DE STATISTIQUE La valeur vĂ©nale moyenne d'un hectare de terre labourable de 1re classe, est de. . . 2,250 fr. de 2e classe, est de. . . 1,250 de 3e classe, est de. . . 400 — de prĂ© naturel de 1re classe. 5,000 de 2e classe. 3,000 de 3e classe. 600 — de vigne, de 1re classe. 3,000 de 2e classe. 2,500 de 3e classe. 1,500 — de forĂȘts, taillis sous futaie. 1,300 — — taillis simple. . . 500 Les terres labourables se louent, en moyenne, l'hectare 1re classe 65 fr. 2e classe. 30 3e classe. 10 Les prĂ©s naturels 1re classe 120 2e classe. 75 3e classe, 15 Les vignes ne se louent pas dans le canton. On compte 24 fermes ayant moins de 5 hectares. 9 — de 5 Ă  10 hectares. 14 - de 10 Ă  20 — 26 — de 20 Ă  50 - 8 — de 50 Ă  100 — Trois seulement possĂšdent plus de 100 hectares. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 341 Etendues des terres communales du canton. Hectares. Produit. Bois et forĂȘts. . . . 2,178 85,639 fr. Terres arables ... 87 4,160 PrĂ©s Ă  faucher ... 324 2,552 PĂąturages 145 1,184 Total des revenus communaux. 93,535 fr. On peut Ă©valuer Ă  2,230 fr. le droit de pĂąturage et les autres avantages que les habitants tirent de leurs biens communaux. AIDES AGRICOLES. Hommes, 560 ; femmes, 495. Le salaire ordinaire est de 1 fr. pour les hommes et de 60 cent, pour les femmes quand ils sont nourris, et de 1 fr. 50 c. et 1 fr. quand ils ne le sont pas. Ces prix ont Ă©tĂ© augmentĂ©s dans ces derniĂšres annĂ©es Ă  cause de la chertĂ© des denrĂ©es alimentaires. Pendant les travaux de la moisson, les salaires sont augmentĂ©s d'un quart. On Ă©value Ă  200 le nombre d'ouvriers des deux sexes qui Ă©migrenl pendant la moisson. Il part bien plus d'hommes que de femmes. Le but de leur voyage est ordinairement la Champagne et la Brie. La moyenne des gages d'un valet de ferme est de 350 fr. Les servantes gagnent 180 fr. INSTRUMENTS AGRICOLES. 1°. La Charrue. — Il n'y a pas, que je sache, de perfectionnements dans le systĂšme des charrues. C'est toujours la charrue Ă  avant-train. Elle est conduite par un ou deux chevaux, suivant la nature du sol ou l'Ă©poque des labours. 342 ESSAI DE STATISTIQUE 2°. La herse. — Elle a la forme d'un quadrilatĂšre rĂ©trĂ©ci Ă  un bout. On commence Ă  adopter les dents de fer, infiniment prĂ©fĂ©rables aux dents de bois. 3°. Le Rouleau ou Roux. — On se sert peu de rouleaux en fonte. Le Contre est une espĂšce de couteau en fer qu'on adapte Ă  la charrue un peu en avant du soc. On s'en sert pour dĂ©fricher les luzernes. Les fumiers et les moissons sont transportĂ©s sur des charrettes Ă  deux roues. Il y a quatre ou cinq ans, on nĂ© comptait qu'une seule machine Ă  battre dans tout le canton. Aujourd'hui on en peut compter une quinzaine. La majeure partie des grains se bat encore au flĂ©au. L'usage des tarares se multiplie avec une rapiditĂ© toujours croissante. Leur prix rĂ©duit et l'avantage qu'ils procurent les ont fait prĂ©fĂ©rer au van Ă  genoux, qui, il est vrai, nettoie mieux le grain, mais fait perdre plus de temps. § XII. — Commerce, Industrie. Le canton d'Aix-en-Othe n'est pas commerçant dans l'acception la plus Ă©tendue du mot. — Il n'y a pas de commerce spĂ©cial. — Dans les annĂ©es abondantes, on vend passablement de cidre. La rĂ©colte de vin, je l'ai dit, n'est pas suffisante. On compte trois ou quatre marchands de blĂ© qui tirent le grain des greniers pour le revendre en dehors du canton. On compte Ă©galement cinq marchands de porcs qui les tirent directement des environs de ChĂąteauroux. LĂ© commerce de bois est assez important. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 343 Les foires les plus renommĂ©es sont celles de SaintMards. On y vend un peu de grain, beaucoup de bestiaux, de la race bovine surtout. Les chevaux s'y vendent moins bien. Les denrĂ©es alimentaires forment aussi une branche assez importante du commerce de ces foires. L'industrie du canton se partage en diffĂ©rentes branches. L'industrie principale est la bonneterie, ou plutĂŽt la fabrication des tissus en laine et en colon, au moyen de mĂ©tiers rectilignes anglais. Aixen-Othe est le principal centre de cette industrie. On compte, dans le canton, 750 mĂ©tiers, dont plus de 400 dans la seule commune d'Aix. Ces 750 mĂ©tiers sont partagĂ©s pour le travail entre huit ou dix fabricants rĂ©sidant presque tous Ă  Aix. La tisseranderie Ă©tait autrefois une industrie trĂšsimportante; Saint-Mards en Ă©tait le centre. En 1824, on comptait dans cette commune 347 mĂ©tiers de tisserand; aujourd'hui il n'en reste plus que 70. Cette industrie paraĂźt devoir cĂ©der la place Ă  la bonneterie. La meunerie est assez rĂ©pandue ; mais il n'y a que deux usines importantes celle de Saint-BenoĂźt-surVannes, et celle de Gerbeau, commune de Rigny. Ces deux moulins sont Ă  quatre tournants. Le premier appartient Ă  M. d'Ambly, le second Ă  M. Bouillat. Ces usines expĂ©dient Ă  Lyon, Ă  Paris, Ă  Troues, Ă  Sens, et desservent les boulangers de la localitĂ©. Une autre industrie est aussi dominante dans le canton, c'est la fabrication de la brique et de la tuile. On compte quinze Ă©tablissements de ce genre. On se dispose en ce moment, Ă  Saint-BenoĂźt, Ă  fonder une tuilerie. Il existe sur le territoire de cette 344 ESSAI DE STATISTIQUE commune un banc d'excellente terre d'une trĂšs-forte puissance. Cette usine sera chauffĂ©e Ă  la tourbe. Les tuileries fabriquent annuellement,en moyenne, trois cents milliers de marchandises briques, tuiles, carreaux. La brique se vend 32 .fr., la tuile 18 fr. Pour une fournĂ©e de 25 milliers de briques, il faut de 3,000 Ă  3,500 bourrĂ©es de ramilles, Il faut ordinairement quatre hommes pour desservir une tuilerie Un marcheur ; c'est celui qui pĂ©trit la terre. On le nomme marcheur, parce que autrefois on pĂ©trissait la terre avec les pieds. Un mouleur; son nom indique ses fonctions. Un porteur, qui prend la brique des mains du mouleur et qui la porte sur l'aire. Un hallier, qui est chargĂ© du sechage et du rebattage, c'est-Ă -dire qui fait sĂ©cher sous la halle et qui redresse les arĂȘtes des briques. La tuile ne se cuit jamais seule. Les couches infĂ©rieures sont toujours en briques. Cinq tuiles tiennent la place de deux briques. Dans le canton, jusqu'Ă  prĂ©sent, on n'a guĂšre fabriquĂ© que la brique, attendu qu'on manque gĂ©nĂ©ralement de terre propre Ă  la fabrication de la tuile. Le canton possĂšde aussi deux fours Ă  chaux, l'un Ă  Rigny, l'autre Ă  Saint-Mards. Celui-ci est de crĂ©ation rĂ©cente. On est Ă  la veille de voir s'Ă©tablir une industrie trĂšs-importante dans le canton, une forge Ă  fer. On vient de dĂ©couvrir sur la commune d'Aix et sur celle de BĂ©rulle, dans les terrrains argileux, du minerai de fer qui permet d'espĂ©rer de voir fonder un Ă©tablissement qui donnera un nouveau relief au canton. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 345 TROISIEME PARTIE. COMMUNES DU CANTON. § Ier. — Aix-en-Othe. Aix-en-Othe est un bourg situĂ© dans le vallon de la Nosle. Son sol crayeux est recouvert, sur les hauteurs, par le terrain tertiaire sable, argile et terre rouge Ă  silex, et sur les flancs des collines, en certaines places, par la terre jaune dĂ©tritique avec silex. En gĂ©nĂ©ral, ce dernier dĂ©pĂŽt est peu considĂ©rable, et la craie paraĂźt souvent Ă  la surface. Le sol du vallon est composĂ© d'un lit de brĂšche de cinq Ă  six dĂ©cimĂštres d'Ă©paisseur, Ă  petits fragments solidement soudĂ©s, au-dessous de laquelle est une terre noire tourbeuse facilement pĂ©nĂ©trable. Dans le bas du bourg, les puits entrent dans cette terre aprĂšs avoir traversĂ© le conglomĂ©rat. Ils ont une profondeur de 4 Ă  5 mĂštres. Dans les points les plus Ă©levĂ©s, ils sont creusĂ©s dans la craie jusqu'Ă  30 mĂštres. Ceux de la partie moyenne, avant d'atteindre cette roche, rencontrent d'abord la terre jaune dĂ©tritique. Sur le plateau, Ă  la CornĂ©e Alexan- 346 ESSAI DE STATISTIQUE dre, un puits de 50 mĂštres traverse 15 mĂštres de terre jaune avec sable et silex, puis pĂ©nĂštre dans la craie. Deux, fontaines principales, la DhuĂ©e et l'Echouette, sont situĂ©es au couchant et prĂšs du bourg. La premiĂšre forme un petit ruisseau qui, aprĂšs avoir traversĂ© un Ă©tang, se rend dans la Nosle. La deuxiĂšme forme Ă©galement un petit cours d'eau qui se jette aussi dans cette petite riviĂšre, aprĂšs avoir longĂ© une prairie. Ces eaux sont trĂšs-claires et trĂšs-vives, et sourdent au bas de la colline, probablement sous la croĂ»te de terrain dĂ©tritique. La tempĂ©rature de ces eaux est de 11° 5'. Une carriĂšre de craie, Ă  500 mĂštres et au sud du bourg, sur le penchant dĂ© la colline du Jard, est exploitĂ©e Ă  ciel ouvert. Les couches y sont, en gĂ©nĂ©ral, Ă©paisses et assez nettement sĂ©parĂ©es. On y rencontre, mais assez rarement, quelques petits rognons calcaires. M. Leymerie a trouvĂ© dans celte craie le spatangus coranguinum, des parties minces de test de catillus et des ventriculites. Ces derniers fossiles, qui presque partout ailleurs se prĂ©sentent Ă  l'Ă©tat de silex, sont formĂ©s ici par une craie plus ou moins siliceuse. Une sablonniĂšre, prĂšs des CornĂ©es, offre un sable assez pur, blanc-gris ou jaunĂątre. Sur le plateau, les terres sont froides, Ă  fond argilo-sableux, rougeĂątre et caillouteux par place. Les coteaux offrent un terrain chaud, blanc ou gris et souvent chargĂ© de silex. Altitude, au-dessus du niveau de la mer 165 mĂštres pris au clocher. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 347 Son nom d'Aix Aquoe, de Aquis in Otha, Aquis granum, lui vient des sources;dont nous avons parlĂ© et qui servaient autrefois Ă  la dĂ©coration du parc du chĂąteau, oĂč elles arrivaient par des aqueducs qui subsistent encore en partie. Il est situĂ© dans une fort belle position, sur la roule dĂ©partementale n° 4 de Tonnerre Ă  Nogentsur-Seine, Ă  30 kilomĂštres de Troyes, et Ă  2 kilomĂštres seulement de la route impĂ©riale n° 60 de Nancy Ă  OrlĂ©ans. La commune d'Aix est composĂ©e de dix-huit centres de population, y compris le chef-lieu. Ce sont Maisons; MĂ©nages. Individus. Aix-en-Othe. . . . 252 376 1,196 Moulin-Ă -Tan ... 2 2 6 Le Bouchot. ... 9 9 33 Le Jard ..... 48 59 193 Les CornĂ©es-Lalliat. 16 21 56 La CornĂ©e-Alexandre 9 11 29 Les CornĂ©es Cabourdin 4 4 16 Le Mineroy. ... 37 45 140 Soubredou 3 3 11 Les Grandes-VallĂ©es. .2 12 40 Les Chevreaux... 52 53 153 Les Petites-VallĂ©es. 6 6 23 La Bouillant . . . 58 75 262 La Pitoyte , , . , 15 23 75 Craney partie. . . 2 2 5 Druisy ..... 26 37 115 La Vosve. .... 17 22 67 Mont-Saint-BenoĂźt. 1 1 1 569 761 2,427 T. XXII. 24 348 ESSAI DE STATISTIQUE En 1852, la population Ă©tait de 2,310; la population s'est donc augmentĂ©e de 117. La moyenne, par mĂ©nage, est d'un peu plus de trois. Cette population se divise comme suit Garçons......... 565 Filles .. . . 490 Hommes mariĂ©s . . . . . . 607 Femmes mariĂ©es . . . . . . 608 Hommes veufs 43 Femmes veuves 114 On compte 165 sexagĂ©naires, 75 septuagĂ©naires, 14 octogĂ©naires. Les Ă©lecteurs sont au nombre de 697. Bornes du territoire. — Le finage d'Aix-en-Othe est bornĂ© au nord par les finages de Paisy et de Villemaur, au midi par celui de Villemoiron, Ă  l'est par celui de Neuvillesur-Vannes, Ă  l'ouest par celui de Paisy. Il y a des hameaux qui sont Ă  plus de 5 kilomĂštres du chef lieu. La commune d'Aix est administrĂ©e par un maire, un adjoint et seize conseillers municipaux. Il y a deux gardes-champĂȘtres, deux gardes-ofrestiers ; un commissaire de police pour tout le canton ; un bureau de tabac Ă  Aix, et un dĂ©bit aux Chevreaux. Il y a, Ă  Aix, une sociĂ©tĂ© d'ouvriers sous le nom d'Union des Travailleurs. Elle fonctionne trĂšsbien. Un marchĂ© public se tient le mercredi; il a Ă©tĂ© Ă©tabli le 4 avril 1781. On n'y vend point de grain, seulement des lĂ©gumes et autres denrĂ©es alimen- SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 349 taires. C'est le mĂȘme jour que se tiennent les audiences du tribunal de justice de paix. Il y a quatre foires par an le 22 janvier, lĂ© 18 juin, le 3 septembre et le 4 novembre. Ces foires sont insignifiantes et valent Ă  peu prĂšs un marchĂ© ordinaire. AntĂ©rieurement, les foires et les marchĂ©s avaient Ă©tĂ© octroyĂ©s par Louis XII, en 1510, sur la demande de l'Ă©vĂȘque Raguier. Ils Ă©taient tombĂ©s en dĂ©suĂ©tude et entiĂšrement abolis. Quelques personnes intĂ©ressĂ©es Ă  leur rĂ©tablissement firent valoir, auprĂšs de Louis XVI, les besoins incessants de la population. Les foires et le marchĂ© furent rĂ©tablis, mais leur importance ne s'en accrut pas davantage. Louis XII n'avait accordĂ© que deux foires. Louis XVI en octroya deux de plus. Dans leur demande, les pĂ©titionnaires font valoir que les denrĂ©es sont en bon » dĂ©bit dans celte bourgade, surtout les grains de » toute espĂšce; que les laboureurs des lieux cir» convoisins, en amenant leurs grains, peuvent fa» cilement faire leurs provisions de bois soit Ă  bĂątir, » soit Ă  chauffer, de vins, cidre, fruits de toute » sorte, dont les habitants d'Aix font rĂ©colte et par» tie de leur commerce. » A cette Ă©poque, il est probable que les foires et les marchĂ©s Ă©taient abondamment fournis. Aujourd'hui, le voisinage trop rapprochĂ© de Saint-Mards et de Villeneuve-l'ArchevĂȘque, placĂ©s dans des centres populeux ou plus commerçants, prive Aix de tout commerce, sous le rapport des grains. Disons aussi, en passant, qu'aujourd'hui les foires diminuent de valeur. Chaque commune veut avoir 350 ESSAI DE STATISTIQUE sa foire. Il est rĂ©sultĂ© de cette multiplicitĂ© des rendez-vous commerciaux, des entraves dans les transactions. Les foires ne sont plus qu'un, but de promenade pour la jeunesse. Aix possĂšde une halle d'un assez lourd aspect. Les audiences se tiennent dans la partie supĂ©rieure. Il y a Ă©galement un la voir public. A la place de l'ancienne maison commune, qui servait de classe aux garçons et de logement Ă  l'instituteur, on Ă©lĂšve en ce moment un beau bĂątiment qui offre tous les Ă©lĂ©ments d'une bonne construction, et qui servira Ă  la fois d'hĂŽtel-de-ville, de logement pour les instituteurs des deux sexes, de salle d'audience pour la justice de paix, de logement pour la pompe. Aix possĂšde une compagnie de pompiers rĂ©cemment organisĂ©e. Elle est composĂ©e de cent hommes, et on peut la citer comme une compagnie modĂšle. Aix offre un aspect satisfaisant aujourd'hui ; ses maisons, sans ĂȘtre d'une excessive Ă©lĂ©gance, sont propres et bien aĂ©rĂ©es. Elles sont construites en craie avec briques, mortier de sable et chaux, et couvertes, la plus grande partie, en tuiles. Aix n'a guĂšre, que six Ă  sept rues assez bien percĂ©es. Des promenades publiques bien plantĂ©es entourent le bourg. Le ruisseau de la Nosle longe la route n° 4, appelĂ©e Ă  Aix rue des Vannes, et offre tous les avantages qui ressortent du voisinage d'un cours d'eau. SUR LE CANTON D'AIX-EN-THE. 351 Egises. - L'Ă©glise paroissiale d'Aix est sous le vocable de l'Assomption. Elle est, dit-on, l'ouvrage successif de trois siĂšcles; elle fut commencĂ©e en 1572, et ne fut achevĂ©e qu'en 1766. Le portail fut fait en 1671. Ce millĂ©sime est placĂ© au-dessus du fronton. Cet Ă©difice n'a rien dĂ© remarquable Ă  l'extĂ©rieur; il est construit en craie avec contreforts de la mĂȘme pierre. A l'intĂ©rieur, la nef est fort belle. Elle se compose de sept travĂ©es appuyĂ©es sur des colonnes soutenant dĂ©s arcs Ă  plein cintre, et voutĂ©e en pierres de craie taillĂ©e. Il n'y a point de bas-cĂŽtĂ©s. Les fenĂȘtres de l'Ă©glise sont circulaires sans meneaux. Il y en a sept. L'abside est Ă©clairĂ©e par cinq autres fenĂȘtres Ă  meneaux croisĂ©s. La premiĂšre fenĂȘtre Ă  droite, Ă  moitiĂ© murĂ©e, est composĂ©e de quatre panneaux semi-circulaires et de trois circulaires ; la fenĂȘtre de gauche, en face, est du style flamboyant. Dans le choeur sont deux chapelles. Dans la chapelle de droite, l'autel est surmontĂ© d'un tableau reprĂ©sentant la Vierge distribuant des chapelets Ă  saint Dominique et Ă  sainte ThĂ©rĂšse. L'autel de gauche est dĂ©diĂ© Ă  saint Joseph, dont la statue surmonte le tabernacle. Le rĂ©table du maĂźtre-autel en bois dorĂ© est de fort belle exĂ©cution deux colonnes d'ordre corinthien encadrent le tableau qui reprĂ©sente l'Assomption de la Vierge. Au dessus est un PĂšre Eternel dans un riche cadre circulaire dorĂ©; un Saint-Esprit planant sur le tout. Ces peintures ont beaucoup de fraĂźcheur. 332La 332La est surmontĂ©e d'une coupole de for e o tale. La sonnerie est composĂ©e de trois cloches qui s'harmonisent assez bien. A l'extrĂ©mitĂ© du bourg, en haut de la colline oĂč est bĂąti Aix, est une autre Ă©glise sous le vocable de saint Avit. Cette Ă©glise, qui fut dĂ©diĂ©e en 1537, Ă©tait l'Ă©glise paroissiale, si l'on en croit la tradition. Elle Ă©tait beaucoup plus vaste qu'elle ne l'est aujourd'hui. Elle est placĂ©e au milieu du cimetiĂšre. La charpente de la toiture est fort remarquable. Cette Ă©glise renfermait autrefois le tombeau d'un seigneur italien, probablement de la suite de l'Ă©vĂȘque Caracciole. La dĂ©molition du choeur a fait disparaĂźtre ce tombeau. Cette chapelle possĂ©dait, dit-on, une pierre privilĂ©giĂ©e dont je parlerai plus loin. Commerce, Industrie. — Il n'y a pas de commerce en grand Ă  Aix. L'industrie principale est la bonneterie, qui occupe 800 individus des deux sexes. Il y a trois moulins Ă  farine sur la Nosle un Ă  Druisy, un Ă  la Vosve et un Ă  Aix. Celui-ci est le plus important, il est Ă  trois tournants. A 500 mĂštres en aval, il y a un moulin Ă  tan. Depuis quelques annĂ©es seulement, il s'est Ă©levĂ© une tuilerie au hameau des Chevreaux. Contributions directes, Revenu La commune d'Aix paie En foncier 12,553f 47c Personnelle et mobiliĂšre. 3,486 77 PortĂ©s et fenĂȘtres 1,810 16 Patentes .„ 4,189 07 En tout. . ... . 22,039f 47c SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 353 Elle possĂšde 669 hectares 96 ares 80 centiares de bois qui produisent un revenu de 26,373 fr. 15 c. 62 hectares 21 ares 81 centiares de pelouses affermĂ©es 3,350 fr. 70 c. Revenu total 29,700 fr. 85 c. La superficie totale du territoire est de 3,476 hectares. On compte 285 chevaux, 837 bĂȘtes Ă  cornes, 3,524 bĂȘtes Ă  laine, 21 chĂšvres, 93 porcs. MunicipalitĂ©. — Les registres de l'Ă©tat civil datent de 1618 ; au greffe de Troyes, ils portent la date de 1594. Les plus anciens sont Ă©crits en latin. On compte Naissances. Mariages. DĂ©cĂšs. De 1792 Ă  1803. . . 704 181 608 De 1803 Ă  1813. . . 442 126 532 De 1813 Ă  1823. . . 556 144 530 De 1823 Ă  1833. . . 488 141 445 De 1833 Ă  1843. . . 489 206 430 De 1843 Ă  1853. . . 566 178 553 Liste chronologique des Maires depuis 1793. 1793, 7 janvier. Guyot Charles-Ant., prĂȘtre assermentĂ©. An m, 23 florĂ©al. Darnel Claude. An IV, 11 pluviĂŽse. RiviĂšre Louis. An vu, 7 florĂ©al. Gatouillat Savinien. An VIII, 11 thermidor. Darnel CL, pour la 2e fois. 1811, 13 juillet. Cosson Jean, comme adjoint adjoint ..... 1811, 4 aoĂ»t. Fouet Charles-François. 1812, 7 fĂ©vrier. Cosson Jean, par intĂ©rim. 1812, 28 mai. Cosson Jean,comme maire. 354 ESSAI DE STATISTIQUE 1813, 12 fĂ©vrier. Pichot Louis-Antoine. 1814, 14 mai. Angevin FĂ©lix. 1815, 23 mai. Bouillerot Bernard. 1815, 29 juin. Beaudouin Henri. 1815, 22 aoĂ»t. Angevin SĂ©lex. 1815, 12 septembre. Paris ThimothĂ©e, adjoint jusqu'en 1818. 1818, 12 septembre, Paullentru Edme. 1826, 15 fĂ©vrier. Maillard ArsĂšne. 1826, 27 septembre. Veau Louis-Avit. 1831, 14 dĂ©cembre. RiviĂšre Antoine. 1834, 20 octobre. Lange FrĂ©dĂ©ric, comme dĂ©lĂ©guĂ© jusqu'au 24 janvier 1835, puis comme maire jusqu'en 1841. 1841, 27 juillet. Veau Louis-Avit. 1846, 2 aoĂ»t. Millot Bazile. 1855, 26 juin. Fouet Louis-HĂ©lĂšne, maire actuel. Chemins, Routes. — Les ressources financiĂšres de la commune d'Aix ont permis Ă  l'administration municipale d'entretenir une bonne viabilitĂ©. Des chemins solidement empierrĂ©s conduisent aux nombreux hameaux qui dĂ©pendent d'Aix. Il est fĂącheux seulement que le sol si tourmentĂ© du territoire ne leur permette pas d'ĂȘtre toujours d'un facile accĂšs. La route de Nogent Ă  Tonnerre traverse le territoire jusqu'au hameau de la Vosve. On vient d'ouvrir un chemin d'intĂ©rĂȘt commun qui passera par Neuville-sur-Vannes, et reliera Aix Ă  la route impĂ©riale n° 60 Ă  Estissac. On a l'intention SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 355 de pousser ce chemin jusqu'Ă  BĂ©rulles. Ce serait, pour cette derniĂšre commune, un raccourcissement de 10 kilomĂštres sur Troyes. PrĂ©cis historique. — La forĂȘt d'Othe Otta, Utta, Nemus Othonis Ă©tait autrefois trĂšs-Ă©tendue. Quelques auteurs prĂ©tendent que, dans les temps anciens, elle joignait celle de la Traconne et occupait alors une grande partie des cantons de Marcilly-le-Hayer et de Nogent-sur-Seine. D'autres auteurs lui donnent pour bornes la Vannes et l'Yonne, d'oĂč les villages de ces cantons sont surnommĂ©s en Othe. Elle a Ă©tĂ© dĂ©frichĂ©e en grande partie, et les bois de Joigny en sont la plus notable portion. Plusieurs Ă©crivains font mention de celle forĂȘt ; nous citerons l'auteur de la vie de saint Ebbon, archevĂȘque de Sens, Nitard, Ă  l'occasion des guerres entre les fils de Louis-le-DĂ©bonnaire. Vers le milieu du IXe siĂšcle, Lothaire avait choisi la forĂȘt d'Othe comme point de rĂ©union de ses troupes, pour barrer le passage Ă  l'armĂ©e de son frĂšre Charles-Ie-ChauvĂ©, qui allait de Sens Ă  Troyes pour les fĂȘtes de PĂąques. Il est probable que Lothaire ne put arrĂȘter son frĂšre, car nous voyons Charles-le-Chauve faire ses PĂąques Ă  Aix en 841. Au centre de la partie montagneuse et au milieu des forĂȘts qui la' couvraient, les Druides avaient un domaine considĂ©rable. Ce domaine passa ensuite aux Ă©vĂȘques de Troyes, sous le nom d'Aix-en-Othe. C'est l'asile que Fulchrique, successeur de saint Prudence dans l'Ă©vĂȘchĂ© de Troyes, offrit Ă  saint Loup de FerriĂšres et Ă  ses moines, lors des ravages des Normands en 852. Le pays d'Othe Ă©tait dĂ©fendu, 336 ESSAI DE STATISTIQUE dans la partie oĂč il s'ouvre sur Troyes, par un ancien fort construit sur un monticule isolĂ© de toutes paris, avec trois fossĂ©s profonds qui embrassaient la cime de la montagne. Ce fort n'existe plus; il ne reste que les fossĂ©s. Il fut dĂ©truit par les Anglais. Ce fort, qui s'appelait Montaigu, Ă©tait situĂ© sur le territoire de Laines-aux-Bois. Ce nom existe toujours. Il paraĂźt qu'Aix a appartenu aux seigneurs de Villemaur, en qualitĂ© de domaine. Si l'on en croit la tradition, l'empereur Julien aurait donnĂ© Ă  un de ses officiers, nommĂ© Maur, le chĂąteau de Villemaur et ses dĂ©pendances vers l'an 361. Il est probable que le chĂąteau d'Aix, abandonnĂ© par les Druides, et Ă  proximitĂ© de Villemaur, faisait partie de la donation de Julien. Lorsque l'Ă©glise de Troyes eut Ă©tĂ© fondĂ©e, les successeurs de Maur, convertis au christianisme, imitĂšrent les rois de France, leurs suzerains, et firent don aux Ă©vĂȘques de quelques parties de leurs domaines. Quoi qu'il en soit, il est notoirement avĂ©rĂ© que les barons de Villemaur possĂ©daient originairement le domaine d'Aix, puisqu'ils Ă©taient en droit de s'y faire des rĂ©serves ou de les abandonner. L'une de ces rĂ©serves Ă©tait la dĂ©pouille de l'Ă©vĂȘque. A sa mort, le baron de Villemaur, ou ses officiers, se mettaient en possession de tout ce qui se trouvait lui appartenir dans le chĂąteau d'Aix. Ils faisaient de mĂȘme Ă  l'Ă©gard de leurs hommes de corps dans l'Ă©tendue de cette terre, et c'est cette remise nĂ©cessairement postĂ©rieure Ă  la tradition du fonds, que les papes et les rois confirment aux Ă©vĂȘques de Troyes. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 557 Nous voyons, en 1152, le pape EugĂšne III, dans une bulle adressĂ©e Ă  Henry, Ă©vĂȘque de Troyes, confirmer Ă  cet Ă©vĂȘque les biens de son Ă©vĂȘchĂ©, et lui assurer, entre autres fonds, la possession de la terre d'Aix et de ses dĂ©pendances, avec tous ses droits, franchises et immunitĂ©s qui lui avaient Ă©tĂ© accordĂ©s et Ă  ses successeurs par les seigneurs de Villemaur. Sept ans aprĂšs, Alexandre III fit la mĂȘme chose en faveur de l'Ă©vĂȘque Mathieu; et de peur que cette ratification, purement ecclĂ©siastique, n'Ă©prouvĂąt dans la suite quelques difficultĂ©s en France, par une charte donnĂ©e en 1207, Ă  Saint-Germain-en-Laye, Philippe-Auguste, Ă  la rĂ©quisition de l'Ă©vĂȘque HervĂ©e, voulut bien confirmer cette concession, comme l'avait fait Louis VII, son pĂšre. Comme nous l'avons vu, le chĂąteau d'Aix Ă©tait fortifiĂ© dĂšs le IXe siĂšcle. Au XIVe, il Ă©tait encore une place assez forte pour servir de retraite pendant les guerres des Anglais en France. L'Ă©vĂȘque de Troyes y avait un Ă©quipage de guerre; et Henry de Poitiers en fit un refuge dont le souvenir s'est perpĂ©tuĂ© jusqu'Ă  nos jours. Lors de la captivitĂ© du roi Jean, les Anglais se rendirent maĂźtres du chĂąteau d'Aix, et le tinrent pendant dix-huit mois. Charles, alors dauphin, entreprit de les en chasser. Il se forma une ligue des seigneurs du pays, dont l'Ă©vĂȘque Henry Ă©tait un des plus puissants. Ils s'avancĂšrent vers le chĂąteau d'Aix, le prirent au troisiĂšme assaut, et en chassĂšrent les Anglais, qui perdirent quatre-vingts hommes. HumiliĂ©s de cette prise, les Anglais revinrent en 1368, brĂ»lĂšrent le fort aprĂšs l'avoir quittĂ©. Mais le gĂ©nĂ©reux Ă©vĂȘque en commença les rĂ©parations, que 358 ESSAI DE STATISTIQUE sa mort l'empĂȘcha d'achever. Son successeur, Jean de Braque, ne fit que fortifier ce qu'on appelait le fort. Jean de Braque ne siĂ©gea qu'environ cinq ans, et, dans ce court intervalle, il donna au chĂąteau Ă  peu prĂšs la forme qu'il a conservĂ©e jusqu'Ă  sa dĂ©molition. Depuis cette diminution, la partie fortifiĂ©e du bourg n'Ă©tait plus assez spacieuse pour y mettre Ă  couvert les habitants et leurs effets. Plusieurs quittĂšrent le pays pour aller s'Ă©tablir ailleurs avec plus de sĂ»retĂ©, et ce lieu Ă©tait menacĂ© d'une dĂ©sertion totale, lorsque la commune, composĂ©e pour la plupart d'hommes de corps de l'Ă©vĂȘque, lui demanda lĂ  libertĂ© de construire des habitations dans l'espace dĂ©sert de la basse-cour, qu'ils offrirent de fortifier dĂ© leurs mains, pourvu, toutefois, qu'il les aidĂąt de son cĂŽtĂ©. Cette affaire fut plusieurs fois misĂ© en dĂ©libĂ©ration, tant dans le Conseil de l'Ă©vĂȘque, composĂ©, Ă  cet effet, de plusieurs personnes de la ville et du diocĂšse, que dans le Chapitre de l'Ă©glise de Troyes. On examina l'avantage qui en reviendrait Ă  la mense archiĂ©piscopale, la suffisance du terrain du fort pour le logement des Ă©vĂȘques, le nouveau rempart que formerait les nouvelles maisons des habitants, pour appuyer le logement Ă©piscopal. Enfin, il fut accordĂ© que les habitants pourraient bĂątir dans la basse-cour, tant pour eux que pour leurs hoirs et ayant-cause, Ă  toujours, au moyen d'une redevance, portant lods et rentes payables tous les ans au 1er octobre. La charte en fut donnĂ©e, Ă  Saint-LyĂ©, le 5 novembre 1373. Aix tomba de nouveau au pouvoir des Anglais vers le milieu du XVe siĂšcle. Des lettres d'Odart Gri- SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 359 viau, lieutenant-gĂ©nĂ©ral Ă  Troyes, en 1434, nous apprennent qu'il fut fait, sur les bourgeois de cette ville, une imposition de 600 livres, employĂ©es au recouvrement, d'Aix, tombĂ© de nouveau au, pouvoir des Anglais. De toute cette masse imposante de forts, de bastions, de tours, il ne reste plus rien. Ce qu'on appelle aujourd'hui le chĂąteau, n'est pas propre abonner une idĂ©e de ce que pouvait ĂȘtre un chĂąteau au moyen-Ăąge. NĂ©anmoins, on voit encore les traces des chaĂźnes qui soutenaient le pont-levis, la passerelle, les poternes, etc. On trouve aussi, çà et lĂ , quelques restes de carreaux Ă©maillĂ©s, qui prouvent que le chĂąteau Ă©tait construit dans les conditions de luxe et de confortable, que pouvait permettre la haute position des possesseurs. En ce moment, des fouilles faites, Ă  l'occasion d'un chemin qu'on ouvre pour aller aux fontaines, mettent Ă  jour des conduits en terre destinĂ©s Ă  conduire l'eau, dans les dĂ©pendances du chĂąteau. Suivant d'autres personnes, ces tuyaux seraient l'ouvrage des Romains, Il existe encore aujourd'hui une place appelĂ©e la Butte, qui est plantĂ©e d'arbres. C'Ă©tait le lieu oĂč l'on faisait l'exercice de l'arbalĂšte. La partie du bourg qui se trouve au nord, sur la route dĂ©partementale, et qui porte aujourd'hui le nom de la GaietĂ©, est, sur les vieux titres, appelĂ©e les CĂ©lestins. Il est probable qu'il y avait, dans cet emplacement, un couvent de cet ordre. Revenu de la terre d'Aix au XIVe siĂšcle. — L'Ă©vĂȘchĂ© recevait en deniers, en moyenne, 220 livres 7 deniers, qui Ă©quivalent Ă  11,441 fr. 52 c. dĂ© notre 360 ESSAI DE STATISTIQUE monnaie. 11,441 f. 52 c. 1 muid 9 setiers de froment, le muid, composĂ© de 12 setiers, Ă  12 15^, faisait . 1,094 4 muids de seigle, Ă  8 17/ . . 1,665 4 muids 1 mine d'orge, Ă  6 4-' 3* . . .. 1,180 10 muids 1 mine d'avoine, Ă  5 13^ . . . 2,682 Total. .... 18, Le muid valait 12 setiers; la mine Ă©tait la moitiĂ© du setier; le bichet Ă©tait le quart de la mine, et le boisseau moitiĂ© du bichet. Le boisseau devait avoir un diamĂštre intĂ©rieur de 14 pouces 5 lignes; une hauteur en dedans, de 7 pouces 2 lignes 1/2; il se mesurait rĂącle, et contenait 1,175 pouces cubes, ou 23 litres 32 centilitres. Vers la fin du XVe siĂšcle et le commencement du XVIe, les revenus de la terre d'Aix sont amoindris ils ne s'Ă©lĂšvent plus qu'Ă  11,384 fr. 70 c. Cela tient Ă  ce que la valeur de l'argent avait baissĂ©, il ne valait que 27 fr. 50 c. Ă  la livre 1. Aix faisait partie de l'archidiaconĂ© de Troyes et du doyennĂ© de Villemaur. D'aprĂšs Hadrien de Valois, la forĂȘt d'Othe aurait formĂ© une sorte de Pagus dont faisaient partie tous les pays surnommĂ©s en Othe. Dans le rĂŽle envoyĂ© au doyen de la chrĂ©tientĂ© de 1 Ces notes sont extraites d'un travail de M. d'Arbois de Jubainville, archiviste de l'Aube. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 361 Villemaur, le 22 mars 1457, Ă  l'occasion de la taxe imposĂ©e aux ecclĂ©siastiques du diocĂšse pour la dĂ©fense de la foi contre les Turcs, le curĂ© d'Aix est portĂ© pour la somme de XL sous. A la date de 1457 on voit, au nombre des bienfaiteurs de l'HĂŽtel-Dieu-Saint-Esprit de Troyes, situĂ© dans le faubourg et prĂšs la porte Croncels, Catherine, veuve de Pariset de Fontaines d'Aix-en-Othe, et fille de Jehan Chevillon de Pitoiste. Au hameau de la Vosve Ă©tait le prieurĂ© de Die, dĂ©pendant de l'abbaye de Fleury-sur-Loire. Les droits de cens et rente avaient Ă©tĂ© rachetĂ©s en 1662, moyennant 300 livres que l'Ă©vĂȘque de Troyes donnait tous les ans au prieur; en 1753, celui-ci Ă©tait rentrĂ© au prieurĂ©. La paroisse d'Aix eut des curĂ©s recommandables par leur science et leurs vertus; entre autres Jean Collet, natif de Rumilly-les-Vaudes, qui construisit, en 1527, l'Eglise de Rumilly avec les sommes d'argent qu'il trouva dans les quĂȘtes qu'il fit dans diffĂ©rentes provinces; Jean MoslĂ©; Odart MoslĂ© qui permuta, en 1570, pour la cure de Saint-Nizier de Troyes, fut dĂ©putĂ© en 1578 par le clergĂ© pour obtenir du roi la permission de tenir une assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale, et fut chargĂ© de l'Ă©ducation de M. de Chevreuse, fils du duc de Guise. Dans la suite, il entra chez les JĂ©suites, et mourut Ă  Àuch, oĂč il prĂȘchait encore en 1592. Guillaume de Taix, nĂ© en 1529, d'une famille noble, et qui devint doyen de l'Ă©glise de Troyes. Il portail pour armes, d'argent Ă  deux fasces d'azur, avec un petit croissant de gueules sur le milieu de la fasce supĂ©rieure, Ă©tant nĂ© d'un puĂźnĂ©. 362 ESSAI DE STATISTIQUE Martin Beaugrand, qui fut directeur des Ursulines de Troyes pendant 51 ans, et auteur de plusieurs ouvrages de piĂ©tĂ©. Je demande, en terminant, la permission de citer quelques particularitĂ©s intĂ©ressantes On lit dans les registres des actes de baptĂȘmes » 1662 En l'annĂ©e 1662, auparavant la moisson, le » grand boisseau de fourment a vallu cent dix sols ; » le grand boisseau de soigle trois livres dix sols ; » le grand boisseau d'avene trente sols. Les pauvres » ont eu grande nĂ©cessitĂ©. Pour les soulager, on fit » des potages quatre Ă  cinq jours la semaine, les" quels potages estoient faicts 1° deux seaux d'eau; » 2° trois quarterons de beurre ou dE lard, ou autre » graisse; 3° un demy potot de sel, quelque peu » plus; 4° pour deux sols de poivre; 5° une pinte » et demye de pois, cuits dĂšs le soir auparavant; » 6° une grande panerĂ©e d'herbes en tout ce que » dessus bien bouilly ensemble dans une grande » chaudiĂšre ; on y mettait 12 ou 15 de pain coupĂ© » en morceaux carrĂ©s, et aprĂšs, avoir bouilly, on en » distribuait une escuellĂ© a chaque pauvre,. Pour » rendre meilleurs, lesdits potages, on, y mettait quelquefois une fresseure de mouton,ou quel» qu'autre morceau de viande coupĂ©e. » Monseigneur de Troyes fit de grandes aumosnes » pendant les annĂ©es de chertĂ©, tant en grain qu'en » argent, pour les panures malades.... ». M. l'abbĂ© de Saint-Aignan, prieur de Dies, donna » dix escus pour faire les potages ci-dessus, » A la fin du registre de 1666 est Ă©crit L'annĂ©e SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 363 » mil six cent soixante-six, l'annĂ©e fut abondante » contre l'attente gĂ©nĂ©rale le fourment valait 16 » le septier, le soigle 10, l'orge 6, l'avoine cent » sols. Le muid de vin, mesure de Sens, 10 livres. » Dans le mĂȘme registre, mention est faite du sĂ©jour Ă  Aix de plusieurs compagnies de soldais commandĂ©s par M. d'Avancourt, le capitaine de Bligny et le capitaine le Barge. En 1663, le curĂ© se plaint que pendant cette » mĂȘme annĂ©e plus de 80 personnes sont mortes » de grandes maladies. Vingt personnes Ă  peine » furent exemptes. » Le bon curĂ© raconte que » malgrĂ© quatre ou cinq accĂšs de fiĂšvre, il n'en ad» ministra pas moins les sacrements, n'ayant point » de vicaire. » L'annĂ©e prĂ©cĂ©dente, il Ă©tait mort 61 personnes. A la suite de la rĂ©vocation de l'Ă©dit de Nantes, il y eut des abjurations de quelques-uns des rĂ©formĂ©s, notamment Ă  Aix. Ces abjurations, contenues aux registres des baptĂȘmes, eurent lieu, surtout aprĂšs une expĂ©dition en rĂšgle, dans la contrĂ©e d'Othe, d'un membre de l'Election assistĂ© de son greffier, et accompagnĂ© de dix-sept archers de la marĂ©chaussĂ©e et de dix archers de la robe courte. NĂ©anmoins, les actes disent que les abjurations sont faites sans aucune contrainte. En voici quelques-unes Le 13 aoĂ»t 1685, Anne Materon, veufve de feu » Jean Hubert, de la religion rĂ©formĂ©e, a abjurĂ© la » dite religion prĂ©tendue en l'Ă©glise de d'Aix, » et ensuite a promis et jurĂ© sur les SS. Evangiles, » sans aucune contrainte, qu'elle embrassait la reli» gion catholique, promy la garder et tenir toute sa T. XXII. 25 364 ESSAI DE STATISTIQUE » vie moyennant la GrĂące de Dieu, la faire garder et » observer tant qu'il lui sera possible Ă  ceux qui » seront Ă  sa charge, Coe elle vouĂ© Ă  l'heur pnte » Hester Hubert, sa fille, Ă  laditte religion catho» lique, aagĂ©e de cinq ans, et en cas qu'il lui advint » de faire le contraire, qu'elle se soubmettait aux. » peines portĂ©es par les canons. Ladite abjuration » faicte par devant moi Anthoine Savine, pre curĂ© » audict lieu, en vertu du pouvoir reçu de Mr Vinot, » Grand vicaire de Troyes, et en prnce de honble » home Jean Mauroy, lieutt au Bailliage dudit Aix; » Me Claude Huvier ; Jacque l'Equier; E. Blanchet, » mre d'Ă©cole audit; Pre ChossemiĂ©, mareschal, qui » ont signĂ©; quand Ă  la dite Materon, a dĂ©clarĂ© ne » savoir. » En marge A laquelle j'ai donnĂ© l'absolution » de l'excommunication par elle encourue Ă  cause » de la dite hĂ©rĂ©sie et icelle j'ay admis Ă  la partici» pation des sacrements de la sainte Eglise. » Les registres subsĂ©quents en contiennent une foule d'autres conçues dans les mĂȘmes termes, que je ne rapporterai pas pour cette raison. On remarquera entre autres celle de Etienne de BadĂ©, seigneur en partie de Villemoiron, et de sa femme, Anne Gillon, veuve de Massicault de Dierrey-Saint-Julien, peutĂȘtre celui qui fut torturĂ© en 1662. J'ai rapportĂ© plus haut que l'Ă©glise Saint-Avit possĂ©dait une pierre miraculeuse. Je trouve, dans le registre des baptĂȘmes de l'annĂ©e 1687, un rapport du curĂ© d'Aix qui constate la rĂ©surrection momentanĂ©e d'un enfant mort-nĂ©, apportĂ© exprĂšs de Saint-Mards pour subir l'inflence de cette prĂ©cieuse pierre. En effet, Ă  peine l'enfant fut-il posĂ© sur l'autel, qu'il SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 365 » devint chaud de froid qu'il Ă©tait, qu'il lui sortit » mĂȘme du sang par le nombril, et qu'il fit mĂȘme » quelque distillation d'urine sic, que les mains » firent un mouvement, que le Sr Hostelain, chirur» gien, profita de cet instant pour lui administrer le » baptĂȘme, aprĂšs quoi il mourut. » On parle encore de cette pierre Ă  Aix ; mais elle n'existe plus, du moins avec ses propriĂ©tĂ©s miraculeuses. § II. — Saint-Mards-en-Othe. Saint-Mards Sanctus Medardus est situĂ© Ă  38 kilomĂštres de Troyes, 8 kilomĂštres d'Aix-en-Othe, 176m au-dessus du niveau de la mer. Cette altitude est prise du sol de l'Ă©glise Ă  la naissance du vallon de la Nosle, au point de rĂ©union de deux petits vallons accessoires. Sol comme Ă  Aix; trĂšs peu de grĂšs erratique; la plupart des blocs que prĂ©sentait celte contrĂ©e ayant Ă©tĂ© exploitĂ©s pour les constructions. Puils de 7 Ă  30 mĂštres creusĂ©s dans la terre jaune caillouteuse et dans la craie. Dans les hameaux, du plateau tertiaire, on trouve des puits dont la profondeur atteint jusqu'Ă  60 mĂštres. La Nosle prend sa source Ă  la jonction des deux vallons ; la fontaine SaintBouin, Ă  1 kil. Ă  l'est du bourg. On en a conduit les eaux jusqu'au centre du pays, oĂč elles aboutissent Ă  une fontaine jaillissante. Ces sources donnent en toutes saisons. On peut encore citer la Chailloire, qui tarit Ă  certaines Ă©poques, et qu'on fait servir nĂ©anmoins pour le flottage des bois. AprĂšs la fonte des neiges ou Ă  la suite d'orages, le pays est quelquefois 366 ESSAI DE STATISTIQUE inondĂ© par les, eaux qui descendent par les vallons et les ravins. A l'est du hameau de la Belle-Epine on trouve un terrain qui offre un sable gras de couleur rouge employĂ© dans les constructions. Il existe encore un autre terrier prĂšs du Moulin-d'En-Bas, d'oĂč l'on tire pour le mĂȘme usage une terre graveleuse qui contient des fragments de craie. Population. — Saint-Mards se partage en quinze parties 1° Saint-Mards; 2° trois hameaux du nom de Vaucouards ; 5° la Belle-Fayte ; 6° Vaubadon ; 7° la Mivoye ; 8° la. LisiĂšre-des-Bois ; 9° la Croix-SaintJacques ; 10° Belair ; 11° la Belle-Epine ; 12° le Nervot ; 13° la Pilonnerie ; 14° le PrĂ©daissy; 15° les Robins. On compte 493 maisons, 604 mĂ©nages. La population Ă©tait de 1,798 Ăąmes en 1842, et de 1,743 en 1852; elle est aujourd'hui de 1,676 habitants qui se divisent ainsi 289 hommes mariĂ©s avec enfants ; 184 — sans enfants; 9 hommes veufs avec enfants ; 26 — sans enfants ; 284 femmes mariĂ©es avec enfants; 185 — sans enfants; 21 femmes veuves avec enfants ; 60 — sans enfants. 314 garçons; 304 filles. Comme on vient de le voir, la population de SaintMards tend sans cesse Ă  diminuer. Quelle est la cause de cette diminution ? On l'explique par le nombre extraordinaire de mĂ©nages sans enfants 271 . SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 367 Une autre cause, c'est que les dĂ©cĂšs surpassent gĂ©nĂ©ralement les naissances. Serait-ce Ă  dire que SaintMards n'est pas dans des conditions de salubritĂ© suffisante? Voici le mouvement officiel de la population Naissances. Mariages. DĂ©cĂšs. De 1792 Ă  1803. . . 562 175 495 De 1803 Ă  1813. . . 383 128 467 De 1813 Ă  1823. . . 419 165 504 De 1823 Ă  1833. . . 463 130 410 De 1833 Ă  1843. . . 374 156 452 De 1843 Ă  1853. . . 348 176 364 Territoire, Exploitation. — Le territoire de SaintMards a 6 kilomĂštres de large du nord au sud du finage de Villemoiron Ă  celui de Nogent-en-Othe ; 10 kilomĂštres de long depuis la tranchĂ©e du Bois-del'Avocat aux maisons de la Guinand Yonne, de l'est Ă  l'ouest. La superficie totale du territoire est de 3,140 hectares. Il y a 102 laboureurs qui possĂšdent 187 chevaux, 17 Ăąnes et 4 mulets; 4 taureaux, 425 vaches, 177 laurillons ou bouvillons ; 18 bĂ©liers, 1,027 moutons, 715 brebis et 484 agneaux; 93 porcs. Administration. — La commune est administrĂ©e par un maire, un adjoint et seize conseillers municipaux. Elle compte 571 Ă©lecteurs. Les registres de l'Ă©tat civil datent de 1792 seulement. Elle possĂšde une brigade de gendarmerie Ă  pied pour le service du canton, deux gardes-champĂȘtres, une compagnie de pompiers, un receveur buraliste, deux dĂ©bits de tabac, un bureau de poste aux lettres avec quatre facteurs, un instituteur et une institutrice laĂŻques. 368 ESSAI DE STATISTIQUE Il s'y tient un marchĂ© aux grains tous les lundis. Il n'est pas trĂšs important. En revanche, les foires sont les plus renommĂ©es du canton, bien qu'elles aient subi le sort de toutes les foires, c'estĂ -dire qu'elles aient perdu de leur importance. On en compte six le 24 avril, le lundi de PĂąques, le 25 mai, le 21 septembre, le 6 dĂ©cembre et le lundi qui suit la fĂȘte de NoĂ«l. Il y a en plus des foires remises, dont deux Ă  jour fixe, les premiers lundi de juillet et de novembre. Sous l'ancienne RĂ©publique, Saint-Mards possĂ©dait un bureau d'enregistrement. Routes, Chemins, Constructions. — Il y a Ă  SaintMards 1° la route dĂ©partementale n° 4, traversant le pays et le territoire sur une longueur de 6 kilomĂštres 200 mĂštres ; 2° le chemin de grande communication de Saint-Mards Ă  Germigny du canton de Saint-Florentin, 5,700 mĂštres sur le territoire; 3° le chemin d'intĂ©rĂȘt commun de Saint-Mards Ă  Ervy, n° 22, par Vosnon, 2 kilomĂštres 700 mĂštres; 4° les chemins vicinaux de Saint-Mards Ă  Joigny, 4,300 mĂštres; de Saint-Mards Ă  Chennegy,2,700 mĂštres; plus de 7,400 mĂštres de chemins nouvellement construits, conduisant Ă  tous les hameaux. Quatre cantonniers entretiennent les chemins. Il y a encore, Ă  Saint-Mards, bien des maisons couvertes en chaume; nĂ©anmoins, on remarque que le nombre en diminue tous les ans d'une maniĂšre sensible. Dans le centre du pays, le long de la route, ont voit de fort beaux bĂątiments construits entiĂšrement en briques. Au milieu de la place, est une halle rĂ©cemment Ă©levĂ©e et d'assez bon goĂ»t. Tout auprĂšs, est une fon- SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 369 taine jaillissante, dont l'eau retombe en gerbes Ă©lĂ©gantes d'un bassin en fonte soutenu par un enfant de mĂȘme mĂ©tal. Ce travail est d'une fort belle exĂ©cution. A l'extrĂ©mitĂ© du bourg, sur le chemin de Nogenten-Othe, est un lavoir public construit en briques et fort vaste. Eglise. - L'Ă©glise de Saint-Mards, relevĂ©e en 1735, a Ă©tĂ© en partie dĂ©truite par les calvinistes; mal reconstruite en 1779, elle Ă©tait si peu solide que les pierres se dĂ©tachaient de la voĂ»te Ă  chaque instant. Les fenĂȘtres, au lieu de vitraux, Ă©taient fermĂ©es avec des paillassons. Elle fut consolidĂ©e en 1827, 1828 et 1829. Aujourd'hui, c'est une des belles Ă©glises du canton. Elle est situĂ©e au haut du village; on y monte par 27 marches. L'abside, voĂ»tĂ©e en craie taillĂ©e, doit appartenir Ă  l'ancienne Ă©glise. Le rĂ©table, composĂ© de deux colonnes d'ordre corinthien, supporte un tableau de fort belle exĂ©cution, reprĂ©sentant l'Ascension. Sur le chapiteau de ces deux colonnes est posĂ©e une Gloire dorĂ©e du plus bel effet. Le rĂ©table est Ă©clairĂ© par quatre fenĂȘtres Ă  meneaux en pierre et Ă  vitraux circulaires. De chaque cĂŽtĂ© de l'autel principal sont deux autels mĂ©nagĂ©s dans les bas-cĂŽtĂ©s. Celui de droite est dĂ©diĂ© Ă  la Vierge immaculĂ©e, celui de gauche Ă  Saint-Nicolas. Le maĂźtre-autel, qui a la forme d'un tombeau, est en marbre rouge, et provient de l'Ă©glise de Vauluisant, ainsi que deux magnifiques volutes de mĂȘme roche et de mĂȘme nuance, placĂ©es prĂšs de la porte principale et qui servent de bĂ©nitiers 370 ESSAI DE STATISTIQUE La voĂ»te de la nef est supportĂ©e par quatre colonnes. Un jeu d'orgue est placĂ© au-dessus de la porte intĂ©rieure de la nef. Le portail, fort simple, se compose de deux pilastres sur lesquels est posĂ© un fronton renfermant une Gloire en relief. Au-dessus est une rosace en vitraux non coloriĂ©s, surmontĂ©e d'une guirlande de pierre. Le clocher a la forme quadrangulaire. Commerce, Industrie. — Comme Aix, Saint-Mards possĂšde toutes les branchĂ©s de commerce de petit dĂ©tail. Il y a une tuilerie, deux moulins Ă  eau et un Ă  vent, un four Ă  chaux rĂ©cemment construit, quatre tuileries, dix-sept pressoirs, dont quinze Ă  manĂ©ge et deux Ă  bras, 41 mĂ©tiers Ă  bas, 70 mĂ©tiers de tisserands. Vers le milieu du XVIIIe siĂšcle, on en comptait prĂšs de 400. De tout temps celle derniĂšre industrie avait Ă©tĂ© le partage des habitants de SaintMards. ImpĂŽts, Revenus. — Le revenu imposable est de 36,961 fr. 70 c. — On paie Contribution fonciĂšre .... 7,376 f. » c. Personnelle et mobiliĂšre . . . 1,985 » Portes et fenĂȘtres . . . . . 1,410 » Patentes 1,814 37 12,585 f. 37 c. Saint-Mards possĂšde 481 hectares de bois qui donnent un produit annuel de 4,680 fr. La chasse est louĂ©e 192 fr. 75 c. par an. On loue aussi quelques mares poissonneuses qui rapportent 46 fr. 75 c. pour droit de pĂȘche par an. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 571 Liste chronologique des Maires. Drouot Louis, du 12 vendĂ©miaire au 6 florĂ©al an VI. Morin Henry, du 6 florĂ©al an VI, au 10 vendĂ©miaire an vu. Bazin Etienne-Robert, comme prĂ©sident de l'administration municipale jusqu'en brumaire an XII. Morin Henry, de nouveau jusqu'en 1814. Fromant Henry, jusqu'en 1827. Morin Charles, jusqu'en 1830. Fromant Henry, de juillet Ă  novembre 1830. Drouot Antoine-Vincent, jusqu'au 10 janvier 1835. Barrat Jean-Baptiste, jusqu'au 26 aoĂ»t 1837. Petit Charles-Augustin, jusqu'en septembre 1845. Dumet Nicolas, jusqu'en 1846. TrouvĂ© Hyacinthe, maire actuel. Le placard oĂč Ă©taient les archives de la mairie ayant Ă©tĂ© incendiĂ© en 1814, il est probable qu'on a perdu bien des piĂšces pouvant aider Ă  l'intelligence de l'histoire de Saint-Mards. PrĂ©cis historique. — Dans des lettres de Philippele-Bel et de Charles VII, cette bourgade est appelĂ©e Saint-MĂ©dard-du-Chemin, parce que c'Ă©tait la route de Troyes Ă  Joigny et Ă  Auxerre. Saint-Mards Ă©tait, anciennement, une ville murĂ©e, du grenier Ă  sel d'Estissac, Ă©lection de Troyes, du bailliage et prĂ©sidial de Chaumont, depuis que, au XIVe siĂšcle, elle a 372 ESSAI DE STATISTIQUE Ă©tĂ© soustraite du bailliage de Troyes, Ă  la sollicitation de la duchesse d'AthĂšnes qui en Ă©tait dame. Saint-Mards possĂ©dait des fabriques d'Ă©toffes dĂšs le commencement du XVIe siĂšcle, car nous voyons, en 1531, le Conseil de ville de Troyes ordonner aux gardiens des portes de ne laisser entrer aucun » drap de lit, plumes, cotillons, pourpoints, peaux » en poil ou en laine, vieux chiffons venant de » Langres, de Chaumont, de Brienne, de Vitry-en» Perthois, de ChĂąlons, d'Auxerre, de Saint-Mards» en-Othe, etc., et ceci Ă  cause des ravages qu'exer» çait la peste dans ces diffĂ©rentes villes Ă  cette » Ă©poque. » Dans un feuilleton de l'Aube, du 14 mai 1857, nous lisons dans un article intitulĂ© Recherches sur les anciennes pestes de Troyes, de 1531 Ă  1544, la » peste Ă©tait au village de Saint-Mards, situĂ© Ă  quel» ques lieues de la ville. De ce pays, il vint Ă  Troyes » un homme et trois femmes pour y vendre, moyen» nant quelques sous, des hardes et du vieux linge. » Ces braves gens se mirent en quĂȘte de se dĂ©bar» rasser de leur marchandise; mais bientĂŽt on en » sut la provenance. On les arrĂȘta aussitĂŽt. L'homme » fut enfermĂ© dans la tour Charlemagne, qui vient » de disparaĂźtre, et les femmes dans sa voisine, la » tour Barbazan, dont il ne reste plus, hĂ©las! que " quelques assises. Tous quatre furent livrĂ©s Ă  M. le » PrĂ©vĂŽt. Mais, pendant l'instruction, quoique courte » et fort sommaire, l'homme parvint Ă  s'Ă©vader. Les » femmes, moins heureuses, restĂšrent sous les ver» rous. M. le PrĂ©vĂŽt rendit sa sentence, et les con» damna Ă  ĂȘtre attachĂ©es Ă  une charrette, conduites » dans les rues et carrefours de la ville, pour y ĂȘtre SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 373 » fouettĂ©es publiquement par le fermier des menues » amendes et par l'exĂ©cuteur des hautes oeuvres. La " sentence reçut son exĂ©cution, et ses prescriptions » furent exactement observĂ©es. L'autoritĂ© munici» pale avait pris ses mesures Ă  cet effet. Elle paya » dix sous Ă  ceux qui appliquĂšrent la peine du fouet » aux patientes pour aller boire » avant de les » fustiger, et Me Michaud, exĂ©cuteur des hautes » oeuvres et maĂźtre encordeur, reçut quarante sous » pour les avoir bien fouettĂ©es » Lorsque le calvinisme se rĂ©pandit en France, il fit des progrĂšs considĂ©rables Ă  Saint-Mards. Charles de la Porte, sieur de Chevrosche, seigneur du PrĂ©daissy, y facilitait et protĂ©geait les prĂȘches et les assemblĂ©es des sectaires. L'Ă©glise de Troyes y envoya des dĂ©putĂ©s pour travailler Ă  dĂ©truire l'erreur. Mais Chevrosche rendit, par ses intrigues, leur dĂ©putation inutile. Depuis l'Ă©dit de Nantes, ils voulurent y avoir un temple, avec l'exercice libre de leur religion. RenĂ© BenoĂźt, nommĂ© Ă  l'Ă©vĂȘchĂ© de Troyes, y vint lui-mĂȘme, en 1598, pour fortifier les fidĂšles dans la foi. Les officiers de la justice, Ă©tant protestants, firent emprisonner quelques catholiques, et, malgrĂ© tous les efforts du Chapitre de la cathĂ©drale, ils Ă©levĂšrent enfin un temple proche l'Ă©glise paroissiale en 1615. Ce voisinage excita plusieurs querelles entre les deux communions. L'Ă©vĂȘque RenĂ© de Breslay et son clergĂ© en portĂšrent leurs plaintes au Parlement, et le temple des huguenots fut transportĂ© au bout de la Grande-Rue, Ă  l'extrĂ©mitĂ© du bourg. Il Ă©tait frĂ©quentĂ© par les religionnaires du canton et de plusieurs endroits Ă©loignĂ©s. Les huguenots de Dierrey Ă©taient en correspondance 374 ESSAI DE STATISTIQUE permanente avec ceux de Saint-Mards. On lĂ©guait des fonds pour l'entretien des ministres. A l'occasion des troubles excitĂ©s par les calvinistes de Saint-Mards; M. de Barbezieux, lieutenant pour le roi, Ă  Troyes, envoya dans le bourg des compagnies de gens de pied et de cheval, avec des pionniers et de l'artillerie. Ces troupes s'emparĂšrent du chĂąteau, tuĂšrent une grande partie de ceux qui s'y Ă©taient retirĂ©s, parmi lesquels Ă©tait le prĂ©sident Sorel. Elles firent des prisonniers et mirent le reste Ă  rançon. De Saint-Mards, ces troupes se rendirent Ă  Noyers, qui, au bout de trois semaines de siĂ©ge, se rendit Ă  composition. Extrait d'une lettre de Berchaire Mutel, curĂ© de Saint-Mards. Le 27 mai 1681, 3e fĂȘte de la PentecĂŽte, jour » oĂč se tenait la foire qui avait Ă©tĂ© transfĂ©rĂ©e du 25 » Ă  cause de la solennitĂ©, le clocher, dont la flĂšche » Ă©tait une des plus Ă©levĂ©es qui se voient, Ă©tait tombĂ© » jusqu'au beffroy sans blesser personne; quoique » cet accident fut arrivĂ© pendant les vĂȘpres, et que le » devant de l'Ă©glise fut rempli d'une multitude, au » milieu de laquelle cette flĂšche se prĂ©cipita subi» tement avec le timbre de l'horloge, dont les anses » furent rompus. Cette cloche, que l'on n'a point » fait refondre, produisait un accord parfait avec les » cinq autres. » Pareil accident, arrivĂ© trois fois en moins d'un SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 375 » siĂšcle, a fait prendre le parti de supprimer cette » flĂšche de dessus la grosse tour qu'on vient de » construire. » L'ancien chĂąteau fortifiĂ© et' flanquĂ© de quatre » grosses tours se fait encore remarquer, quoiqu'en » ruines. Le bourg, autrefois fermĂ© de murs, dont » partie sert aujourd'hui de clĂŽture ait jardin du » presbytĂšre, est encore entourĂ© de fossĂ©s. Les foires, » au nombre de quatre, sont les plus considĂ©rables » de la Champagne. Elles se trouvent les jours de » saint Mathias, 24 fĂ©vrier; de saint Urbain, 25 mai ; » de saint Mathieu, 21 septembre, et de saint Nicolas, » 6 dĂ©cembre. » Les marchĂ©s qui se tiennent tous les lundi, ne » se distinguent pour ainsi dire des foires que par » le dĂ©placement du mĂ©nage, qui, Ă  celles-ci, se » tient Ă  cĂŽtĂ© de l'Ă©glise, au nord. La majeure » partie des habitants s'occupe du mĂ©tier de tis» serand. On fait nombre de plus de 300 de ces » mĂ©tiers employĂ©s Ă  la fabrique de toiles, coutils, » treilles et tiretaines. » Il ne manque qu'un Ă©tablissement modelĂ© sur » celui de plusieurs endroits, qui retirerait une mul» titude de jeunesse, de l'un et de l'autre sexe, d'une » inaction que l'on voit de jour en jour dĂ©gĂ©nĂ©rer » en fainĂ©antise. » C'est sur le territoire de Saint-Mards que saint » Bouin se retira dans la solitude, auprĂšs d'une fon» taine qui porte son nom, et qui forme la premiĂšre » source d'un ruisseau qui, avant que d'entrer dans » le bourg, en reçoit un autre appelĂ© Chailloy, dans », lequel, au bas de Saint-Mards, se jettent plusieurs 376 ESSAI DE STATISTIQUE » autres fontaines qui l'aident Ă  faire tourner, les » deux moulins, et l'accroissent considĂ©rablement » jusqu'Ă  Villemoiron, au bas duquel il est encore » augmentĂ© par les deux sources d'Aix, dont il tra» verse le finage pour se rendre Ă  Paisy-Cosdon, oĂč » il se jette dans la Vannes. L'enceinte de l'ermitage » de ce saint solitaire se fait encore remarquer, » mais le lieu de son oratoire n'est reconnaissable » que par une croix qui sert de station Ă  la proces» sion du mardi des Rogations. » On n'est point surpris d'avoir vu nos anciens » Ă©vĂȘques de Troyes s'Ă©tudier Ă  ne mettre Ă  Saint» Mards, pour curĂ©s, que des hommes d'un mĂ©rite » et d'une science consommĂ©s dans le droit canon » et les antiquitĂ©s ecclĂ©siastiques., lorsqu'on sait ». que, par des Ă©dits de pacification, ce bourg fut » mis au nombre des lieux oĂč les protestants auraient » le libre exercice de leur religion. Quels savants prĂȘ» tres ne fallait il pas pour entrer en lice avec les » Claude, les Aubertin, les Jurieu, qui en avaient » fait leur principale Ă©cole et leurs plus fameux » rendez-vous au temps de la PĂ que, qu'ils y cĂ©lé» braient avec d'autant plus de pompe et d'apparat, » que les trois temples qu'ils y avaient leur procu» raient, par leur distance, plus de facilitĂ©s de se » donner en spectacle aux catholiques Ă©branlĂ©s et » tremblants sous un despotisme, tel que celui qu'ils » avaient usurpĂ© dans tout le pays d'Othe ! Deux » de ces temples sont encore subsistants, l'un ser» vant de grange Ă  la ferme du chĂąteau, l'autre de» meure en masure dans le bois de PrĂ©daissy, Ă  la » proximitĂ© d'un autre chĂąteau qui leur servait de » fort, mais dont il ne reste aucun vestige que l'em- SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 377 » placement des bĂątiments et la forme des jardins » encore plantĂ©s en buis. » Le plus cĂ©lĂšbre de ces prĂȘches, et qui en Ă©tait » comme la mĂ©tropole, avait d'abord Ă©tait placĂ© au» au» de l'Ă©glise des catholiques, oĂč se tient aujour» aujour» le mĂ©nage aux jours de foire. Mais la trop » grande proximitĂ© faisait naĂźtre entre les deux par» par» de si frĂ©quentes disputes, que chaque jour on » y voyait le renouvellement du massacre de Passy. » Les prĂ©tendus rĂ©formĂ©s reçurent ordre de se re» re» hors de l'enceinte. Ils transportĂšrent cette » soi-disant cathĂ©drale dans les retranchements oĂč " elle subsista jusqu'Ă  ce que, par un arrĂȘt du Con» Con» elle fĂ»t dĂ©molie de fond en comble et rem» rem» par une croix dite la Croix du PrĂȘche, Son » premier emplacement est marquĂ© du mĂȘme » signe. » On lit dans les registres de cette paroisse que, » l'an 1685, le 5e jour du mois d'avril, le prĂȘche ou » temple des huguenots de la religion prĂ©tendue ré» formĂ©e a Ă©tĂ© dĂ©moli jusqu'aux fondements, sui» vant l'arrĂȘt du Conseil d'Ă©tat du roy rendu le » 5e jour du mois de mars prĂ©cĂ©dent, Ă  la poursuite » du syndic du clergĂ© du diocĂšse de Troyes. Le sieur » Comparat, subdĂ©lĂ©guĂ© de monseigneur HuĂ© de » Miromesnil, intendant en Champagne, prĂ©sident » en l'Ă©lection de Troyes, chargĂ© dudit arrĂȘt, en » bonne et due forme, serait venu en la paroisse de » Saint-Mards, l'ayant fait signifier Ă  Me Charles » d'Elforterie, ministre de la religion rĂ©formĂ©e, et » me Payant fait voir je l'ai priĂ© d'assister, dĂšs le " matin, Ă  la messe et au Te Deum, avant que de » procĂ©der Ă  la dĂ©molition dudit temple, oĂč se sont 378 ESSAI DE STATISTIQUE , » portĂ©s les habitants catholiques, le tout en actions » de grĂące 1. » Les biens du temple furent adjugĂ©s aux hĂŽpitaux de Troyes, et les sommes dues au Consistoire accordĂ©es pour les rĂ©parations de l'Ă©glise, oĂč l'on transporta aussi tous les meubles. NĂ©anmoins, les huguenots se sont encore perpĂ©tuĂ©s pendant longtemps dans cette paroisse. Mais leur secte a enfin entiĂšrement disparu par les soins de Me Claude de Montmeau, curĂ© de Saint-Mards depuis 1730, et mort en 1778. Les fermes et l'emplacement du chĂąteau de SaintMards appartiennent aujourd'hui Ă  la famille Costel. Les bois oĂč Ă©tait le chĂąteau de Chevrosche sont Ă  M. Dalogny. On en voit encore des vestiges. La seigneurie de Saint-Mards Ă©tait un marquisat oĂč les seigneurs avaient un chĂąteau, maintenant dĂ©truit. Au XIVe siĂšcle,elle appartenait Ă  Jeanne d'Eu, comtesse de Brienne et duchesse d'AthĂšnes. Elle fut vendue ensuite Ă  Jean de Chanteprime, qui Ă©pousa Jeanne Thessarde, dont il eut deux filles. L'aĂźnĂ©e vendit sa part, en 1461, Ă  Louis Raguier, Ă©vĂȘque de Troyes, et y rentra faute de paiement. En 1493, la seigneurie entiĂšre appartenait Ă  sa soeur, qui Ă©pousa Michel de PiĂ©d-de-Fer, a qui elle porta ce domaine. Ces Pied-de-Fer l'ont possĂ©dĂ© longtemps. On voit, au XVIIe siĂšcle, Alexandre Pied-de-Fer, chevalier, marquis de Saint-Mards, seigneur de 1 L'original de cette lettre est entre les mains de M. l'abbĂ© Coffinet. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 379 Montgueux, grand chambellan du prince de CondĂ©, gouverneur des princes de Conti, s'excuser de ne pouvoir faire partie,de l'arriĂšre-ban, attendu qu'il est au service des princes de Conti. Les armes des Pied-de-Fer Ă©taient Ă©chiquetĂ©es d'or et d'azur. La terre de Saint-Mards appartint aussi Ă  Anne de Thurin, marquise de Saint-Mards, dont la fille fut mariĂ©e Ă  Pierre de Courcelles. Cette terre passa depuis aux Letellier, qui ont eu Maraye en mĂȘme temps. Elle appartint, en dernier lieu, au duc de Villeroy. PrĂ©daissy, hameau de Saint-Mards, Ă©tait une seigneurie distraite de celle de Saint-Mards, et qui appartenait au fameux de La Porte de Chevrosche, avec le fief de deux fiefs, au commencement du XVIIe siĂšcle, passĂšrent Ă  la famille du Mottet, puis Ă  M. de Chavaudon, lieutenant-gĂ©nĂ©ral de Troyes, et ensuite Ă  M. de Sainte-Maure, son fils, prĂ©sident en la cour des aides. Il y avait au PrĂ©daissy une justice particuliĂšre qui se rendait au nom de M. de Chavaudon de Sainte-Maure, qui Ă©tait seigneur pour moitiĂ© dans les bois et usages de la paroisse. Il y avait encore un autre hameau, appelĂ© ChĂąteau-Hutton, Castrum Guitonis, qui a totalement disparu. Ce hameau appartenait Ă  Pierre de ChĂąteau-Hutton, bienfaiteur de l'abbaye de Dilo. La famille de Pigney possĂ©dait une partie de ce domaine dans le XVIe siĂ©cle. Il passa ensuite Ă  Etienne, sire de Pressey, seigneur de Chamoy. En 1468, nous le voyons entre les mains de Gilles de Villemor, seigneur de Craney. En 1565,on trouve encore Jacques de Pied-de-Fer, seigneur de ChĂąteau-Hutton. En T. XXII. 26 380 ESSAI DE STATISTIQUE 1630, Jean le Masson laissa ChĂąteau-Hutton Ă  sa fille. Le chancelier SĂ©guier rĂ©unit ce domaine Ă  celui de Villemaur. Parmi les curĂ©s de Saint-Mards, on distingue Charles de Titreville, nĂ© au Mesnil-le-Roy, diocĂšse de Chartres, bachelier en thĂ©ologie, conseiller, aumĂŽnier du roi, lequel, de curĂ© de Saint BenoĂźt-surVannes, le devint de Saint-Mards en 1615. Il y exerça son ministĂšre dans les jours les plus critiques du calvinisme, et il lui fallut souvent recourir Ă  l'autoritĂ© sĂ©culiĂšre pour mettre en sĂ»retĂ© sa vie et celle des catholiques. Il rĂ©signa, en 1631, Ă  son neveu qui s'appelait comme lui, Charles de Titreville. Celui-ci fut, comme son oncle, aumĂŽnier du roi, et, suivant un acte de baptĂȘme de la paroisse de Chennegy, ancien lecteur en hĂ©breu de S. M. Louis XIII, et protonotaire apostolique. Il mourut, Ă  Saint-Mards, en 1671. § III. — Maraye-en-Othe. Maraye Maraia, Ă  30 kilomĂštres de Troyes, 15 kilomĂštres d'Aix-en-Othe. Altitude, 284m. Ce bourg est situĂ© dans une position Ă©levĂ©e, Ă  la naissance d'un vallon, qui va rejoindre Ă  Chennegy le grand vallon de Lancre. Ravins nombreux et profonds sur les coteaux environnants; sol comme Ă  Aix. Blocs de grĂšs sauvages assez nombreux, offrant quelquefois un volume assez considĂ©rable. Puits de 10 Ă  36 mĂštres de profondeur, creusĂ©s dans la craie surmontĂ©e de deux Ă  trois mĂštres de terre jaune caillouteuse. Pas de fontaine constante. Eaux sau- SUR LE CANTON D'AIX-EX-OTHE. 381 vages abondantes provenant des orages et de la fonte des neiges. Telles sont les particularitĂ©s que prĂ©sente le sol de cette bourgade. Les meilleures terres sont dans le fond du vallon ; sur les cĂŽtes, le terrain est argileux et caillouteux rougeĂątre; il convient au froment. Sur le plateau, les terres sont froides et produisent du seigle et des arbres Ă  cidre. Les parties sablonneuses offrent de trĂšs-beaux bois. Population. — Maraye, y compris le Gallot et la Belle-Fayte, compte 134 maisons, 178 mĂ©nages, 499 individus. Maisons. . MĂ©nages. Individus. Champsicourt. . . . 27 36 110 Les Boulins. .... 42 56 171 Champ-Charme. . 20 34 100 La PerriĂšre. . . .57 77 218 Vireloup . ..... 4 5 17 Total. . . . . 292 386 1,115 En,1852, la population Ă©tait de 1,140, 244 garçons ; 279 hommes mariĂ©s; 26 hommes veufs ; 210 hommes mariĂ©s avec enfants; 69 — sans enfants; 8 hommes veufs avec enfants; 16 — sans enfants; 222 filles; 286 femmes-mariĂ©es ; 60 femmes veuves. On compte 57 sexagĂ©naires, 20 septuagĂ©naires, 12 octogĂ©naires et un homme de 91 ans. Maraye possĂšde une table des registres des bap- 382 ESSAI DE STATISTIQUE tĂȘmes, mariages et sĂ©pultures depuis 1700 jusqu'Ă  1784. Dans cet intervalle, il y a 3,434 naissances et 2,816 dĂ©cĂšs. Les actes datent de 1582. On compte Naissances. Mariages. DĂ©cĂšs. De 1792 Ă  1803. . . 401 101 199 De 1803 Ă  1813. . . 339 89 327 De 1813 Ă  1823. . . 333 84 332 De 1823 Ă  1833. . . 264 105 228 De 1833 Ă  1863. . . 225 108 249 De 1843 Ă  1853. . . 238 50 197 Territoire. — Le territoire de Maraye est trĂšsĂ©tendu. Sa superficie totale est de 4,177 hectares produisant un revenu cadastral de 57,386 fr. 41 c. C'est la commune la plus riche en bois du canton, et son territoire en renferme 2,909 hectares. Le Grand-SĂ©minaire de Troyes en possĂšde 106 hectares 85 ares estimĂ©s 1,987 fr. 55 c. dĂ© revenu cadastral. Administration municipale. — Douze conseillers municipaux, y compris le maire et l'adjoint, administrent la commune. La police rurale est confiĂ©e Ă  deux gardes-champĂȘtres. Celle des bois est confiĂ©e Ă  plusieurs gardesforestiers. On y compte 366 Ă©lecteurs. Maraye possĂšde une compagnie de sapeurs-pompiers; un orphĂ©on rĂ©cemment organisĂ©, et qui ne craint pas d'entrer en lutte avec les sociĂ©tĂ©s de ce genre les mieux constituĂ©es. L'instruction des enfants est confiĂ©e Ă  deux instituteurs laĂŻques et Ă  une institutrice Ă©galement laĂŻque. L'un de ces instituteurs rĂ©side au hameau de La PerriĂšre. Il y a Ă©tĂ© créé un dĂ©bit de tabac. N D'AIX-EN-OTHE. 383 Chemins, Constructions. — Maraye est situĂ© dans la traverse de la route dĂ©partementale. n° 4 de Tonnerre Ă  chemins de grande communication sillonnent son finage 1° le chemin n° 5 de Maraye Ă  Estissac, par Chennegy ; 2° le chemin n° 12 de Maraye Ă  Bouilly, par Sommeval ; 3° le chemin n° 3 de Villeneuve-au-Chemin Ă  la route impĂ©riale n° 60, par Maraye. Chacun des hameaux est reliĂ© Ă  Maraye par de nombreux chemins vicinaux en bon Ă©tat de viabilitĂ©. Les constructions de Maraye sont comme Ă  SaintMards, en pierre dure et en briques; comme Ă  SaintMards, on voit encore Ă  Maraye de vieilles masures couvertes en paille, qui ne demandent qu'Ă  disparaĂźtre. Ce qu'il y a de constructions nouvelles est fait avec goĂ»t et ne manque pas d'Ă©lĂ©gance. Maraye possĂšde un marchĂ© aux grains le mardi il est assez bien achalandĂ©. Les foires sont au nombre de trois le 10 mars c'est la plus importante, le 15 juin, moins suivie que la prĂ©cĂ©dente, et le 20 octobre, qui ne le cĂšde guĂšre Ă  celle du 10 mars. Outre ces foires, il y en a encore d'autres qu'on appelle foires remises, et qui n'ont point de jours invariablement fixes. On vend, Ă  ces foires, du grain et des bestiaux de toute espĂšce. Maraye possĂšde une halle dont la construction remonte Ă  1637, Ă©poque de l'Ă©tablissement des foires et des marchĂ©s de Saint-Mards par M. de Bullion. Ces foires tombĂšrent en dĂ©suĂ©tude, et ce n'est qu'en 1846 qu'elles furent rĂ©tablies dans l'Ă©tat oĂč elles sont aujourd'hui. L'industrie principale, Ă  Maraye, est l'agriculture et l'exploitatio e tiers Ă  bas et quatre tuileries emploie une terre assez impure forme; deux Ă  la Haute-Rive, au sud de la p et une Ă  l'extrĂ©mitĂ© sud de La PerriĂšre. Celle-ci a s terrier Ă  une assez grande distance dans le bois, au bas du plateau. L'argile y est d'un jaune-brun, contient des fragments de silex, et se trouve mĂ©langĂ©e de sable Ă  une certaine profondeur. On compte deux moulins Ă  vent sur Maraye, et huit pressoirs pour cidre et pour vin. ImpĂŽts. — La commune de Maraye paie Contribution fonciĂšre. . . . 11,942 fr. Personnelle et mobiliĂšre . . 1,255 Poites et fenĂȘtres 611 Patentes ..... 568 Total. . ... . 14,357 fr. Eglise. — L'Ă©glise de Maraye, construite de 1779 Ă  1783, est fort jolie et trĂšs-vaste. Elle a 45 mĂštres de long sur 25 mĂštres de largeur. La hauteur sous voĂ»te est de 15 mĂštres. Sa flĂšche a 40 mĂštres. Cette Ă©glise est composĂ©e d'une nef et de deux latĂ©raux. La voĂ»te est supportĂ©e par huit colonnes jumelles cylindriques. Les bas-cĂŽtĂ©s, moins Ă©levĂ©s que la nef, sont supportĂ©s par des pilastres en relief. Le maitre-autel, dĂ©tachĂ©, est accompĂ gnĂ© de colonnes dorĂ©es d'ordre corinthien. Les fenĂȘtres sont Ă  plein-cintre deux seulement ont des vitraux coloriĂ©s en forme de damier. Le clocher est couvert en ardoises, forme d'Ă©cailles. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 383 Contrairement aux habitudes de l'Eglise latine, le portail est situĂ© au levant. Quelques habitants m'ont dit que, lors de la pose de la premiĂšre pierre de cette Ă©glise, les personnes qui Ă©taient prĂ©posĂ©es Ă  cette pose enfouirent dessous les piĂšces et les archives de l'ancienne Ă©glise. Singulier moyen de conservation ! MunicipalitĂ©. — 1792, Fontenay, maire; aprĂšs lui Le Boucher, ancien curĂ©, jusqu'au 25 frimaire an II. An II, Rollin. An V, Mosdier Louis. An V, Morey. An VI, Guyot Louis-Antoine, jusqu'en 1844 46 ans. 1844, Guyot-Cardon. 1848, Pouard-Bachelier, maire actuel. ParticularitĂ©s historiques. — La paroisse de Maraye Ă©tait autrefois un prieurĂ©-cure de Sainte-GeneviĂšve. Sa crĂ©ation datait de 1174, Ă©poque oĂč l'Ă©vĂȘque Mathieu la donna Ă  Pabbaye de Saint-Martin-Ăšs-Aires. Par suite des partages faits entre Thibaut-lePosthume et Erard de Brienne, comme ayant Ă©pousĂ© Philippine de Champagne, petite-fille du comte Henry 1er, la terre de Maraye tomba Ă  Erard, en 1225. Par un autre arrangement du mois d'aoĂ»t 4227, ce mĂȘme prince assigna Ă  Erard pour 1200 de terre rente Ă  prendre sur plusieurs domaines, tels que les bois de Saint-Bouin, Saint-Mards et Maraye, etc., sous la rĂ©serve que les habitants desdits lieux y auraient leurs usages accoutumĂ©s. La commune de Maraye, comme dĂ©jĂ  il a Ă©tĂ© dit, est une des plus 586 ESSAI DE STATISTIQUE riches en bois de ces contrĂ©es. Elle n'en avait aucun titre en 1553, lorsque le duc de Nevers, seigneur, s'arrangea sur ce fait avec presque toutes les paroisses de ses terres de Champagne. Par une transaction de janvier de cette annĂ©e 1553, il est dit que le seigneur-duc cĂšde aux habitants de Maraye un droit d'usage perpĂ©tuel de 1° 300 arpents de bois dans la contrĂ©e appelĂ©e le Bois-de-Villiers; 2° 300 autres arpents Ă  prendre dans celle des Grands et Petits-Soudhoins; 3° et enfin 100 arpents environ du Souillard-de-la-Pierre, et droit de pĂąturage pour leurs bestiaux, sans autre retour que de payer 12 deniers tournois par an au jour de Saint-Remi, 1er octobre, par chaque feu. La vente des bois produisit, en 1740, une somme de 43,438 livres qui fut placĂ©e Ă  constitution par les soins de M. de Villerov, et la rente destinĂ©e Ă  l'entrelien d'un vicaire, de deux maĂźtres d'Ă©cole, l'un Ă  Maraye, l'autre Ă  La PerriĂšre, de l'Ă©glise, de l'Ă©cole, et autres charges de communautĂ©. Lorsque Villemaur eut des seigneurs particuliers, la seigneurie de Maraye appartint aux comtes de Champagne. La suite des seigneurs de Maraye est restĂ©e inconnue jusqu'au commencement du dix-septiĂšme siĂšcle. A celte Ă©poque, celte seigneurie, conjointement avec les chĂ tellenies d'isle, de Villemaur, de Chaource, passa Ă  Jacques de ClĂšves, puis Ă  Henriette de ClĂšves, duchesse de Nevers, princesse de Mantoue, veuve de Ludovic de Gonzague, duc de Nevers, gouverneur de la Champagne. AprĂšs la mort 'de Henriette, Charles de Gonzague, son frĂšre, fut seigneur de Maraye en 1628. Il vendit cette terre Ă  SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 387 M. de Bullion, sur-intendant des finances, avec la rĂ©serve de la mouvance sur Isle-Aumont. Elle entra ensuite dans la maison de Letellier en la personne du chancelier de ce nom. A la mort de l'abbĂ© de Louvois, en 171,8, cette baronie tomba dans le partage du duc d'Alincourt, son neveu, d'oĂč elle a passĂ© au duc de Villeroy, son' fils, qui la possĂ©dait encore au moment de la RĂ©volution, Nous voyons, en 1114, un Pierre de Maraye, abbĂ© de Saint-Loup de Troyes. Au XVIIe siĂšcle, Pierre de Reynard, Ă©cuyer, demeurant Ă  Maraye, se met aux ordres du roi, Ă  propos de la convocation de l'arriĂšre-ban. A la mĂȘme occasion, Pierre de Haranguier, seigneur de La PerriĂšre, remontre les dĂ©penses qu'il a faites pour soutenir sa noblesse; mĂȘme que tous » ses grains ont Ă©tĂ© perdus cette annĂ©e 1674 par » la grĂȘle, requiert qu'il te dĂ©charge dudit ban ; » nĂ©anmoins ledit Haranguier offre marcher. » § IV. — Nogent-en-Othe. Nogent-en-Othe est un village situĂ© en partie Ă  la naissance d'un vallon qui descend Ă  Saint-Mards, et qui pourrait ĂȘtre considĂ©rĂ© comme le commencement de la vallĂ©e de la Nosle, et en partie sur le plateau, tertiaire. Haut-Nogent, C'est le mĂȘme sol qu'Ă  Saint-Mards. Les puits ont de 15 Ă , 20 mĂštres de profondeur, et mĂȘme jusqu'Ă  40 mĂštres, prĂšs de l'Ă©glise;.ils sont creusĂ©s dans la terre jaune chargĂ©e de silex, et dans la craie.; Nogent est situĂ© Ă  15 kilo- 388 ESSAI DE STATISTIQUE mĂštres d'Aix, M de Troyes, 3 kilom. 200 de SaintMards, sur le chemin de grande communication de Saint-Mards Ă  Ervy par Vosnon. Les fonds prĂ©sentent une bonne terre Ă  froment. Sur les cĂŽtes, un sol rougÚùtre caillouteux, Ă  seigle. Sur le plateau, des terres froides retenant l'eau, oĂč les bois qui couvrent plus des trois quarts du terrain viennent bien. A la lisiĂšre de ces bois, on trouve Ă  l'ouest du village des vergers composĂ©s d'arbres Ă  cidre. Altitude, 210 mĂštres auprĂšs de l'Ă©glise. La commune de Nogent-en-Othe est partagĂ©e en deux parties Le Bas Nogent, qui renferme l'Ă©glise, l'Ă©cole et la mairie, 33 maisons, 39 mĂ©nages, 107 individus. Le Haut-Nogent, 21 maisons, 22 mĂ©nages et 73 individus. En tout 54 maisons, 61 mĂ©nages et 180 habitants. Il y a 59 Ă©lecteurs. On compte 35 garçons, 28 filles, 53 hommes mariĂ©s, 3 hommes veufs, 8 femmes veuves. Sur 53 hommes mariĂ©s, vingt sont sans enfants. C'est presque dans la mĂȘme proportion qu'Ă  Saint-Mards. Il y a 11 sexagĂ©naires, 6 septuagĂ©naires et 2 octogĂ©naires. Le territoire de Nogent-en-Othe n'est pas Ă©tendu. Il compte 352 hectares de terres labourables. Les bois comptent pour 536 hectares. La commune n'en possĂšde pas un are, ce qui est assez Ă©tonnant dans une contrĂ©e aussi boisĂ©e. Les bois appartiennent Ă  MM. de Chavaudon de Sainte-Maure, de feu de La Mothe de Montceaux, Marcel Peschard d'Ambly, ingĂ©nieur des mines Ă  Dijon. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 389 M. de Chavaudon y a, je crois, une chĂątaigneraie. Nogent n'a ni commerce ni industrie. Les habitants sont tous cultivateurs, bĂ»cherons ou charbonniers. Le rĂŽle des patentes ne s'Ă©lĂšve qu'Ă  1 fr. — La contribution fonciĂšre, Ă  2,216 fr.; la personnelle et mobiliĂšre, Ă  183 fr. ; les portes et fenĂȘtres, Ă  73 fr. — La totalitĂ©, Ă  2,473 fr, — Le revenu cadastral, Ă  13,509 fr. 83 c. La commune ne possĂšde pour tout revenu que 17 ares 97 centiares de terre contigus Ă  la maison d'Ă©cole, et qui sont louĂ©s Ă  un habitant du pays. La municipalitĂ© se compose d'un maire, d'un adjoint, et de six conseillers municipaux. Il y a un desservant rĂ©sidant depuis quelques annĂ©es ; un instituteur logĂ© dans une maison acquise en 1848. L'Ă©glise n'est plus qu'une chapelle aujourd'hui. Voici ce que dit M. FlĂ©chey, de l'Ă©glise et du village de Nogent " . . . . . Village de 150 habitants, dont les » maisons sont dissĂ©minĂ©es sur le revers de deux » chaĂźnes de montagnes fort rapprochĂ©es l'une de » l'autre, et qui donnent Ă  ce pays un caractĂšre sau» vage et trĂšs-pittoresque. Du haut de l'Ă©glise on » jouit de points de vue charmants. L'Ă©glise a 15 » mĂštres de long sur 7 mĂštres de largeur. Quatre » fenĂȘtres l'Ă©clairent ; leur forme ogivale et leurs » meneaux flamboyants donnent Ă  cette Ă©glise le » caractĂšre du seiziĂšme siĂšcle. Dans le clocher, une » cloche portant celte inscription » L'an 1776, j'aĂŻ Ă©tĂ© bĂ©nite par Edme Fransureaux, » curĂ© de Nogent-en-Othe, et chapelain de Saint-Martin » de Molesme; parrain, M. Antoine Mathurin Wous- 390 ESSAI DE STATISTIQUE » toum, licenciĂ© es-loys, prieur de Flacy, et en cette » qualitĂ© seigneur de Nogent-en-Othe, chanoine de Sens, » avec Mlle Marie-Madeleine Latis. » L'intĂ©rieur est fort pauvre. Mais au milieu d'un » si grand dĂ©nĂ»ment, deux objets d'art viennent frapper l'oeil du spectateur. Ce sont deux restes » prĂ©cieux, l'un du seiziĂšme siĂšcle, l'autre du trei» ziĂšme. Le premier, ancien dĂ©bris d'un autel, est » une niche en menuiserie sculptĂ©e peinte en ara» besques, coloriĂ©e de divers tons, servant Ă  abriter » une statue de la Vierge couronnĂ©e, tenant dans » ses bras l'Enfant JĂ©sus, vĂ©ritable chef-d'oeuvre de » l'Ă©poque de la Renaissance. Le deuxiĂšme est la » porte d'un tronc en menuiserie, laquelle, en cuivre » massif de 26 centimĂštres de hauteur sur 13 de lar» geur, est ornĂ©e de figures et d'arabesques en relief » reprĂ©sentant dans le milieu un Christ en croix; » sur les cĂŽtĂ©s, deux personnages drapĂ©s tenant un » livre Ă  la main, et au milieu, au-dessus du Christ, » une main, caractĂšre symbolique reprĂ©sentant la » Toute-Puissance. Le fond est ornĂ© d'arabesques » ciselĂ©es garnies d'Ă©maux de diverses couleurs. Cet » objet d'art, fort remarquable, est du treiziĂšme » siĂšcle, et ne le cĂšde en rien aux panneaux ciselĂ©s qui recouvrent certains Ă©vangĂ©liaires conservĂ©s Ă  » la bibliothĂšque. » Ce morceau prĂ©cieux, et si bien dĂ©crit, sert aujourd'hui de porte Ă  un tabernacle en bois de chĂȘne nouvellement construit. Sur ce tabernacle est posĂ©e la niche dont on vient de parler. Il est fĂącheux que les personnages sculptĂ©s sur la porte en Ă©mail aient Ă©tĂ© mutilĂ©s. Les tĂȘtes ont disparu. La statue de la SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 391 Vierge Ă©tait originairement dorĂ©e; la pose en est on ne peut plus gracieuse. PrĂ©cis historique. — Parmi les villes qui appartiennent Ă  la prĂ©vĂŽtĂ© de Villemaur, la prisĂ©e de 1328 et le dĂ©nombrement de 1503 mettent en tĂȘte, aprĂšs le chef-lieu et Paisy, en domaine, Nogent-en-Othe, la ville, les bois et appartenance qui sont aux religieux, abbĂ© et couvent de MolĂȘme, en la haute-justice et garde de Villemaur. Trente mĂ©nages composaient celte paroisse, qui Ă©tait du diocĂšse de Sens avec le hameau du Haut-Nogent. L'archevĂȘque Ă©tait collateur de la cure, et le curĂ© percevait la dĂźme qui Ă©tait peu considĂ©rable, Ă  cause des frĂ©quentes plantations qui sont, dit la chronique, ce qui croĂźt le mieux sur le territoire. La plupart des bois formait, dans son Ă©tendue, une multitude de fiefs prĂ©tendant tous haute,moyenne et basse-justice, et droits d'institution d'officiers. Les plus connus sont ceux de Craney, qui appartenaient Ă  M. de Chavaudon ; Nogent-le-Neuf, la RhĂ©torĂ©eVitry, la Cour-de-Sautour et celui de Balapierre. Ces noms aujourd'hui ne reprĂ©sentent plus que des noms de contrĂ©es. Liste chronologique des Maires. 1793, 26 janvier. Menneret Louis. 1793, 14 mars. Boudin Louis. 1793, 16 mai. Bailiet Pierre. An V, 8 vendĂ©miaire. Boudin Louis. An VIII, 21 brumaire. Hurpeau Jean. An VIII, 22 messidor. Chaussemier Jean-Bapt.. An XII, 22 frimaire. Baillet Pierre. 392 ESSAI DE STATISTIQUE 1809, 10 mai Chaussemier Antoine; 1809, 26 mai. Lange Antoine-Charles. 1816, 5 fĂ©vrier. Berthelin. 1820. Lange Antoine-Charles. 1826, 6 janvier. Rousseau Joseph. 4840, 26 septembre. Courtin Etienne. 1841, 8 septembre. Paris MĂ©dard. 1864, 30 juin. Rousseau Joseph. 1848, 24 octobre. Berthelin Jean-Baptiste. 1851, 11 fĂ©vrier. Courtin Etienne, 1853, 30 juin. Couillard Jean Baptiste. 1856, mars. Rousseau Ambroise, maire actuel. § V. — Villemoiron. Villemoiron Villa Mauronium, Villa Mauroni, situĂ© sur la route dĂ©partementale n° 4 de Nogent Ă  Tonnerre, le long du ruisseau de la Nosle, Ă  3,800 mĂštres de Saint-Mards, 6 kilomĂštres d'Aix, 31 kilomĂštres de Troyes. Altitude, 147 mĂštres. Sol comme Ă  Aix. Puits de 3 Ă  15 mĂštres de profondeur, creusĂ©s dans le dĂ©tritus jaunĂątre et la craie. Quelques petites sources dans le vallon, prĂšs du chĂąteau. SablonniĂšre au nord, Ă  l'entrĂ©e du bois. Villemoiron se partage en quatre parties Maisons. MĂ©nages. Individus. Villemoiron . . . . 111 143 385 Surançon . . . ... 38 50 138 Le Petit-Craney. . . 6 10 22 Le Haut-Craney.. . 4 4 9 Total. . . 159 207 559 SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 393 La population Ă©tait de 560 en 1852 151 hommes mariĂ©s, 150 femmes mariĂ©s, 102 garçons, 108 filles, 14 hommes veufs, 29 femmes veuves, parmi lesquels on compte 50 sexagĂ©naires, 21 septuagĂ©naires, 9 octogĂ©naires, une femme de plus de 90 ans. Villemoiron est assez bien construit, sur la route n° 4. Ses maisons, bĂąties de pierre et de briques, annoncent l'aisance et le bon goĂ»t. Au fond du vallon est un petit chĂąteau, dont la construction ne remonte pas bien haut. Il appartient aujourd'hui Ă  M. le marquis de La Baume. La superficie totale du territoire est de 1,269 hectares, dont 697 en terres arables et 446 en bois. La commune possĂšde 205 hectares 23 ares de bois, dont un quart en rĂ©serve. Les autres propriĂ©tĂ©s de la commune consistent en friches ou placiers, oĂč les bestiaux vont pĂąturer. Le maire actuel a fait planter sur ces terrains des arbres Ă  cidre en 1856. La chasse est louĂ©e 200 fr. par an. La pĂȘche a Ă©tĂ© interdite, la riviĂšre ayant Ă©tĂ© totalement dĂ©peuplĂ©e. Les terres sont exploitĂ©es par" vingt-quatre laboureurs ayant en tout 50 chevaux. On compte 220 vaches, 600 bĂȘtes Ă  laine. La ferme du chĂąteau est louĂ©e en dĂ©tail. Villemoiron n'a point de commerce spĂ©cial. Outre l'industrie agricole qui domine, on peut citer la fabrique de tissus en laine sur mĂ©tiers anglais. Il y a un moulin Ă  blĂ© sur la Nosle; quatre pressoirs pour la fabrication du cidre et du vin. 394 ESSAI DE STATISTIQUE La municipalitĂ© se compose de douze membres, y compris le maire et l'adjoint. Un garde-champĂȘtre et un garde-forestier sont chargĂ©s de la police rurale. L'instituteur et le curĂ© sont logĂ©s dans les bĂątiments appartenant a la commune. Un dĂ©bit de tabac y est Ă©tabli. On y voit un lavoir public sur la Nosle, fort bien construit. Il y a une compagnie de sapeurs-pompiers. La commune de Villemoiron paie un impĂŽt foncier de 3,455fr. Personnelle et mobiliĂšre, de 609 fr, ; portes et fenĂȘtres, de 353 fr.; patentes, 106 fr. 50 c. Le revend cadastral imposable est de 23,685 fr. 87 c. Les actes de l'Ă©tat-civil datent de 1649. Liste chronologique des Maires. Gelenier Claude, jusqu'au 18 brumaire an IV. Lavallade, jusqu'au 8 pluviĂŽse de la mĂȘme annĂ©e. Gelenier Claude, reprend jusqu'au 9 messidor an V. Canquery, jusqu'au 15 nivĂŽse an VI. Braley Nicolas, jusqu'au 30 prairial an VIII. Oudin HonorĂ©, jusqu'au 4 thermidor an IX. Lavallade reprend jusqu'au 29 janvier 1808. Veau Louis-Avit, jusqu'au 29 juillet 1815. Lecomte Claude-Louis, jusqu'au 5 fĂ©vrier 1819. Gauthier François, jusqu'au 24 juin 1827. Adam Isidore, adjoint, reçoit les actes pour M. le marquis de La Baume, maire jusqu'au 27 septembre 1830. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 395 Gauthier François reprend jusqu'en dĂ©cembre 1855. Gauthier Louis-Zozime, fils du prĂ©cĂ©dent, maire actuel. Église. — L'Ă©glise de Villemoiron est une des Ă©glises les plus intĂ©ressantes du canton, par ses vitraux d'une touche et d'un coloris parfaits. Ces vitraux ont Ă©tĂ© rĂ©parĂ©s en 1745. Le vitrail Ă  gauche de l'abside l'a Ă©tĂ©, il y a quelques annĂ©es, par de Troyes. Les fenĂȘtres, du style flamboyant, sont fort bien dĂ©coupĂ©es. Dans le transsept Ă  droite, au-dessus de l'autel de la Vierge, le vitrail reprĂ©sente le transport de la maison de la sainte Vierge Ă  Notre-Dame-de-Lorette. Le deuxiĂšme panneau reprĂ©sente un jeune homme sortant d'un puits. Au-dessus de la petite porte, Ă  droite, est une verriĂšre reprĂ©sentant Adam et Eve mangeant du fruit dĂ©fendu, Dieu les chassant du Paradis ; au-dessous, la croix avec cette lĂ©gende Per lignum servi facti sumus, per lignum liberati sumus. Les trois panneaux infĂ©rieurs reprĂ©sentent saint Nicolas et la Vierge ; au-dessous est Ă©crit Me Nicole Regnault, natif de Vert, paroisse d'Auxon, Ă©tant curĂ© de Villemoiron, a donnĂ© cette verriĂšre en 1617. L'abside est Ă©clairĂ©e par quatre fenĂȘtres Ă  meneaux en pierre du style flamboyant. Le tableau du maitre-autel reprĂ©sente le martyre de saint SĂ©bastien, patron de ta paroisse. PrĂ©cis historique. — Villemoiron Ă©tait possĂ©dĂ© par une quantitĂ© de seigneurs le premier qu'on connaisse est Jean de Villemoiron, en 1227, qui fait hommage au comte de Champagne, alors baron de Villemaur. T. XXII. 97 396 ESSAI DE STATISTIQUE Marie de Primri; Poincy de Villemoiron, qui se dĂ©clara vassal de Villemaur. Guy de Pontaillier, Philippe de Courcelles, Gaucher de Dinteville, le comte de Roucy, y avaient chacun une partie. En 1377, la comtesse de Flandres dĂ©clare y possĂ©der une portion en la justice, four, taille, moulin et en la pescherie. Il faut que cette portion ait Ă©tĂ© aliĂ©nĂ©e quelque temps aprĂšs, puisque Philippe de Courcelles y est rentrĂ© par acquisition. Depuis ce temps les barons de Villemaur possedaient un quart et demi de la seigneurie. Pareille portion appartenait, au commencement du XVIIe siĂšcle, Ă  Nicolas d'Artaise, puis Ă  son fils Aaron vers 1655. AprĂšs beaucoup de partages et de divisions, Alexandre Gaudichon, seigneur de Craney, rĂ©unit les parties dispersĂ©es, et M. le duc de Liancourt en devint possesseur aprĂšs. A la RĂ©volution, le chĂąteau de Craney appartenait Ă  M. de Vallans. Le hameau de Surançon appartenait Ă  la duchesse de Brabanl, comme on le voit dans l'aveu de 1503. Il Ă©tait compris parmi les ressorts, garde et souverainetĂ© de Villemaur. Il y avait haute, moyenne et basse-justice, qui Ă©tait du prieurĂ© de Saint-Flavit de Villemaur. Le plus ancien seigneur de Craney est Deudes, qui, en 1211, relevait de Fromont de Corroy, chĂątelain pour moitiĂ© de Villemaur, Ă  cause de HĂ©lie, fille de ManassĂšs. Une famille du nom de Pigny ou Pigney, tint longtemps cette terre avec celle de ChĂąteau-Hutton, dans les quatorziĂšme et quinziĂšme siĂšcles. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 397 La maison de Villemor, qui descendait des anciens barons de Villemaur, de la premiĂšre race, a tenu celte terre pendant plus de trois cents ans. Jacques DouĂ©, conseiller au PrĂ©sidial de Troyes, fit l'acquisition de Craney en 1688. C'est lui qui fit bĂątir le chĂąteau. AprĂšs la mort de DouĂ©, celte terre fut vendue Ă  Charles Fenard de La BothiĂšre, major au rĂ©giment d'Anjou, qui en rendit hommage en 1719. Nous voyons, en 1674, Charles de RoffeyVillemor, seigneur de Craney, Ă©poux de Gabrielle de Harlus, fille du seigneur de Vertilly, Avon et autres lieux. La famille de BĂ©rulles possĂ©dait quelque chose sur Villemoiron, car nous voyons dans les actes de mariage de 1758 Jugement de Congniasse Desjardins, lieutenant ordinaire en la mairie de Villemoiron, qui constate le mariage de messire De Zedde, chevalier, capitaine d'infanterie au bataillon de Dijon, et dame Claudie de BĂ©rulles, dame de Villemoiron en partie, demeurant Ă  Villemoiron. » La mĂȘme annĂ©e, autre jugement rendu par le mĂȘme Congniasse Desjardins, contre ledit De Zedde et sa femme, pour ne pas ĂȘtre comparus par-devant lui pour justifier de leur mariage qui n'avait pas Ă©tĂ© enregistrĂ© par le curĂ©. Ils sont condamnĂ©s Ă  chacun 5 livres envers la Fabrique, sur laquelle amende seront pris les frais du sergent,, taxĂ©s Ă  3 francs. A propos de la convocation du ban et de l'arriĂšreban au dix-septiĂšme siĂšcle, on voit Haute et puissante dame Mme Magdeleine Faby, veufve du chancelier SĂ©guier, seigneur de Villemoiron, Paisy, etc., remontrer par procureur que la di- 398 ESSAI DE STATISTIQUE gnitĂ© que feu M. le chancelier a remplie avec tant d'Ă©clat durant tant d'annĂ©es, et les services que rendent tous les jours ceux de sa famille, sont des titres suffisants pour la dispenser de la loi commune. Charles de Gillier, seigneur de Villemoiron en partie, baron du Petit-Sormery, remontre qu'il est au service du roi. Etienne de Doy, seigneur en partie de Villemoiron, demeurant Ă  Pitoiste, demande exemption Ă  cause de sa grande nĂ©cessitĂ©. Joseph de Villemor, seigneur de la BursiĂšre, demeurant Ă  Villemoiron, remontre qu'il est ĂągĂ© et a deux enfants au service du roi. La veuve Aaron d'Artache, dame de Villemoiron en partie, remontre qu'elle n'a pas d'enfants et qu'elle ne peut mettre un homme en Ă©quipage, ses biens Ă©tant saisis par suite des dettes que son mari a faites Ă©tant au service du roi. Pierre de Maupuis, seigneur de Villemoiron en partie, remontre que ses biens ont Ă©tĂ© saisis et vendus par ses crĂ©anciers, et qu'il est contraint de travailler en gentilhomme verrier pour nourrir sa famille. Dame Charlotte de Roffey, veuve de Louis de Villemor, seigneur de Craney, Villemoiron, Fontvannes, remontre les services militaires de feu son mari et de ses enfants, et de plus la saisie de ses terres, et requiert dispense du service. Etienne de BadĂ©, seigneur de Villemoiron en partie, demeurant Ă  Pitoiste, remontre qu'il est malade et hors d'Ă©tat de faire les frais nĂ©cessaires pour son Ă©quipage. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 399 Le banc et l'arriĂšre-ban Ă©taient un mandement public adressĂ© de par le roi aux baillis royaux, publiĂ© et criĂ© par un sergent dans tous les bailliages et chĂątellenies du ressort, pour convoquer les vassaux et les arriĂšre-vassaux de la couronne, qui ensuite devaient se rendre en armes Ă  l'armĂ©e du roi. Le nom de ban s'appliquait aux nobles relevant du roi, et l'arriĂšre-ban Ă  ceux qui relevaient des vassaux du roi. Lorsque des nobles ne pouvaient se rendre au service du roi pour des raisons de santĂ© ou d'infirmitĂ©s, le lieutenant-gĂ©nĂ©ral du bailliage taxait, suivant l'importance du fief, une somme qui Ă©tait versĂ©e au receveur du domaine royal. Dans le bailliage de Troyes, les taxes variaient de 20 Ă  500 livres. En 1692, la seigneurie de Saint-BenoĂźt-sur-Vannes Ă©tait taxĂ©e 300 livres, comme celles de Chassenay, de Vendoeuvre, d'Arcis. TraĂźnel Ă©tait taxĂ© Ă  500 livres. La convocation dont je fais mention a lieu en 1674, et a pour but de fournir un contingent Ă  l'armĂ©e de Turenne, sur les bords du Rhin. § VI. — Paisy Cosdon. Paisy Paisyacum, Paisiacus, Ă  2 kilomĂštres d'Aix, 3 kilomĂštres de Villemaur, 28 kilomĂštres de Troyes, situĂ© Ă  l'extrĂ©mitĂ© nord du vallon de la Nosle, juste au point oĂč le vallon vient aboutir Ă  la vallĂ©e de la Vannes. Solde craie souvent recouverte de dĂ©tritus; ter- 400 ESSAI DE STATISTIQUE rain tertiaire argilo-sableux, et terre rouge Ă  silex sur le plateau. Puits de 10, 20, 40 et mĂȘme 70 mĂštres de profondeur. Quelques petites sources mortes dans le vallon. Une crayĂšre sur le flanc de la colline, Ă  500 mĂštres au levant du village. La craie en est assez estimĂ©e. On y remarque un cordon horizontal de rognons siliceux et des surfaces assez Ă©tendues, polies et striĂ©es, recouvertes d'un enduit ferrugineux. On y trouve encore quelques nids de limonite et de petits amas d'argilite offrant la couleur nankin. Dans la vallĂ©e, la prairie est mĂ©diocre. Les terres sont blanches ou rougeĂątres, mĂ©diocres sur les cĂŽtes, meilleures lorsqu'elles sont exposĂ©es au levant. Sur le plateau, bois et arbres Ă  cidre. Altitude, 145 mĂštres, sol de l'Eglise. La commune de Paisy se partage en cinq parties Maisons. MĂ©nages. Individus. Paisy. . 52 70 248 Vaujurennes ... 54 65 212 Les Chenettes 5 5 11 Cosdon, ferme 1 1 11 La Tuilerie.... 1 1 2 Total. ... 113 142 484 Il y a maintenant une seconde tuilerie qui Ă©tait au hameau du Jars Ă  l'Ă©poque du recensement. On l'a transfĂ©rĂ©e au lieu oĂč elle Ă©tait jadis, au lieu dit Franc-Alleu. On compte 115 hommes mariĂ©s; 7 hommes veufs ; 123 garçons ; SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 401 113 femmes mariĂ©es; 20 femmes veuves; 106 filles. Population totale, 484 habitants. Elle Ă©tait, en 1852, de 515 diminution de 31. Paisy est, comme je l'ai dit, placĂ© au point de jonction du vallon de la Nosle avec la vallĂ©e de la Vannes. Il s'appuie dans toute sa longueur sur le ruisseau de la Nosle, et se trouve, pour ainsi dire, enfermĂ© dans un angle formĂ© par la route impĂ©riale n° 60 et la route dĂ©partementale n° 4 qui se joignent Ă  quelques pas du village. Les maisons sont construites en craie et en briques, et couvertes partie en tuiles, partie en paille. Vaujurennes est situĂ© Ă  6 kilomĂštres du chef-lieu, sur le plateau au sud-ouest. Les puits y ont 70 mĂštres et plus de profondeur. Les constructions sont pareilles Ă  celles de Paisy ; le chaume domine encore dans les couvertures. Le hameau des Chenettes est situĂ© au milieu des bois. C'Ă©tait probablement, dans l'origine, la maison du garde des propriĂ©tĂ©s seigneuriales. La ferme de Cosdon est au nord et Ă  300 mĂštres de Paisy, sur la route impĂ©riale n° 60. Les tuileries sont Ă  l'est et au nord-ouest de Vaujurennes et au sud de Paisy. Le territoire de Paisy se compose de 1,746 hectares, d'un revenu cadastral de 19,216 fr. 45 c. Les terres labourables comptent pour 900 hectares. On compte 21 laboureurs, 57 chevaux, 200 vaches, 750 moutons et brebis. Les vaches des manouvriers 402 ESSAI DE STATISTIQUE vont paĂźtre dans les pĂątures communales. L'herbe de ces pĂątures est de mauvaise qualitĂ©. Paisy possĂšde 47 hectares de bois, auxquels ne participent pas les habitants du hameau de Vaujurennes, en vertu d'une clause expresse stipulĂ©e dans l'acte de donation des seigneurs de Paisy. L'abaissement de la population, de 515 Ă  484, va rĂ©duire de 12 Ă  10 le nombre de conseillers municipaux de Paisy. Il y a un garde-champĂȘtre et un garde-forestier; un dĂ©bit de tabac. Il y a un instituteur communal logĂ© aux frais de la commune dans un bĂątiment assez bien appropriĂ©. Il n'y a pas de prĂȘtre Ă  demeure, c'est le curĂ© de Saint-BenoĂźt qui dessert la paroisse. On parle de faire construire un presbytĂšre. Les constructions sont Ă  peu prĂšs les mĂȘmes que dans tout le canton; la pierre de roche, la craie, la brique pour les baies sont les matiĂšres ordinaires employĂ©es. On voit quelques couvertures en ardoises. Les chemins sont entretenus au moyen du silex assez abondant dans certaines contrĂ©es. I Les actes de l'Ă©tat civil ne datent que de 1720. Au greffe de Troyes ils remontent jusqu'Ă  1571. On compte, du 1er janvier 1813 au 1er janvier 1823, 149 naissances, 33 mariages et 132 dĂ©cĂšs. Naissances. Mariages. DĂ©cĂšs. De 1823 Ă  1833. . . 170 45 116 De 1833 Ă  1843. . . 121 35 67 De 1843 Ă  1853. . . 137 44 99 L'industrie agricole et la bonneterie se partagent Ă  peu prĂšs la population de Paisy. On compte 47 mĂ©tiers Ă  bas, dont 2 français seulement, SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 403 Deux moulins Ă  eau Ă  200 mĂštres l'un de l'autre. Ils font la farine de mĂ©nage seulement. Le moulin, situĂ© en amont et appartenant Ă  la famille Pichot, d'Aix, Ă©tait autrefois une papeterie. Le moulin en aval ne date guĂšre que de 60 ans. AntĂ©rieurement, il y avait un moulin sur la Vannes, tout prĂšs de Cosdon. A la suite d'une forte inondation, les eaux pluviales de Planty vinrent l'assaillir et l'encombrer de grĂšve Les moulins de Villemaur, forcĂ©ment arrĂȘtĂ©s par cet encombrement, intentĂšrent un procĂšs au meunier de Cosdon. Ce dernier fut contraint de faire un aqueduc. Faute de ressources ou autrement, ce travail ne fut pas exĂ©cutĂ©. Le moulin fut dĂ©moli. Il y a aujourd'hui, comme autrefois, deux tuileries sur le territoire de Paisy. La terre est une argile bigarrĂ©e alliĂ©e par masses Ă  des sables rouges, jaunes et blancs le tout recouvert par une terre rougeĂ tre Ă  silex, probablement remaniĂ©e. Brique noirĂątre et poreuse d'assez bonne qualitĂ©. L'Ă©glise n'a rien de remarquable ; elle est trĂšssimple, d'une seule piĂšce et sans voĂ»te. C'est, sans aucun doute, le reste d'une Ă©glise plus ancienne, car on voit encore de chaque cĂŽtĂ© du choeur les arcs Ă  plein-cintre qui, autrefois, devaient correspondre Ă  des latĂ©raux. On trouve, en effet, dans les registres des sĂ©pultures de la paroisse, des inhumations faites dans la chapelle de la Vierge, et cette chapelle n'existe plus. Le tableau du maĂźtre-autel reprĂ©sente JĂ©sus apparaissant Ă  Madeleine dans un jardin aprĂšs la rĂ©surrection. Ce tableau a de la fraĂźcheur. Les fenĂȘtres sont sans meneaux; les vitraux, en 404 ESSAI DE STATISTIQUE verre blanc. Seulement, dans une des fenĂȘtres Ă  droite, on voit une grisaille parfaitement conservĂ©e, reprĂ©sentant le buste d'un chevalier qui doit appartenir au seiziĂšme siĂšcle. Liste chronologique des Maires. 1743, 12 janvier. Hennequin Edme. An IV, 10 vendĂ©miaire. Odin Pierre. An VI, 2 fructidor. Henriot François. An VII, 7 frimaire. Roley Nicolas. An VII, 13 florĂ©al. Laloy Louis. An VIII, 6 florĂ©al. Renuad. An XIII, 22 florĂ©al. Odin Pierre. An XIII, 5 vendĂ©miaire. RozĂ© Jean, 25 ans. 1830, 7 septembre. Chevalier Nicolas. 1831, 22 septembre. Lasne. 1843, 10 aoĂ»t. Chevalier Nicolas. 1846, 26 aoĂ»t. Saviniat EugĂšne. 1869. Chevalier FĂ©lix, maire actuel. ParticularitĂ©s, PrĂ©cis historique, — On lit Ă  la suite des actes de baptĂȘmes de Paisy, annĂ©e 1740, les lignes qui suivent Ă©crites par Galland, curĂ© Cette annĂ©e 1740 la postĂ©ritĂ© sçaura les fĂącheux » Ă©vĂ©nements causĂ©s par la rigueur des saisons. La » nuit du 1er au 2e octobre la gelĂ©e a Ă©tĂ© si forte » qu'elle a gĂątĂ©, perdu toutes les vignes. On a laissĂ© » en plusieurs endroits les raisins aux secs sic. » Le vin a valu cent trente et cent quarante livres. » La pinte vingt sols. A la saint Martin les ge» lĂ©es continuĂ©es ont calcinĂ© tous les ouvrages de SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 405 » massonnerie de l'annĂ©e. Les murs de l'Ă©glise et » du cimetiĂšre de Paisy ont Ă©tĂ© si fort endommagĂ©s » que l'on a Ă©tĂ© obligĂ© Ă  recommencer de nouveau. " Ensuite sont survenues des pluies continuelles le » jour et la nuit, poussĂ©es par des vents, tempĂȘtes » et orages qui ont causĂ© des inondations si grandes » que les eaux ont entraĂźnĂ© les ponts, les moulins, » des villages entiers. On a veu la Meuse Ă  Charle» ville charrier des meubles et des chĂąlits tout dres» ses ; grand nombre de personnes de pĂ©ries ; le " bled cher, l'orge trois livres six sols Ă  la saint " Martin Ă  Rigny-le-Ferron, le pain cinq sols la » livre. Priez Dieu que pareilles choses n'arrivent de » votre temps. On va en bateau dans les rues de » Paris. A Florence, ville capitale de la Toscane, » les eaux ont montĂ© jusqu'Ă  40 pieds. » Les nouvelles disent que le pont de Kyel-sur» le-Rhin, de l'autre cĂŽtĂ© de Strasbourg, est entraĂźnĂ© » et que 3000 hommes y sont pĂ©ris noyĂ©s. » Paisy Pasiacum, nom tout celtique, disent les uns, tout romain disent les autres, aussi fiĂšre que les plus vieilles citĂ©s, a possĂ©dĂ© son musĂ©e souterrain ; un coup de pioche rĂ©vĂ©la, par hasard, ces richesses archĂ©ologiques. M. FlĂ©chey, autorisĂ© par la SociĂ©tĂ© AcadĂ©mique de l'Aube, et. muni de l'assentiment de M. le PrĂ©fet, y fit une descente, et bientĂŽt apparut Ă  ses yeux Ă©tonnĂ©s une riche mosaĂŻque des meilleurs temps de l'art romain, et qui n'avait pas moins de quinze mĂštres de long, sur 10 mĂštres de large. Malheureusement, celte mosaĂŻque Ă©tait mutilĂ©e. Mais M. FlĂ©chey a pu extraire et rapporter au MusĂ©e de Troyes des fragments considĂ©rables de la bordure de celte mosaĂŻque. 406 ESSAI DE STATISTIQUE Quels Ă©taient, » dit M. AmĂ©dĂ©e Gayot dans la sĂ©ance du 21 mai 1852, quels Ă©taient le caractĂšre » et la destination de l'Ă©tablisssement fondĂ© dans ce » lieu, et assez riche pour paver si magnifiquement » ses salles? Était-ce un temple, comme pourrait le » faire soupçonner la tradition du pays et le nom de » Buisson-aux-PrĂȘtres que porte encore cette con» trĂ©e? Étaient-ce des bains publics comme le nom d'AixAquoe,pourrait le faire soupçonner? Était-ce » lĂ  la somptueuse villa d'un patricien? Il serait » tĂ©mĂ©raire de hasarder des conjectures Ă  ce sujet. » Si l'on en croit les habitants du pays, il resterait encore bien du terrain Ă  explorer, et l'on n'aurait dĂ©couvert qu'une trĂšs-petite partie des richesses archĂ©ologiques cachĂ©es dans ce sol privilĂ©giĂ©. Voici le compte-rendu des fouilles faites en 1853, sur la demande et pendant la prĂ©sence de lĂ  SociĂ©tĂ© française Ă  Troyes. M. FlĂ©chey, chargĂ© de la direction des travaux, » a exĂ©cutĂ© 300 mĂštres courants de tranchĂ©es de 80 " centimĂštres de largeur, sur 1 mĂštre de profon» deur. Il a, de plus, explorĂ© 1,800 mĂštres super» ficiels; il a mis, ainsi, Ă  dĂ©couvert les anciennes " fondations exĂ©cutĂ©es sur la propriĂ©tĂ© du sieur De» von, et a reconnu par des sondages que les cons» tructions se prolongeaient au-delĂ  de chaque cĂŽtĂ© » sur les hĂ©ritages non fouillĂ©s. Les aires qui re» couvraient le sol entre les parois Ă©taient formĂ©es » en bĂ©ton trĂšs-dur. » Voici les objets recueillis pendant les fouilles 1° De nombreux fragments de marbres pré» cieux, vert antique, blanc, veinĂ©, brĂšche, griotte, » porphyre, stuc, etc.; SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 407 » 2° Fragments de peintures murales; » 3° Un style en bronze d'un dessin Ă©lĂ©gant, trĂšs bien conservĂ© ; » 4° Une hache romaine, Ă  fer trĂšs-recourbĂ© ; » 5° Une hache dite gauloise, en jade espĂšce de » pierre verdĂątre; » 6° Des clefs, des mĂ©dailles en bronze du haut » empire; " 7° Des fragments de poterie, une amphore bri» sĂ©e qu'on a pu reconstituer presque entiĂšrement; » l'anse en terre cuite d'une autre amphore de pre» miĂšre grandeur sur laquelle avait Ă©tĂ© apposĂ© un » cachet portant cette inscription » Depuis quatre ans que les fouilles ont Ă©tĂ© faites, aucune nouvelle tentative n'a Ă©tĂ© essayĂ©e; on pourrait en accuser l'ignorance et l'insouciance des propriĂ©taires. Paisy Ă©tait Ă  la collation du Chapitre de Villemaur; les dĂ©cimateurs Ă©taient le curĂ©, l'abbĂ© de Montier-la-Celle et le prieur de Clairlieu ; Ă  Cosdon, c'Ă©tait le curĂ© de Paisy et les chanoines de SaintPierre de Troyes; Ă  Vaujurennes, le curĂ© et les religieux de Deiloc Dei Locus. Paisy Ă©tait du domaine de Villemaur dĂšs la prisĂ©e de 1328. Les chevaliers et les Ă©cuyers portant le nom de Paisy n'Ă©taient que de simples possesseurs de diffĂ©rents fiefs situĂ©s dans cette paroisse, et relevant comme les autres de la chĂątellenie de Villemaur. Franc-Alleu, oĂč est maintenant la tuilerie nouvellement reconstruite, avait des habitants en 1553. Il y avait encore un autre hameau appelĂ© Chemets, dont on ne connaĂźt que le nom. La part que le duc de Nevers, seigneur de Paisy, 408 ESSAI DE STATISTIQUE s'Ă©tait rĂ©servĂ©e, et qui consistait en 40 arpens de bois et 10 arpens de prĂ©s, fut vendue Ă  divers particuliers, et on voit dans la suite un seigneur de Courmononcle propriĂ©taire d'un fief sur Paisy. Le Chapitre de Saint-Étienne y possĂ©dait 100 arpens 58 perches de bois en deux piĂšces. Sur cette paroisse Ă©tait le fief de La Motte de Paisy, Ă  cause d'une motte ou tertre oĂč il Ă©tait assis, dans la prairie, assez prĂšs de l'Eglise, et oĂč il y a eu un chĂąteau ou manoir environnĂ© de fossĂ©s. Ce chĂąteau appartenait dĂšs 1362 Ă  Garnier Canis, qui le laissa Ă  ses enfants Pierre et Nicolas. Ce dernier le vendit Ă  Allart Olivier, grenetier du grenier Ă  sel de Villemaur, seigneur de Cosdon. Le hameau de Vaujurennes n'Ă©tait originairement qu'une grange, selon l'expression d'alors, c'est-Ă dire une ferme, domaine, mĂ©tairie qui appartenait aux seigneurs de Villemaur. La dame HĂ©liela vendit Ă  Henry, Ă©vĂȘque de Troyes, en 1151. Ce prĂ©lat, Ă  la priĂšre de Louis-le-Jeune et de la comtesse Mathilde, dont il Ă©tait parent, la donna, en aumĂŽne et pour le remĂšde de l'Ăąme de ses ancĂȘtres, Ă  l'abbaye de Dilo, pour l'entretien des chanoines de celte Ă©glise. Cette grange, ou mĂ©tairie, Ă©tait chargĂ©e envers les seigneurs de Courmononcle d'une rente fĂ©odale dont les propriĂ©taires firent hommage aux barons de Villemaur. Cosdon ou Caudon, et suivant les anciens titres Corvaudon, Colsaudon, rĂ©duit aujourd'hui Ă  une seule ferme, Ă©tat autrefois un gros hameau de Paisy. Les terriers y montrent diverses rues. On y a vu des moulins Ă  foulon, des moulins Ă  farine, Ă  Ă©corce, SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 409 Ă  huile. Un autre le nomme Taillefer, soit qu'il ait appartenu Ă  une famille de ce nom, soit Ă  cause d'une forge qui subsistait encore en 1459. La terre de Cosdon jouissait de tous les droits attachĂ©s alors aux fiefs. Elle avait une maison seigneuriale et des prisons. Il y avait encore dans la paroisse de Paisy le fief du couvent des CĂ©lestins de Sens, dont le prieur et les religieux fournirent leur aveu au duc de Nevers en 1454, Payant rĂ©cemment acquis de Guillaume de la Pallu, seigneur de Courmononcle. Les bornes qui existent encore sur la limite des finages de Paisy et d'Aix furent plantĂ©es en 1538, par les soins de Pierre de Provins, bailly de Villemaur. Elles portent l'Ă©cusson Ă©piscopal. Il existe dans les archives de Paisy un titre qui accorde aux habitants de cette paroisse la jouissance d'une certaine quantitĂ© de bois, Ă  l'exclusion des habitants de Vaujurennes. En voici le sommaire Acte passĂ© entre les habitants de Paisy et le bailly » autorisĂ© de François de ClĂšves, duc de Nivernais, » seigneur de Paisy en 1563, lieutenant-gĂ©nĂ©ral » pour le roy en les paĂŻs de Champagne, Brye et » Luxembourg, seigneur de Lautrec, d'Orval, » d'Isles, CharmocĂ©, Villemor et Maraye, par-devant » Mes Georges Mortiment et Pre Augignard, clercs» notaires jurĂ©s en la prĂ©vĂŽtĂ© de Villemor. Procu» ration donnĂ©e Ă  Marquet, Fambet, Julyen Colin, » Colas Chevalier et Jehan Chevalier, demeurant en » la paroisse de Paisy, au nom de tous les habi» tants de Paisy, Franc-Alleuf et VallĂ©e des Ches» nettes. » Les habitants s'Ă©taient emparĂ©s de ce bois aprĂšs la transaction indiquĂ©e. Le seigneur, sur 410 ESSAI DE STATISTIQUE les 120 arpents, s'en rĂ©serve 40 et laisse le reste aux habitants qui ont prins et prendront femme nĂ©e » audit lieu, qui ont acquis maison et y sont de» morants, depuis 20 ans seulement, et non aultres » habitants, en payant par eux la redevance d'hu» saige et Ă  la charge aussy qu'ils feront ung long » fossĂ© Ă  leurs frais et dĂ©pens Ă  la sĂ©paration de ce » que le seigneur leur laisse. » Une autre piĂšce datĂ©e de 1572, ainsi intitulĂ©e Ordonnances des commissaires dĂ©putĂ©s des francs» fiefs, nouveaux acquĂȘts prĂ©tendant main-levĂ©e sur » les usages, pĂąturages et communautĂ©s. » Cette saisie avait Ă©tĂ© faite par l'ordre du Roi, attendu que les habitants n'avaient pas fourni dĂ©claration *dans le temps et suivant l'Edit. NĂ©anmoins, comme les habitants ont prouvĂ© avoir fait les dĂ©marches nĂ©cessaires, cette saisie fut annulĂ©e. Paisy avait un notaire au dix-septiĂšme siĂšcle. Les minutes de cette Ă©tude doivent ĂȘtre chez le notaire de Rigny-le-Ferron. On voit encore dans les archives de Paisy un arrĂȘtĂ© du district d'Ervy, mettant fin aux prĂ©tentions des habitants de Vaujurennes, qui, malgrĂ© les termes explicites de l'acte dont j'ai donnĂ© la teneur plus haut, voulaient avoir des droits dans les bois donnĂ©s par le duc de Nivernais. § VII. — Saint-BenoĂźt-sur-Vannes. Saint-Benoit-sur-Vannes, Ă  32 kilomĂštres de Troyes, 7 kilomĂštres d'Aix, 6 kilomĂštres de Villemaur, est situĂ© sur le penchant d'un coteau, au bord SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 411 septentrional de la vallĂ©e. Solde craie ordinairement recouverte de dĂ©tritus avec silex. Alluvion ordinaire dans la vallĂ©e; trĂšs-peu de blocs de grĂ©s erratique. Puits ayant de 3 Ă  4 mĂštres dans le bas du village, et prĂšs de 40 mĂštres dans les points les plus Ă©levĂ©s, de 10 Ă  12 mĂštres prĂ©s de la roule. Ceux de ces deux derniĂšres catĂ©gories traversent un lit de terre jaune avec silex et fragments crayeux avant de pĂ©nĂ©trer dans la craie. Les puits de la vallĂ©e donnent toujours de l'eau et ne rencontrent que le terrain d'alluvion. Quelques sources, appelĂ©es BĂźmes dans la vallĂ©e, alimentent des ruisseaux qui se dĂ©versent dans la Vannes. Une crayĂšre est Ă  l'ouest. Un terrier se trouve Ă  200 mĂštres Ă  l'est du village, prĂšs de la route n° 60. A 300 mĂštres au nord il existe un banc de terre propre Ă  la fabrication de la brique, d'une trĂšs-forte puissance. Une quantitĂ© considĂ©rable de dĂ©bris de tuiles et de briques annoncent que dans cette contrĂ©e il y avait autrefois une tuilerie. Sol vĂ©gĂ©tal mĂ©diocre gĂ©nĂ©ralement; sa nature varie suivant les caractĂšres et l'Ă©paisseur du dĂ©tritus appliquĂ© sur la craie. Le hameau de Courmononcle est placĂ© Ă  1 kilomĂštre de Saint-BenoĂźt, auquel il est rĂ©uni. Il est situĂ© Ă  la base d'une cĂŽte rapide et ravinĂ©e, sur la rive gauche de la Vannes. Sol de craie, rarement Ă  nu. Sur le flanc du coteau, il est recouvert par une plaque de dĂ©tritus composĂ© de terre jaune, de sable, de silex et d'un peu de minerai de fer. Dans les bois, sur le plateau, terrains tertiaires argilo-sableux. On trouve sur le territoire quelques blocs de grĂšs sauvage. Puits de 2 Ă  3 mĂštres dans le terrain d'alluvion, et atteiT. XXII. 88 412 ESSAI DE STATISTIQUE gnant jusqu'Ă  50 mĂštres dans la partie la plus Ă©levĂ©e du hameau. Terre jaunĂątre argile, sable et craie. Une fontaine et une source au milieu du hameau. D'autres sources assez considĂ©rables du cĂŽtĂ© de Paisy. Deux autres sources prĂšs d'ArmentiĂšres, la Bouillarde et la Fontaine-AlĂ©tin. Toutes ces veines aqueuses forment des ruisseaux qui vont alimenter la Vannes. Une petite crayĂšre au sud du village. Le fond de la vallĂ©e prĂ©sente un tuf ferrugineux avec dĂ©tritus tertiaires mĂȘlĂ©s de silex. Bonnes terres Ă  froment; prĂ©s mĂ©diocres. Sur les cĂŽtĂ©s, terre rougeĂ tre, quelquefois sablonneuse. Le bois croĂźt assez bien dans le terrain argilo-sableux qui couronne la colline. On trouve des scories ferrugineuses Ă©parses dans les champs et dans les bois qui couronnent la colline. Altitude de Saint-BenoĂźt, sol du chĂąteau, 117m. — de Courmononcle, prĂšs de la ferme, 115m. La commune de Saint-BenoĂźt se partage en huit parties Maisons. MĂ©nages. Individus. Saint-BenoĂźt ... . .79 114 406 Courmononcle .... 21 23 85 Le Grand-ArmentiĂšres. 1 1 7 Le Petit-ArmentiĂšres. 1 1 2 La ferme Fruitier... 1 1 2 La PlĂątriĂšre. ..... 1 1 6 Le Moulin 1 1 5 Le ChĂąteau ...... 1 1 5 Total 106 143 518 SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 413 On compte 124 hommes mariĂ©s; 133 garçons; 10 hommes veufs ; 119 femmes mariĂ©es; 115 filles; 17 femmes veuves. La population Ă©tait, en 1852, de 485 habitants. Il y a augmentation de 33 individus. On y compte 109 Ă©lecteurs. Courmononcle Ă©tait, autrefois une commune. Il est rĂ©uni Ă  Saint-BenoĂźt depuis le 14 juin 1854. La ferme Fruitier est l'ancienne ferme du chĂąteau de Courmononcle, devenue habitation particuliĂšre. Le Grand-ArmentiĂšres, situĂ© au sud-ouest et Ă  1 kilomĂštre de Saint-BenoĂźt, est une ferme dĂ©pendant autrefois de l'abbaye de Vauluisant. Le Grand-ArmentiĂšres est une propriĂ©tĂ© de M. de La porte de BĂ©rulles. Le Petit-ArmentiĂšres, appelĂ© aussi le Foulon, Ă  cause d'une usine de ce genre qui ne fonctionne plus depuis quelques annĂ©es, est Ă  200 mĂštres du GrandArmentiĂšres; c'est une ferme appartenant Ă  M. Bourjon ZĂ©phirin, de Villeneuve-l'ArchevĂȘque. Il appartenait aussi Ă  l'abbaye de Vauluisant. La PlĂątriĂšre est une habitation particuliĂšre Ă  l'est du village, sur la route impĂ©riale n° 60. Tout prĂšs de cette maison est une plĂątriĂšre. Le Moulin et le ChĂąteau sont contigus, et appartiennent Ă  la famille d'Ambly. Le village est bien situĂ©, sur la roule impĂ©riale n° 60, Ă  mi-pente d'un coteau adossĂ© au plateau de Planty. 414 ESSAI DE STATISTIQUE Les maisons sont construites en craie avec socles en silex, avec mortier de chaux et terre jaune d'alluvion, Les baies des portes et des fenĂȘtres, ainsi que les chaĂźnes, sont en briques ordinairement tirĂ©es du Jard. La couverture en tuile domine. Il y a une quinzaine d'annĂ©es Ă  peine, la communication entre Saint-Benoit et Courmononcle Ă©tait presque impossible, Ă  cause de la difficultĂ© du chemin; mais, par les soins Ă©clairĂ©s du maire actuel, on a Ă©tabli une chaussĂ©e qui rend aujourd'hui les relations trĂšs-faciles. Le hameau de Courmononcle est Ă©galement bĂąti sur le penchant d'une colline couronnĂ©e de bois Ă  son sommet. La seule rue qui le traverse est d'un accĂšs fort difficile. Il est question d'en ouvrir une seconde qui favorisera davantage les communications. Au milieu du hameau, prĂšs de l'Ă©glise, est une fontaine dĂ©diĂ©e Ă  saint Gengoul. Cette fontaine possĂšde sa lĂ©gende, et la tradition du pays ne manque pas d'en attribuer la crĂ©ation Ă  ce saint qui l'aurait fait sourdre tout exprĂšs pour convaincre sa femme de violation de la foi conjugale. La vie de saint Gengoul rapporte ce fait ; mais il se passe au pays mĂȘme du saint, en Bourgogne. Lors du passage des alliĂ©s, Courmononcle fut presqu'entiĂ©rement brĂ»lĂ© par l'imprudence d'un habitant du pays qui tira un coup de fusil sur une estafette russe. La route n° 60 traverse Saint-BenoĂźt de l'est Ă  l'ouest, et forme naturellement la principale rue. Deux autres rues descendent parallĂšlement du nord au midi, et viennent aboutir l'une au chĂąteau, l'autre an moulin, par la chaussĂ©e de Courmononcle. Ces SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 415 deux rues sont traversĂ©es, Ă  leur sommet, par l'ancienne voie romaine de Troyes Ă  Sens. Dans le tableau de recensement de la population, cette rue porte le nom de rue Romaine. Le chĂąteau est situĂ© au milieu de la vallĂ©e, prĂšs de la Vannes. Il Ă©tait autrefois entourĂ© de bois jusque prĂšs de la route. BrĂ»lĂ© pendant les guerres de la Ligue, il fut rĂ©parĂ© au commencement du dix-septiĂšme siĂšcle. Il n'Ă©tait restĂ© que le portail et le colombier. Le portail, couronnĂ© d'un campanile carrĂ©, est flanquĂ© de tourelles ornĂ©es de clochetons qui dĂ©noncent le quinziĂšme siĂšcle. Un pont de pierre remplace le pont-levis dont on voit encore les traces. Le chĂąteau, entourĂ© de doubles canaux Ă  eau courante, se compose d'un corps-de-logis et de deux pavillons. Entre le canal intĂ©rieur et le canal extĂ©rieur est le potager, au nord. La façade principale regarde le midi. Cette habitation appartient Ă  la famille Peschardd'Ambly, hĂ©ritiers, par les femmes, des comtes de Vienne, seigneurs de Saint-BenoĂźt. Je parlerai de cette famille un peu plus loin. Les actes de l'Ă©tat civil de Saint-BenoĂźt datent de 1743. Ceux de Courmononcle, de 1771. On compte Naissances. Mariages. DĂ©cĂšs. De 4792 Ă  1803. . . 125 30 102 De 1803 Ă  1813. . . 82 24 105 De 1813 Ă  1823. . . 106 41 98 De 1823 Ă  1833. . . 107 20 69 De 1833 Ă  1843. . . 94 35 49 De 1843 Ă  1853. . . 100 49 91 416 ESSAI DE STATISTIQUE L'Ă©glise, dĂ©diĂ©e Ă  saint BenoĂźt, tomba de vĂ©tustĂ© vers la fin du dix-septiĂšme siĂšcle, et fut rebĂątie au commencement du dix-huitiĂšme; mais elle le fut si mal qu'on fut obligĂ© de reconstruire la nef et le clocher en 1728, Cette Ă©glise, de mĂ©diocre grandeur, est assez bien percĂ©e. Le choeur est voĂ»tĂ© en bois ; il n'y a point de transsept. On y voit quelques tableaux, entre autres, une copie du martyre de saint Laurent, par Lesueur. Cet Ă©difice est placĂ© tout en haut du village, prĂšs de la voie Romaine. Le presytĂšre est contigu Ă  l'Ă©glise, et appartient Ă  la commune, qui en a fait l'acquisition il y a une quinzaine d'annĂ©es. Courmononcle possĂšde aussi une Ă©glise qui n'est plus maintenant qu'une chapelle. Elle Ă©tait plus vaste autrefois. Elle possĂšde une cloche qui date de 1562. Le parrain fut Nanceau, seigneur de Courmononcle; la marraine, Marguerite Des Essarts. La population agricole de Saint-BenoĂźt s'Ă©lĂšve Ă  180 individus; la bonneterie en occupe 60 environ. Il y a 38 mĂ©tiers Ă  bas. On compte 84 chevaux, 13 Ăąnes, 4 mulets, 270 vaches, 19 chĂšvres, 24 porcs, 1,900 moutons. La superficie totale du territoire est de 1,667 hectares 93 ares. Le revenu cadastral, de . . . . 14,544 fr. 58 c. Contribution fonciĂšre. . . 4,580f80c Personnelle et mobiliĂšre . 875 52 Portes et fenĂȘtres. . ... 371 42 Patentes . . 338 39 Total. . . . . 6,166f 13c SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 417 La commune possĂšde 139 hectares 16 ares 19 centiares de bois qu'on sert en affouages aux habitants de Saint-BenoĂźt seulement. Ces bois sont une libĂ©ralitĂ© des seigneurs de Villemaur. On loue la chasse et la pĂȘche. Ces deux produits peuvent s'Ă©lever Ă  300 francs. On a Ă©galement tirĂ© parti d'un certain nombre d'hectares de pĂątures, en les louant aux habitants, qui y ont Ă©tabli des jardins maraĂźchers d'un bon rapport. Par suite de l'augmentation de la population, le Conseil municipal, aux prochaines Ă©lections, sera composĂ© de douze membres au lieu de dix, y compris le maire et l'adjoint. Il y a un instituteur communal logĂ© par la commune, et un prĂȘtre qui dessert alternativement Paisy et Courmononcle. On a Ă©tabli, il y a peu d'annĂ©es, un lavoir prĂšs du moulin. Cet Ă©tablissement est ouvert gratuitement aux habitants du pays et Ă  ceux des pays voisins, notamment aux gens de Planty. Liste chronologique des Maires de Courmononcle. Boitel François, assermentĂ©, membre du Conseil gĂ©nĂ©ral de la commune jusqu'au 4 fructidor an II. PrĂ©vost Edme, jusqu'au 5 brumaire an IV. Lambert Pierre-Augustin, jusqu'au 15 pluviĂŽse an VI Gatellier Nicolas, jusqu'au 4 prairial an vu. Butteau François, jusqu'au 27 pluviĂŽse an VIII. PrĂ©vost Edme reprend jusqu'au 11 fĂ©vrier 1813, 418 ESSAI DE STATISTIQUE PrĂ©vost Louis-Huberf, jusqu'au 7 juin 1816. Vincent Petit-Charles, jusqu'au 1er janvier 1823. PrĂ©vost Louis-Hubert reprend jusqu'au 24 mars 1826; Chossemier Pierre, jusqu'au 2 dĂ©cembre 1848. PrĂ©vost Edme, jusqu'au 1er janvier 1852. PrĂ©vost HonorĂ©, maire Ă  l'Ă©poque de lĂ  rĂ©union, 14 juin 1854. Maires de Saint-BenoĂźt-sur-Vannes. Marnot François, membre du Conseil gĂ©nĂ©ral de la commune jusqu'au 8 ventĂŽse an VI. Dauphin Savinien, jusqu'au 7 nivĂŽse an vu. Arson Nicolas, jusqu'au 22 thermidor an VIII. Simonnet Charles, jusqu'au 20 mars 1806. Dauphin Savinien, jusqu'au 24 janvier 1808. Simon, jusqu'au 20 mars 1813. Le baron Peschard d'Ambly Simon, dĂ©lĂ©guĂ© comme adjoint pour recevoir les actes de l'Ă©tat civil jusqu'au 1er mai 1833. Mornot François, jusqu'au 22 mars 1834. Siret, adjoint jusqu'au 12 fĂ©vrier 1835. Lorin Jean-Pierre, jusqu'au 12 septembre 1843. M. Peschard d'Ambly EugĂšne, maire actuel. PrĂ©cis historique. — Saint-BenoĂźt s'appelait anciennement Courmorin, de Curtis morini. En 1075, l'Ă©vĂȘque Hugues II donna ce village au monastĂšre de Saint-BenoĂźt-sur-Loire. Depuis ce temps, saint BenoĂźt devint le patron de la paroisse, et donna son nom au village. Il rĂ©sulte de cette donation que les Ă©vĂȘques de Troyes furent probablement les pre- SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 419 miers seigneurs de Saint-BenoĂźt, Ă  moins, toutefois, qu'ils ne l'aient tenu originairement de la libĂ©ralitĂ© des barons de Villemaur. Le plus ancien seigneur connu de Saint-BenoĂźt est Hugues de Montreuil, qui vivait au commencement du XIIIe siĂšcle. Dans le siĂšcle suivant, cette terre passa Ă  la maison d'AvelIy, depuis 1362 jusqu'Ă  1447. Jeanne d'Avelly fut mariĂ©e Ă  Louis de Guerry Des Essarts, seigneur de Lirey, dont elle eut Antoine et Louise. Celle-ci s'allia Ă  Jacques de Pied-de-Fer, seigneur de Saint-Mards, qui comparut Ă  l'arriĂšreban de 1545, pour le fief de sa femme Ă  Saint-BenoĂźt. De la maison d'Avelly, le fief de Saint-BenoĂźt passa par acquisition Ă  la famille de Vienne, illustre en Champagne. Un aveu de 1619 fait voir cette terre entre les mains de Joseph de Vienne, Ă©lu Ă  Troyes. Celui-ci rebĂątit le chĂąteau, Ă  l'exception du donjon et du colombier. Une tradition de famille rapporte que le comte de Vienne, zĂ©lĂ© partisan du roi de Navarre, soutenait chaudement le parti de ce prince contre les Troyens dĂ©terminĂ©s Ligueurs. Ceux-ci descendirent jusqu'Ă  Saint-BenoĂźt, et incendiĂšrent le chĂąteau, qui ne fut rebĂąti qu'assez longtemps aprĂšs. La famille de Vienne cessa un instant de possĂ©der Saint-BenoĂźt, qui passa par Ă©change Ă  Louise de Cormon, vers le milieu du XVIIe siĂšcle Cette dame Ă©pousa Pierre de Morin, chevalier, seigneur du Bocage, qui devint par lĂ  seigneur de Saint-BenoĂźt pour quelque temps. Il mourut avant elle, et, aprĂšs sa mort, elle traita de la terre avec Henri de Longueau, seigneur de Villuis, qui en rendit foi et hommage au chancelier SĂ©guier. 420 ESSAI DE STATISTIQUE Son fils Michel Ă©pousa, Ă  Sens, en 1676, Françoise Fauvelot, et rendit ses hommages en 1691. Il laissa trois filles; la plus jeune, Anne-Madeleine, dame de Saint-BenoĂźt, Ă©pousa François Pomponne de Vienne, qui rendit ses hommages en 1711. Ce dernier eut quatre enfants 1° Nicolas-François, qui hĂ©rita du chĂąteau et de ses dĂ©pendances ; 2° Charles-François ; 3° Pierre Henry; 4° Edme-François-Louis, seigneur de Villuis. C'est de l'aĂźnĂ© que descend la famille actuelle de Saint-BenoĂźt, par le mariage, en 1792, de messire RenĂ©-Nicolas Peschard d'Ambly, baron de Levoncourt et de la VallĂ©e, chevalier d'Ambly, capitaine au corps des grenadiers de France, ayant le brevet de major d'infanterie, fils de Me HonorĂ© Peschart, baron desdits lieux, et d'honorĂ©e dame Françoise de Bussy, de la paroisse de Bar-le-Duc, au diocĂšse de Toul, avec demoiselle Marie-Jeanne-Louise Pomponne de Vienne, fille de Me Nicolas-François Pomponne de Vienne, chevalier de l'ordre de SaintLouis, seigneur de Saint-BenoĂźt, Courmononcle et autres lieux, et d'HonorĂ©e dame madame MarieThĂ©rĂšse-Antoinette Loyson d'Alençon. De ce mariage naquit Alexandre-Nicolas Peschard d'Ambly, baron de Levoncourt, chevalier de Saint-Louis, mort en 1833, membre du Conseil d'arrondissement et maire de Saint-BenoĂźt-sur-Vannes. Il avait Ă©pousĂ© Mme Jeanne-EIĂ©onore de Parchappe, fille de RochJoseph-ElĂ©onor de Parchappe, Ă©cuyer, seigneur de Domprot, et de Jeanne JacobĂ© de FrĂ©mont. De ce mariage sont issus cinq fils et quatre filles 1° Alexandre Gustave, mort en 1857, chevalier de la LĂ©gion-d'Honneur, et maire de Philippeville, en AlgĂ©rie; SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 421 2° Louis-Ernest, mort en 1839; 3° Rosalie-AnaĂŻs, mariĂ©e Ă  M. Louis VĂ©rollot; 4° EugĂšne-François, nĂ© en 1815, maire de SaintBenoĂźt ; 5° ClĂ©mence, dĂ©cĂ©dĂ©e en bas Ăąge ; 6° Hortense-ElĂ©onore, mariĂ©e Ă  M. EugĂšne Des Marets de PĂąlis, officier de la marine impĂ©riale ; 7° Marcel-LĂ©opold, ingĂ©nieur des mines ; 8° CĂ©line-AmĂ©lie, mariĂ©e Ă  M. Victor Gallice; 9° Charles-FrĂ©dĂ©ric, ingĂ©nieur de marine. Famille de Vienne. — La famille de Vienne Ă©tait une des plus illustres de Champagne ; l'histoire de cette province, notamment celle de Troyes, fait souvent mention des de Vienne. Elle occupa souvent les charges les plus importantes de la ville de Troyes; elle Ă©tait honorĂ©e de la faveur des rois, et ses alliances avec les CrĂ©qui, les Montmorency, les LĂ©vis, prouvent que les plus nobles familles ne craignaient pas dĂ©roger en se l'infĂ©odant. La terre de Vienne Ă©tait situĂ©e entre Varennes et Sainte-MĂ©nehould. On ne sait pas au juste Ă  quelle Ă©poque les de Vienne possĂ©dĂšrent des fiefs en Champagne. DĂ©jĂ , en 1194, on voit Guillaume de Vienne possĂ©der des terres dans le comtĂ© de Bar-sur-Seine, ainsi qu'il rĂ©sulte de lettres-patentes octroyant aux religieux de l'abbaye de Mores, prĂšs de Celles, affranchissement de tout pĂ©age par toutes ses terres. Le premier dont fasse mention Caumartin est Hugues de Vienne, seigneur dudit, de Saint-Thomas, de Brassy, qui Ă©pousa Marguerite de Plancy, dame dudit et de FouchĂšres, et dont il eut deux fils, Ber- 422 ESSAI DE STATISTIQUE trand et Jean Bertrand, fut aĂŻeul de Christine d'Aguerre, Ă©pouse de Antoine de CrĂ©quy, prince de Foix; et mĂšre de Charles de CrĂ©quy, prince de Foix, duc de LesdigniĂšres, marĂ©chal de France. Plusieurs de Vienne furent attachĂ©s aux ducs de Luxembourg, comtes de Saint-Phal. Henry de Vienne, gentilhomme de Jean de Luxembourg, comte de Marie, fut trouvĂ© mort auprĂšs de lui Ă  la bataille de Morat, en 1477, ainsi que son frĂšre Nicolas. Un Jean-Baptiste de Vienne, fils de Jean VI de Vienne, Ă©tait gouverneur des ville et chĂąteau de Ligny, pour le duc de Luxembourg. Un de ses frĂšres, Jean, Ă©tait protonotaire apostolique et prieur de Randonvilliers. A une certaine Ă©poque, les de Vienne se partagent en plusieurs branches. La branche des de Vienne de RhĂšges, celle des de Vienne de GĂ©vrolles, des de Vienne de Presles, des de Vienne de GĂ©rosdot, des de Vienne de Soligny-les Etangs. Toutes ces branches descendaient directement de Hugues, par ses fils Bertrand et Jean. Le premier seigneur de Soligny, est Bernard de Vienne, fils de François, deuxiĂšme fils de Jean de Vienne, seigneur de RhĂšges. Il Ă©tait lieutenant-gĂ©nĂ©ral d'artillerie, gouverneur de Bourg-en-Bresse, mort en 1634. Il laissa deux enfants Jean et AngĂ©lique. Jean Pomponne, comte de Vienne, Ă©pouse Françoise LebĂącle d'Argenteuil, fille de messire Louis LebĂącle, comte d'Epineuil, marquis d'Argenteuil, seigneur de Pouy. AngĂ©lique Ă©pouse Marie-François, baron de Monjouvant, en 1629, et en a deux filles Catherine et Jeanne. Cette derniĂšre Ă©pousa Roger SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE 423 de LĂ©vy en 1642, et eut de son mariage CharlesAntoine de LĂ©vy, comte de Charlus. Une soeur de Bernard rie Vienne, Elisabeth-AngĂ©lique, Ă©pouse François de Montmorency Bouteville, gouverneur de Senlis, et mort en 1627. De ce mariage, un fils, connu plus tard sous le nom de marĂ©chal de Montmorency, et deux filles, Marie-Louise, mariĂ©e Ă  Dominique d'Estampes, marquis de Valencay, et Elisabeth, mariĂ©e 1° Ă  Gaspard de Colligny, duc de ChĂątillon-sur-Loing, marquis d'Andelot ; 2° en fĂ©vrier 1664, Ă  Christian-Louis, duc de Mecklembourg Schwerin. François-Nicolas Pomponne, comte de Vienne, seigneur de Saint-Benoit-sur-Vannes et BlĂ©zy, chevalier de Saint-Louis et capitaine au rĂ©giment de Xaintonge, arriĂšre-petit-fils de Bernard, seigneur de Soligny, fils de François, seigneur de Pouy et d'Epineuil, et de Anne-Magdeleine de Longueau, Ă©pouse ThĂ©rĂšse Loyson d'Alençon. De ce mariage MarieJeanne-Louise Pomponne de Vienne, mariĂ©e, en 1772, Ă  Alexandre-RenĂ© Peschard d'Ambly, baron de la VallĂ©e et de Levoncourt; de ce mariage, Alexandre-Nicolas, mort en 1833, et pĂšre des Peschard d'Ambly actuels. Les armes des de Vienne Ă©taient de gueules Ă  l'aigle d'or. Famille d'Ambly. — Originaire du Maine, la famille Peschard, ou Peschart, jouissait depuis plusieurs siĂšcles de toutes les prĂ©rogatives attribuĂ©es Ă  la noblesse d'ancienne extraction, lorsqu'un de ses membres vint, vers l'an 1525, s'Ă©tablir par mariage en Lorraine. Sa postĂ©ritĂ©,divisĂ©e en plusieurs branches, tant dans cette province qu'en Champagne, 424 ESSAI DE STATISTIQUE s'est constamment distinguĂ©e par l'Ă©tendue de ses possessions, par l'illustration de ses alliances et par les hautes fonctions qu'elle a occupĂ©es tant dans l'armĂ©e que dans la magistrature. Outre le fief seigneurial d'Ambly, dont la branche principale porte le nom, cette famille a possĂ©dĂ© la baronie de Levoncourt et les terres de Vidampierre, Neuville-sur-Orne, Contrisson, Lymon-enBarrois, Longueville, la VallĂ©e, Vassincourt, etc. Les principales alliances sont avec les maisons de Thumerq, d'Audenet, de Salles, de Beurges, de Rouyn, de Gourdot, Nota de la Tour, Antoine de Bussy, de Maimbourg, Pomponne de Vienne alliances qui lui procurĂšrent des liens de parentĂ© avec les Montmorency, les Coligny, la famille souveraine de Mecklembourg Schwerin, de Parchappe, Des Marets de PĂąlis. Les armes des Peschart d'Ambly sont CoupĂ© d'argent et de sable, au lion de l'un Ă  l'autre. Cimier un lion naissant; supports, deux sauvages. Famille de Parchappe. — La famille de Parchappe est originaire de Champagne. Le premier connu est Jean, Ă©cuyer, seigneur d'Aulnay-aux-Planches et du Fresne, grenetier du grenier Ă  sel d'Epernay ; il Ă©pousa Olive de Champy. Il fut anobli par Henri IV, en 1590. Cette famille fit alliance avec les maisons de Mouchy de Faremond, de Matigny de Goncourt, de Caumont, de Flavigny. Vers le milieu du dix-septiĂšme siĂšcle, la famille de Parchappe devint propriĂ©taire du fief de Morambert. Vers la fin du mĂȘme siĂšcle, par alliance avec la SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 425 maison de Mertrus, les Parchappe devinrent seigneurs de Domprot. Jeanne-ElĂ©onore de Parchappe, douairiĂšre d'Ambly, est fille de Roch-ElĂ©onor de Parchappe, et de Jeanne-JacobĂ© de FrĂ©mont, fille de Louis, capitaine au rĂ©giment de Chaumont, seigneur de Couvrost. Outre le fief des comtes de Vienne, il y avait encore, Ă  Saint-BenoĂźt, un autre fief situĂ© au hameau de Joux Jugoe, qui n'existe plus que de nom et qui est incorporĂ© au territoire de Saint-BenoĂźt. Cette seigneurie appartenait au Chapitre de Troyes; la justice ressortissait au bailliage de Sens. Les bois communaux viennent de la libĂ©ralitĂ© des barons de Villemaur, sous la redevance d'une maille la maille Ă©tait la moitiĂ© du denier, le denier Ă©tait la douziĂšme partie du sou que chaque habitant Ă©tait tenu de porter en personne en leur recette au jour de Saint-Remi, Ă  peine de trois livres d'amende, et encore sous la rĂ©serve de la justice qui appartenait sur ces bois aux barons de Villemaur. Courmononcle, qui n'est sĂ©parĂ© de Saint-BenoĂźt que par la Vannes, Ă©tait, si l'on s'en rapporte aux anciennes prisĂ©es, bien plus important qu'il ne l'est aujourd'hui. A chaque fouille qu'on fait dans les champs, on trouve des fondations. Il y avait une halle, des places publiques. Un grand chemin le traversait allant de Coulours, oĂč il y avait une commanderie, Ă  Villemaur, par Courmononcle et Rigny. Trois hameaux en dĂ©pendaient ArmentiĂšres, qui ne se compose plus que de deux fermes; Bouley et Massicaut, dont les habitations ont disparu, et qui ne forment plus que des contrĂ©es dĂ©pendant du ter- 426 ESSAI DE STATISTIQUE ritoire de Rigny. ArmentiĂšres dĂ©pendait de l'abbaye de Vauluisant, et fut bĂąti ou restaurĂ© par les soins de l'abbĂ© Pierre, 33e abbĂ© de Vauluisant vers 1517, qui y construisit en outre un moulina blĂ© et un Ă  foulon, et y fit planter de la vigne. Ces deux usines n'existent plus. Parmi les anciens seigneurs de Courmononcle, on trouve une dame de Corferant, lige de Villemaur, pour ce qu'elle possĂ©dait Ă  Courmononcle. Guillaume et ManassĂšs, de Courmononcle, sont compris dans la prisĂ©e de 1328, parmi les feudataires de Villemaur. Dans le mĂȘme siĂšcle, et longtemps depuis, on trouve cette terre entre les mains de plusieurs seigneurs. Avant Guillaume et ManassĂšs, dont je viens de parler, on voit, en 1290, noble homme Geoffroy de Saint-Florentin, sire de Courmononcle, nommĂ© tiersexpert dans la vente que fit Gauthier de TraĂźnel, sire de Foissy, Ă  Gilles le Cornut, deuxiĂšme du nom, archevĂȘque de Sens, de ses terres, prĂ©s et maisons qu'il avait Ă  Villeneuve-l'ArchevĂȘque et autres lieux. Vers 1452, Guillaume de la Palu. Guy de Nanceau et Felizot, vers 1513. Charles de La Hui, et une demoiselle Des Essarts, sa femme, qui Ă©tait de la maison d'Avelly de SaintBenoĂźt. Les de Midy et les de Nanceau y subsistaient encore au commencement du XVIIe siĂšcle. On y a vu encore possĂ©der des portions les maisons de BĂ©rulles, de SoubmairĂ©ment et de Chaumont. En 1630, Edme Amaury de Chaumont se trouve seul seigneur de ce lieu par l'acquisition des autres portions. Cette terre passa plus tard Ă  la maison de La Grange de La Ville-DonnĂ©e, qui Ă  son tour la cĂ©da SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. .427 Ă  la maison de Vienne, dont les hĂ©ritiers la possĂ©dĂšrent jusqu'Ă  ce jour, sauf des dĂ©membrements nĂ©cessitĂ©s par des partages de famille. Il y avait encore sur le territoire de Courmononcle plusieurs fiefs appartenant aux comtes de Vienne c'Ă©tait les Grands et les Petits-ChevrĂȘts, qui relevaient de la baronie de Villemaur. Une partie de ces fiefs passa, on ne sait comment, Ă  la maison de La Rochefoucault, qui la possĂšde encore. Une autre portion Ă©tait devenue la propriĂ©tĂ© de M. Des Marets de PĂąlis, qui en rendit hommage en 1734, Ă  la comtesse de Blanzac. Les Petits-Chevrets appartiennent aujourd'hui Ă  Mme la baronne d'Ambly. Le chĂąteau de Courmononcle, qui en 1630 Ă©tait encore entourĂ© de fossĂ©s et de ponts-levis, a totalement disparu. Les travaux d'assĂšchement opĂ©rĂ©s par M. Fruitier ont effacĂ© toutes les traces de ces fossĂ©s. Il y a dans l'Ă©glise de Courmononcle des carreaux armoriĂ©s qui doivent provenir des dĂ©molitions du chĂąteau. Parmi les curĂ©s qui ont gouvernĂ© la paroisse de Saint-BenoĂźt, on remarque Charles de Titreville, qui devint curĂ© de Saint-Mards, comme nous l'avons vu, vers 1615 ; Nicolas Huez de Troyes, ex-jĂ©suite, connu par son goĂ»t pour les mĂ©caniques; il vivait vers 1689; Nicolas Camusal, aussi de Troyes, qui s'amusait Ă  rimer, surtout des Ă©pigrammes. Saint-BenoĂźt a vu naĂźtre l'Ă©vĂȘque de Troyes, HervĂ©e, qui vivait au commencement du treiziĂšme siĂšcle. T. XXII. 29 428 ESSAI DE STATISTIQUE § VIII. — Vulaines. Situation et sol, semblables Ă  ceux de Saint-BenoĂźt. Pas de blocs de grĂšs sauvage ; un peu de terrain tertiaire sur les points les plus Ă©levĂ©s au nord-ouest. Puits de 2 mĂštres Ă  12 mĂštres. Ils pĂ©nĂštrent dans la craie aprĂšs avoir traversĂ© 3 mĂštres environ de terre jaune Ă  silex. Une crayĂšre au nord au-dessus de la route, Ă  1 kilomĂštre du village. Une sablonniĂšre prĂšs de la limite du finage de Bagneaux Yonne. VallĂ©e marĂ©cageuse Ă  cause des nombreux filets d'eau qui y sourdent, et du dĂ©faut d'encaissement de la riviĂšre qui coule ordinairement Ă  fleur du sol. On y rĂ©colte de mauvais foin pour litiĂšre. Au nord-est, sol crayeux d'une qualitĂ© infĂ©rieure. Au nord-ouest, terre un peu rougeĂątre propre au froment; bois dans un sol crayeux. Altitude, 108 mĂštres. Population 73 maisons, 82 mĂ©nages, 291 habitants. 70 hommes mariĂ©s ; 74 garçons; 7 hommes veufs; 71 femmes mariĂ©es ; 51 filles; 18 femmes veuves. La population Ă©tait de 294 en 1852 ; Ă©lecteurs, 89. La route impĂ©riale n° 60 forme la rue principale de Vulaines. Un peu au-dessous, une rue parallĂšle Ă  la route conduit au chemin de grande communica- SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 429 tion n° 4, qui se dirige vers Rigny. Une autre rue, la plus ancienne sans doute, est appelĂ©e rue du Moutier. Elle conduit Ă  l'Ă©glise, situĂ©e au haut du village, comme Ă  Saint-BenoĂźt, Ă  proximitĂ© du chemin des Romains. Les constructions sont les mĂȘmes qu'Ă  SaintBenoĂźt; les toitures en tuiles dominent. Vulaines est Ă  40 kilomĂštres de Troyes, 12 kilomĂštres d'Aix-en-Othe, 3 kilomĂštres de Rigny-leFerron, 4 kilomĂštres 5 mĂštres de Villeneuve-l'ArchevĂȘque Yonne. On compte, Ă  Vulaines, 16 laboureurs possĂ©dant 48 chevaux, 4 Ăąnes, mulet, 130 vaches, 1200 moutons. La superficie totale du territoire est de 871 hectares, avec un revenu cadastral de 5607 fr. 87. On compte 621 hectares de terres labourables. 77 hectares de bois, dont 47 hectares Ă  la commune. Le reste des bois appartient Ă  M. Bazin, de Bercenay-le-Hayer, et est contigu aux bois communaux. Vulaines paie FonciĂšre 2,834f 05c Personnelle et mobiliĂšre 574 27 Portes et fenĂȘtres. .... 233 62 PatentĂ©s 201 34 Total 3,843f 28c Il n'y a Ă  Vulaines que 4 mĂ©tiers Ă  bas. Les autres habitants sont laboureurs ou manouvriers, sauf quelques professions nĂ©cessaires Ă  la campagne, comme charrons, charpentiers, maçons, etc. On y 430 ESSAI DE STATISTIQUE compte aussi un marchand de chevaux et un marchand de bois. Il y a un moulin sur la Vannes. On loue la pĂȘche 150 francs en moyenne; la chasse des bois, 50 francs ; la chasse dans les pĂątures, 27 francs. Le maire a tirĂ© partie des pĂątures en en louant la portion la moins mauvaise; cette location a produit, en 1856, 400 francs. L'administration municipale se compose de dix conseillers municipaux, y compris le maire et l'adjoint. Il y a un instituteur communal logĂ© aux frais de la commune. La classe, sĂ©parĂ©e du logement de l'instituteur, est construite dans d'assez bonnes conditions. Seulement, il manque un cabinet des archives; c'est un grenier qui en tient lieu. Les actes de l'Ă©tat civil datent de 1627. Il y a une subdivision de sapeurs-pompiers trĂšsbien organisĂ©e. Il n'y a point de presbytĂšre. C'est le curĂ© de Rigny qui vient desservir la paroisse. L'Ă©glise de Vulaines est d'un seul jet, sans transsept, bĂątie en grĂšs et en craie avec contreforts. Elle est Ă©clairĂ©e par neuf fenĂȘtres du style ogival, sans meneaux. Elle est aux trois quarts voĂ»tĂ©e. La partie du choeur et l'abside doivent ĂȘtre du seiziĂšme siĂšcle. Huit poteaux en bois, adossĂ©s Ă  la muraille, supportent la voĂ»te au-dessous du clocher. De chaque cĂŽtĂ© des parois intĂ©rieures de l'Ă©glise, sont peints des Ă©cussons qui s'alternent l'un reprĂ©sente l'aigle en champ de gueule, avec la croix de Malte en suspensoir, surmontĂ© d'une couronne de mar- SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 431 quis; l'autre porte deux lions lampassĂ©s au 1er et au 4e; des fleurs de lys aux 2e et 3e, avec une couronne de marquis pour cimier. Le clocher a Ă©tĂ© rĂ©parĂ© en 1846, et a reçu une cloche du poids de 422 kilogrammes, donnĂ©e par M. Boudin, maire, et plusieurs notables. Il y avait autrefois un chĂąteau dans la vallĂ©e prĂšs de la Vannes. Il fut dĂ©moli en 1806, et les matĂ©riaux vendus au sieur Lesourd, beau-pĂšre du maire actuel. Liste chronologique des Maires de Vulaines. 1793, 21 janvier. Manchin. An vu, 12 nivĂŽse. Burtel. An IX, 1er florĂ©al. Robinet Edme. An XI, 18 fructidor. Burtel, de nouveau. 1836, 1er janvier. Millard Hippolyte. 1837, 25 avril. Boudin Jean-Louis-ThĂ©odore. Jean-Louis-ThĂ©odore. 15 mars. Robinet Antoine-Alexis. 1852, 7 mars. Destrot Jean-Jules. 1855, mai. Boudin Jean-Louis-ThĂ©odore, Jean-Louis-ThĂ©odore, actuel. ParticularitĂ©s, PrĂ©cis historique. — Avant la RĂ©volution de 1789, l'Ă©glise de Vulaines possĂ©dait trois cloches qui avaient Ă©tĂ© bĂ©nites en 1739. Le parrain de la premiĂšre fut monseigneur Claude-ConstantEsprit-JuvĂ©nal de Harville des Ursins, chevalier, marquis de TraĂźnel, seigneur de DoĂ© et autres lieux, et la marraine trĂšs-haute et trĂšs-puissante dame madame Louise-Madeleine Leblanc, marquise de TraĂźnel, dame de Vulaines. La seconde avait pour 432 ESSAI DE STATISTIQUE parrain monseigneur CĂ©sar Leblanc, Ă©vĂȘque d'Avranches, conseiller du roi en tous ses conseils, et pour marraine Claude-Constance-Ésprit JuvĂ©nal de Harville des Ursins de TraĂźnel, fille de madame de ce lieu. La troisiĂšme eut pour parrain DĂ©nis Alexandre Leblanc, Ă©vĂȘque de Sarlat, conseiller du roi, et pour marraine mademoiselle Isabelle de Harville des Ursins de TraĂźnel, fille de madame de ce lieu. Deux de ces cloches furent descendues du clocher pendant la terreur,et cachĂ©es dans l'Ă©glise. Plus tard, elles furent envoyĂ©es Ă  Ervy. La troisiĂšme fut refondue Ă  Bagneaux, en 1811. On allait autrefois en grande dĂ©votion Ă  l'Ă©glise de Vulaines, Ă  cause de l'huile de saint Antoine, renfermĂ©e dans une lampe placĂ©e auprĂšs de la statue de ce saint. Cette huile avait, dit-on, le pouvoir de guĂ©rir du mal de saint Antoine et des ampoules. Cette coutume est tombĂ©e en dĂ©suĂ©tude! Vulaines, ou Vieux-Laines, Ă©tait du diocĂšse de Sens et de la chĂątellenie de Villemaur. En 1330, il est qualifiĂ© de ville. A cette date, on voit une demoiselle PĂ©ronelle, veuve de Giles de Saint-Oult, Ă©cuyer, dame de Vulaines en partie; En 1503, Jean le Tartrier, Ă©cuyer, seigneur d'ErrĂ©, prĂšs Messon, aussi seigneur de Vulaines en partie; Gratien de Ponville, qui comparaĂźt, en 1555, au procĂšs-verbal de la coutume de Sens, en qualitĂ© de seigneur de Vulaines ; Jules d'AbondĂ©, au commencement du dix-septiĂšme siĂšcle. Cette famille tint longtemps la terre de Vulaines. François d'AbondĂ©, fils de Jules, Ă©pousa Marie de SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 433 Catelan. Les Catelan Ă©taient seigneurs de Maulny, prĂšs de Villeneuve-PArchevĂȘque. En 1648, on voit Charles-Alexis d'AbondĂ©, colonel au rĂ©giment de Chartres. C'est lui qui fit bĂątir le chĂąteau. Il fut tuĂ© en Flandre en 1709. AprĂšs sa mort, Claude Le Blanc, ministre de la guerre, fit l'acquisition de cette terre par dĂ©cret, et en rendit les devoirs fĂ©odaux au duc de Coislin en 1721. Elle passa ensuite Ă  Louise Le Blanc, sa fille, Ă©pouse de Esprit JuvĂ©nal des Ursins, marquis de TraĂźnel. Ils ont laissĂ© cette terre Ă  leur fils aĂźnĂ© ClaudeConstant-Esprit JuvĂ©nal des Ursins, qui Ă©pousa Marie-Antoinette de Matignon, et qui rendit hommage au duc d'Estissac le 20 aoĂ»t 1751. A sa mort, ce seigneur fut trĂšs-vivement regrettĂ© des habitants de Vulaines, pour l'inĂ©puisable bontĂ© avec laquelle il les traitait. ElĂ©onore des Ursins, sa fille, fut mariĂ©e Ă  Donatien-Marie-Joseph-Vincent de Rochambeau, qui fut gĂ©nĂ©ral en chef de l'armĂ©e de SaintDomingue, et capitaine-gĂ©nĂ©ral de la colonie sous la RĂ©publique. Pendant que le gĂ©nĂ©ral de Rochambeau soutenait l'honneur du nom français dans l'AmĂ©rique, les habitants habitants Vulaines, perdant leur respect traditionnel pour leurs seigneurs, s'occupaient des moyens de lui ravir une partie de ses biens. Sur la fin de 1793, le moment Ă©tait favorable, et la commune de Vulaines, profitant de l'absence du gĂ©nĂ©ral, obtint, sans grands efforts, le 6 germinal an II, un jugement arbitral conforme Ă  ses dispositions. 434 ESSAI DE STATISTIQUE Ce jugement fut rĂ©voquĂ© par la cour de cassation au profit du gĂ©nĂ©ral Rochambeau. Les piĂšces de cette affaire sont aux archives de Vulaines. On y voit Ă©galement la copie d'une transaction entre les habitants et le seigneur de Vulaines, au sujet des bois, communaux, pĂȘcherie, riviĂšre » commune, prez, paturages, passĂ©e le mardy aprĂšs » les brandons, au mois de fĂ©vrier l'an mil trois » cent trente. » En voici quelques extraits Pardevant Jaque de la Gambe, prĂ©vĂŽt de Sens, » et Guillaume Le Pelletier, garde du scel en ladite » prĂ©vĂŽtĂ©, et Gillet, avangier de Saint-Florentin, » clerc jurĂ© de ladite prĂ©vĂŽtĂ©, sont comparus en » leurs propres personnes demoiselle Peronelle, » jadis femme de feu Gille de Saint-Oult, jadis Ă©cuyer, » et dame en partie de Vulaine, et comme elle dit » pour Pierre Damerson de la ChĂątellenie de Pro» vins, Ă©cuyer, et demoiselle Jeanne, sa femme, » pour eux. » D'autre part, Pierre, dit Legros, Pierre, dit » Parez, Laurent Proest, Fellissant Fellon, Collard, » dit PencomĂšre, Jacque Henry, Marguerite, jadis » femme de feu Simon le Large, Gille, dit BergiĂšre, » Jeanne Jobart, Guibert, dit Person, Felissant de » la RibodiĂšre, Pierre, dit Loyer, Jeanne, dit Mer» cier, GomĂšre Lesourd, Simon le FormĂšre, Joannas » de Saint-Oult, Denise de la MĂ©lanze, Joanne, dit la " BergiĂšre, Felissant du Chemin, Felissonne, dit la » PĂȘcheronne, Adeline, dit la Goneline, Michaut des » BrocĂ©, Jeanne, dit le Grefroy, Mammon, femme » de feu Aimez, Joanne des Flody, Benigne, dit » Villaine, Felissant Malierze, Jaque, dit le Villain, SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 435 » Jean, dit Ferrez, Jehan la BontĂ©, Pervers, dit » Mersan, Marie, femme de feu le Grand, Jaque " Collin, Maureau, Jubert Boiteux, Felix de la Jo" lante, Jayant le Couturier, Berthier le PĂȘcheron, » PĂ©rinĂ©e le Tixerant, Joanne le HainĂšre, Joanne, » dit le Sotinat, Jaque l'AssistĂ©, Collard, dit Sebas» tinet, PĂ©rinĂ©e, dit Mahus, et Joanne, dit Richard, » tous demeurant et habitants en la ville et paroisse » de Vulaines-sur-Vannes, lesquels Ă©taient la plus » grande, la plus forte et la plus saine partie de tous » les habitants de ladite ville de Vulaines, etc. a Il rĂ©sulte de l'ensemble de cette piĂšce que les habitants de Vulaines prĂ©tendaient jouir des bois, pĂȘcherie, etc., sans redevance aucune envers les seigneurs. La sentence rendue par le prĂ©vĂŽt confirme leshabitants dans la jouissance, usance, desdits bois, etc., Ă  la condition qu'ils seront tenus, par chacun an, d'Ă©lire et Ă©tablir deux bĂ»cherons, pure personne et » bonne renommĂ©e esdits bois de Charmoy, qui se ront prĂ©sentĂ©s auxdits Peronelle et Mariez, ou Ă  » leurs hoirs, et jouiront pour le commun profit de » bien et loyement garder ledit bois, lesquels bû» cherons ensemble deux ou un tout seul, distri» bueront et dĂ©partiront Ă  bonne foy Ă  chacun des» dits habitants pour sa part et partie portionelment » autant Ă  l'un qu'Ă  l'autre. » Lesdits habitans et leurs hoirs auront chaquun » dĂ©jĂ  Ă  toujours leurs usages esdits prez et patures " Ă  paturer de toute maniĂšre de bĂȘte, et pourront » cueillir de l'herbe esdits prez, etc., pature Ă  la » faucille jusqu'Ă  la fĂȘte de la my-aoust passĂ©e fau» cher Ă  la faux sy il leur plait pour le convenoir 436 ESSAI DE STATISTIQUE » et nĂ©cessitĂ© de leurs bĂȘtes sans congĂ© desdits bû» cherons. Pareille autorisation pour pĂȘcher Ă  la » truble, au bon, au panier dessus rive et dans » l'eau, et la pescherie de pĂȘcher Ă  la main aux » Ă©crevisses tant seulement. Et pour toutes les au» tres choses et singuliĂšres des susdites, un chaquun » desdits habitants et leurs hoirs seront tenus et » tenneront pourra et pourronts, sera et seronts » tenus de payer chacun an et a tousjours aux sus» dits PĂ©ronelle et Mariez et Ă  leurs hoirs Ă  Vulaine » quatre deniers tournois les jour et fĂȘte de saint » Remy, au chef d'octobre. » Et s'il arrivait que quelqu'un des habitants se refusĂąt Ă  payer ou commĂźt volontairement quelque dĂ©lit, les bĂ»cherons-jurĂ©s, accompagnĂ©s du sergent, des seigneurs, et du messier de la ville et paroisse de Vulaines-sur-Vannes, courraient sus au mĂ©hu» sant ou malfaictenr, et l'ameneraient devant le » seigneur qui pourrait le condamner Ă  une amende » cinq sols tournois, etc., » Ă  la fin est Ă©crit... nous avons fait celer ces presentes du sel de la» ditte prĂ©votĂ©, qui furent faictes et donnĂ©es et re» çues au mouthier de Vulaine, l'an de grĂące mil » trois cent trente, le mardy aprĂšs les brandons. » Au mois de fevrier, presence de M. Jean, prĂȘtre » curĂ© de Vulaine; Pierre, dit l'Enfant,de Molinons; » Philippe de Noyen, Perronet Darmez, fils desdits » Mariez, ecuyer, et Jean, dit Goin, dit Sarrez, de la » Villeneuve-l'ArchevĂȘque. » Ainsi signĂ© au repli de la marge d'en bas Pharranger, ita est; suivent les signatures de Cossery et Chaperon, tabellions de la prĂ©vĂŽtĂ© de Sens. Plusieurs gĂ©ographes, entre autres Damville et SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 437 Pasumot, dĂ©signent Vulaines comme Ă©tant le Clanum des anciens. Ils placent Clanum Ă  douze lieues de Sens, prĂšs de Villeneuve-l'ArchevĂȘque. Ces gĂ©ographes veulent trouver de l'analogie entre Clanum et Vulaines, et ils remplacent le C de Clanum par un O, un V ou un B. Cette question est trop obscure pour qu'on y puisse voir clair ; je dirai seulement que rien jusqu'Ă  prĂ©sent n'a fait conjecturer que Vulaines fĂ»t bĂąti sur les ruines d'une ancienne ville romaine, et pour mon propre compte j'aurais mieux aimĂ© qu'on plaçùt Clanum entre Villeneuve et Villemaur. Nous aurions peut-ĂȘtre alors un nom Ă  donner aux richesses archĂ©ologiques de Paisy. § IX. — Rigny-Ie-Ferron. Rigny est situĂ© au fond du vallon qui descend de BĂ©rulles, en un point oĂč plusieurs autres vallons, notamment celui de Cerilly, viennent se rĂ©unir. Sol de craie presque partout recouvert d'un manteau, ordinairement Ă©pais, de terre jaune avec sable; silex trĂšs-abondant ; limonite gĂ©odique en fragments et plaques de grĂšs ferrugineux. Terrain tertiaire dans les bois et sur le plateau ; nombreux blocs de grĂšs sauvage sur les cĂŽtes. Les ravins montrent le terrain dĂ©tritique dont on vient de parler, et sur leur fond des blocs de grĂšs. Parmi les nombreux silex qu'on y trouve, on rencontre assez souvent des oursins Spatangus Coranguinum, Ananchytes, Galerites, et rarement des empreintes de Catillus. 458 ESSAI DE STATISTIQUE La profondeur des puits varie de 2 Ă  3, et jusqu'Ă  15 mĂštres 50, suivant les hauteurs; ils sont creusĂ©s, en gĂ©nĂ©ral, dans le terrain dĂ©tritique et la craie. Ceux des maisons les plus basses ne rencontrent sous le dĂ©tritus qu'un limon noirĂątre, fĂ©tide et donnant une eau de mauvaise qualitĂ©. Une fontaine, dite de Saint-Martin, touchant les maisons au sud-est, forme un ruisseau qui, aprĂšs avoir traversĂ© le bourg, oĂč il alimente un lavoir, va se jeter dans le Grand-FossĂ©. Rigny est encore longĂ© Ă  l'ouest par le ruisseau de CĂ©rilly, qui va se perdre dans la Vannes aprĂšs avoir arrosĂ© le fond du vallon. La position de ce bourg, au point oĂč plusieurs vallons viennent dĂ©verser leurs eaux dans les temps d'orage ou de fonte des neiges, l'expose Ă  d'assez frĂ©quenfes inondations. Le Grand-FossĂ© que je viens de citer est un canal creusĂ© dans le but de faciliter le dĂ©gorgement de ces eaux torrentielles et leur Ă©coulement dans la Vannes. Toutes ces prĂ©cautions n'empĂȘchent pas les eaux de couler quelquefois dans les rues; mais les maisons se trouvent au moins prĂ©servĂ©es. Il y a deux crayĂšres; l'une au nord, prĂšs du bois de la Brosse. C'est de cette carriĂšre que fut tirĂ©e, si l'on en croit la tradition, la craie qui servit Ă  la construction des Ă©glises de Rigny, de BĂ©rulles, de Planty et de quelques autres sans doute. L'autre au sud, au-dessus du moulin de Gerbeau. A cette crayĂšre est joint un four Ă  chaux depuis longtemps exploitĂ©. Les blocs de grĂšs sauvage qu'on rencontre frĂ©quemment sur le territoire de Rigny sont exploitĂ©s SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 439 pour faire des pavĂ©s, des coins, des bornes d'hĂ©ritages et des pierres de construction. Dans les parties basses, bon sol Ă  froment ; sur les coteaux, terre Ă  seigle sur le dĂ©tritus ou la craie. Les hauteurs au sud-ouest offrent des terres rouges. Bois et vergers Ă  cidre sur le plateau, en partie dans le terrain rouge Ă  silex, et en partie dans les argiles et sables tertiaires argile plastique. Le nom de Rigny-le-Ferron semble indiquer qu'autrefois on a pu y exploiter et y traiter des minerais ferrugineux. On trouve, en effet, dans les bois qui en dĂ©pendent, des scories ferrugineuses en grande quantitĂ©. On prĂ©tend mĂȘme que les Romains y avaient des forges portatives. D'un autre cĂŽtĂ©, le sol de la contrĂ©e prĂ©sente, au milieu du terrain dĂ©tritique, de nombreux fragments de limonite gĂ©odique. Altitude, 145 mĂštres, sol de l'Ă©glise. On compte Ă  Rigny-le-Ferron, y compris le hameau du Bois-de-Rigny, qui a 38 maisons, 46 mĂ©nages et 148 individus 302 maisons, 378 mĂ©nages, 1255 individus. 306 hommes mariĂ©s ; 37 hommes veufs ; 306 garçons ; 295 femmes mariĂ©es ; 57 femmes veuves ; 264 filles. La population Ă©tait de 1,244 en 1852; 355 Ă©lecteurs. Rigny est situĂ© Ă  40 kilomĂštres de Troyes, 10 kilomĂštres d'Aix-en-Othe, 8 kilomĂštres de Villeneuvel'ArchevĂȘque. Rigny, proprement dit, est construit 440 ESSAI DE STATISTIQUE tout-Ă -fait Ă  la maniĂšre des villes. Toutes les maisons se touchent et forment plusieurs rues assez mal alignĂ©es. Elles sont en pierres de roche et beaucoup ont un Ă©tage au-dessus du rez-de-chaussĂ©e. Le chemin de grande communication n° 4, de Nogent-surSeine Ă  Saint-Florentin, traverse le bourg Ă  peu prĂšs dans son centre et forme la rue principale. Cette rue est, dans toute sa longueur, pavĂ©e en assez mauvais matĂ©riaux. 47 chemins, dont 5 vicinaux, sillonnent le territoire. Au milieu de la grande rue, Ă©tait la halle. C'Ă©tait un affreux bĂątiment construit tout en bois, et interceptant la circulation. L'administration municipale eut le bon esprit de la faire disparaĂźtre. Une autre halle, toute de pierres et de briques, fut Ă©levĂ©e sur l'emplacement de l'ancien cimetiĂšre. Ce bĂątiment, d'une construction Ă©lĂ©gante, ornĂ©e d'une horloge publique, renferme aussi les appartements municipaux. Le cimetiĂšre a Ă©tĂ© transfĂ©rĂ© hors du pays, au nord. Le marchĂ© se tient le mardi de chaque semaine ; il ne s'y vend que des denrĂ©es alimentaires ; point de grain. Il y a cinq foires les 16 fĂ©vrier, 19 mars, 1er juillet, 12 septembre et le 13 novembre. Ces foires sont assez importantes, surtout pour la vente des bestiaux. Il est fĂącheux qu'il n'y ait point de place publique assez vaste pour contenir sur un mĂȘme point tout le matĂ©riel de la foire. Le marchĂ© aux vaches se tient dans une rue; le marchĂ© aux chevaux, dans SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 441 une autre; les porcs et les moutons se vendent sur les promenades, dans les environs du cimetiĂšre. Ces foires et marchĂ©s ont Ă©tĂ© Ă©tablis par une ordonnance de Louis XII, datĂ©e de Blois, au mois d'aoĂ»t 1510. Il y a, Ă  Rigny, un maire, un adjoint et douze conseillers municipaux; Deux gardes-champĂȘtres, un garde-forestier; Un bureau de tabac ; Un bureau de distribution pour les lettres, d'un rapport annuel de 2,000 fr., qui dessert les communes de BĂ©rulles, de Rigny, de Vulaines, de SaintBenoit-sur-Vannes et de Paisy-Cosdon ; trois facteurs. Deux Ă©coles communales pour les enfants, l'une, dirigĂ©e par un instituteur laĂŻque, l'autre par les soeurs de la Providence. La date des registres remonte jusqu'Ă  1581. On compte Naissances. Mariages. DĂ©cĂšs. De 1813 Ă  1823. . . 359 88 304 De 1823 Ă  1833. . . 394 92 257 De 1833 Ă  1843. . . 369 107 257 De 1843 Ă  1853. . . 350 116 310 Rigny paie Foncier 7,191f 75c Personnelle et mobiliĂšre. 2,510 98 Portes et fenĂȘtres .... 1,728 07 Patentes 1,558 92 Total 12,989f 72c La superficie totale du territoire est de 1,094 hectares. Le revenu cadastral s'Ă©lĂšve Ă  21,204 fr. 11 c. 442 ESSAI DE STATISTIQUE On compte 1,383 hectares de terres labourables, 317 hectares de bois. la valeur des parts affouagĂšres est Ă©valuĂ©e 4,109 fr. 75 c. L'exploitation, des terres est confiĂ©e Ă  35 laboureurs ayant 345 chevaux, 30 Ăąnes, 600 vaches, 1,530 moutons. La location de la chasse produit 110 fr. La pĂȘche, 200 fr. Le commerce de Rigny se borne Ă  la vente des objets de consommation ordinaire. NĂ©anmoins, on y compte un marchand de blĂ© en gros, quatre marchands de bois, et un marchand de chevaux. Rigny possĂšde deux moulins Ă  blĂ© l'un, Ă  Gerbeau, sur le ruisseau de CĂ©rilly; il est Ă  quatre tournants et fait le commerce de farines ; l'autre appelĂ©, Moulin de la Cour, au centre de Rigny mĂȘme, prĂšs de l'emplacement de l'ancien chĂąteau. Il moud spĂ©cialement le grain de mĂ©nage. La bonneterie commence Ă  prendre de l'extension Ă  Rigny. On compte dĂ©jĂ  54 mĂ©tiers Ă  bas, dont trois français seulement. Liste chronologique des Maires. 1792, 1er novembre. Bouillat Nicolas-Alexis. An VIII, 29 fructidor. VĂ©rollot Alexis. 1817, 15 janvier. Lorne 1820, 26 mars. Bouillat Firmin. 1826, 13 fĂ©vrier, Forgeot. 1831, 19 mars. Bouillat Charles-Louis - Adalbert. 1833, 20 juillet. Desguets. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 443 1835, 17 janvier. Forgeot, pour la 2e fois. 1838, 1er janvier. VĂ©rollot Alexis. 1846, 10 juin. Bouillat Armand, maire actuel. Rigny possĂšde actuellement trois mĂ©decins. De 1769 Ă  1773, la commune de Rigny-le-Ferron fut en procĂšs avec un sieur Morin, entrepreneur Ă  Nogent-sur-Seine. Ce Morin devait, suivant le devis, paver les rues de Rigny, faire un fossĂ© pour l'Ă©coulement des eaux torrentielles, et construire les ponts dudit fossĂ©. Ces travaux n'ayant pas Ă©tĂ© exĂ©cutĂ©s conformĂ©ment aux conventions, les syndic, habitants et communautĂ© dĂ©clarĂšrent au sieur Urbain Chaillou, architecte Ă  Paris, avec sommation de l'insĂ©rer dans son procĂšs-verbal, qu'il Ă©tait impossible de recevoir les travaux, car, dit la requĂȘte au roi, de 1773, les» dits pavĂ©s Ă©tant prĂ©sentement gelĂ©s et couverts de » boue. Mais ce qui constate l'invaliditĂ© dudit pavĂ©, » c'est qu'il est enfoncĂ© en plusieurs endroits; qu'il » en est de mĂȘme des fossĂ©s; qu'Ă  l'Ă©gard du Grand» FossĂ©, qui est le plus intĂ©ressant pour la commu» nautĂ©, les levĂ©es sont artificielles et ne peuvent » subsister, et que la profondeur du fossĂ© n'est pas » dans toutes les parties conforme au devis. » Que, suivant le devis, le sieur Morin devait faire poser Ă  chacun des ponts huit grandes bornes » de grĂšs piquĂ©, et qu'il n'y en a que six; que les » bahuts en pierre qui recouvrent les parapets doi» vent ĂȘtre attachĂ©s avec de bons crampons en fer » et scellĂ©s en plomb, et qu'ils ne sont ni attachĂ©s » ni scellĂ©s, etc. » Nous ignorons si cette requĂȘte au roi donna gain de cause aux habitants, mais nous voyons encore auT. auT. 30 444 ESSAI DE STATISTIQUE jourd'hui les parapets sans crampons et les ponts avec six bornes seulement. Eglise. - L'Ă©glise de Rigny appartient Ă  plusieurs Ă©poques. La partie la plus ancienne doit ĂȘtre de la fin du quinziĂšme siĂšcle. La nef, de construction rĂ©cente, a quatre travĂ©es et est voĂ»tĂ©e en lattis. Le choeur forme deux travĂ©es avec transsept. Le chevet est circulaire; la voussure du transsept et de l'abside est a lozanges et en moellons de craie. Les deux latĂ©raux sont moins Ă©levĂ©s que la nef. De chaque cĂŽtĂ© du choeur sont deux autels. Au-dessus de celui de droite est le Christ descendu de la croix, soutenu par sa mĂšre ; Ă  ses pieds est sainte Paule, qui donna son nom Ă  cette chapelle. L'autel de gauche est dĂ©diĂ© Ă  la Vierge, refuge des pĂ©cheurs. Au-dessus est un tableau reprĂ©sentant, je crois, le fondateur des JĂ©suites. Cinq fenĂȘtres Ă©clairent l'abside; elles sont du style flamboyant, Ă  doubles meneaux et Ă  vitraux coloriĂ©s qu'on attribue Ă  Jean Cousin. Il est fĂącheux que ces vitraux soient mutilĂ©s. Les parties qui subsistent sont d'une fraĂźcheur de coloris qui fait regretter ce qui manque. Le premier, Ă  droite, reprĂ©sente la lĂ©gende de saint Martin, patron de la paroisse; il est presque entiĂšrement conservĂ©. Le deuxiĂšme reprĂ©sente l'Assomption de la Vierge. Le troisiĂšme, au fond de l'abside, se compose d'une foule de lĂ©gendes qui n'ont aucun rapport entre elles ainsi, au bas du panneau infĂ©rieur, on voit saint Nicolas, puis saint Jacques, et un autre personnage dont il ne reste plus que le buste ; au-dessus, l'Annonciation de la Vierge; plus haut, JĂ©sus au jardin des Olives, etc. le tout tronquĂ© et mutilĂ©. Le SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 445 quatriĂšme reprĂ©sente la gĂ©nĂ©alogie de la Vierge. Les murs intĂ©rieurs de l'Ă©glise Ă©taient autrefois ornĂ©s de peintures Ă  fresque de la plus belle exĂ©cution. On en peut juger par la seule qui reste Ă  gauche, sur le pilier d'un des bas-cĂŽtĂ©s du choeur. Elle reprĂ©sente un personnage de grandeur naturelle portant entre ses bras des piĂšces de bois croisĂ©es. Cette peinture n'Ă©tait pas isolĂ©e. Le pinceau d'un barbouilleur aura passĂ© sur le reste. Certes, dit M. BourassĂ©, une des plus funestes » rĂ©parations qu'on ait fait subir aux Ă©glises du » moyen-Ăąge, c'est le badigeonnage, et surtout le » grattage, vraie lĂšpre qui s'attache aux murailles » du saint Ă©difice et qui en dĂ©truit la beautĂ©. » Sans respect pour les sculptures, lĂ©s peintures » les plus dĂ©licates, le badigeonnage promĂšne par» tout son hideux pinceau. Les lĂ©gĂšres dentelles en » pierre, les dessins gracieux, les dĂ©coupures trans» parentes, les ciselures fines, vĂ©ritable orfĂ©vrerie » en pierre, le moelleux du travail, tout disparaĂźt » sous une couche Ă©paisse de badigeon boueux. » Le badigeon n'est pas seulement un contre-sens, » c'est une profanation. » De chaque cĂŽtĂ© de la porte principale sont deux bĂ©nitiers en marbre blanc taillĂ©s en coquillage. Audessus est un jeu d'orgue montĂ© depuis quelques annĂ©es seulement. Le clocher, d'une forme Ă©lĂ©gante, est de grĂšs sauvage Ă  sa base. La partie supĂ©rieure est en craie taillĂ©e. Il tomba en 1725. Sur l'un des montants de l'horloge, on lit l'inscription suivante Mil V cent trente, par Denis Baubourg de Troyes. 446 ESSAI DE STATISTIQUE Il existe trois cloches, une grosse et deux petites. Une quatriĂšme, d'assez forte dimension, a tĂ©tĂ© fondue pendant la RĂ©volution de 1792. Sur la grosse on lit, en caractĂšres gothiques Galaise suis certainement, car ainsi premier dit mon nom Galas de Chaumont, le puissant seigneur de Rigny-le-Ferron, mil Ve XXX. Sur l'une des petites, on lit en caractĂšres semblables Nomen virgineum dico Maria meum, mil Ve XXX. Sur l'autre, en caractĂšres romains Marie, fondue en 1839, par la commune de Rigny. Deux cloches avaient Ă©tĂ© fondues en 1764, et baptisĂ©es le 2 juillet. La moyenne avait nom Amable Catherine ; la petite, AdĂ©laĂŻde-Catherine-Reine. Le parrain, Amable-Pierre-Thomas de BĂ©rulles; la marraine, Catherine-Marie Rolland, sa femme, et leurs enfants. Ces deux cloches n'existent plus. Il est probable que la moyenne est celle fondue pendant la RĂ©volution, et la petite, celle remplacĂ©e en 1839. La chapelle Sainte-Paule Ă©tait autrefois la chapelle seigneuriale. Elle fut fondĂ©e par Paule de Chaumont, femme d'Arthur d'Assigny, et fille de Galas de Chaumont. Dans cette chapelle est une tombe en pierre sur laquelle est placĂ©e l'inscription suivante en caractĂšres gothiques Cy gist Galas de Chaumont, escuier, en son vivant seigneur de Regny, de Coursant et de Sainct-Cire en ptie, lequel dĂ©cĂ©da le XXIIIIe jor de Juillet mil V° quarante-trois, aussi gist damoiselle Gauchere de Braillard, sa femme, laquelle dĂ©cĂ©da....... A chaque coin de la tombe est l'Ă©cusson des deux familles. Nous donnons ici le dessin exact de cette tombe dessinĂ©e par M. Delaune-Guyard, nĂ©gociant MĂ©m. de la de l'Aube, Tome XXII. 1858. Gaussen del. d'aprĂšs Ă  Troyes. PIERRE TUMULA1RE DE GALAS DE CHAUMONT, dans l'Eglise de Rigny-le-Ferron. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 447 Ă  Rigny-le-Ferron. Elle a 2 mĂštres 14 centimĂštres de longueur sur un mĂštre de largeur. Sur les vitraux de cette chapelle on voit, Ă  gauche, le seigneur de Rigny qui doit ĂȘtre Galas de Chaumont ou Arthur d'Assigny, couvert de son armure, agenouillĂ© sur un prie-Dieu. Sur ce prie-Dieu Ă©taient peintes les armes du seigneur ; malheureusement il a Ă©tĂ© brisĂ© et remplacĂ© par un verre blanc. A gauche est la chĂątelaine, Ă©galement agenouillĂ©e. Son Ă©cu est parfaitement conservĂ©, et tout-Ă -fait semblable Ă  ceux placĂ©s sur la tombe. Il est probable que les deux personnages sont Arthur d'Assigny et Paule de Chaumont, fondateurs de la chapelle. Au milieu du choeur est une tombe en marbre noir, sur laquelle on lit Soubs ce marbre repose Messire Hector de Sardents, vivant chevalier, seigneur de Courcemont, Gumery, et de Regny-le-Ferron pour moitiĂ©, chevalier de l'ordre de Notre-Dame-du-MontCarmel et de Saint-Lazare, premier chef d'escadre des armĂ©es navailes de France, dĂ©cĂ©dĂ© le 29 septembre 1675, aagĂ© de 47 ans. Cette tombe Ă©tait supportĂ©e par quatre lions et Ă©levĂ©e de deux pieds au-dessus du sol. Ces lions ont disparu. Il en reste encore un, je crois, dans un coin de l'Ă©glise. La chapelle du Rosaire renferme trois tombes; la premiĂšre porte cette inscription Ci gist maĂźtre Louis Bezançon, lieutenant de CĂ©ansen-Othe, Ă  Rigny-le-Ferron, PrĂ©vost, de Coulours et autres lieux, dĂ©cĂ©dĂ© l'onze avril 1714, et de son Ăąge la soixante et dix-septiĂšme annĂ©e. Priez Dieu pour le repos de son Ăąme. 448 ESSAI DE STATISTIQUE La deuxiĂšme Sous cette tombe reposent les corps de François Bezançon, Md de bois, dĂ©cĂ©dĂ© le,..., et de Barbe Cochois, sa femme, inhumĂ©e dans un sĂ©pulcre de pierre le vingtdeux novembre mil six cent quatre-vingt-quinze, qui ont fondĂ© une messe Ă  perpĂ©tuitĂ© le premier dimanche de chacun mois Ă  l'hostel du Rosaire de cette Ă©glise, par dĂ©votion qu'ils ont eue Ă  la sainte Vierge. Requiescant in pace. Les caractĂšres de la troisiĂšme tombe sont entiĂšrement effacĂ©s. Sur l'un des contreforts extĂ©rieurs de l'Ă©glise de Rigny, on voit un cartouche en pierre contenant une inscription en lettres gothiques, fort difficile Ă  dĂ©chiffrer. M. Delaune-Guyard a eu la bonne idĂ©e, d'aprĂšs les avis de M. Jules Ray, d'en envoyer une empreinte en plĂątre au MusĂ©e de Troyes. M. Finot, ancien chef d'institution Ă  Troyes, a pu lire ce qui suit Ipse Guielmus eram antiquo de sanguine Petrus, Cuius in hĂąc gelidĂą gleba quiescit humo. Ut sacra pro moestis libavi mystica functis. Sic nostro blandas nomine funde prĂšces. N. . violetĂą morte merentur M. . . . sacer ......... Obii ano Domini 1548. 5 mail mensis. En voici la traduction D'ancienne souche issu j'Ă©tais Guillaume Pierre, Je ne suis maintenant qu'une froide poussiĂšre. J'offris pour vos dĂ©funts mes priĂšres, mes voeux Amis, priez pour moi, moi qui priai pour eux ! DĂ©cĂ©dĂ© l'an du Seigneur 1549. 5 mai SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 449 Cette pierre est Ă©videmment une pierre tumulaireSeulement, est-elle Ă  sa place primitive ? C'est ce qu'il est impossible de dire au juste. L'Ă©glise de Rigny vient d'ĂȘtre ornĂ©e rĂ©cemment de deux tableaux donnĂ©s par M. Valton, propriĂ©taire Ă  Rigny. L'un reprĂ©sente la Vierge au raisin ; l'autre, sainte Catherine. Il existe chez M. Soyer, ancien notaire Ă  Rigny, un vespĂ©ral manuscrit, sorte d'Ordo Ă  l'usage des moines pour le jour de la PentecĂŽte. Ce petit livre, reste d'un plus grand, est ornĂ© de trois vignettes. La premiĂšre reprĂ©sente la sainte Vierge assise, en invocation; autour d'elle sont groupĂ©s douze personnages en habits de moines, agenouillĂ©s, la tĂȘte couronnĂ©e de l'aurĂ©ole cĂ©leste. Bien que la tĂȘte et le vĂȘtement annoncent des moines, il est Ă©vident que ce sont les douze apĂŽtres recevant les dons du SaintEsprit, reprĂ©sentĂ© par une colombe planant audessus. L'appartement oĂč ils sont renfermĂ©s forme un hĂ©micycle Ă©clairĂ© par deux fenĂȘtres Ă  vitrail l'ozangĂ©. Le cadre est formĂ© de petits carrĂ©s mi-partie or et azur, ornĂ© d'arabesques du plus bel effet. La seconde vignette reprĂ©sente un pontife coiffĂ© de la tiare ou triple couronne, bĂ©nissant une jeune femme agenouillĂ©e Ă  ses pieds, et sur la tĂȘte de laquelle un ange vient poser une couronne. Le fond est tout or. Enfin, la troisiĂšme reprĂ©sente Suzanne au bain; au-dessus d'elle, dans une galerie flanquĂ©e de tourelles, machicoulis et meurtriĂšres, apparaĂźt un vieillard Ă  l'oeil lubrique, au teint enflammĂ© et le chef ornĂ© d'une couronne de comte. 450 ESSAI DE STATISTIQUE M. Delaune-Guyard, dont le goĂ»t et l'intelligence sont remarquables, s'est empressĂ© de copier ce petit opuscule. Il a saisi avec bonheur les nuances d'or et d'azur qui ornent ce joli parchemin. Je recommande aux amateurs et le texte et la copie. Il possĂšde aussi un bas-relief en bois sculptĂ©, reprĂ©sentant l'Annonciation. Ce morceau est d'une trĂšs-belle exĂ©cution, et est l'ouvrage de Jacques MilIon, sculpteur, et de Jean Cousin, peintre, tous deux de Troyes. Il sort des greniers du chĂąteau de CĂ©rilly, ancienne propriĂ©tĂ© de la famille de BĂ©rulles. DĂ©tails historiques. — Le plus ancien seigneur connu de Rigny est Adam, fils de Jacques, vicomte de Joigny. L'an 1261, sur le tĂ©moignage des chevaliers Robert de Cucherel et Gile de Brion, gardes du comtĂ© de Champagne, il est dit qu'Adam, fils de feu Jacques, autrefois vicomte de Joigny, voulant rĂ©tablir la paix qu'avait troublĂ©e un instant un dĂ©bat entre lui et les lĂ©preux des Deux-Eaux, au sujet d'un muid de mouture qu'il rĂ©clamait sur leurs moulins de Bercon, renonce Ă  cette prĂ©tention ainsi qu'au droit de fief et de mouvance qu'il rĂ©clamait. Plus tard, la seigneurie de Rigny appartint Ă  la maison de Plancy, et de celle-ci passa Ă  celle de Chaumont par alliance. Le premier qui se trouve avoir portĂ© le nom de Chaumont est Eudes, qui vivait au commencement du dixiĂšme siĂšcle. Il fut le pĂšre de Rolande, femme de Herbert, seigneur de Serrenz-en-Vexin. Vers la fin du onziĂšme siĂšcle, un Chaumont Otmond Ă©pousa la fille de Nicolas, seigneur de Quitry. Cette famille Ă©tait une des plus grandes de France. L'an 1119, on voit Guillaume, troisiĂšme SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 451 seigneur de Chaumont, qualifiĂ© de gendre du roi, gĂȘner rĂ©gis. Dreux de Mello, seigneur de Vitry-le-CroisĂ©, mort au voyage de Hongrie, l'an 1396, Ă©pousa, le 11 octobre 1381, Jeanne de Plancy, fille de Jean de Plancy et de Jeanne de Sully. Jeanne de Mello, leur fille, dame de Rigny, Ă©pousa, le 16 juin 1408, Guillaume de Chaumont-en-Vexin, seigneur de Rigny par cette alliance, de Quitry, de Boissi-le-Bois, de Bois-Garnier, etc., conseiller et chambellan du roi Charles VI, qui le fit capitaine de cent hommes en 1413, et capitaine de Sens et d'Auxerre en 1417. Il s'Ă©tait depuis attachĂ© au parti du Dauphin, alors rĂ©gent du royaume. Ce prince le fit maĂźtre-enquĂȘteur et gĂ©nĂ©ral rĂ©formateur des eaux et forĂȘts de France, par lettres du 20 septembre 1418, et lui donna au mois de fĂ©vrier de la mĂȘme annĂ©e le comtĂ© de Chaumont, dont il lui accorda de nouvelles lettres le 3 juin 1624. Lorsque ce prince fut parvenu Ă  la couronne, il continua de le servir; il se trouva auprĂšs de lui en 1428 au siĂ©ge d'OrlĂ©ans, Ă  son sacre en 1629, et en plusieurs autres occasions jusqu'en 1439. Il mourut en 1445. Il eut pour enfants Charles, seigneur de Chaumont, mort au combat de Verneuil en 1423; Antoine, qui vint ensuite, et Jeanne de Chaumont, mariĂ©e Ă  Jean de Chandes, seigneur de Vaux. Antoine de Chaument, seigneur de Quitry, de Rigny-le-Ferron, de Chassenai, etc., vivait en 1476. Il Ă©pousa Jeanne Martel, dame de Bacqueville et de Bellestre, fille de Jean dit Bureau,- seigneur de Bacqueville, et de Jeanne de Joui. Il eut pour enfants Julien, Guillaume, qui fut seigneur de Rigny, et Catherine de Chaumont. 452 ESSAI DE STATISTIQUE Guillaume de Chaumont, seigneur de Quitry et de Rigny-le-Ferron, Ă©pousa Marguerite d'Anglure, dame de Conantes, fille de Guillaume d'Angleterre et de Jeanne de VergĂ©. Il eut pour enfants Galas, seigneur de Rigny ; Jacques qui a fait la branche d'Esguilly et de Saint-ChĂ©ron ; Jacquelines, mariĂ©e Ă  Jean de Balerne, seigneur de la Cueue en Brie ; Trislane, religieuse Ă  Provins, et Bernard de Chaumont, seigneur de Conantes. Galas de Chaumont, seigneur de Rigny-le-Ferron et de Coursan, Ă©pousa GauchĂšre de Bruillart, et eut pour enfants AymĂ©e, dame de Rigny-le-Ferron, mariĂ©e Ă  Louis du Roux, seigneur de Chigy ; Jeanne, mariĂ©e Ă  Claude de Ponville ; Paule, mariĂ©e Ă  Arthur d'Assigny, seigneur du Fort, et Antoinette,religieuse Ă  Provins. En 1559, la terre fut partagĂ©e en trois portions, en exĂ©cution d'une sentence du bailliage de Sens, du 24 mai 1550. On ne sait pas ce que devint le tiers dĂ©volu Ă  Jeanne, femme de Claude de Ponville. Le tiers de Paule de Chaumont, femme d'Arthur d'Assigny, vendu, en 1581, Ă  Claude de BĂ©rulles, revint Ă  JuvĂ©nal du Roux, fils d'AymĂ©e de Chaumont et de Louis du Roux, au moyen du retrait lignager qu'il exerce en 1583. Il possĂšde par la suite les deux tiers, et, par acte du 11 fĂ©vrier 1621, sa veuve, Françoise Levergeur, est indiquĂ©e comme dame pour la deuxiĂšme partie. En 1649, Amaubry de Chaumont, seigneur de Courmononcle, et y demeurant, l'un des hĂ©ritiers de JuvĂ©nal du Roux, cĂšde sa part dans la succession Ă  François de Courtois, dĂ©jĂ  seigneur de Rigny en partie, du chef de Françoise de Chambon sa femme, SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 453 petite-fille de JuvĂ©nal du Roux et de Françoise Levergeur. En 1667, Charles de Chambon, descendant encore de JuvĂ©nal du Roux, cĂšde sa part Ă  Hector De Sardents. A la mort de ce dernier, Alphonse De Sardents, son frĂšre, hĂ©rite pour un quart, le 16 novembre 1675. Alphonse De Sardents vend Ă  ses soeurs sa part dans la succession d'Hector De Sardents, leur frĂšre. Il est probable que le tiers qui appartenait dans l'origine Ă  Claude de Ponville Ă©tait passĂ© dans la famille de BĂ©rulles. Une partie de la seigneurie de Rigny passe ensuite Ă  François de Lorrain, seigneur d'Aubigny et de la BrochardiĂšre. Son fils, par acte du 5 mars 1707, vend Ă  Pierre de BĂ©rulles 200 arpents dans la Brosse, tenant Ă  M. de BĂ©rulles. Ce François de la BrochardiĂšre meurt le 14 aoĂ»t 1726, et est inhumĂ© dans la chapelle NotreDame de l'Ă©glise de Rigny. En 1753, on trouve encore un de Lorrain de la BrochardiĂšre d'Aubigny. Au moment de la RĂ©volution, les BĂ©rulles possĂ©daient toute la seigneurie de Rigny. Outre les seigneurs dont je viens de parler, on voit encore figurer Marie de Primri ; Miles de Rignyle-Ferron, auquel succĂšde Guillaume de Grancey, portĂ© en aveu au duc de Bourgogne. Les barons de Villemaur y possĂ©daient aussi un domaine de 10 arpents, dont partie Ă©tait renfermĂ©e dans l'enceinte du bourg, et qui forme aujourd'hui une rue appelĂ©e rue Haute. Notes diverses.— Mardi, avant Sainte-Anne 1315, 454 ESSAI DE STATISTIQUE transaction entre Jehan de Plancy, duc de Rignyle-Ferron, chevalier, Jouhanne de Saint-Varlsins, dame de Rigny, sa femme, du chef de cette derniĂšre, et religieuses personnes l'abbĂ© et le couvent de Valluysant de l'ordre de CĂźteaux, sur des droits de pĂąturage, passage dans les bois de Bocy et de Bouloy. Jehan de la Granche, clerc maĂźtre-jurĂ©. — Mercredi, avant la Saint-ClĂ©ment, 1315, autre transaction entre les mĂȘmes. — 1522, 26 novembre Gronvelle, Tabellion, jurĂ© en sa prĂ©vĂŽtĂ© de Rigny, Pierre Lehongre, licenciĂ© Ăšs-lois, Bailly de Rigny, vente par monseigneur Galas de Chaumont, Ă©cuyer, seigneur de Rigny et de Plancy en Brie, Ă  Antoine , musnier demeurant audit Rigny, d'une place oĂč il y a un saut Ă  eau pour faire et construire un moulin Ă  bled assis au finage dudit Rigny, lieu dit le Clos-Genestron, d'un long aux prez du seigneur, d'autre au chemin, tendant de Rigny Ă  Flacy, d'un bout aux hoirs Simon, d'autre Ă  Antoine Prieur. — 1529,31 mai. Arpentage entre Galas de Chaumont et Lucas Grepillard et Nicolas Jeannelon, procureurs des manants et habitants de Rigny, et avec eux Guillaume Batard de Chaumont, Ă©cuyer, Gabriel Salmon, syndic de Rigny et 156 autres habitants nommĂ©s, des Bois de Bouloy, de Chauffour et de Bossis. — 1537, 21 juin. Transaction entre le mĂȘme seigneur et les habitants, par laquelle les habitants cĂšdent au seigneur cent arpents de bois dans Bossis, et le seigneur, Ă  son tour, aux habitants, les piĂšces de bois appelĂ©es les usages de Chauffour et de Bouloy. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 455 — 1588, le mardi 13 dĂ©cembre. BaptĂȘme de demoiselle du Roux. — " MisĂšres du temps d'Huy » et grandes crues de riviĂšres de Marne et Seyne. » — 1581,vendredi, lendemain de Saint-Peregorin, les troupes d'un sieur Vaubergent, composĂ©es de Français lansquenets et Albanais, furent repoussĂ©es parles habitants de Rigny. A la dĂ©fense de l'escalade, Jean Breton fut blessĂ© d'un coup de pierre, Symphorien Pigeon d'un coup d'arquebuse, dont il mourut le lendemain. — 1588. Cet an furent occis maints reitres, les» quels Ă©taient venus avec grandes armĂ©es en » France pour aboulir la foi chrestienne et catho» lique, et furent dĂ©faits par monseigneur de *** et » ses soldats. » L'an auquel durant Dieu moissonna, c'est-à» dire que d'avant NoĂ«l il semblait au monde qu'on » mourait de faim Ă  Pasques suivantes ; mais le bon » Dieu y mit la main par sa grĂące laquelle il voulut » donner Ă  tous fidĂšles chrĂ©tiens. » — 1637, sĂ©jour Ă  Rigny d'une compagnie du marquis de Praslin. — MĂȘme annĂ©e, 14 aoĂ»t, vendredy, le cimetiĂšre est retouchĂ© par Joly, curĂ© de Rigny, BenoĂźt, curĂ© » de CĂ©ant-en-Othe, Pastoreau, curĂ© de CĂ©rilly, le» quel cimetiĂšre avait Ă©tĂ© polluĂ© par le corps d'un » soldat guelphe de la compagnie de M. de Praslin, » qu'on y avait inhumĂ© par force et par violence. » — 1653, 15 janvier. Tonnerre, grĂȘle, Ă©clair. — 1667, 17 avril, le feu prit Ă  la halle, dura » 5 jours, brĂ»la 80 maisons du faubourg Ă  la halle, et 456 ESSAI DE STATISTIQUE » fut enlevĂ© Ă  deux lieues. Ce dĂ©sastre avait rĂ©duit » les habitants incendiĂ©s Ă  l'impuissance de satisfaire » Ă  ses charges. Le roy les dĂ©chargea de la taillĂ© » qu'ils devaient pour l'annĂ©e et modĂ©ra pour 10 ans » la paroisse Ă  1,000 fr. chaque annĂ©e, durant les» quelles les habitants ne furent imposĂ©s qu'Ă  » 5 sols par cote pour raison des biens qu'ils possé» daient. » — 1686. Vente par la veuve Martin Aubert, demeurant Ă  Rigny-le-Ferron, et par Martin Aubert, potier d'Ă©tain Ă  Troyes, Ă  Messire Jacques de BĂ©rulles, chevalier, conseiller du roy en ses conseils, seigneur et vicomte de la terre et seigneurie de CĂ©ant-en-Othe, CĂ©rilly, Viel-Verger, Rigny-le-Ferron, en partie d'une maison sise en l'enclos dudit Rigny, sur la rue Neuve, appelĂ©e vulgairement la Maison des Grues, tenant d'un long Ă  la rue du Sacq, d'autre Ă  George Thierry, d'un bout Ă  la rue Neuve, d'autre aux Murailles et FossĂ©s dudit Rigny. Viot, notaire au bailliage, pairie et vicomtĂ© de CĂ©ant-en-Othe. Cette maison existe encore, et est remarquable par sa construction et les ornements qui dĂ©corent l'intĂ©rieur des appartements. — Milieu du dix-septiĂšme siĂšcle. Etat des revenus de la terre et seigneurie de Rigny en ce qui appartient Ă  Françoise de Chambon pour son tiers. Françoise de Chambon descendait de JuvĂ©nal du Roux, et avait Ă©pousĂ© François de Courtois. Le bichet de froment estimĂ©. . . 30 sols. — d'avoine 10 sols. Les chapons, la piĂšce. . . . . .16 sols. Les terres, 55 sols de loyer l'arpent. Le moulin, SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 457 non-compris le franc-moulu de la maison de ladite dame, les prez 36 et 40 livres l'arpent. Les droits de justice, dĂ©fauts, amendes et le mesurage, 124 livres; le four banal, 200 livres. Le droit de Saint-Remy, un bichet d'avoine et une poule par feu. Les lods et rentes, 100 livres. 40 arpents dans la Brosse ; pour chaque coupe de 4 arpents, 100 livres. Le droit de langue, 12 livres. La moitiĂ© du prĂ© Lamothe et la roise,20 livres 16 sols. Le foulon des Saules, affermĂ© 110 livres. La maison seigneuriale, jardins, clos, colombier, 130 livres. Le droit de chasse — 1702. Mort, Ă  Sens, de AngĂ©lique Liesse de Coursois, femme d'Aubigny, inhumĂ©e dans l'Ă©glise de Rigny. — 1720. Un abĂźme s'est fait par les grandes eaux sur le chemin d'Aix; Jean Pierret y est mort. — 1725. Le clocher de Rigny est tombĂ©. — 1733. SĂ©jour Ă  Rigny d'une compagnie de cavalerie au rĂ©giment de Gesvre. — 1749. Fief et seigneurie de la Mothe Ă  Rigny. — 1784. SĂ©jour Ă  Rigny d'une compagnie du PrĂ©vĂŽt gĂ©nĂ©ral des monnaies de France. — 1796, 17 septembre. Edme-Pierre Salmon est assassinĂ© d'un coup de fusil par Delcourt, garde, Ă  la pointe de l'Epinote. — 1737. Rigny fut environnĂ© de murailles et de fossĂ©s. Galas de Chaumont en obtint la permission 458 ESSAI DE STATISTIQUE du roi pour se dĂ©fendre contre les bandes qui ravageaient alors le royaume. L'ancien chĂąteau, Ă  en juger par les restes, devait ĂȘtre trĂšs-important. Le manoir, proprement dit, n'existe plus. Il ne reste plus que trois tourelles ; ces trois tours sont liĂ©es entre elles par des bĂątiments d'exploitation rurale. On voit encore parfaitement la trace des fossĂ©s. Dans l'une des tourelles, on voit la date de 1666. Une autre, suivant la tradition, devait servir de prison. Les murs ont au, moins 90 centimĂštres d'Ă©paisseur, et le verrou qui en ferme encore la porte est Ă©norme. , On voit quelques noms gravĂ©s sur la muraille, entre autres, VitrĂ©, dragon du roi, Bourguignon, La Force, etc. On pense que ces noms sont ceux de quelques prisonniers. Je dois tous les renseignements sur Rigny Ă  M. Delaune-Guyard, nĂ©gociant Ă  Rigny, dont le zĂšle a Ă©tĂ© infatigable, et Ă  M. Salmon, juge de paix Ă  Ervy, natif de Rigny, qui a bien voulu compulser les archives et me communiquer une foule de notes intĂ©ressantes. Je profite de cette occasion pour les remercier. § X. — BĂ©rulles. Le village est situĂ© dans un vallon qui va rejoindre la vallĂ©e prĂšs de Vulaines, aprĂšs avoir passĂ© par Rigny-le-Ferron, sur un sol de craie recouvert de dĂ©tritus. TrĂšs-peu de grĂšs sauvage. Sur le plateau, SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 459 terrain d'argile et de sables tertiaires bien caractĂ©risĂ©s. Ils se montrent immĂ©diatement Ă  la surface ou sous le dĂ©pĂŽt de terre rouge avec silex. Puits de 7 Ă  10 mĂštres dans les parties basses, et de 25 Ă  70 mĂštres dans les points les plus Ă©levĂ©s. Ceux-ci pĂ©nĂštrent presque de suite dans la craie ; les autres traversent, avant de la rencontrer, une couche assez Ă©paisse de terre jaune caillouteuse. Une source forme un ruisseau qui se perd aprĂšs un court trajet. Il n'y a que trois puits dans les hameaux un aux Chalois, un au Bois-le Roi, et un Ă  la Petite-JaronnĂ©e. Partout ailleurs on se sert de l'eau de citerne pour les besoins du mĂ©nage. Deux sablonniĂšres au sud-sud-ouest, l'une Ă  l'entrĂ©e du bois, l'autre dans le bois mĂȘme, au sommet occidental d'un triangle formĂ© par trois chemins. On y trouve un sable pur vivement colorĂ© en rouge dans sa partie supĂ©rieure, et blanc ou verdĂątre en dessous. On ne voit pas de silex dans cette partie du plateau. Bon sol autour du village. Les cĂŽtes prĂ©sentent un terrain maigre que l'on rend propre Ă  la culture du froment par le moyen des prairies artificielles. Peu de terres blanches. La terre du plateau est tantĂŽt rouge et ferrugineuse, et tantĂŽt sableuse ou argileuse. Souvent elle retient l'eau et devient ce qu'on appelle froide. Elle porte des bois mĂ©diocres et des vergers d'arbres Ă  cidre. Un monceau de scories noires et ferrugineuses existe entre BĂ©rulles et le hameau de Berluviers, et fait croire Ă  l'existence de forges dans les temps anciens. On en trouve Ă©galement dans les bois communaux. Altitude du sol, prĂšs de l'Ă©glise, 160 mĂštres audessus du niveau de la mer. T. XXII. 31 460 ESSAI DE STATISTIQUE La commune de BĂ©rulles se divise en 14 parties Maisons. MĂ©nages. Individus. BĂ©rulles... ..... 90 111 374 Le Fort-Jacquet .. . 21 23 84 Les Langots 8 9 29 Berluviers ...... 18 21 58 Quincarlets. ..... 10 13 47 LesChalois 13 13 40 Le Bois-le-Roi . . . 28 34 100 La Petite-JarronĂ©e . . 5 6 21 Les Dupins 7 8 24 Les Fermes 4 5 14 Le Champ-Marin. . . 4 4 15 Pierre-Frite 2 2 11 PrĂ©totin 1 2 10 Longue-Perte .... 1 1 4 212 252 831 La population Ă©tait, en 1852, de 896, diminution de 65. Les habitants attribuent cet abaissement de la population Ă  l'Ă©migration d'une douzaine de familles' depuis cinq ans. La commune de BĂ©rulles est la seule du canton qui possĂšde un enfant du mĂȘme Ăąge que le Prince ImpĂ©rial, et qui ait Ă©tĂ© baptisĂ© sous le patronage de Leurs MajestĂ©s. II s'appelle Victor-Cyprien Thierry. 192 hommes mariĂ©s ; 204 garçons ; 18 hommes veufs; 191 femmes mariĂ©es; 188 filles; 38 femmes veuves. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 46l Les actes de l'Ă©tat civil datent de 1700. Naissances. Mariages. DĂ©cĂšs. De 1813 Ă  1823. . . 242 53 255 De 1823 Ă  1833. . . 222 81 201 De 1833 Ă  1843. . . 236 89 176 De 1843 Ă  1853. . . 216 80 176 BĂ©rulles est Ă  40 kilomĂštres de Troyes, 10 kilomĂštres d'Aix, 4 kilomĂštres de Rigny-le-Ferron. Le chef-lieu est situĂ© au fond du vallon, entourĂ© de coteaux assez escarpĂ©s. II est bien construit et forme un parallĂ©logramme dans l'enceinte des anciens fossĂ©s. En dehors de ces fossĂ©s, le long du chemin de grande communication n° 4, s'allonge une partie du village dĂ©signĂ©e sous le nom de Faubourg-d'en-Bas. Ce chemin forme la rue principale. Les maisons y sont bĂąties en silex, craie et briques. La plus grande partie y est couverte en tuiles. Sur la place, prĂšs de l'Ă©glise, on voit quelques maisons de belle apparence. PrĂšs de la halle Ă©tait la maison de justice. Elle a disparu. On compte quatre chemins vicinaux seulement 1° des Bois-le-Roi Ă  Aix, 2° de BĂ©rulles au Fournaudin, 3° de BĂ©rulles Ă  Coulours, 4° de BĂ©rulles Ă  Saint-Mards. Il y a, en outre, des chemins particuliers conduisant des hameaux au chef-lieu. Tous ces chemins sont entretenus avec du silex, au moyen de prestations en nature. Tout prĂšs de l'Ă©glise est la halle reconstruite en 1844. Elle est en bois et couverte en tuiles. Autrefois, BĂ©rulles possĂ©dait un marchĂ© le lundi, et quatre foires la premiĂšre tombait le 20 janvier; la deuxiĂšme, le lundi-saint ; la troisiĂšme, le 27 juin; 462 ESSAI DE STATISTIQUE la quatriĂšme, le 19 octobre. Celles du lundi-saint et du 19 octobre seules subsistent. Elles sont, du reste, assez peu importantes. Celle du mois d'octobre, pourtant, a quelque renommĂ©e, surtout pour la vente du bĂ©tail blanc. Le marchĂ© n'existe plus. Le petit commerce est assez bien reprĂ©sentĂ©. Il y a un marchand d'Ă©picerie et de rouennerie dont le magasin peut rivaliser avec ceux de beaucoup de petites villes ; un boulanger, un boucher, un marchand de grain, un marchand de chevaux, un marchand de plĂątre. Trois tuileries deux prĂšs du hameau des Dupins, Ă  l'est; l'autre au Bois-le-Roi, au nord-est. Celle-ci prĂ©sente une argile sablonneuse, assez grossiĂšre, traversĂ©e par des masses et des veines d'une terre contenant du silex. II y avait aussi, il y a quelque temps, une fabrique de poterie grossiĂšre. On compte dix pressoirs pour le vin et le cidre. Le vin blanc de BĂ©rulles a de la rĂ©putation. La bonneterie compte une cinquantaine de mĂ©tiers. il y avait aussi deux moulins Ă  vent, l'un entre le Bois-le-Roy et les Dupins, l'autre au-dessus du Fort-Jacquet. Ils n'existent plus. La commune est desservie parles moulins de Saint-BenoĂźt-sur-Vannes, de Gerbeau et de Rigny-le-Ferron. La municipalitĂ© se compose de douze membres, y compris le maire et l'adjoint; la commune possĂšde deux pompes desservies par 36 pompiers. Il y a un garde-champĂȘtre et un garde-forestier. SUR LE CANTON DAIX-EN-OTHE. 463 Il y a deux Ă©coles laĂŻques l'une pour les garçons ; l'autre pour les filles, dirigĂ©e par une institutrice. L'instituteur est logĂ© aux frais de la commune, dans un bĂątiment appartenant autrefois Ă  M. de BĂ©rulles; l'institutrice est Ă  loyer. Le presbytĂšre, assez vaste, est prĂšs de l'Ă©glise. Le curĂ© dessert le Fournaudin Yonne. La superficie totale du territoire de BĂ©rulles est de 1,649 hectares. Le revenu cadastral s'Ă©lĂšve Ă  10,848 francs 66 c. On fait 1,109 hectares de terres labourables. On compte pour l'exploitation de ces terres 40 laboureurs, 100 chevaux, 200 vaches, 1,600 moutons et brebis partagĂ©s en 16 troupeaux. Le commune possĂšde 221 hectares de bois communaux. Un jugement arbitral, du 24 ventĂŽse an II, la mit en possession d'une partie de ces bois, qui avait Ă©tĂ© usurpĂ©e par les seigneurs. La coupe annuelle de ces bois est de 5 hectares. Chaque part affouagĂšre vaut Ă  peu prĂšs 20 francs. Contributions ImpĂŽt foncier 4,384'35° Personnelle et mobiliĂšre. 1,605 59 Portes et fenĂȘtres. .... 706 92 Patentes 642 38 Total. 7,339f24c Eglise. — L'Ă©glise de BĂ©rulles est classĂ©e parmi les monuments historiques du dĂ©partenent de l'Aube. C'est, en effet, un Ă©difice digne de l'attention des amateurs; le dĂ©veloppement du vaisseau, la lĂ©gĂšretĂ© des piliers, l'Ă©lĂ©gante courbure de la voĂ»le, la ri- 464 ESSAI DE STATISTIQUE chesse de coloris des vitraux, la taille hardie et Ă©lancĂ©e de la tour, tout enfin mĂ©rite d'ĂȘtre signalĂ©. Cinq fenĂȘtres du style flamboyant, avec meneaux en pierre, Ă©clairent, l'abside. Le premier vitrail Ă  gauche reprĂ©sente la naissance de la Vierge, il est composĂ© de six panneaux ; le 2e, les mystĂšres de l'Annonciation, six panneaux ; le 3e au fond de l'abside, les mystĂšres de la Passion, neuf panneaux et deux meneaux ; le 4e, la Descente de Croix, la RĂ©surrection et les diverses apparitions du Christ. La 5e fenĂȘtre est aux deux tiers rebouchĂ©e; la partie Ă©clairĂ©e ne conserve qu'un reste de vitrail mutilĂ©, La 2e fenĂȘtre du latĂ©ral Ă  droite reprĂ©sente la gĂ©nĂ©alogie de la Vierge. La partie supĂ©rieure de quelques-uns de ces vitraux reproduit l'Ă©cusson aux armes de la famille de BĂ©rulles, ce qui fait croire que les seigneurs de cette maison ont contribuĂ© en tout ou en partie Ă  l'Ă©rection de cette Ă©glise, et alors l'Ă©poque de sa fondation pourrait ĂȘtre fixĂ©e Ă  la moitiĂ© du seiziĂšme siĂšcle. La cuve baptismale en pierre de lĂ©zinne est assez remarquable elle est de forme hexagonale; sur chaque face on voit des figures en relief. La premiĂšre face reprĂ©sente le BaptĂȘme de JĂ©sus-Christ ; la deuxiĂšme, le massacre des Innocents; la troisiĂšme, le Saint-Esprit descendant sur les apĂŽtres ; la quatriĂšme, le baptĂȘme d'un nĂ©ophite; la cinquiĂšme, celte lĂ©gende Qui crediderit et baptisalus fuerit salvus eril McVL; la sixiĂšme, un ange soutenant une piscine, avec une inscription en lettres gothiques. On entre dans l'Ă©glise par un portail abritĂ© par un porche en bois. On y descend par quatre mar- SUR LE CANTON DAIX-EN-OTHE. 465 ches. La porte est Ă  deux ventaux sĂ©parĂ©s par une colonne de pierre de forme cylindrique surmontĂ©e d'une niche vide de sa statue. Au-dessus est un bandeau ornĂ© de figures et de fleurs en relief. Dans le plein-cintre sont deux chapeaux de cardinal. Du portail on descend dans l'Ă©glise par un perron de six marches assez dĂ©labrĂ©es. Le clocher a 57 mĂštres d'Ă©lĂ©vation. Il renferme quatre cloches, dont trois datent de 1545. Sur l'une d'elles on voit cette inscription Vox Domini vox mea cunclorum sil terror Demoniorum. Le patron de l'Ă©glise est Notre-Dame de septembre. Les jeunes gens cĂ©lĂšbrent la Saint-Eloi du 25 juin. Pourquoi cette dissidence avec tous les jeunes gens de la chrĂ©tientĂ© qui ont choisi pour patron saint Nicolas? On prĂ©tend qu'autrefois saint Eloi Ă©tait le seul saint dont on fit la fĂȘte. Lors de l'Ă©rection de l'Ă©glise, on dĂ©possĂ©da saint Eloi de son titre de patron pour le donner Ă  la Sain le-Vierge. La jeunesse d'alors, mĂ©contente de ce changement, et pensant que saint Eloi n'avait pas dĂ©mĂ©ritĂ©, jura de le conserver, ce qui fut fait, sans prĂ©judice toutefois des hommages dus Ă  la mĂšre du Sauveur. La fĂȘte du 25 juin est toujours dignement cĂ©lĂ©brĂ©e. IndĂ©pendamment de ces deux fĂȘtes, il en existe encore une plus cĂ©lĂšbre c'est la fĂȘte de Sainte-Reinedes-Bois, qui se fait le jour de la TrinitĂ©. A quinze cents mĂštres de BĂ©rulles, au milieu des bois communaux, sur la montagne, Ă  l'ouest, est une chapelle dĂ©diĂ©e Ă  sainte Reine d'AlizĂ©. C'est lĂ  que se rendaient des milliers de pĂ©lerins de tous Ăąges et de toutes conditions, de plusieurs lieues Ă  la ronde. On ne voulait pas mourir sans 466 ESSAI DE STATISTIQUE avoir fait, une fois dans sa vie, le pĂ©lerinage de sainte Reine. C'est qu'Ă  sainte Reine on croyait un grand crĂ©dit auprĂšs de Dieu. Les malades, les boiteux, les paralytiques s'y faisaient transporter en grande dĂ©votion. On buvait de l'eau de la fontaine, et on en emportait bien prĂ©cieusement chez soi, non sans avoir prĂ©alablement dĂ©posĂ© son humble offrande dans le tronc. Mais Ă  tous les voyageurs venus de loin, il fallait un abri quelconque, un lieu de repos ; les besoins de l'Ăąme satisfaits, il fallait un peu songer aux besoins du corps. Alors s'Ă©levaient comme par enchantement une quarantaine de tentes; les tables se couvraient de vivres, et puis, comme corollaire obligĂ© et permis, des danses, comme en faisaient nos bons aĂŻeux, s'improvisaient en plein soleil sous les yeux des grands parents, et au coucher du soleil, on rentrait chez soi le coeur gai et content, non sans emporter Ă  son chapeau ou Ă  son corset le bouquet de papier bĂ©ni, preuve matĂ©rielle et certaine du pĂ©lerinage Ă  Sainte-Reine. Cela se passait ainsi il y a quelque soixantaine d'annĂ©es. Il n'en est plus de mĂȘme, hĂ©las! aujourd'hui. On va bien encore Ă  Sainte-Reine, mais le nombre de pĂ©lerins est bien amoindri, la foi est bien moins vive, on n'arrive que bien tard dans l'aprĂšs-midi, pour s'en aller plus tard encore; on ne rapporte plus ou que trĂšs-peu de bouquets bĂ©nis ; on fait un repas fort cher dans deux ou trois guinguettes qui ont remplacĂ© les tentes hospitaliĂšres de nos aĂŻeux, et puis l'on s'en va prosaĂŻquement en disant triste fĂȘte, cette annĂ©e! sans songer que c'est nous-mĂȘmes qui gĂątons cette fĂȘte par le manque de foi et les idĂ©es profanes que nous y apportons ! Pour ces fĂȘtes, SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 467 toutes de coeur, nous sommes loin de nos pĂšres. Je n'ai pu recueillir de renseignements sur la fondation de celte chapelle. Il y a bien une lĂ©gende, mais une lĂ©gende n'est pas toujours de l'histoire. On dit qu'un seigneur de CĂ©ant-en-Othe, partant pour la croisade, aurait fait voeu, s'il revenait sain et sauf, de construire une chapelle Ă  sainte Reine d'AlizĂ©, pour laquelle il professait une dĂ©votion particuliĂšre. D'autres disent que c'est la femme du seigneur qui fit le voeu. Quoiqu'il en soit, la chapelle fut Ă©rigĂ©e, mais dans des proportions bien exiguĂ«s et bien mesquines, Ă  moins que la chapelle primitive n'ait disparu ruinĂ©e par le temps; ce qui est probable, car la construction actuelle paraĂźt appartenir au commencement du dix-huitiĂšme siĂšcle. Le campanile qui couronne cet Ă©difice possĂ©dait une cloche qui fut soustraite il y a quelques annĂ©es, sans qu'il ait Ă©tĂ© possible de retrouver la trace des auteurs du vol. DĂ©tails historiques. — La commune de BĂ©rulles portait autrefois le nom de CĂ©ant ou SĂ©ant-en-Othe. Elle quitta ce nom lorsqu'elle devint la propriĂ©tĂ© des seigneurs de BĂ©rulles, vers le milieu du seiziĂšme siĂšcle. NĂ©anmoins, le nom de SĂ©ant, par corruption Siant, ne put s'oublier entiĂšrement, puisqu'aujourd'hui mĂȘme on lui donne encore cette derniĂšre dĂ©nomination. Le plus ancien seigneur connu de SĂ©ant-en-Othe est Mainard, seigneur de Tury, qu'on voit, en 1153, donner Ă  l'abbaye de Dilo tous les alleux qu'il possĂšde sur le territoire de SĂ©ant, et ce, pour le repos » de l'Ăąme de son Ă©pouse. » En 1252, cette terre appartenait Ă  Jeanne de 468 ESSAI DE STATISTIQUE Brienne, mariĂ©e Ă  Mathieu, troisiĂšme du nom, sire de Montmorency. On lit dans l'Almanach historique de Sens, 1784 BĂ©rulles Ă©tait une petite ville composĂ©e de deux » paroisses BĂ©rulles et Boeurs, entourĂ©e de murs » et de fossĂ©s, flanquĂ©e de bastions et en Ă©tat de » soutenir un siĂšge. Elle fut prise d'assaut par les » calvinistes, comme on le voit dans un vieux ma» nuscrit qui a pour titre Histoire de Champagne ; » lesquels, aprĂšs l'avoir pillĂ©e et y avoir mis tout Ă  » contribution, se saisirent du procureur fiscal et » l'attachĂšrent Ă  un poteau au milieu de la place » publique, oĂč ils lui firent souffrir les plus horribles » tourments et le percĂšrent de leurs lances. Peu sa» tisfaits de cette cruelle opĂ©ration, ils le dĂ©liĂšrent » du poteau pour le conduire, tout couvert de son » sang et prĂȘt Ă  expirer, par les rues de la ville. Ils » le descendirent ensuite dans un puits, et enfin, pour » mettre le comble Ă  leur cruautĂ©, ils l'en retirĂšrent; » et lui ayant coupĂ© la tĂȘte, ils l'exposĂšrent au haut » de la porte appelĂ©e de Rigny. » Il est rapportĂ© dans le mĂȘme manuscrit Que les habitants de Saint-Pregs-les-Sens vinrent » avec les habilants de Coulours au secours de ladite » ville, et qu'ils en chassĂšrent les calvinistes. Depuis >> ce temps, cette petite ville est rĂ©duite en bourg, » dont la paroisse est fort Ă©tendue et trĂšs-considé» rable, comprenant au moins trente hameaux; » Boeurs en est la succursale. SĂ©ant appartenait au » roi, ainsi que les villes de Saint-Florentin, Danne» moine. Suivant le procĂšs verbal de la coutance de » Troyes, la justice s'y exerçait au nom du roi. >> Ces villes ont Ă©tĂ© aliĂ©nĂ©es avec toute la forĂȘt SUR LE CANTON DAIX-EN-OTHE. 469 » d'Othe au duc de Nevers, en faveur de son mariage avec Jeanne de Bourbon. » AprĂšs cette aliĂ©nation, la justice ne se rendit plus qu'au nom du duc de Nevers, et ensuite au nom des seigneurs sous le nom de Pairie. Les sentences relevaient nuement au Parlement, conformĂ©ment Ă  plusieurs rĂšglements entre les seigneurs et MM. des Bailliages de Troyes et de Sens. Jeanne de Bourbon, duchesse de Nevers, vendit la terre de SĂ©ant environ l'an 1552 Ă  M. Galas de BĂ©rulles, dont la famille l'a toujours possĂ©dĂ©e depuis. Me Pierre de BĂ©rulles, premier prĂ©sident du Parlement de Grenoble, a fait Ă©riger une partie de ses terres en marquisat. On lit aussi dans les coutumes du Bailliage de Troyes, par L. Legrand En ladite chatellenie de SĂ©ant en-Othe, y a bailli » et prĂ©vĂŽt, et hors le bourg dudit SĂ©ant est l'Ă©glise >> paroissiale, de laquelle prĂ©vĂŽtĂ© et paroisse sont les » hameaux de Beurlenie et Pierrefitte, Fourracque et » Bois-le-Roy ; du ressort duquel bailliage y a vil» lage ou hameau de Burs, auquel y a prĂ©vĂŽt et une » Ă©glise appelĂ©e Saint-Nicolas, qui est du bailliage » de Sens. Combien qu'elle paie taille au roy avec » les habitants dudit SĂ©ant-en-Othe, et soulait ledit » Burs ĂȘtre de la paroisse dudit SĂ©ant-en-Othe, sinon » depuis six ans que ledit curĂ© de Burs y a fait faire » fonds et cimetiĂšre, et est de prĂ©sent paroisse dont » l'on rend 700, de laquelle prĂ©vĂŽtĂ© de Burs sont » les hameaux de la JaronĂ©e, la Revenue, la Grand» VallĂ©e, la VallĂ©e-des-Corbeaux Ă©tant dudit bail» liage de Sens, les bourgs de Fournaudin et Viels» Vergers qui Ă©taient naguĂšre de ladite paroisse de 470 ESSAI DE STATISTIQUE » SĂ©ant-en-Othe, et nĂ©anmoins ils vont Ă  prĂ©sent Ă  » Seillery ouĂŻr la messe et oĂč il leur plaĂźt, et sont » dudit bailliage de Sens. Combien qu'ils soient de » la taille du roy audit SĂ©ant-en-Othe, » Il n'y a jamais eu, que l'on sache, de chĂąteau Ă  BĂ©rulles. Les seigneurs habitaient ordinairement CĂ©rilly, Ă  4 kilomĂštres de BĂ©rulles. Le chĂąteau de CĂ©rilly appartenait encore, l'an dernier, Ă  la famille de BĂ©rulles. Il vient d'ĂȘtre vendu. Liste chronologique des Maires de BĂ©rulles. 1792, 1er novembre. Gillet Louis-Firmin. 1792, 3 dĂ©cembre. Savinien, ancien curĂ©, officier officier 1793, 2 juin. Mauger Jacques. 1793, 2 juillet. Froment Ambroise. An IV, 30 frimaire. Lagoguey Alexis-HonorĂ© Alexis-HonorĂ© An VI, 6 germinal. Froment François. An VI, 8 messidor. Gillet Louis-Firmin. An VII, 15 nivĂŽse. Froment François. An XIII, 3 thermidor. ViĂ© Pierre. 1806, 22 juin. Hattot Louis, 25 ans. 1831, 16 novembre. Girouy Pierre. 1835, 14 janvier. Boudrot Georges. 1839, 2 fĂ©vrier. Fandard Etienne-Michel. Etienne-Michel. 1840, 2 juillet. Aubrat Jean-Charles. 1843, 14 aoĂ»t. Fandard Zacharie,maire actuel. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 471 QUATRIÈME PARTIE. APPENDICE. § Ier. — Moeurs et Coutumes. On peut diviser la population du canton d'Aixen-Othe en deux catĂ©gories la population agricole et la population industrielle. Chacune d'elles a une physionomie Ă  part. Les nuances sont si marquĂ©es, qu'il est impossible de s'y mĂ©prendre; elles sont saisissables, surtout quand on examine les tableaux de rĂ©vision pour le contingent de l'armĂ©e. Les communes oĂč le travail des champs et des bois domine fournissent des hommes de premiĂšre force, vigoureux et bien constituĂ©s. Les pays de bonneterie, au contraire, que des hommes de petite taille, malingres, chĂ©tifs, pĂąles en gĂ©nĂ©ral. Cet Ă©tat, bien caractĂ©risĂ©, tient Ă©videmment Ă  la nature des occupations de chaque classe. Le genre de travail exerce sur le moral une trĂšsgrande influence. L'homme des champs, fatiguĂ©, harassĂ© par le travail, aspire aprĂšs le reposa la fin de chaque journĂ©e; ses sens sont nĂ©cessairement 472 ESSAI DE STATISTIQUE plus calmes, ses appĂ©tits sensuels ont moins d'activitĂ©. L'ouvrier bonnetier, au contraire, vouĂ© par sa position Ă  une vie plus sĂ©dentaire, recherche avidement tous les stimulents qui peuvent apporter une modification Ă  sa maniĂšre d'ĂȘtre. Son imagination plus vive, alimentĂ©e trop souvent par des lectures plus que lĂ©gĂšres, le poussera quelquefois dans le dĂ©sordre. Mais ce sera chez lui aussi que vous trouverez le musicien, l'artiste, l'homme au dĂ©voĂ»ment spontanĂ©. Il n'est guĂšre possible que, dans un pays boisĂ© comme l'est le canton d'Aix, il ne s'y soit pas contractĂ© des hahitudes de braconnage et de maraudage. Les occasions sont trop frĂ©quentes, le travail dans les bois trop incessant, pour que ce dĂ©faut n'ait pas laissĂ© quelque empreinte dans une certaine partie de la population. Disons bien vite que le nombre des dĂ©lits diminue tous les jours. EnvisagĂ©e sous le point de vue religieux, la population du canton d'Aix ne peut ĂȘtre, Ă  proprement parler, taxĂ©e d'impiĂ©tĂ©. Sans suivre d'une maniĂšre rĂ©guliĂšre les pratiques du Culte, elle ne nĂ©glige aucun des principaux actes de la religion. Il n'y a pas d'exemple qu'on ait laissĂ© un enfant s'avancer dans la vie sans avoir reçu le baptĂȘme ; dĂšs l'Ăąge de sept Ă  huit ans, on l'envoie Ă  l'Ă©glise pour y recevoir l'instruction religieuse jusqu'Ă  ce que son curĂ© l'ait jugĂ© digne de faire sa premiĂšre communion. On paraĂźt mĂȘme attacher une grande importance Ă  cet acte; l'enfant, lui-mĂȘme, ne se croit grand qu'aprĂšs l'avoir accompli. Enfin, au moment suprĂȘme, il ne refusera SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 473 pas l'assistance du prĂȘtre. L'habitant de la contrĂ©e d'Othe a donc des principes religieux. Si nous l'examinons dans sa vie privĂ©e, nous le voyons gĂ©nĂ©ralement bon pĂšre, Ă©poux soigneux, Ă©conome sans ĂȘtre ennemi des distractions permises. LĂ  femme, bonne mĂ©nagĂšre, aidera son mari dans son travail, sans pour cela nĂ©gliger ses enfants. Si c'est un bonnetier, elle remplacera son mari pendant le repas; ses filles sauront coudre, dĂ©vider le coton, la laine. Si c'est un bĂ»cheron, elle accompagnera son mari au bois pour ne le quitter que quelques instants avant la nuit, pour venir prĂ©parer le repas du soir. La femme du cultivateur, elle, trouve ses occupations autour d'elle; la basse-cour, les bestiaux lui suffisent. Parfois, on la verra chausser le brodequin et piĂ©tiner les guĂ©rets au moment de la semaille. L'aisance rĂšgne gĂ©nĂ©ralement dans le canton; mais une chose digne de remarque, c'est que le luxe existe en raison inverse de la position financiĂšre de chaque catĂ©gorie. La population industrielle, chez les femmes surtout, sacrifie bien plus Ă  la mode que la classe des agriculteurs. Cela se comprend, du reste, les habitudes sĂ©dentaires du fabricant de bonneterie permettent une certaine propretĂ© extĂ©rieure qui n'est pas toujours compatible avec les travaux agricoles et le traitement journalier des bestiaux. On remarque aussi de notables amĂ©liorations dans la nourriture. On mange beaucoup plus de viande de boucherie qu'autrefois. Dans toutes les communes un peu populeuses, il y a un boucher, un boulanger; 474 ESSAI DE STATISTIQUE et celles qui n'en ont pas sont, toutes les semaines, approvisionnĂ©es de pain blanc et de viande. Tous les cultivateurs Ă©lĂšvent plusieurs porcs, et leur cave est toujours fournie de vin ou de cidre. Le pain, par exemple, n'est pas de premiĂšre qualitĂ©. Le cultivateur ne mange que le grain qu'il ne peut pas vendre au marchĂ©. Le fabricant de bonneterie, au contraire, vit de pain blanc; mais sa boisson habituelle est l'eau, quelquefois du cidre, quand le prix n'en est pas trop Ă©levĂ©. Le langage, les coutumes, les usages n'ont point de cachet spĂ©cial dans le canton. Il n'y a pas de patois proprement dit. Certes, la langue française n'y est pas parlĂ©e dans toute sa puretĂ©; le vocabulaire troyen de Grosley servirait encore, et ses craintes n'Ă©taient pas fondĂ©es lorsqu'il paraissait apprĂ©hender que le dialecte de son pays ne disparĂ»t, absorbĂ© par le langage Ă©purĂ© de la civilisation. On signale encore quelques prĂ©jugĂ©s; la superstition a encore quelques prosĂ©lytes on redoutera la rencontre d'une pie, on ne commencera pas un travail important le vendredi, le cri d'un hibou, d'une chouette donne encore le frisson; on trouve encore quelques vieilles femmes qui prĂ©tendront vous guĂ©rir de la maille, d'une entorse, en marmottant quelques priĂšres qu'elles ne comprennent pas certainement. Mais tout cela s'en va, et la gĂ©nĂ©ration actuelle n'aura aucun de tous ces travers-lĂ . SUR LE CANTON DAIX-EN-OTHE. 475 § 11. — Biographie. Je finis ce travail si long, quoique encore incomplet, en donnant quelques notices biographiques des personnages appartenant au canton. HERVÉE, nĂ© Ă  Courmorin, aujourd'hui Saint-BenoĂźt-sur-Vannes, chanoine, chantre, grand-archidiacre, puis enfin Ă©vĂȘque de Troyes en 1206. Son mĂ©rite seul l'Ă©leva Ă  cette haute dignitĂ©, car il n'appartenait pas Ă  une famille riche, si l'on en juge par son Ă©pitaphe, conservĂ©e par Courtalon Proesul Trecensis, priĂčs aulem Parisiensis Verbi divini doctor, de Curie Morini Paupere gente satus, jacet Herveus hic tumulatus, etc. On a dĂ©couvert son tombeau, il y a peu d'annĂ©es, dans une des chapelles de la cathĂ©drale de Troyes. Ce saint Ă©vĂȘque travailla Ă  la construction de l'Ă©glise cathĂ©drale de Troyes, et en fut le premier fondateur. PIERRE Antoine, 2e du nom, 33e abbĂ© de Vauluisant, nĂ© Ă  Rigny-le-Ferron, succĂ©da Ă  Jean Hannoteau, son parent, le 20 septembre 1502. Il Ă©tait fils de Jean Pierre, marchand Ă  Rigny. Philibert Pierre, son frĂšre, Ă©tait alors prieur de Vauluisant. Antoine se livra tout entier Ă  l'administration de son abbaye; il s'occupa beaucoup des rĂ©parations et des embellissements de son Ă©glise. Son chiffre se voyait au portail du nord et sur les stalles du choeur, il Ă©tait formĂ© des lettres initiales de son nom F A P frĂšre Antoine Pierre ; ces lettres, entreT. entreT. 32 476 ESSAI DE STATISTIQUE lacĂ©es dans le cordon de sa croix pectorale, sont d'or au champ d'azur. C'est de son temps que furent construits l'ancien maĂźtre-autel, l'ancien cloĂźtre et la bibliothĂšque. Ses soins ne se bornĂšrent pas Ă  l'intĂ©rieur ; la plupart des fermes de l'abbaye, bĂąties par ses ordres et Ă  ses frais, dĂ©posent de son dĂ©sintĂ©ressement et de son zĂšle. Nous le voyons Ă  Courgenay s'occuper de soins plus intĂ©ressants. Son intention Ă©tait de faire Ă©riger ce bourg en ville. Le roi François Ier, dont il avait mĂ©ritĂ© la faveur, lui avait accordĂ© pour cela des lettres-patentes; il entoura la ville de murs et de fossĂ©s profonds; dans son active impulsion, les rues s'alignĂšrent, et Courgenay prit un aspect nouveau. En 1516, il dĂ©fendit courageusement les privilĂšges de son ordre pour l'exemption de la juridiction de l'archevĂȘque de Sens, qui Ă©tait alors Tristan de Salazor. 11 reçut plusieurs fois la visite de François 1er, et obtint de ce prince une garde-gardienne. Nous passons sur ces dĂ©tails pour nous occuper d'un monument dans lequel figure l'abbĂ© Pierre, et qui mĂ©ritĂ© davantage l'attention de nos lecteurs. C'est une sĂ©pulture de Notre Seigneur, ouvrage de Gentil et de Dominique. Les huit personnages, dont six Ă©taient tirĂ©s du mĂȘme bloc de pierre, sont Ă  peu prĂšs de grandeur naturelle; l'abbĂ© Pierre y est reprĂ©sentĂ© sous la figure de NicodĂȘme. La mĂšre de l'abbĂ© y est reprĂ©sentĂ©e Ă  genoux avec son chapelet. Ce groupe est maintenant dans l'Ă©glise de Villeneuvel'ArchevĂȘque. Le cardinal de ChĂątillon, dĂ©sirant rĂ©unir l'abbaye de Vauluisant Ă  ses autres bĂ©nĂ©fices, fit proposer Ă  l'abbĂ© Pierre de la lui rĂ©signer. Le bon pĂšre, que SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 477 trente annĂ©es de travaux ne faisaient qu'attacher de plus en plus Ă  son monastĂšre, montrait pour cela beaucoup de rĂ©pugnance. Le cardinal ne se rebuta point. AprĂšs l'avoir nommĂ© son grand-vicaire, il lui fit donner, par l'archevĂȘque de Sens, le prieurĂ©-cure de Notre-Dame-de-Courtois ; il lui offrit de plus une grosse pension sur l'abbaye de Vauluisant, le vicariat perpĂ©tuel et inamovible de cette maison, et un Ă©vĂȘchĂ© in parlibus. Ebloui par des propositions si avantageuses, l'abbĂ© donna sa dĂ©mission et accepta la pension, qui consistait en la jouissance du chĂąteau, des terres, seigneuries et appartenances de Courgenay, et de toutes les fermes qui sont autour de Vauluisant, comme Pouy, BerniĂšres, ArmentiĂšres, etc. ClĂ©ment VII lui accorda la bulle de l'Ă©vĂȘchĂ© de Sydon, et le nomma supĂ©rieur de l'abbaye de Vauluisant en 1534. Dom Pierre obtint du pape un bref qui lui permit d'exercer ses fonctions Ă  Sens et dans le diocĂšse. Il vĂ©cut encore quinze ans aprĂšs son abdication, et mourut accablĂ© de vieillesse le 15 fĂ©vrier 1549. DE VIENNE Bernard, seigneur de Saint-BenoĂźt-surVannes et de Soligny-les-Etangs, est nĂ© en 1574. Il n'avait que vingt-deux ans lorsque Henri IV l'admit au nombre des gentilshommes de la chambre. A vingt-quatre ans il fut pourvu de la charge d'Ă©cuyer de la Grande-Ecurie, et Ă  trente ans, de celle de capitaine-enseigne des gardes-du-corps de Sa MajestĂ©. Sa brillante conduite lui procura la lieutenance de l'artillerie en Bresse, et son courage le fit nommer par le roi lieutenant en la citadelle de la ville de Bourg, Ă  laquelle il rendit tant de tĂ©moi- 478 ESSAI DE STATISTIQUE gnages de valeur et de fidĂ©litĂ©, qu'aprĂšs avoir Ă©tĂ© honorĂ© des charges de bailly de Bresse et d'aide gĂ©nĂ©ral de camp des armĂ©es de France, et commandĂ© des troupes en qualitĂ© de gĂ©nĂ©ral jusqu'Ă  l'Ăąge de soixante ans, Louis XIII, pour le rĂ©compenser, lui donna les provisions de gouverneur de la ville de Bourg, oĂč il mourut le 3 mai 1634. Il fut enterrĂ© dans l'Ă©glise de Soligny, oĂč l'on voit encore son tombeau. Le cardinal DE BÉRULLES Pierre, nĂ© Ă  CĂ©rilly, prĂšs de Rigny-le-Ferron, fils de Pierre de BĂ©rulles, seigneur de CĂ©ant-en-Othe, de Rigny-le-Ferron et autres lieux, prĂ©lat recommandable par ses vertus et ses talents. Il fut le fondateur et le premier gĂ©nĂ©ral de la congrĂ©gation de l'Oratoire, qui avait une maison Ă  Troyes. Il composa plusieurs ouvrages de controverse, publiĂ©s en 1644. Il est mort en 1629, en disant la messe. DE SARDENTS Hector, seigneur en partie de Rignyle-Ferron, chevalier de l'ordre du Mont-Carmel et de Saint-Lazare, premier chef d'escadre des armĂ©es navales de France, nĂ© en 1628. DĂšs l'Ăąge de dix-huit ans, il parvint, par son courage et son intelligence, au grade de capitaine de vaisseau. ChargĂ© de la conduite des ambassadeurs Ă  Naples, du cardinal Barberini et de la reine Christine Ă  Rome, il s'en acquitta de maniĂšre Ă  mĂ©riter leur estime et leur affection. Il fit le service de lieutenant-gĂ©nĂ©ral au fameux combat naval du 7 juin 1673, entre la flotte d'Angleterre et celle de France, sous le commandement du duc d'Yorck et du comte d'EstrĂ©e ; Ă  celle de Hollande sous Ruyter, il y eut SUR LE CANTON DAIX-EN-OTHE. 479 la jambe emportĂ©e d'un coup de canon sans cesser de combattre jusqu'Ă  la fin ; et, malgrĂ© cet accident, il se trouva encore Ă  trois actions de mĂȘme nature. Il vint mourir en son chĂąteau de Rigny, chĂ©ri et honorĂ© de la noblesse et de ses vassaux, le 29 septembre 1675, ĂągĂ© de 47 ans. Il avait Ă©pousĂ© Jeanne de Courtois, et ne laissa pas d'enfants. PIERRE Jean-Georges, nĂ© Ă  Rigny-le-Ferron en 1716, savant ecclĂ©siastique, archĂ©ologue distinguĂ©, curĂ© de Champlost pendant 45 ans, aprĂšs avoir Ă©tĂ© prĂ©alablement vicaire d'Auxon. Tout le temps que lui laissaient les pĂ©nibles fonctions de son ministĂšre, il l'occupa Ă  faire des recherches scientifiques qui pussent Ă©clairer l'histoire de son pays. Dans l'almanach de Sens, de 1783, il Ă©crivit une longue et intĂ©ressante lettre sur deux voies romaines qui traversaient le territoire de Champlost, et notamment sur celle qui conduisait Ă  Alize-Sainte-Reine, en passant par Eburobriga, aujourd'hui Avrolles. Le savant gĂ©ographe Pasumot lui rĂ©pondit, et tout en le rĂ©futant quelquefois, il ajoute Je suis entiĂšrement d'accord avec M. Pierre, >> qui, par ses recherches, a fixĂ© une position inté» ressante de l'ancienne gĂ©ographie Eburobriga Ă  » une demi-lieue de Champlost. » Les services que M. Pierre a rendus Ă  la commune de Champlost sont incalculables il encourageait l'agriculture Ă  l'Ă©poque oĂč elle Ă©tait naissante. C'est lui qui a projetĂ© l'Ă©tablissement d'une route sur le territoire de sa paroisse, conduisant de Sens Ă  SaintFlorentin par Theil, Vaumort, Cerisiers, Arces, Champlost et Avrolles. DĂšs 1766, le tracĂ© du che- 480 ESSAI DE STATISTIQUE min conduisant Ă  Avrolles fut dirigĂ© par lui ; il fit ramasser des cailloux par les enfants, paya leurs journĂ©es de ses fonds, ainsi que les voituriers qui charroyaient les matĂ©riaux. Ces travaux furent renouvelĂ©s chaque annĂ©e, et aprĂšs plusieurs requĂȘtes et dĂ©marches faites auprĂšs de M. Berthier de Sauvigny, intendant de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Paris, et en exĂ©cution de son ordonnance du 8 aoĂ»t 1782, il a Ă©tĂ© procĂ©dĂ©, dans la mĂȘme annĂ©e, Ă  l'adjudication, au rabais, de la construction et de la rĂ©paration de cette ancienne voie romaine. La RĂ©volution seule vint interrompre les travaux, et ils ne furent dĂ©finitivement continuĂ©s que 39 ans aprĂšs, en 1828. Ce chemin, dĂ» Ă  l'initiative de l'abbĂ© Pierre, s'appelle aujourd'hui la route impĂ©riale n° 5 de premiĂšre classe, de Paris Ă  GenĂšve et l'Italie. L'abbĂ© Pierre traversa l'Ă©poque orageuse de la RĂ©volution dans des alternatives de repos et de persĂ©cution. Il mourut en 1798, Ă  l'Ăąge de 81 ans. Extrait d'une lettre Ă©crite Ă  M. Delaune-Guyard par M. Paris, adjoint de Champlost, en 1856. La famille Pierre existe encore Ă  Rigny-le-Ferron. MOREAU DE LA ROCHETTE François-Thomas, cĂ©lĂšbre agriculteur, inspecteur gĂ©nĂ©ral des pĂ©piniĂšres de France, chevalier de Saint-Michel, nĂ© Ă  Rignyle-Ferron, le 3 octobre 1720. Tout entier aux devoirs de la place qu'il occupait Ă  Melun en qualitĂ© de directeur des fermes du roi, il lui consacrait tous les instants de la journĂ©e; mais le soir, et pendant la nuit, il s'occupait des moyens de rendre fertile une terre appelĂ©e La Rochette, dont SUR LE CANTON DAIX-EN-OTHE. 481 le sol Ă©tait si pauvre, que l'on disait dans le pays qu'une poule n'y trouverait point Ă  vivre en aoĂ»t. Il l'avait acquise en 1751, mais ce ne fut qu'en 1760 qu'il put essayer de la dĂ©fricher. Le succĂšs rĂ©pondit Ă  ses espĂ©rances, et en 1767 il proposa au Gouvernement d'Ă©tablir Ă  La Rochette une Ă©cole d'agriculture, Ă  laquelle cinquante, puis cent enfants trouvĂ©s furent attachĂ©s. Sous sa direction, on vit bientĂŽt cet Ă©tablissement jouir d'une prospĂ©ritĂ© que celui qui l'avait créé n'avait pas osĂ© lui-mĂȘme se promettre. Un terrain dĂ©frichĂ©, nivelĂ© et plantĂ© de belles forĂȘts, des champs fĂ©conds, une maison Ă©lĂ©gante et spacieuse Ă©levĂ©e sur les dessins de Louis, architecte distinguĂ©, des bĂątiments nĂ©cessaires Ă  l'exploitation, de longues terrasses, de vastes jardins, de riches pĂ©piniĂšres prirent insensiblement la place de bruyĂšres arides, de montagnes de sable. Le sol le plus disgraciĂ© de la nature devint fĂ©cond et riche de tout le luxe de la vĂ©gĂ©tation. Les premiers succĂšs de Moreau avaient Ă©tĂ© apprĂ©ciĂ©s du Gouvernement et rĂ©compensĂ©s. En 1766, il fut nommĂ© inspecteur gĂ©nĂ©ral des familles acadiennes restĂ©es sur les ports de mer. En 1767, inspecteur gĂ©nĂ©ral des pĂ©piniĂšres royales, et en 1769, honorĂ© de lettres de noblesse et dĂ©corĂ© du cordon de SaintMichel. En 1785, en qualitĂ© de commissaire du roi, il fut chargĂ© de l'amĂ©nagement des bois destinĂ©s Ă  approvisionner la capitale. Il crĂ©a Ă  Urcel, prĂšs de Laon, la premiĂšre manufacture de sulfate de fer couperose verte dont la France ait Ă©tĂ© enrichie; enfin il donna des projets et des plans pour le dĂ©frichement des landes de Bordeaux, qu'il croyait 482 ESSAI DE STATISTIQUE susceptibles de bonne culture et de productions fertiles. Voltaire avait conçu beaucoup d'estime pour Moreau de la Rochette, et il existe entre ce grand Ă©crivain et cet utile citoyen une correspondance sous le rapport agricole. Cette correspondance est toute entiĂšre insĂ©rĂ©e dans les MĂ©moires de la SociĂ©tĂ© d'Agriculture du dĂ©partement de la Seine, tome IV, pages 264 et suivantes. Elle est due Ă  M. François de NeufchĂąteau. Moreau de la Rochette mourut dans le lieu mĂȘme qu'il a immortalisĂ© par ses crĂ©ations et ses soins, le 20 juillet 1791, Ă  l'Ăąge de 71 ans. Il eut un fils membre de la SociĂ©tĂ© d'Agriculture de Seine-et-Marne, et son petit-fils, le baron ArmandBernard Moreau de la Rochelte, devint prĂ©fet de la Vienne et du Jura. La famille de Moreau de la Rochelte existe toujours Ă  Rigny. MOREAU Philippe-Jacques, nĂ© Ă  Rigny-le-Ferron, le 27 avril 1777, chevalier des ordres de Saint-Louis et de la LĂ©gion-d'Honneur. Parti comme volontaire, il fit les premiĂšres campagnes de la RĂ©publique. Plus tard, son mĂ©rite et ses capacitĂ©s le firent entrer Ă  l'Ecole Polytechnique, et il parvint au grade d'ingĂ©nieur de premiĂšre classe au corps du gĂ©nie maritime. C'est lui qui, dans la campagne de Wagram, jeta sur le Danube le pont d'une seule piĂšce dans la nuit du 4 au 5 juillet, ce qui lui valut une citation honorable dans le bulletin. Le jour de la bataille de la Moscowa, il eut la cuisse droite emportĂ©e par un boulet, ce qui ne l'empĂȘcha pas de suivre l'armĂ©e Ă  Moscou et de faire son service Ă  cheval dans la retraite. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 483 Il fut professeur de l'Ecole maritime de Brest, de 1816 Ă  1830. Des intrigues de bas Ă©tage lui firent perdre cette place ; il fut mis Ă  la retraite. Il vint s'Ă©tablir au milieu de sa famille, Ă  Rigny-le-Ferron, oĂč il mourut le 16 dĂ©cembre 1849, Ă  l'Ăąge de 72 ans. Il fit publier Ă  Brest, en 1827, un ouvrage trĂšsestimĂ© sur la marine. son neveu, possĂšde une partie de ses manuscrits. Il en a donnĂ© quelques-uns Ă  la BibliothĂšque de Troyes. Le vaisseau Ă  trois ponts le Charlemagne a Ă©tĂ© construit sur ses dessins. § III. — Organisation administrative. DĂ©putĂ© au Corps LĂ©gislatif. M. le vicomte Amant Rambourgt, réélu en 1857. Membres du Conseil GĂ©nĂ©ral. 1834. Le gĂ©nĂ©ral vicomte Rambourgt. 1848. M. VĂ©rollot Alexis. 1855. M. Argence, avocat Ă  Troyes. Conseillers d'arrondissement. 182... Le baron RenĂ©-Nicolas Peschard d'Ambly. 1832. M. GuyĂŽt-Gerdy, Ă  Maraye-en-Othe. 1845. M. VĂ©rollot Alexis, Ă  Rigny-le-Ferron. 1848 M. Maillard ArsĂšne, notaire Ă  Aix-en-Othe. 1853. M. Coudrot, notaire Ă  Aix, dĂ©missionnaire. 1855. M. EugĂšne Peschard d'Ambly, maire de Saint-BenoĂźt. 484 ESSAI DE STATISTIQUE Aix-en-Othe, chef-lieu de canton, est le siĂšge d'une justice de paix dont le titulaire rĂ©side depuis longues annĂ©es Ă  Rigny. Trois huissiers sont attachĂ©s Ă  ce tribunal ; leur rĂ©sidence est Aix, Saint-Mards et Rigny-le-Ferron. Le service de la police est fait par un commissaire rĂ©sidant au chef-lieu, et par une brigade de gendarmerie Ă  pied casernĂ©e Ă  Saint-Mards. Cette brigade est composĂ©e de quatre hommes et d'un brigadier. La gendarmerie Ă  cheval d'Estissac fait le service des communes situĂ©es dans la vallĂ©e de la Vannes. Les contributions directes sont confiĂ©es Ă  deux percepteurs qui rĂ©sident l'un Ă  Rigny-le-Ferron, qui fait la recette d'Aix, de BĂ©rulles, de Rigny, de Vulaines, de Saint-BenoĂźt et de Paisy; l'autre Ă  SaintMards, et qui perçoit Ă  Maraye, Ă  Nogent-en-Othe, Ă  Saint-Mards et Ă  Villemoiron. Trois bureaux de poste desservent les dix communes du canton; un bureau de direction Ă  SaintMards ; deux bureaux de distribution un Ă  Aix-enOthe, l'autre Ă  Rigny-le-Ferron. Aix possĂšde un bureau d'enregistrement depuis 1830. Avant cette Ă©poque, il Ă©tait Ă  Estissac. Les contributions indirectes sont perçues par le Receveur Ă  cheval d'Estissac. Aix est la rĂ©sidence du curĂ©-doyen du canton. L'instruction est confiĂ©e Ă  deux instituteurs laĂŻques et Ă  des soeurs de la Providence. Des deux instituteurs laĂŻques, l'un rĂ©side Ă  Aix, et l'autre au hameau du Mineroy. SUR LE CANTON DAIX-EN-OTHE. 485 § IV. — RĂ©sumĂ© de la population du canton. Maisons. MĂ©nages. Habitants. Aix-en-Othe. . . . 569 761 2,427 Saint-Mards. ... 493 604 1,676 Maraye 292 386 1,115 Nogent-en-Othe. . 54 61 180 Villemoiron ... 159 207 554 Paisy-Cosdon. . . 113 142 484 St-BenoĂźt-sur-Vannes 106 144 518 Vulaines ..... 73 82 291 Rigny-le-Ferron . 302 378 1,255 BĂ©rulles ..... 212 252 831 Total. . . . 2,373 3,017 9,331 On compte 2,100 garçons, 1,878 filles, 198 hommes veufs, et 442 femmes veuves. Cette disproportion entre les femmes veuves et les hommes veufs peut facilement s'expliquer Les femmes veuves, la plupart du temps, se suffisent Ă  elles-mĂȘmes; tandis que l'homme, quelquefois chargĂ© d'enfants, a besoin d'une femme pour diriger son mĂ©nage, Ă©lever ses enfants, et il est rare qu'il prenne une femme veuve. 486 ESSAI DE STATISTIQUE § V. — Statistique de NOMBRE NOMS DES ÉCOLES PUBLIQUES DES COMMUNES. SpĂ©ciales SpĂ©ciales Deux TOTAL aux aux des Garçons. Filles. sexes. Ecoles. Aix-en-Othe 3 Saint-BenoĂźt-sur-Vannes » » 1 1 BĂ©rulles 1 1 » 2 Maraye-en-Othe 1 1 1 3 Saint-Mards-en-Othe 1 1 » 2 Nogent-en-Othe » » 1 4 Paisy-Gosdon » » 1 1 Rigny-le-Ferron 1 1 » 2 Villemoiron » » 1 1 Vulaines » » 1 1 TOTAL. .... 5 5 7 17 Je dois ce tableau Ă  l'obligeance de M. l'inspecteur Bage. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 487 Instruction publique. SEXES SÉPARÉS. SEXES RÉUNIS. TOTAL GÉNÉRAL GARÇONS FILLES GARÇONS FILLES des ÉlĂšves, payants gratuits payantes gratuites payants gratuits payantes gratuites 109 11 120 100 20 120 76 11 58 5 390 » » » » » » 38 2 27 4 71 59 6 65 61 4 65 » » » » 130 61 4 65 51 2 53 40 2 18 2 180 98 12 110 108 12 120 » » » » 230 » » » » » » 16 1 8 1 26 » » » » » » 22 3 18 2 45 85 10 95 84 11 95 » » » » 190 » » » » » » 40 5 39 3 87 » » » » » » 18 2 30 » 50 412 43 455 404 49 453 250 26 198 17 1,399 488 ESSAI DE STATISTIQUE § VI. — Statistique Judiciaire. Le Tribunal d'Aix rend, en moyenne, 170 jugements. Les affaires jugĂ©es contradictoirement s'Ă©lĂšvent Ă  120. Les affaires en conciliation, Ă  28. Les affaires en police simple, Ă  70. Le chiffre des amendes en police simple, des dommages-intĂ©rĂȘts en matiĂšre civile, peut s'Ă©lever, en moyenne, Ă  100 fr. SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. 489 TABLE DE LA STATISTIQUE DU CANTON D'AIX-EN-OTHE. Pages. ATANT-PROPOS 249 PREMIÈRE PARTIE. - ETAT PHYSIQUE DU PAYS 252 § 1er. — Situation, Etendue 252 § II. — Cours d'eau, Sources 254 § III. — Nature du sol, GĂ©ologie 257 § IV. — Aspect du pays 260 § V. — MĂ©tĂ©orologie 264 § VI. — Etat sanitaire 267 § VII. — Botanique 269 § VIII. — Zoologie 275 DEUXIÈME PARTIE. AGRICULTURE, COMMERCE, INDUSTRIE 297 § 1er. — Tableau des diffĂ©rentes natures de propriĂ©tĂ©, etc 298 § II. — RĂ©flexions sur l'Agriculture en gĂ©nĂ©ral . 300 § III. -— Terres labourables 306 § IV. — Cultures diverses 312 §V. —Fourrages 316 § VI. — Vigne . 323 § VII. — Cidre 326 § VIII. — Bois 328 490 ESSAI DE STATISTIQUE SUR LE CANTON D'AIX-EN-OTHE. § IX. — Animaux domestiques 330 § X. — Consommation 338 § XI. — Economie rurale 339 § XII. — Commerce, Industrie. ....... 342 TROISIEME PARTIE. COMMUNES DU CANTON 345 §Ier. —Aix-en-Othe 345 § II. — Saint-Mards-en-Othe ....... 365 § III. — Maraye-en-Othe 380 § IV. — Nogent-en-Othe 387 § V. — Villemoiron 392 § VI. — Paisy-Cosdon . . 399 § VII. — Saint-BenoĂźt-sur-Vannes. ..... 410 § VIII. — Vulaines 428 § IX. — Rigny-le-Ferron 437 §X. — BĂ©rulles. . 458 QUATRIEME PARTIE. APPENDICE 471 § 1er. — Moeurs et Coutumes 471 § II. — Biographie 475 § III. — Organisation administrative .... 483 § IV. —RĂ©sumĂ© de la population 485 § V. — Statistique de l'Instruction primaire . . 486 § VI. —Statistique judiciaire 488 PROGRAMME DES PRIX MIS AU CONCOURS PAR LA SOCIÉTÉ. Prix Ă  dĂ©cerner en 1859. Un prix de 300 francs et une mĂ©daille d'or Ă  la personne qui aura introduit une amĂ©lioration quelconque dans la culture de la vigne. Les concurrents qui voudront faire apprĂ©cier leurs procĂ©dĂ©s, devront adresser leurs demandes Ă  la SociĂ©tĂ© avant le 30 avril 1859. Prix Ă  dĂ©cerner en 1860. 1°. Un prix de 500 francs Ă  l'auteur du meilleur bas-relief reprĂ©sentant l'entrevue de saint Loup et d'Attila aux portes de la ville de Troyes. Les personnages devront ĂȘtre de grandeur deminature. Les plĂątres prĂ©sentĂ©s au concours devront ĂȘtre terminĂ©s au plus tard le 1er mai 1860, et ne pourront pas ĂȘtre retirĂ©s avant la clĂŽture de l'ExpoT. l'ExpoT. 33 492 PROGRAMME DES PRIX sition des Beaux-Arts, qui doit avoir lieu Ă  Troyes au mois de juin 1860. 2°. Une mĂ©daille de la valeur de 200 francs sera dĂ©cernĂ©e Ă  la personne qui aura, en matiĂšre de pisciculture, obtenu les rĂ©sultats les plus satisfaisants. Les personnes qui voudront concourir pour ce prix devront en faire la dĂ©claration, par Ă©crit, Ă  M. le SecrĂ©taire de la SociĂ©tĂ©, avant le 1er novembre 1860. La SociĂ©tĂ© d'Agriculture nommera alors une Commission pour examiner les rĂ©sultats obtenus par les concurrents, et lui faire un rapport Ă  ce sujet. Prix Ă  dĂ©cerner en 1861. 1°. Une mĂ©daille de la valeur de 300 francs Ă  l'auteur du meilleur mĂ©moire sur l'une des principales Ă©poques de l'histoire de la Champagne, ou sur l'un des personnages les plus remarquables qu'elle a produits. 2°. Une mĂ©daille de la valeur de 200 francs Ă  l'auteur de la meilleure statistique de l'un des cantons du dĂ©partement de l'Aube.— La SociĂ©tĂ© invite les personnes qui voudront concourir pour ce dernier prix, Ă  consulter le 29e numĂ©ro de ses MĂ©moires 1er trimestre de 1829, oĂč elle a publiĂ© un projet de statistique, et six grands tableaux prĂ©sentant la nomenclature trĂšs-dĂ©taillĂ©e des diverses questions que la SociĂ©tĂ© dĂ©sire voir traiter dans un travail de ce genre. La statistique du canton des Riceys, par MM. GuĂ©- MIS AU CONCOURS PAR LA SOCIÉTÉ. 493 nin et A. Ray 2e semestre de 1852, pourra Ă©galement ĂȘtre consultĂ©e avec fruit. Les concurrents devront s'abstenir de traiter la statistique des cantons de Marcilly-le-Hayer, de Nogent-sur-Seine, des Riceys et d'Aix-en-Othe. Ces quatre cantons ont dĂ©jĂ  Ă©tĂ© le sujet de travaux couronnĂ©s par la SociĂ©tĂ©. Les concurrents pour ces deux prix devront faire remettre leurs manuscrits, francs de port, Ă  Troyes, chez le SecrĂ©taire de la SociĂ©tĂ©, au plus tard le 1er novembre 1860. Prix Ă  dĂ©cerner en 1862. Un prix de 500 francs au meilleur mĂ©moire relatif Ă  l'emploi de la craie dans les constructions, soit Ă  l'Ă©tat de pierre, soit Ă  l'Ă©tat de chaux. Le mĂ©moire devra indiquer les rĂ©sultats de l'analyse de la craie extraite Ă  diverses profondeurs audessous du niveau du sol. Les principales questions sur lesquelles la SociĂ©tĂ© appelle l'attention des concurrents, sont celles-ci 1°. Emploi de la craie Ă  l'Ă©tat de pierre. Quelles sont les prĂ©cautions Ă  prendre dans l'extraction? La qualitĂ© de la craie varie-t-elle avec la position des bancs mis en oeuvre ? Dans cette hypothĂšse, quelle est la profondeur Ă  laquelle il convient de descendre le plus ordinairement? Combien doitil s'Ă©couler de temps entre le moment de l'extraction et celui de l'emploi? 494 PROGRAMME DES PRIX A quelle hauteur la craie doit-elle ĂȘtre placĂ©e audessus du sol dans les constructions ? Comparaison des prix d'une maison construite Ă  Troyes, 1° en charpente, 2° en briques, 3° en craie, soit Ă  l'Ă©tat de pierre de taille, soit Ă  l'Ă©tat de moellon. Par quels procĂ©dĂ©s peut-on Ă©viter l'humiditĂ© qu'entraĂźne l'emploi de la craie dans les Ă©difices? Prix de revient. 2°. Emploi de la chaux fabriquĂ©e avec la craie. Indiquer les meilleurs procĂ©dĂ©s de fabrication et d'extinction ; faire connaĂźtre en quoi consiste le foisonnement ; comparer la chaux de craie et la chaux de FouchĂšres rendues Ă  Troyes, sous le rapport du prix de revient ; prĂ©senter les rĂ©sultats d'expĂ©riences comparatives entre ces deux espĂšces de chaux, sous le rapport de la qualitĂ© des mortiers. Peut-on fabriquer en grand de la chaux hydraulique, ou du ciment naturel, avec la craie argileuse qui existe sur plusieurs points du dĂ©partement, Ă  la limite du terrain crayeux et des terrains argileux 1? 1 Il rĂ©sulte d'expĂ©riences faites par M. Vicat, sur des Ă©chantillons choisis dans les parties basses des territoires placĂ©s Ă  cette limite, qu'il existe de la chaux hydraulique bu du ciment naturel dans les communes dĂ©signĂ©es ci-aprĂšs Racines. ciment naturel. Auxon, lieu dit les Fontenis. ; ... idem. Chamoy, lieu dit la Voie-des-Vignes . . idem. MIS AU CONCOURS PAR LA SOCIÉTÉ. 495 Etudier la fabrication des mortiers hydrauliques composĂ©s de chaux grasse et de pouzzolane artificielle. Les opinions Ă©mises sur ces deux derniers articles devront ĂȘtre basĂ©es sur des expĂ©riences aussi nombreuses que possible. Les concurrents pour ce prix devront faire remettre leurs manuscrits, Ă  Troyes, chez le SecrĂ©taire de la SociĂ©tĂ©, au plus tard le 1er mai 1862. Prix Ă  dĂ©cerner en 1863. Une mĂ©daille de la valeur de 300 francs Ă  l'auteur de la meilleure histoire de l'art cĂ©ramique dans le dĂ©partement de l'Aube, depuis les temps les plus reculĂ©s jusqu'Ă  nos jours. Les concurrents pour ce prix devront faire reChamoy, reChamoy, dit les Martrois. . . . chaux Ă©minemment hydraulique. Saint-Phal, lieu dit Bouteille ciment naturel. Les Maisons, entre ce village et Lagesse. chaux Ă©minemment hydraulique. Saint-Jean-de-Bonneval, lieu dit Cave-duTertre. ciment naturel. Laines-aux-Bois, lieu dit Montaigu. . chaux Ă©minemment hydraulique. Saint-AndrĂ©, propriĂ©tĂ© du sieur Bornet. chaux moyennement hydraulique. GĂ©rosdot, lieu dit le Gatis , ciment naturel. Rouilly-les-Saceys chaux hydraulique. 496 PROGRAMME DES PRIX MIS AU CONCOURS PAR LA SOCIÉTÉ. mettre leurs manuscrits Ă  TroyĂ©s, au SecrĂ©tariat de la SociĂ©tĂ©, au plus tard le 31 dĂ©cembre 1862. CONDITIONS COMMUNES A CES CONCOURS. Les manuscrits porteront chacun une Ă©pigraphe ou devise qui sera rĂ©pĂ©tĂ©e dans et sur le billet cachetĂ© joint Ă  l'ouvrage, et contenant le nom de l'auteur, qui ne devra pas se faire connaĂźtre, Ă  peine d'ĂȘtre exclu du concours. Les concurrents sont prĂ©venus que la SociĂ©tĂ© ne rendra aucun des ouvrages qui auront Ă©tĂ© envoyĂ©s au concours; mais les auteurs auront la libertĂ© d'en faire prendre des copies. LISTE DES DONS FAITS AU MUSÉE DE TROYES, AVEC LES NOMS DES DONATEURS, Pendant l'annĂ©e 1858*. Article 33 du RĂšglement de la SociĂ©tĂ© AcadĂ©mique de l'Aube > qu'il est en lui, Ă  l'augmentation du MusĂ©e. » Les dons faits Ă  la SociĂ©tĂ© par ses Membres, ou par des per» sonnes Ă©trangĂšres, seront inscrits sur un registre spĂ©cial, et » publiĂ©s en outre dans les journaux de Troyes et dans l'ANNUAIRE >> du DĂ©partement, avec les noms des donateurs. >> MM. CLÉMENT-MULLET, homme de lettres Ă  Paris. — Des oeufs de Notonectes insectes hĂ©miptĂšres du Mexique, provenant du lac de Texcoco Mexique. Ces oeufs, malgrĂ© leur petitesse, servent d'aliments aux Indiens, et forment des bancs d'oolithes, aprĂšs avoir Ă©tĂ© incrustĂ©s pour les concrĂ©tions calcaires que dĂ©posent les eaux du lac. TAILLEBOIS Edouard, apprenti de marine sur un vaisseau de commerce. — Un poisson volant, du tropique du Cancer. LE GRAND, agent-voyer en chef, Ă  Troyes. — Un crĂąne de chacal d'Afrique. — Un crĂąne de chien-doguin. COEFFET-OLIVIER, numismate Ă  Villeneuve-l'ArchevĂȘque. — * Pour les publications prĂ©cĂ©dentes, voir les MĂ©moires de la SociĂ©tĂ© des annĂ©es 1849 Ă  1857. 498 LISTE DES DONS FAITS AU MUSÉE DE TROYES, L'empreinte d'un sceau trouvĂ© dans un champ dĂ©pendant de l'ancienne abbaye de Vauluisant, et paraissant provenir d'un abbĂ© de Vauluisant. COLLET-JOLLY, boucher Ă  Troyes. — Un veau monstrueux. GUYARD-DELAUNE, nĂ©gociant Ă  Rigny-le-Ferron. — Six carreaux Ă©maillĂ©s du moyen-Ăąge, provenant d'une ancienne maison de Rigny-le-Ferron. PACOT Paul, charpentier Ă  Ricey-Haute-Rive. — Les deux cĂŽtĂ©s et une misĂ©ricorde de stalle, en chĂȘne sculptĂ©, provenant de l'ancienne abbaye de Molesme. GUILLIER, propriĂ©taire au HĂąvre. — Trois caisses contenant un choix considĂ©rable de mollusques marins, de madrĂ©pores, de poissons, de fossiles et d'objets d'ethnographie. MAITREJEAN Ulysse, propriĂ©taire Ă  Chennegy. —Une piĂšce de monnaie portant la date de 1567. SEBILLE, propriĂ©taire Ă  Troyes. — Un oursin fossile, de la craie. MOUTARD, cultivateur a Bouranton.— Un oursin fossile, de la craie. GOMMERY François, cultivateur Ă  Aix-Ă©n-Othe.—Une pĂ©trification. RIBAULT, cultivateur Ă  Eguilly. — Une mĂ©daille romaine, trouvĂ©e entre Essoyes et Vendeuvre. CARTEREAU, mĂ©decin Ă  Bar-sur-Seine. — Un poisson de mer prĂ©parĂ©. CHARPENTIER, marĂ©chal Ă  Montreuil. — Deux vases antiques, Ă  anses, en terre cuite, trouvĂ©s Ă  Monireuil, Ă  cinq mĂštres de profondeur. TERNOIRE, instituteur, Ă  Donnement. —Une lame d'Ă©pĂ©e Ă  deux tranchants, et un fer de lance antiques, trouvĂ©s Ă  Donnement, dans le jardin de M. Oudin Pierre, Ă  cĂŽtĂ© d'un squelette. PERSON, architecte-voyer adjoint Ă  Troyes. — Plusieurs pots antiques trouvĂ©s dans les fondations d'une maison de la rue du Bois. Mme DE BACULARD-D'ARNAUD, nĂ©e CORRARD, dĂ©cĂ©dĂ©e Ă  Ricey-Bas. — Trois tableaux peints Ă  l'huile 1° le portrait de son mari, en uniforme de gendarme de la Maison du Roi ; 2°le portrait du mĂȘme, enfant, peint par Greuze. Une lettre autographe de M. de Baeulard-d' Arnaud, conservĂ©e aux AVEC LES NOMS DES DONATEURS. . 499 archives de la SociĂ©tĂ© AcadĂ©mique de l'Aube, apprend que Greuze, ami de son pĂšre, a peint ce portrait en 1776; 3° le portrait de M. de Baculard-d'Arnaud pĂšre, aussi enfant. M. de Baculard-d'Arnaud pĂšre, conseiller d'ambassade, auteur du Comte de Comminges des Epreuves du Sentiment, etc., a Ă©tĂ© l'un des reprĂ©sentants les plus fĂ©conds de la littĂ©rature lĂ©gĂšre du XVIIIe siĂšcle. VERNEUIL, surveillant du MusĂ©e, Ă  Troyes. — Deux oursins fossiles du terrain jurassique. ADMINISTRATEURS les des Hospices de Troyes. — Plusieurs carreaux Ă©maillĂ©s provenant d'une maison faisant partie de l'HĂŽtel-Dieu. OUDIN Louis, cultivateur Ă  Saint-Parres-les-Tertres. — Une clef ancienne, trouvĂ©e Ă  Baire, dans l'emplacement de l'ancien chĂąteau. GRILLIAT Etienne, caissier Ă  Troyes. — Une branche de frĂȘne fasciĂ©e. MARTINOT, maire Ă  Chervey. — Une monnaie romaine trouvĂ©e Ă  Chervey. SCHOLET, brigadier de gendarmerie Ă  VĂ©zelay. - Des anneaux de bronze, trouvĂ©s Ă  Brosses, canlon de VĂ©zelay, dans un monticule de pierres, dit le Merger-aux-Moines. Ces anneaux Ă©taient autour des jambes des squelettes exhumĂ©s. Le plus petit des anneaux entourait un doigt de pied. HORIOT, agent-voyer cantonal Ă  Marcilly-le-Hayer. — Le montant d'un chenet datant du moyen-Ăąge, et reprĂ©sentant un personnage. — Un vase mĂ©rovingien et des fragments de poteries antiques trouvĂ©s Ă  Saint-Aubin, prĂšs de la Chapelle-Godefroy. DOYEN le baron, receveur gĂ©nĂ©ral Ă  Troyes. — Six mĂ©dailles et monnaies trouvĂ©es dans son jardin, place de la Tour deux petits bronzes de Constantin; un petit bronze quinaire de TĂ©tricus; un demi-blanc de Louis XI, pour le DauphinĂ©; un double tournois de Louis XIII; un jeton de Nuremberg. — Un bel Ă©chantillon de PalĂ©ontologie Pholadomya parvicosta, Agassh, trouvĂ© dans un fragment de pierre du terrain jurassique moyen, provenant d'un mur de sa maison. 500 - LISTE DES DONS FAITS AU MUSÉE DE TROYES, ETC. JUCHAT, propriĂ©taire Ă  la Villeneuve-au-ChĂątelot. — Une statuette en fonte, trouvĂ©e dans les ruines d'une tourelle du chĂąteau de Nelerolles. RECORDON, pasteur protestant Ă  Troyes. — Un attribut religieux en bronze, trouvĂ© en creusant les fondations du temple protestant. LELIÈVRE, agent-voyer cantonal Ă  Jasseines. — Des poteries et des objets antiques dĂ©couverts dans une carriĂšre de grĂšve entre Isle et Ramerupt. LAMBLIN Antoine, marchand de gibier Ă  Troyes. — Deux oeufs de canepetiĂšre. FLÉCHEY, architecte-voyer Ă  Troyes. — Un petit tableau peint sur marbre, reprĂ©sentant sainte Claire, tenant une monstrance. monstrance. peinture, de l'Ă©cole italienne, semble ĂȘtre de la fin du XVe siĂšcle. TRUELLE Auguste, payeur du dĂ©partement Ă  Troyes. — Une bague portant une croix de l'ordre du Temple. Cette bague a Ă©tĂ© trouvĂ©e dans le jardin de M. Truelle, rue du Temple. BONNIN Pierre, cantonnier Ă  Villadin. — Un Ă©chantillon de silex d'une forme bizarre. NOCHÉ, notaire Ă  Troyes. — Un aigle balbuzard, tuĂ© Ă  ClĂ©rey, le 20 septembre 1858. Le vicomte RAMBOURGT, dĂ©putĂ© de l'Aube, Ă  Troyes. — Une fouine tuĂ©e dans la forĂȘt d'Othe. LEPHOUX, photographe Ă  Troyes. — Une Ă©preuve photographique de la cathĂ©drale de Troyes. — Deux mĂ©dailles romaines.— Une pĂ©trification. Mme THIBAUT-HENNETON, propriĂ©taire Ă  Troyes. — Une petite cuillĂšre antique, en bronze, trouvĂ©e dans le faubourg Saint-Martin. Pour copie conforme au registre destinĂ© Ă  inscrire les Dons faits au MusĂ©e de Troyes. Troyes, le 25 dĂ©cembre 1858. JULES RAY, Un des conservateurs. MERCURIALES DU DÉPARTEMENT DE L'AUBE, Pendant l'annĂ©e 1959. Mercuriales de l'AnnĂ©e 1857. QuantitĂ© d'hectolitres de Grains vendus sur les principaux MarchĂ©s du dĂ©partement de g; l'Aube, et Prix moyen de l'hectolitre par quinzaine. MOIS. FROMENT. MÉTEIL. SEIGLE. ORGE. AVOINE. QuantitĂ©s. Prix moyen. QuantitĂ©s. Prix moyen. QuantitĂ©s. Prix moyen. QuantitĂ©s. Prix moyen. QuantitĂ©s. Prix moy. f. c. f. c. f. c. f. c. f. c. Janvier... 1re 6150 26 62 366 19 90 732 16 46 3010 12 33 3775 7 74 2e 9464 27 11 550 20 » 1297 16 29 5852 12 58 5087 7 93 FĂ©vrier ... 1re 5984 27 61 375 20 19 698 16 67 3195 12 93 3608 7 99 2e 7502 27 14 544 21 10 600 17 58 1940 14 47 4911 8 58 Mars .... 1re 7095 27 37 592 20 70 1081 16 73 3489 13 40 6208 8 81 2e 5693 27 13 594 20 51 790 17 01 3406 13 49 4542 9 03 Avril .... 1re 5743 26 03 543 20 » 967 16 47 4300 13 85 4209 8 81 2e 6972 26 24 620 19 96 971 16 49 4221 13 43 3308 9 31 Mai 1re 9891 26 74 598 20 36 1178 17 05 2960 14 53 3937 9 75 2e 9498 26 50 634 19 75 1853 17 22 3630 la 61 4885 10 33 . Juin 1re 7587 26 09 586 20 07 1419 16 71 1889 14 60 3918 10 72 2e 7144 25 82 526 19 91 1224 15 55 1078 14 62 3763 1103 Juillet. ... 1re 8433 23 90 458 18 52 908 13 65 1735 13 37 4366 10 60 2e 6733 21 39 335 16 83 403 12 79 899 12 54 4186 10 34 AoĂ»t .... 1re 8523 21 30 359 15 70 662 13 29 1392 11 64 3153 10 75 2e 8984 21 27 376 15 98 1379 13 94 3399 11 31 5155 9 61 Septembre 1re 11447 20 22 404 15 49 2714 13 26 3724 10 57 4831 8 41 2e 8955 19 01 283 14 72 782 12 06 2400 10 50 3554 8 63 Octobre. . . 1re 7971 18 72 324 14 04 506 11 36 3687 10 28 3994 8 62 2e 13268 17 76 555 13 37 25 10 95 4870 10 06 5613 8 87 Novembre. 1re 7906 16 64 382 12 63 217 10 73 4293 9 61 4409 8 58 2e 8621 17 67 387 12 74 571 10 97 4046 9 43 4264 8 51 DĂ©cembre.. 1re 10371 17 06 579 12 67 845 10 47 4384 9 12 4910 8 55 2e 11295 16 31 505 12 38 854 9 92 3999 8 80 4484 8 34 TOTAUX 199210 11375 23476 77798 115070 Prix moyen de l'annĂ©e. . 21 82 17 82 14 83 11 49 8 20 a H. Suite des Mercuriales de l'annĂ©e 1857. Comestibles divers. Fourra- Combustibles. FARINES PAIN POMMES VIANDE ges . BOIS CHARBON MOIS. FROMENT lekilogram. TERRE le kilogramme. mĂ©trique. le stĂšre. l'hectol. Prix Blanc. Bis-blanc Prix Boenf. Vache. Veau. Mouton Cochon Foin. Paille. ChĂȘne. Autres de Fossile moyen. moyen. essences BOIS. f. c. c. >> c. >> f. c. f. c. f. c. f. c. f. c. f. c. f. c. f. c. f. c. f. c. f. c. f. c. 1re » » 39 56 34 86 5 84 1 15 1 12 1 16 1 24 1 35 9 80 4 82 10 69 9 18 3 50 5 » Janvier 2e >> >> 40 67 35 » 6 04 1 15 1 12 1 16 1 27 1 39 9 60 4 82 10 62 9 36 3 51 5 12 1re >> >> 40 22 35 29 6 28 1 15 1 13 1 16 1 31 1 37 9 50 4 87 10 » 11 » 3 50 6 » FĂ©vrier 2e >> >> 40 67 35 86 6 13 1 14 1 12 1 17 1 32 1 37 9 60 4 80 10 44 9 38 3 50 5 >> lre » » 40 87 37 14 5 95 1 13 1 10 1 14 1 35 1 39 9 60 4 80 10 36 9 25 3 50 5 » Mars... 2e >> >> 40 78 36 14 5 96 1 13 1 10 1 15 1 40 1 40 9 80 4 95 10 63 9 17 3 50 5 18 1re >> » 39 78 35 » 6 28 1 13 1 10 1 15 1 40 1 39 9 70 5 » 10 46 9 28 3 50 5 18 Avril... 2e >> >> 39 55 34 83 6 51 1 13 1 10 1 14 1 39 1 39 10 82 5 34 10 53 9 34 3 50 5 18 1re », 39 77 35 » 7 32 1 13 1 10 1 15 1 35 1 38 10 13 5 37 10 52 9 24 3 50 5 12 Mai 2e ». 39 55 34 83 6 64 1 14 1 11 1 16 1 45 1 40 9 60 5 10 10 33 9 03 3 50 5 37 > » 38 78 34 17 7 46 1 14 1 13 1 14 1 46 1 41 10 » 5 30 10 39 9 17 3 50 5 31 Juillet 1re » » 37 62 23 » 6 » 1 14 1 13 1 12 1 45 1 41 10 20 5 30 10 86 9 33 3 55 5 31 2e >> » 34 17 29 41 6 51 1 16 1 12 1 06 1 51 1 42 10 20 5 20 10 44 9 26 3 50 5 18 AoĂ»t lre » » 33 89 29 66 5 58 1 15 1 11 1 06 1 48 1 34 10 31 5 36 10 50 9 03 3 50 5 18 2e » » 33 55 29 16 6 19 1 16 1 12 1 07 1 50 1 39 10 57 5 20 10 54 9 04 3 50 5 31 1re . » 32 47 28 16 5 89 1 16 1 12 1 08 1 44 1 40 10 81 5 37 10 31 9 21 3 25 5 25 Sept.... 2e >> >> 31 >> 26 66 5 28 1 14 1 11 1 09 1 33 1 41 10 48 5 37 10 22 9 18 6 » Octob lre » » 29 77 25 33 5 05 1 14 1 10 1 15 1 33 1 41 10 50 5 25 10 » 11 » 3 50 5 37 2e » >> 28 88 24 » 4 26 1 14 1 10 1 18 1 29 1 40 10 60 5 30 10 64 9 28 3 50 5 12 Nov 1re >> » 27 » 22 16 3 72 1 13 1 09 1 18 1 28 1 40 10 70 5 60 10 66 9 31 3 50 5 12 2e » » 27 44 23 » 3 87 1 11 1 08 1 15 1 29 1 36 10 40 5 40 10 » 11 » 3 50 5 31 DĂ©c 1re » » 27 11 22 50 3 76 1 11 1 19 1 15 1 23 1 36 10 40 5 30 10 60 9 20 3 50 5 31 2e » » 26 44 21 83 3 80 1 11 1 08 1 15 1 25 1 33 10 40 5 30 10 63 8 93 3 50 5 31 Prix moyen de l'annĂ©e » >> 30 73 26 56 5 71 1 13 1 11 1 09 1 36 1 42 10 14 5 17 10 45 9 34 3 49 5 27 ETAT des RĂ©coltes en Grains et antres Farineux, PRODUIT. ESPÈCES QuantitĂ© de ment GRAINS g et de pour la FARINEUX. habitants. hectol. hectol. Froment . . 83906 » 2 50 5 >> 5 52 13 55 1136087 24 554746 76 MĂ©teil 1834 >> 2 45 5 » 5 73 14 04 25749 84 49717 87 Seigle. .... 38788 » 2 40 4 75 4 45 10 68 414255 84 272139 92 Orge 30298 » 2 45 5 » 5 74 14 06 425989 88 28784 03 Sarrasin.. . . 1815 » » 75 7 » 9 » 6 75 12251 25 >> MaĂŻs et millet. » » » » » » » » » » » » » Avoine. ... 82755 » 2 45 5 50 5 57 13 65 1129605 75 LĂ©gumes secs. 2361 >> 2 » 7 » 5 52 11 04 26065 44 22242 20 Autres grains. 2405 » 2 » 7 » 4 28 8 56 10586 80 785 02 TOTAUX. . . 244162 » » >> » » » » » » 3180591 54 928415 80 terre. 5618 » 15 » 8 >> 6 40 96 » 539328 » 117752 85 faites en 1887, dans le DĂ©partement de l'Aube. CONSOMMATION. COMPARAISON approximative d'hectolitres et de farineux annuelle- TOTAL PRODUIT nĂ©cessaire. ara a consommation. nourriture pour pour les distille pour ries BESOINS des animaux les brasseries et tous annuels. ExcĂ©dant. DĂ©ficit. domesti- SEMENCES. autres ques. usages. hectol. kilog. >> 209765 » >> 764511 76 871575 48 >> 85382 77 43 » 4493 30 >> 54211 17 >> 28461 83 168 74 47 » 93091 20 >> 365231 12 49034 72 » 607 71 52 105000 >> 74220 10 22000 230004 13 195985 75 » 3595 63 » 12000 >> 136125 >> 13361 25 >> 1110 » >> » 735000 >> 202749 75 » 937749 75 191856 » » 7857 45 68 2000 » 4722 » >> 28964 20 >> 2898 76 » » 6000 >> 4810 » >> 11595 02 >> 1008 22 » >> 860000 » 595212 60 22000 2405628 40 808441 95 33478 81 51609 >> 180000 » 84270 » » 382022 85 157305 15 » » » T. XXII. 34 SOMMAIRE DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ PENDANT L'ANNÉE 1858. SĂ©ance du 15 Janvier 1858. PrĂ©sidence de M. FERRAND-LAMOTTE. Lecture du procĂšs-verbal. — Allocution de M. le PrĂ©sident. — DĂ©pouillement de la correspondance. — DĂ©cision sur les Assises scientifiques. — Dons au MusĂ©e. — Dons Ă  la BibliothĂšque. — Analyse, par M. le PrĂ©sident, des mĂ©moires envoyĂ©s, dans le mois, par les SociĂ©tĂ©s correspondantes. — M. Victor Paillot est nommĂ© membre rĂ©sidant. — M. BĂ©lurgey de Grandville est nommĂ© membre honoraire. — Notice sur les Ă©tudes Ă  Glairvaux, par M. d'Arbois de Jubainville, membre associĂ©. — Situation du drainage dans le dĂ©partement de l'Aube, par M. le comte de Launay, membre associĂ©. — M. de Feu de La Mothe, Ă  Montceaux, est prĂ©sentĂ© comme membre associĂ©. — Remerciements Ă  l'archiviste de la SociĂ©tĂ© pour le zĂšle avec lequel il a dirigĂ© la rĂ©daction de l'Annuaire de l'Aube. SĂ©ance du 19 FĂ©vrier 1858. PrĂ©sidence de M. FERRAND-LAMOTTE. Lecture du procĂšs-verbal. — DĂ©pouillement de la correspondance. — M. Victor Paillot est proclamĂ© membre rĂ©sidant. — — Travail historique sur les SociĂ©tĂ©s de province, par M. Moureau, de Saint-Quentin. — Envoi, par M. LĂ©on De Breuze, d'un, travail sur les amendements. — Demande de renseignements sur les orages de 1857. — Nomination de dĂ©lĂ©guĂ©s au CongrĂšs des SociĂ©tĂ©s savantes. — Nouvelle invention de M. Limoges. — Dons au MusĂ©e. — Dons Ă  la BibliothĂšque. — Analyse, par M. le PrĂ©sident, des mĂ©moires envoyĂ©s, dans le mois, par les SociĂ©tĂ©s correspon- 340 SOMMAIRE DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ dantes. — M. le comte de Launay est nommĂ© membre rĂ©sidant. — M. de Feu de La Mothe, Ă  Montceaux, est nommĂ© membre associĂ©. — M. ChĂ©ri Pauffin est nommĂ© membre correspondant. — Envoi de notes statistiques sur la population de Troyes, par M. le docteur Guichard. — Rapport sur les archives communales de l'arrondissement de Nogent-sur-Seine, par M. d'Arbois de Jubainville, membre associĂ©. — Notice nĂ©crologique sur M. Amant Rambourgt, par M. le docteur BĂ©dor, membre rĂ©sidant. SĂ©ance du 19 Mars 1858. PrĂ©sidence de M. FERRAND-LAMOTTE. Lecture du procĂšs-verbal. — DĂ©pouillement de la correspondance. — M. le comte de Launay est proclamĂ© membre rĂ©sidant. — M. BĂ©lurgey de Grandville est proclamĂ© membre honoraire. — MĂ©thode de culture du sieur Aroux. — Appareils d'enrayement et de signaux inventĂ©s par M. Roux. — Envoi de graines par M. Ch. Baltet. — Dons Ă  la BibliothĂšque. — Dons au MusĂ©e. — Analyse des mĂ©moires envoyĂ©s dans le mois par les SociĂ©tĂ©s correspondantes. — Caverne dĂ©couverte Ă  Montgueux. — Cours d'eau souterrain Ă  Bouilly. — Fontaine de Nago. — Commissions chargĂ©es d'examiner les manuscrits envoyĂ©s pour les prix. — Notice sur les archives des Hospices de Troyes, par M. d'Arbois de Jubainville. SĂ©ance du 16 Avril 1858. PrĂ©sidence de M. CAMUSAT DE VAUGOURDON. Lecture du procĂšs-verbal. — Mort de M. le docteur BĂ©dor, membre rĂ©sidant. — DĂ©pouillement de la correspondance. — M. de Feu de La Mothe est proclamĂ© membre associĂ©.— M. ChĂ©ri Pauffin est proclamĂ© membre correspondant. — Lettre de M. le Ministre de l'Instruction publique, au sujet du comitĂ© des SociĂ©tĂ©s savantes. — Invitation au CongrĂšs scientifique et au CongrĂšs archĂ©ologique. — Analyse des mĂ©moires envoyĂ©s dans le mois par les SociĂ©tĂ©s correspondantes. — Dons Ă  la BibliothĂšque. — Dons au MusĂ©e. — de Cossigny est prĂ©sentĂ© comme membre associĂ©. — Achat, par S. M. l'Empereur, des armes antiques trouvĂ©es Ă  PENDANT L'ANNÉE 1858. 511 Pouan, en 1842. — Demande de subside par M. Van Decasteele. — Rapport sur la caverne de Montgueux, par M. Legrand, membre rĂ©sidant. — Rapport sur le projet de code rural, par M. Berthelin, membre rĂ©sidant. — Rapport sur L'Artistaire de Paillot de Montabert, par M. Schitz, membre rĂ©sidant. — ProcĂ©dĂ©s de M. PrĂ©vost, pour prĂ©server les vignes de la gelĂ©e. — Nomination de dĂ©lĂ©guĂ©s au concours rĂ©gional de Chaumont. — Impressions votĂ©es. SĂ©ance du 21 Mai 1858. PrĂ©sidence de M. FERRAND-LAMOTTE. Lecture du procĂšs-verbal.—Mort de Masson, membre honoraire; Bazin, membre associĂ©; Camut-Chardon, membre correspondant. — DĂ©pouillement de la correspondance. — Communication sur le menhir de Saint-Aubin, par M. le docteur Chertier, membre associĂ©. — ProcĂ©dĂ© de M. FrĂ©dĂ©ric Lenfant, pour la conservation du blĂ©. — Analyse, par M. le PrĂ©sident, des mĂ©moires envoyĂ©s, dans le mois, par les SociĂ©tĂ©s correspondantes. — Dons Ă  la BibliothĂšque. — Dons au MusĂ©e. — M. Jules de Cossigny est nommĂ© membre associĂ©. — PrĂ©sentation de M. Fanjoux, comme membre associĂ©. — Rapport sur une note de M. Douliot, par M. Jules Ray, membre rĂ©sidant. — Note par M. le docteur PriĂ©, membre associĂ©, sur un nouveau mode de culture des treilles, inventĂ© par M. Royer. — Iconographie d'une verriĂšre de l'Ă©glise de Saint-Martin-Ăšs-Vignes, par M. Socard, membre rĂ©sidant. — Note sur la mĂ©thode de dĂ©placement, appliquĂ©e aux tisanes d'hĂŽpital, par M. Oudart. — Rapport sur quelques volumes des MĂ©moires de l'AcadĂ©mie de Lyon, par M. Corrard de Breban, membre rĂ©sidant. — Nomination de dĂ©lĂ©guĂ©s au Comice dĂ©partemental. SĂ©ance du 18 Juin 1858. PrĂ©sidence de M. FERRAND-LAMOTTE. Lecture du procĂšs-verbal. — Mort de M. Alexandre Guenin, membre associĂ©. — DĂ©pouillement de la correspondance. — Envoi d'oeufs de poisson fĂ©condĂ©s. — Testament de Mme de Baeulardd'Arnaud, qui donne au MusĂ©e trois tableaux. — Analyse, par M. le 512 SOMMAIRE DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ PrĂ©sident, des mĂ©moires envoyĂ©s, dans le mois, par les SociĂ©tĂ©s correspondantes. — Dons Ă  la BibliothĂšque. - Dons au MusĂ©e. — Note par M. FlĂ©chey, membre associĂ©, sur une voie romaine dĂ©couverte sous la rue de la CitĂ©. — M. le docteur Bacquias est nommĂ© membre rĂ©sidant. — M. Fanjoux est nommĂ© membre associĂ©. — PiĂšce inĂ©dite sur la chapelle de Notre-Dame-du-ChĂȘne, communiquĂ©e par M. d'Arbois de Jubainville. SĂ©ance du 16 Juillet 1858. PrĂ©sidence de M. FERRAND-LAMOTTE. Lecture du procĂšs-verbal. — DĂ©pouillement de la correspondance. — M. le docteur Bacquias est proclamĂ© membre rĂ©sidant. — Mort de M. Sellier, membre correspondant. — Analyse, par M. le PrĂ©sident, des mĂ©moires envoyĂ©s par les SociĂ©tĂ©s correspondantes. — Dons Ă  la BibliothĂšque. — Dons au MusĂ©e. — Rapport sur un travail de M. Oudart, par M. Jules Ray, membre rĂ©sidant. — Rapport sur le systĂšme Ă©lectro-vital du docteur Rebold, par M. le docteur Desguerrois, membre rĂ©sidant. — Communication au sujet de la galĂ©ruque de l'orme. — Table des longitudes des communes du dĂ©partement de l'Aube, par M. Febvre. — Vie de Jean de Brienne, par M. l'abbĂ© Etienne Georges, membre associĂ©. SĂ©ance du 20 AoĂ»t 1858. PrĂ©sidence de M. FERRAND-LAMOTTE. Lecture du procĂšs-verbal. — DĂ©pouillement de la correspondance. — M. Jules de Cossigny est proclamĂ© membre associĂ©. — Dons Ă  la BibliothĂšque. — Dons au MusĂ©e. — Communication relative Ă  la pisciculture. — M. Gustave Levrat est prĂ©sentĂ© comme membre correspondant. SĂ©ance du 15 Octobre 1858. PrĂ©sidence de M. FERRAND-LAMOTTE. Lecture du procĂšs-verbal. — Mort de M. Patris Debreuil, membre honoraire. — Prix accordĂ© par M. le Ministre de l'Agriculture, pour PENDANT L'ANNÉE 1858. 513 une amĂ©lioration dans la culture de la vigne. — Communication de M. le Ministre de l'Instruction publique, au sujet de la gĂ©ographie ancienne de la France. — Dons Ă  la BibliothĂšque. — Dons au MusĂ©e. — M. Gustave Levrat est nommĂ© membre correspondant. — Analyse, par M. le PrĂ©sident, des mĂ©moires envoyĂ©s par les SociĂ©tĂ©s correspondantes. — Rapport par MM. Le Grand et Jules Ray, membres rĂ©sidants, sur un Ă©norme grĂȘlon trouvĂ© dans un jardin du faubourg de Preize. — Note sur Girardon et sur le grand autel de Vendeuvre, par M. Boutiot, membre rĂ©sidant. — MĂ©moire sur les Mollusques marins des Ăźles Açores, par M. DrouĂ«t, membre rĂ©sidant. — Impressions votĂ©es. SĂ©ance du 19 Novembre 1858. PrĂ©sidence de M. FERRAND-LAMOTTE. Lecture du procĂšs-verbal. — DĂ©pouillement de la correspondance. — M. Gustave Levrat est proclamĂ© membre correspondant. — Dons Ă  la BibliothĂšque. — Dons au MusĂ©e. — tableau des membres associĂ©s, dressĂ© par M. l'archiviste. — Analyse, par M. le PrĂ©sident, des ouvrages envoyĂ©s par les SociĂ©tĂ©s correspondantes. — Rapport sur le recueil de l'AcadĂ©mie des Jeux Floraux, par M. le baron Doyen, membre rĂ©sidant. — Rapport sur un nouveau mode de conservation du blĂ©, par M. G. Huot, membre rĂ©sidant. — Communication sur un autel et une statue attribuĂ©s Ă  Girardon, par M. l'abbĂ© Coffinet, membre rĂ©sidant. SĂ©ance du 17 DĂ©cembre 1858. PrĂ©sidence de M. FERRAND-LAMOTTE. Lecture du procĂšs-verbal. — Mort de M. Baltet-Petit, membre rĂ©sidant. — DĂ©mission donnĂ©e, par M. Camusat deVaugourdon, des fonctions de vice-prĂ©sident. — Nomination d'une commission chargĂ©e d'examiner le frein Lamblin. —Dons Ă  la BibliothĂšque. — Dons au MusĂ©e. — Analyse, par M. le PrĂ©sident, des mĂ©moires des SociĂ©tĂ©s correspondantes. — Programme du prix de viticulture accordĂ© par le Ministre. — Rapport des commissions chargĂ©es de statuer sur les prix. — Prix accordĂ© Ă  M. Roussel. — Mentions honorables Ă  MM. Etienne Georges et Emile MonchaussĂ©. — 514 SOMMAIRE DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ, ETC. Communication de M. FlĂ©chey, membre associĂ©, sur divers objets antiques trouvĂ©s dans les fouilles du LycĂ©e. — Lecture d'une piĂšce de vers, intitulĂ©e Boutade, par M. le baron Doyen, membre rĂ©sidant. — Impressions ordonnĂ©es. SĂ©ance rĂ©glementaire du 22 DĂ©cembre 1858. PrĂ©sidence de M. FERRAND-LAMOTTE. Lecture du procĂšs-verbal. — Dons Ă  la BibliothĂšque.— M. l'abbĂ© Coffinet est nommĂ© PrĂ©sident, et M. le baron Doyen Vice-PrĂ©sident, pour l'annĂ©e 1859. — Nomination de cinq conservateurs du MusĂ©e. — Election de quatre membres de la Commission de publication.— Les quatre sections renouvellent leurs bureaux. — Apurement et approbation des comptes du trĂ©sorier pour l'annĂ©e 1858. — Fixation du budget de la SociĂ©tĂ© pour 1859.— La SociĂ©tĂ© arrĂȘte la liste des Ă©tablissements publics et des SociĂ©tĂ©s qui devront recevoir les mĂ©moires. — DĂ©cision relative aux auteurs Ă©trangers.— Allocution de M. Ferrand-Lamotte, prĂ©sident sortant. Pour extrait conforme Le SecrĂ©taire de la SociĂ©tĂ©, A. GAYOT. TABLE DES MATIERES CONTENUES DANS LES Nos 45, 46, 47 & 48, Formant la 37e annĂ©e des MĂ©moires de la SociĂ©tĂ©, et le Tome XXII de la collection. ANNÉE 1858. Pages. Rapport Ă  Sa MajestĂ© le Roi de Portugal sur un voyage d'exploration scientifique aux Ăźles Açores, exĂ©cutĂ© par MM. Arthur Morelet et Henri DrouĂ«t pendant le printemps et l'Ă©tĂ© de 1857, — par M. Henri DROUET, membre rĂ©sidant. . . . . ... . . . . 5 Note relative Ă  un Sceau dĂ©couvert Ă  Troyes en 1857, — par M. l'abbĂ© COFFINET, chanoine titulaire, membre rĂ©sidant. . 35 Le Maire et les Echevins de Troyes prisonniers Ă  l'hĂŽtelde-ville en 1675, — par M. ThĂ©ophile BOUTIOT, membre rĂ©sidant 59 Aperçu sur les rĂ©sultats du Drainage dans le dĂ©partement de l'Aube, prĂ©sentĂ© Ă  la SociĂ©tĂ© AcadĂ©mique, dans sa sĂ©ance du 15 janvier 1858, — par M. le comte DE LAUNAY, membre associĂ© . 75 T. XXII. 35 516 TABLE. Documents sur la ville de Troyes, extraits du gĂ©ographe arabe Edrisi, communiquĂ©s dans la sĂ©ance du 21 aoĂ»t 1857, — par M. CLÉMENT-MULLET, membre honoraire. . . . . . . . , . . ... . . 83 Rapport Ă  la SociĂ©tĂ© AcadĂ©mique de l'Aube, sur un Manuscrit de M. GĂ©rost, membre associĂ©, — par M. LE BRUN-DALBANNE, membre rĂ©sidant 89 Excursion Ă  la caverne de Montgueux, — par M. Gustave LE GRAND, membre rĂ©sidant ........ 95 Analyse de l'Eau de la caverne de Montgueux, — par M. Henri OUDART, pharmacien Ă  Troyes. . . . .99 Rapport sur le livre de Paillot de Montabert, intitulĂ© l'Artistaire, ou Livre des principales initiations aux beaux-arts, — par M. SCHITZ, membre rĂ©sidant . . 103 Note sur l'analyse du Lait falsifiĂ©, — par M. DOULIOT, professeur de chimie au LycĂ©e impĂ©rial de Troyes. . 131 Maudit Novembre. Boutade, — par M. le baron DOYEN, membre rĂ©sidant. . . 159 Mollusques marins des Ăźles Açores, — par M. Henri DROUET, membre rĂ©sidant. . . ... . . . 143 De la MĂ©thode dite de DĂ©placement, appliquĂ©e aux tisanes d'hĂŽpital, — par M. ODDART, pharmacien Ă  Troyes, membre du Jury mĂ©dical de l'Aube. . . . 189 Coup-d'oeil sur les Institutions civiles du comtĂ© de Champagne, sous Thibaut IV, dit le Chansonnier, — par M. l'abbĂ© ETIENNE GEORGES, membre associĂ© . . . 197 Rapport sur la question de l'Echelle mobile, fait au nom de la Section d'Agriculture, — par M. DOSSEUR, membre rĂ©sidant 225 Essai de Statistique sur le canton d'AĂźx-en-Othe, — par M. MonchaussĂ©, ancien instituteur Ă  Planty . . . 249 Programme des Prix mis au concours par la SociĂ©tĂ© . 491 Liste des dons faits au MusĂ©e de Troyes, avec les noms des donateurs, pendant l'annĂ©e 1858 497 TABLE. 517 Mercuriales du dĂ©partement de l'Aube, pendant l'annĂ©e 1857 501 QuantitĂ©s de grains vendues, et prix moyen par quinzaine 502 Comestibles divers, fourrages et combustibles. . . 504 Etat des rĂ©coltes en grains et autres farineux, faites en 1857, dans le dĂ©partement de l'Aube. . . . 506 Sommaire des sĂ©ances de la SociĂ©tĂ© pendant l'annĂ©e 1858, — par M. AmĂ©dĂ©e GAYOT, secrĂ©taire de la SociĂ©tĂ©. 509 Table des matiĂšres du tome vingt-deuxiĂšme de la collection ........ . 515 AVIS AU RELIEUR Pour le placement des Planches dans le 22e volume des MĂ©moires de la SociĂ©tĂ© AcadĂ©mique de l'Aube. Pages. Caverne de Montgueux, — par M. Le Grand .... 95 Mollusques marins des Açores, planches 1re et 2e, — par M. Baudon 188 Pierre tumulaire de Galas de Chaumont dans l'Ă©glise de Rigny-le-Ferron, — par M. Delaune 446 TROYES. — BOUQOT, IMPr DE LA SOCIETE. Dansl'Ă©pisode 4603 de Plus belle la vie du jeudi 25 aoĂ»t 2022, n'en pouvant plus de l'enquĂȘte qui piĂ©tine, Éric dĂ©cide de rĂ©gler
DĂ©couvrez le rĂ©sumĂ© dĂ©taillĂ© de Plus belle la vie en avance Ă©pisode 4484 du jeudi 24 fĂ©vrier 2022 diffusĂ© sur France 3. Le clan Fedala a rĂ©ussi Ă  sauver OphĂ©lie, la plainte de l’examinateur est retirĂ©e. LĂ©a et Jean Paul ne comprennent pas la prĂ©sence de Manon. Lisez le recap complet PBLV saison 18 Ă©pisode 4484 du 24/02/2022 en avant-premiĂšre avec toutes les photos du feuilleton Plus belle la vie. Manon et Babeth risquent gros, Patrick va-t-il arriver Ă  temps ? Retrouvez le rĂ©sumĂ© intĂ©gral de Plus belle la vie du jeudi 24 fĂ©vrier 2022 Ă©pisode 4484 en avance, 3 jours avant la diffusion France 3 le recap de l’épisode prĂ©cĂ©dent PBLV 23/02/2022 est en ligne. Boher et LĂ©a dĂ©barquent chez les Nebout et se retrouvent face Ă  Manon qui tient RaphaĂ«l dans les bras. Jean-Paul demande Ă  Manon de poser le bĂ©bĂ©&ff7dcf;Babeth et Patrick dĂ©barquent et lui dise que tout va bien. Manon est lĂ  avec leur accord. Patrick et Babeth hĂ©bergent une criminelle pour LĂ©a&ff7dcf; elle pense qu’ils sont devenus fous. Bilal et Karim demandent Ă  Akira de lui vendre son laser. Akira accepte en Ă©change de la casquette de Bilal ainsi que la montre de Karim. Bilal dit Ă  Karim plus tard qu’Akira c’est la reine de l’arnaque ! Akira est dure en affaire Abdel passe son permis avec le fameux examinateur &ff7dcf;il prĂ©fĂšre qu’OphĂ©lie ne vienne pas. Abdel explique que Bilal et Karim ont eu un est inquiĂšte pour ses parents, Boher va tenter de savoir ce qui se passe / PBLV en avance Ă©pisode 4484 du jeudi 24/02/2022 Manon accepte de signer pour renoncer Ă  son abandon sous X. Manon a peur que les Nebout se dĂ©barrasse d’elle une fois qu’ils auront RĂ©my. Manon a peur de ne pas y arriver avec son fils, elle n’a pas l’instinct maternel&ff7dcf;Babeth lui dit qu’elle va l’ renonce Ă  l’abandon de Remy LĂ©a et Boher sont en boucle&ff7dcf; ils pensent que Patrick qu cache quelque chose. Boher ne veut pas que LĂ©a s’approche de ses parents tant qu’il ne sait pas les raisons de la prĂ©sence de se joint Ă  la famille pour aider OphĂ©lie Sur la route du permis d’Abdel, Bilal et Nisma ont une mission pour perturber l’examinateur. Abdel fait exprĂšs de confondre sa droite et sa gauche. L’examinateur prend le volant alors que Karim met en place une dĂ©viation. L’homme est furax, Abdel est Ă  cĂŽtĂ©. Plus belle la vie en avance Ă©pisode 4484 du 24 fĂ©vrier 2022 OphĂ©lie et son auto-Ă©cole sont sauvĂ©es Bilal pointe le laser sur le visage de l’examinateur, il perd le contrĂŽle&ff7dcf;et Nisma fait genre qu’elle Ă©tait sur un vĂ©lo, et qu’il l’a renversĂ©. L’examinateur essaie d’acheter Nisma dont son pĂšre est juge. Bilal dit qu’il a enregistrĂ© la vidĂ©o&ff7dcf;il est prĂȘt Ă  tout pour les Fedala OphĂ©lie peut garder son auto-Ă©cole L’examinateur dit Ă  Abdel qu’il lui donne le permis. Abdel rappelle que tout a Ă©tĂ© filmĂ© avec la camĂ©ra embarquĂ©e sur la voiture de l’auto-Ă©cole. Abdel dit qu’il va essayer de trouver un terrain d’entente avec OphĂ©lie. Au final, l’examinateur a acceptĂ© de retirer sa plainte contre OphĂ©lie. Elle se demande pourquoi il a changĂ© d’avis ! Rayane se fait passer pour un livreur et dĂ©barque chez les Nebout alors que Babeth et Manon sont seules avec RaphaĂ«l. Elles se mettent dans la chambre fermĂ©e Ă  clĂ© et Babeth appelle Patrick A suivre le rĂ©sumĂ© complet de Plus belle la vie en avance du vendredi 25 fĂ©vrier 2022 avec l’épisode 4485. Commentez les Ă©pisodes sur le forum de Plus belle la vie et retrouvez la liste des acteurs au casting de la sĂ©rie. A noter que l’arrĂȘt de Plus belle la vie est une possibilitĂ© pour la fin de la saison en 2022 en raison des audiences en berne.

Laraison est simple, comme nous l’avions dĂ©jĂ  dit, Ă©conomie et droit sont indissociablement liĂ©s. D’aucuns considĂšrent que le droit est un facteur d’attractivitĂ© de l’économie nationale. En consĂ©quence, si le bilan juridique demeure favorable, les investisseurs ne tourneraient plus le dos Ă  cette zone OHADA.

ï»żavec Laurent KĂ©rusorĂ©, Michel Cordes, Sylvie Flepp, Anne DĂ©cisLe risque s'accroit autour de Patrick et Babeth. Pour sauver l'auto-Ă©cole d'OphĂ©lie, Karim, Bilal et Abdel sont prĂȘts Ă  tout, mĂȘme monter une arnaque.
Extraitde l'Ă©pisode 4484 du 24/02. Retrouvez d'autres Ă©pisodes en exclu sur . j'en profite ! À voir ensuite . Plus belle la vie S18 E4597 - Épisode du mercredi 10 aoĂ»t 2022 diffusĂ© le 10/08 26 min ; Plus belle la vie S18 E4596 - Épisode du mardi 9 aoĂ»t 2022 diffusĂ© le 09/08 26 min ; Plus belle la vie S18 E4595 - Épisode du lundi 8 aoĂ»t 2022 diffusĂ© le
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EtcheCbet €75 vertbois123 €76 maxdu80 €77 Cercle-Cadet €78 XSTRIKE53X €79 bigbounce87 €80 chouffologue €81 BBQ123 €82 c0bra273 €83 Mr Degen €84 upTObrako €85 OccItalian €86 imperceptible €87 ROMANO64240 €88 PatAcraipe €89 O50051 €90 Romano3344 €91 BLACK MAMBA 78 €92 Bet_Gagnant €93 MefieToiiiiiiii €94 WILLIBILL13 €95 TomDur38 €96 DIM08200 €97 ValueFloatAA €98 Pablo197099 €99 LSD_25 €100 ihateAK €101 KAgoulAKboul €102 ricomico69 €103 OmarSyck €104 Garancedu06 €105 LAPINCEDUMAS €106 Tulio de Melo €107 TomJoad77 €108 IotaAlphaMu €109 abrahamlimpcall €110 Ame Dj €111 Ecornifleur €112 pomsky90 €113 Lyl8g88 €114 Dydytoff €115 LiLFaFLaRage €116 GaLoViRuS12 €117 federer93400 €118 MBAPPE5000 €119 kekouse €120 francisco83 €121 Dede0277 €122 LeBronJames19 €123 CongreSauvage €124 Jean–Paul €125 Kim74 €126 Tsarabanjina €127 RaisepourInfo €128 Magicyax99 €129 LokitoCST €130 papoushka €131 Mousdingue38 €132 fishdluxe €133 Jakow €134 LaChoukrane €135 bibibos75s €136 Cedricbruxelles €137 DaKillaGirl €138 Diipsroat €139 Steph49bab- €140 Xador €141 Ewanla7777 €142 TrueTellerPMU €143 La Douaane €144 MisterMoon €145 salegoss13 €146 NawaKintheDark €147 talian00001 €148 TwoGz1F €149 Lenchanteur. €150 Whyalwaysme33 €151 KKdamour €152 Owari da € A noter qu'actuellement c'est le Team Pro Erwann Pecheux qui est en tĂȘte du leaderboard juste devant Louis Linard avec Ă  peine 6,10 points d'avance ! Top 20 du Leaderboard 1 PECHEUX ERWANN 164,952 LINARD LOUIS 158,853 MOREAU CLEMENT 122,954 RIBOUCHON FLORIAN 112,155 BONNANT CLEMENT JACKY 108,516 OBIGAND DIDIER PAUL 107,287 MAMOUNI SMAIN 96,368 ARDIC SENOL 93,579 TOSQUES FRANCOIS ALEXANDRE 92,3210 PAPINEAU MATHIEU 89,2311 LAGER WILLIAM 88,4012 MILLARD ROMAIN 86,9213 MARTEL VINCENT 83,6814 MEURILLON CEDRIC 82,2215 PATOUILLIART PAUL 82,0416 CONVERT ALAIN 81,4917 CONAN ARTHUR 78,1018 SEBAN YOAN 77,2319 GUYON DE MONTLIVAULT LAURENT PIERRE PA 76,9620 GUIMOND FLORIAN 76,60 PrĂ©senteau cĂŽtĂ© de Jean-Luc MĂ©lenchon, lors de son meeting Ă  Marseille, ce dimanche 27 mars, la comĂ©dienne Sophie de La Rochefoucauld a lancĂ© un appel Ă  sauver la sĂ©rie Plus Belle la Vie avec Laurent KĂ©rusorĂ©, Michel Cordes, Sylvie Flepp, Anne DĂ©cisTandis qu'un lien indĂ©fectible uni Patrick et Babeth Ă  Manon, Karim, Bilal et Abdel dĂ©cident de jouer le tout pour le tout pour venir en aide Ă  OphĂ©lie. 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Cette course est rĂ©servĂ©e aux pur-sang anglais de 3 ans et plus et se dĂ©roule sur la distance rare de 2 500 mĂštres, qui nĂ©cessite de maĂźtriser vitesse et tenue. Il n’est pas rare que son vainqueur se fixe comme objectif d’ĂȘtre au dĂ©part du Qatar Prix de l’Arc de Triomphe, la coupe du monde des pur-sang, qui aura lieu le dimanche 2 octobre Ă  l’hippodrome de Paris Longchamp. Le dimanche 30 aoĂ»t 2020, Glycon offre un premier Grand Prix de Deauville Ă  Jean-Claude Rouget. Allocation 200 000 € LE MEETING DE DEAUVILLE BARRIÈRE Du mardi 2 au dimanche 28 aoĂ»t 2022, les plus grandes courses de Plat d’Europe se disputent au cƓur de la station balnĂ©aire. Que l’on soit passionnĂ© de courses ou novice, c’est l’assurance d’assister Ă  de trĂšs belles Ă©preuves, intenses, opposant les meilleurs pur-sang d’Europe,[...]Le TrĂ©port76470, Seine-Maritime, Normandie5025 .habLe Quesnoy59530, Nord, Hauts-de-France5003 .habCharbonniĂšres-les-Bains69260, RhĂŽne, Auvergne-RhĂŽne-Alpes4988 .habSĂ©ance de cinĂ©ma "Les Vieux fourneaux 2 bons pour l’asile" CinĂ©maCarcans 33121Du 24/08/2022 au 28/08/2022Pour venir en aide Ă  des migrants qu’il cachait Ă  Paris, Pierrot les conduit dans le Sud- Ouest chez Antoine qui lui-mĂȘme accueille dĂ©jĂ  Mimile, en pleine reconquĂȘte amoureuse de Berthe. S’attendant Ă  trouver Ă  la campagne calme et voluptĂ©, les six rĂ©fugiĂ©s gouteront surtout Ă  la lĂ©gendaire hospitalitĂ© d’un village français. L’occasion rĂȘvĂ©e de secouer les peurs et les prĂ©jugĂ©s pour Sophie et nos trois Vieux Fourneaux, promus consultants inattendus d'une campagne Ă©lectorale que Larquebuse, le maire de Montcoeur n’est pas prĂȘt d’ Bouches-du-RhĂŽne, Provence-Alpes-CĂŽte d'Azur4977 .habVic-le-Comte63270, Puy-de-DĂŽme, Auvergne-RhĂŽne-Alpes4980 .habPrades-le-Lez34730, HĂ©rault, Occitanie4954 .habBalade nature en forĂȘt Landaise Nature - EnvironnementBias 40170Le 30/08/2022C’est au fil des migrations et des interventions de l’Homme qu’a Ă©tĂ© modelĂ© le paysage landais que nous cĂŽtoyons. Pour le comprendre, il faut le pĂ©nĂ©trer. Cette sortie "Nature" est une invitation Ă  la dĂ©couverte de la forĂȘt landaise et de son utilisation par l'Homme. Animation encadrĂ©e par l'animatrice nature de l'Office de Tourisme de Mimizan. Heure et lieu de RDV Ă  9h30 sur le parking de la mairie de Bias Gratuit DurĂ©e 2h30 Transport prĂ©voir vĂ©hicule personnel Minimum 4 pers Maximum 25 pers PrĂ©voir des chaussures fermĂ©es, de l'eau et une lotion anti-moustique. Les poussettes sont interdites durant la visite. Les chiens sont autorisĂ©s mais tenus en laisse. L'OIT se rĂ©serve le droit d'annuler si les consignes ne sont pas respectĂ©es. RĂ©servation sur Visites rĂ©servĂ©es aux individuels couples et famillesWitry-lĂšs-Reims51420, Marne, Grand Est4926 .habBress'Addict 2022 Musique, ConcertLouhans 71500Du 04/07/2021 au 29/08/2022 Bress’Addict ! », qu’est que c’est ? C’est le programme d’animations estivales Ă©laborĂ© par l’Office de Tourisme du Pays de la Bresse bourguignonne. Si vous ne connaissez pas encore nos pĂ©pites », c’est l’occasion de venir les dĂ©couvrir. Durant tout l’étĂ©, l’Office de Tourisme vous propose des visites insolites et gourmandes, des concerts avec une programmation musicale variĂ©e, des visites guidĂ©es. C’est plus d’une cinquantaine de rendez-vous qui sont prĂ©vus tout au long de l’étĂ©. Bref, de nombreuses surprises vous attendent et chacun pourra piocher des idĂ©es en fonction de ses envies. Les Mardis Gourmands » vous emmĂšnent Ă  la rencontre des producteurs locaux, les Jeudis Insolites » vous dĂ©voilent les sites d’une maniĂšre originale et Garçon, la Note ! » vous propose le concept 1 soir, 1 concert, 1 terrasse », les mercredis et vendredis soirs de juillet et aoĂ»t dans les bars et restaurants de la Bresse bourguignonne. Alors nous espĂ©rons que les locaux comme les touristes puissent trouver des petits moments de bonheur inoubliables durant l’ Achards85150, VendĂ©e, Pays de la Loire4849 .habCazouls-lĂšs-BĂ©ziers34370, HĂ©rault, Occitanie4846 .habLe Pellerin44640, Loire-Atlantique, Pays de la Loire4841 .habMouilleron-le-Captif85000, VendĂ©e, Pays de la Loire4846 .habSaint-Saturnin-lĂšs-Avignon84450, Vaucluse, Provence-Alpes-CĂŽte d'Azur4830 .habSoirĂ©e folklore et tartines obernoises Danse - Bal - Cabaret, Musique, FĂȘteObernai 67210Le 31/08/2022Les fameuses soirĂ©es 'Folklore et tartines obernoises' repartent cet Ă©tĂ© ! Plongez dans le folklore alsacien musique et dĂ©monstration de danses avec un le groupe folklorique Holatrio Hop'sasa. Petite restauration avec "les tartines obernoises" et les cĂ©pages alsaciens proposĂ©s par la Corporation des Vignerons obernois. Le mercredi 3 aoĂ»t, soirĂ©e spĂ©ciale SANS GLUTEN, le mercredi 10 aoĂ»t, soirĂ©e spĂ©ciale 'FĂȘte des vins'.Festival Kaléïdoscopique Ă  LancĂ© Artisanat, MusiqueLancĂ© 41310Du 02/09/2022 au 04/09/2022Festival Kaléïdoscopique Ă  LancĂ©. En journĂ©e, les ateliers, les confĂ©rences et le marchĂ© d'artisan animeront les lieux, le tout captĂ© par des supports mĂ©diatiques radio, gazette et tournage vidĂ©o, qui iront Ă  la rencontre des festivaliers. En journĂ©e, les ateliers, les confĂ©rences et le marchĂ© d'artisan animeront les lieux, le tout captĂ© par des supports mĂ©diatiques radio, gazette et tournage vidĂ©o, qui iront Ă  la rencontre des festivaliers. En fin de journĂ©e du vendredi et du samedi, les concerts vous permettrons de vous retrouver sur un espace verdoyant. Vous pourrez vous sustenter et vous dĂ©saltĂ©rer en Ă©coutant des univers musicaux oĂč se cĂŽtoieront le reggae, le rock, le rap avec des couleurs jazz, world et Seine-et-Marne, Île-de-France4813 .habLes rendez-vous des enfants, au ChĂąteau de Morlanne Patrimoine - CultureMorlanne 64370Le 31/08/2022Les mercredis des enfants au chĂąteau de Morlanne ! Pour les GĂ©ants de 7 Ă  11 ans Visite avec le Livret Moyen-Âge. AccompagnĂ© d'un mĂ©diateur et du livret de dĂ©couverte, deviens incollable sur le Moyen-Âge et le ChĂąteau de Morlanne !Cormelles-le-Royal14123, Calvados, Normandie4797 .habLe Coudray-Montceaux91830, Essonne, Île-de-France4792 .habLes Monts d'Aunay14260, Calvados, Normandie4782 .habVisites sur le patrimoine industriel de MontbardMontbard 21500Le 30/08/2022Montbard est fortement marquĂ©e par le comte de Buffon. Connu pour son Ɠuvre naturaliste, il a Ă©galement expĂ©rimentĂ© le travail du mĂ©tal. La ville en a hĂ©ritĂ© son activitĂ© mĂ©tallurgique. Ce patrimoine a permis de dessiner son paysage. Profitez de cette visite pour dĂ©couvrir ou redĂ©couvrir les passĂ©s et prĂ©sents industriels de la citĂ©. Mercredi 29 juin Ă  14h et mardi 30 aoĂ»t Ă  10h. Rendez-vous devant les grilles du musĂ©e - entrĂ©e basse du Parc. Plus d'infos sur la programmation Explorez les paysages de l'Auxois Morvan » DurĂ©e 1h30 / GratuitVillers-le-Lac25130, Doubs, Bourgogne-Franche-ComtĂ©ï„4750 .habLe Versoud38420, IsĂšre, Auvergne-RhĂŽne-Alpes4724 .habLe BarcarĂšs66420, PyrĂ©nĂ©es-Orientales, Occitanie4717 .habCrĂ©gy-lĂšs-Meaux77124, Seine-et-Marne, Île-de-France4715 .habNaturalistes en herbe ! - pour les Bambins - AoĂ»t Nature - Environnement, Nature - Environnement, Nature - Environnement, Visites et circuitsArĂšs 33740Le 31/08/2022Visite destinĂ©e aux familles conçues pour les enfants de 5 Ă  12 ans. A l’aide d’un livret de jeux et d’énigmes, les enfants accompagnĂ©s d’un guide naturaliste dĂ©couvriront les habitants de la rĂ©serve naturelle. Tout en s’amusant, ils apprendront Ă  mieux connaĂźtre les mystĂšres du Bassin d’Arcachon. Rendez-vous Ă  l’entrĂ©e de la rĂ©serve port ostrĂ©icole. RĂ©servation obligatoire Ă  l’Office de Tourisme. 5 €/enfant. Gratuit pour le premier adulte et 2€ pour les adultes supplĂ©mentaires. Les horaires de balades sont fixĂ©s en fonction des marĂ©es. Consultez le programme complet dans la rubrique "PrĂ©parez votre sĂ©jour - Brochures".Initiation Ă  l'orpaillage Sports et loisirs, Nature - Environnement, Nature - EnvironnementJumilhac-le-Grand 24630Du 27/06/2022 au 30/08/2022AprĂšs vous avoir fourni pelle, tamis et bĂątĂ©, Philippe vous initiera aux techniques pour manipuler les sables. Une fois nettoyĂ©, le sable laissera place aux paillettes tombĂ©es au fond de votre bĂątĂ© et oui l’Or est plus lourd que le sable. Et le nec-plus-ultra c’est que votre accompagnateur vous fournira un petit tube pour enfermer votre trĂ©sor et le garder prĂ©cieusement. Quel que soit votre Ăąge, l’espoir de trouver un trĂ©sor et les Ă©toiles dans les yeux seront au rendez-vous. Qui n’a pas rĂȘvĂ© un jour de devenir chercheur d’or ? Alors pourquoi pas vous ! c’est parti
.Le Lion-d'Angers49220, Maine-et-Loire, Pays de la Loire4665 .habSaint-Genis-les-OlliĂšres69290, RhĂŽne, Auvergne-RhĂŽne-Alpes4669 .habTout le monde conte Lecture - Conte - PoĂ©sieSaint-AndrĂ©-de-Cubzac 33240Le 28/08/2022La Cie des Bombyx organise une journĂ©e portes ouvertes tout le monde conte. - 10h30 vive les Ă©motions contes et comptines avec voix et crayons 0 Ă  5 ans. - 11h les arts et les couleurs lectures et contes jeune public et famille. Ateliers d'arts plastiques. - 14h balade et lecture en musique. - 16h30 concert 8€ avec buvette avec LoĂŻc Poinsenet, Christophe Pilard et Mostafa El Pas-de-Calais, Hauts-de-France4659 .habLes enfants au ChĂąteau Raoul Patrimoine - Culture, Pour enfantsChĂąteauroux 36000Du 06/07/2022 au 31/08/2022Mince alors ! Le chĂąteau Raoul est tellement ancien que Denise et Raoul ne savent plus Ă  qui il appartient
 et les voilĂ  emportĂ©s dans un voyage Ă  couper le souffle Ă  travers le temps ! Lors de cette visite ludique, les enfants devront observer, noter, et rĂ©unir tous les indices pour rĂ©soudre l'Ă©nigme...et rendre le chĂąteau Ă  son vĂ©ritable propriĂ©taire ! Afin de favoriser au maximum les enfants, un seul accompagnant par enfant est GUIDEE DE SAINT-GUILHEM-LE-DESERT Histoire - Civilisation, Patrimoine - Culture, Vie locale, Visite guidĂ©eSaint-Guilhem-le-DĂ©sert 34150Du 27/06/2022 au 31/08/2022Étape incontournable sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle, Saint-Guilhem-le-DĂ©sert est nichĂ© dans le val de Gellone, un somptueux Ă©crin de verdure et de rocaille. En compagnie de notre guide passionnĂ©e, vous arpentez les ruelles du village et dĂ©couvrez les richesses mĂ©diĂ©vales du village l’église et le cloĂźtre de l’abbaye de Gellone, joyau de l’art roman languedocien, les remarquables façades romanes du village, la beautĂ© de la cascade du Verdus
 La visite se poursuit en flĂąnant dans les ruelles typiques chargĂ©es d’émotions ! Rendez-vous Ă  l'office de tourisme de Saint-Guilhem-le-DĂ©sert. Se prĂ©senter Ă  l'accueil 10 minutes avant l'horaire de Rove13740, Bouches-du-RhĂŽne, Provence-Alpes-CĂŽte d'Azur4607 .habSĂ©ance de Yoga paddle Nature - Environnement, Sports et loisirs, Manifestation culturelleBiscarrosse 40600Le 28/08/2022SĂ©ances de yoga en cours collectifs Cours tous niveaux - que vous ayez ou pas dĂ©jĂ  pratiquĂ© le yoga DurĂ©e de la sĂ©ance 1h15 Comment se dĂ©roule une sĂ©ance ? LĂącher le mental le temps d'une sĂ©ance et ressentir 1 Temps de reconnexion Ă  soi on quitte les prĂ©occupations du quotidien pour ĂȘtre pleinement dans le moment prĂ©sent. 2 Je vous guide pour quelques exercices respiratoires qui vont vous permettre d’ĂȘtre Ă  l’écoute de votre souffle notre meilleur alliĂ© pour effectuer les postures de maniĂšre fluide. 3 Une fois connectĂ© Ă  la respiration, la pratique des postures effectuĂ©e dans un ordre prĂ©cis permettra de libĂ©rer les tensions, se renforcer et d’apporter dĂ©tente et apaisement. 4 La sĂ©ance se termine par un moment de relaxation qui permet au corps d’assimiler le travail foulĂ©es du patrimoine de Dachstein Manifestation culturelleDachstein 67120Le 28/08/2022Les FoulĂ©es du Patrimoine de Dachstein, qu'est-ce-que c'est ? Un Ă©vĂ©nement sportif et culturel, Ă  la dĂ©couverte du patrimoine historique de Dachstein ! Cette seconde Ă©dition sera placĂ©e sous le signe du dĂ©passement, du bien-ĂȘtre et de la convivialitĂ©, avec des courses pour tous les goĂ»ts et tous les Ăąges. CĂ©lĂ©brer le patrimoine alsacien. Une course pour toutes et tous ! DĂ©tails des courses nocturne FĂȘte, MarchĂ©ï„‹Capbreton 40130Le 29/08/2022DĂ©couvrez les boutiques du centre-ville et les stands Ă©phĂ©mĂšres Ă  l'occasion d'une balade nocturne. DĂšs 19h, en centre-ville. Les stands s'Ă©tendront rue du GĂ©nĂ©ral-de-Gaulle, rue Saint-Nicolas, rue Madeleine Castaing et sur le square nocturne MarchĂ©, BaladesCapbreton 40130Le 29/08/2022DĂ©couvrez les boutiques du centre-ville et les stands Ă©phĂ©mĂšres Ă  l'occasion d'une balade nocturne. DĂšs 19h, en centre-ville. Les stands s'Ă©tendront rue du GĂ©nĂ©ral-de-Gaulle, rue Saint-Nicolas, rue Madeleine Castaing et sur le square collectifs sur la plage de Deauville Nature - EnvironnementDeauville 14800Du 05/07/2022 au 30/08/2022Chaque jour, dĂšs 4 heures du matin, la plage de Deauville est nettoyĂ©e en profondeur par 5 agents du service voirie de Deauville Ă©quipĂ©s d’engins motorisĂ©s. S’ajoutent en saison quatre agents du front de mer mobilisĂ©s de 12h Ă  21h30 pour s’occuper du nettoyage sur les planches et vider les 56 poubelles mises Ă  la disposition du public. Chaque parasolier est aussi chargĂ© de maintenir son "secteur de travail" propre. Les 55 saisonniers Ă  l’Ɠuvre sur le front de mer pour accueillir les vacanciers ont Ă©tĂ© fortement sensibilisĂ©s Ă  la prĂ©servation de la plage et sa propretĂ©. L’une d’entre eux est pour la saison 2022 chargĂ©e de la sensibilisation Ă  la prĂ©servation de la plage. Titulaire d’un Master 2 d’économie du dĂ©veloppement durable, elle est chargĂ©e de l’organisation des ramassages collectifs, chaque mardi Ă  18h et le reste du temps d’expliquer les enjeux aux usagers de la plage. Les ramassages collectifs sont prisĂ©s chaque annĂ©e par de nombreuses personnes. Le dĂ©part se fait de la Place Claude Lelouch. Les messages ne manquent pas sur le front de mer de Deauville pour appeler au respect de l’environnement. Charte de la plage, phrases au sol et messages radio s’ajoutent[...]Saint-MĂ©en-le-Grand35290, Ille-et-Vilaine, Bretagne4576 .habUn Ă©tĂ© au Phare de Verzenay - concerts pique-nique Musique, Jazz - BluesVerzenay 51360Du 26/05/2022 au 28/08/2022Pour la seconde annĂ©e consĂ©cutive, le phare de Verzenay propose durant quelques week-ends de mai et chaque week-end de juillet et aoĂ»t un programme de concerts gratuits dans son jardin panoramique. Artistes locaux et nationaux investissent ce lieu emblĂ©matique de la Montagne de Reims pour le plus grand plaisir des petits et des grands. Avec le programme d’Un Ă©tĂ© au Phare, le phare de Verzenay renoue avec l’ambiance festive de ses dĂ©buts. Dans les annĂ©es 20, RĂ©mois et Sparnaciens venaient en famille ou entre amis pour un moment de dĂ©tente, au théùtre et au terrain de jeux attenants. Tous les concerts ont lieu de 12 h 30 Ă  14 h. Les visiteurs sont invitĂ©s Ă  apporter leur pique-nique et pourront dĂ©couvrir l’offre de producteurs dans les locaux du Phare. Les places Ă©tant limitĂ©es, il est fortement conseillĂ© de "LES HEURES PROFONDES" À L'ABBAYE DE SAINT-FLORENT-LE-VIEIL Exposition, Dessin - CollageMauges-sur-Loire 49620Du 26/08/2022 au 28/08/2022"Les heures profondes" est une exposition collective de quatre artistes, SalomĂ© Fauc, Amandine Portelli, FrĂ©dĂ©ric CochĂ© et Baptiste Filippi. tous reliĂ©s par le travail du dessin et de l'estampe. L'artiste SalomĂ© Fauc est en rĂ©sidence de crĂ©ation Ă  l'abbaye de Saint-Florent-le-Vieil, du 30 mai au 17 juin 2022. ImmergĂ©e dans le lieu, elle compose sur-mesure des installations de dessins suspendus, monumentaux ou labyrinthiques, ornĂ©s de son motif de prĂ©dilection aux infinies variations le international d'orgue - Les Mardis de l'Orgue Merklin Manifestation culturelleObernai 67210Du 05/07/2022 au 30/08/2022L'association 'Les amis de l'orgue Merklin' vous propose ses traditionnels "Mardis de l'orgue Merklin". Les concerts auront lieu un mardi sur deux, tous les 15 jours le 5 et 19 juillet, 2, 16 et 30 aĂ©rien d'aĂ©romodĂ©lisme Manifestation culturelleSurin 86250Le 28/08/2022Le Sud Vienne AĂ©ro ModĂ©lisme organise son meeting annuel. PossibilitĂ© d'un repas champĂȘtre sur le terrain. RĂ©servation par tĂ©lĂ©phone au 05 49 87 40 38 ou 06 85 97 25 54 merci de laisser un message avec vos coordonnĂ©es ou par mail Ă  avant le 21 aoĂ»t. Les pilotes souhaitant s’inscrire doivent nous contacter prĂ©alablement pour l’établissement des documents Ă  nous retourner pour le 15 Pouliguen44510, Loire-Atlantique, Pays de la Loire4484 .habBlĂ©nod-lĂšs-Pont-Ă -Mousson54700, Meurthe-et-Moselle, Grand Est4491 .habLe Bourget-du-Lac73370, Savoie, Auvergne-RhĂŽne-Alpes4486 .habRessources supplĂ©mentairesArtisanatBaladesCinĂ©maCompetition sportiveConcertDanse - Bal - CabaretDessin - CollageExpositionFĂȘteHistoire - CivilisationJazz - BluesLecture - Conte - PoĂ©sieManifestation culturelleMarchĂ©ï„—MusiqueNature - EnvironnementPatrimoine - CulturePour enfantsSports et loisirsSports Ă©questresVie localeVisite guidĂ©eVisites et circuitsBas-RhinCalvadosCĂŽte-dÂŽOrDordogneGirondeHĂ©raultIndreLandesLoir-et-CherMaine-et-LoireMarnePyrĂ©nĂ©es-AtlantiquesSaĂŽne-et-LoireVienneAuchy-les-MinesBlĂ©nod-lĂšs-Pont-Ă -MoussonCazouls-lĂšs-BĂ©ziersCharbonniĂšres-les-BainsCormelles-le-RoyalCrĂ©gy-lĂšs-MeauxCuges-les-PinsLe BarcarĂšsLe Bourget-du-LacLe Coudray-MontceauxLe Lion-d'AngersLe PellerinLe PouliguenLe QuesnoyLe RoveLe TrĂ©portLe VersoudLes AchardsLes Monts d'AunayMouilleron-le-CaptifPrades-le-LezSaint-Genis-les-OlliĂšresSaint-MĂ©en-le-GrandSaint-Saturnin-lĂšs-AvignonVeneux-les-SablonsVic-le-ComteVillers-le-LacWitry-lĂšs-Reims Goering le numĂ©ro deux - (S1E4) - Les complices d'Hitler : BardĂ© des dĂ©corations conquises aux commandes de son avion durant la guerre de Plus belle la vie » du 24 fĂ©vrier 2022 rĂ©sumĂ© en avance Ă©pisode PBLV n°4484. Comment ne pas perdre le fil de l’intrigue en cours dans PBLV ? Restez-nous fidĂšles tout simplement. DĂ©couvrez dĂšs maintenant le rĂ©sumĂ© de l’épisode qui sera diffusĂ© ce jeudi 24 fĂ©vrier 2022. France 3/FTV Plus belle la vie » du 24 fĂ©vrier 2022 rĂ©sumĂ© en avance PBLV LĂ©a et Boher dĂ©barquent chez les Nebout et dĂ©couvrent avec stupeur que Manon tient Raphael dans les bras. Boher lui demande ce qu’elle fait lĂ  et lui ordonne de lĂącher le bĂ©bĂ©. Patrick et Babeth arrivent Ă  ce moment-lĂ  et leur explique qu’ils ont choisi de pardonner son erreur Ă  Manon. LĂ©a s’inquiĂšte et est dans l’incomprĂ©hension totale. Boher lui demande se tenir Ă  l’écart de ses parents car Manon appartient Ă  un gang et il doit tirer tout ça au clair. Patrick et Babeth expliquent Ă  Manon la procĂ©dure de l’abandon sous X. Manon peut dĂ©sormais faire confiance aux Nebout et signe le papier pour rĂ©cupĂ©rer RĂ©mi
 Nisma va faire partie du plan pour aider OphĂ©lie. Bilal et Karim parviennent Ă  rĂ©cupĂ©rer le laser d’Akira en Ă©change de quelques biens personnels. Le plan se met en place Abdel doit passer le permis avec l’inspecteur Martin aujourd’hui et se dĂ©brouille pour que OphĂ©lie ne soit pas dans la voiture. Abdel fait exprĂšs d’ĂȘtre un mauvais Ă©lĂšve afin que l’inspecteur reprenne le volant. Karim se fait passer pour un employĂ© de la DDT et fait prendre Ă  Martin un sens interdit. Bilal n’est pas loin et vise les yeux de Martin avec le laser. Nisma arrive en scĂšne et fait croire que Martin vient de la renverser avec son vĂ©lo. Martin est pris en faute
 Egalement dans cet Ă©pisode extrait vidĂ©o Également dans cet Ă©pisode, le piĂšge des Fedala se referme
 Plus belle la vie » autres rĂ©sumĂ©s en avance jusqu’au 18 mars 2022 Pour les plus impatients, on va encore plus loin avec les rĂ©sumĂ©s courts jusqu’au 11 mars 2022. Vendredi 25 fĂ©vrier 2022 Ă©pisode 4485 Tandis que Patrick est prĂȘt Ă  aller trĂšs loin pour sauver la vie de Manon et protĂ©ger sa famille, Baptiste gagne la confiance de Justine. Les colocs quant Ă  eux, comprennent enfin les mauvaises intentions de Malika. Lundi 28 fĂ©vrier 2022, Ă©pisode 4486 Alors que Patrick envisage de faire un go fast, l’affrontement entre Malika et la coloc monte d’un cran. De leur cĂŽtĂ©, les Fedala doivent prendre congĂ© de la charmante OphĂ©lie
 Mardi 1er mars 2022, Ă©pisode 4487 Alors que les Nebout sont submergĂ©s par une magnifique Ă©motion qui donne du sens Ă  ce qu’ils traversent, Delphine et Franck prĂ©parent leur crĂ©maillĂšre. Quant Ă  Rochat, renoncera-t-il Ă  l’amour ? Mercredi 2 mars 2022, Ă©pisode 4488 Alors que Patrick n’agit plus du tout comme un flic, un mystĂ©rieux visiteur vient perturber la pendaison de crĂ©maillĂšre de Delphine et de Franck. Jeudi 3 mars 2022, Ă©pisode 4489 Alors que Boher devient une menace pour les Nebout, Franck doit composer avec un intrus qui prend beaucoup de place. Quant Ă  Baptiste, il se retrouve sur une intervention qui tourne mal
 Vendredi 4 mars 2022, Ă©pisode 4490 Alors qu’un interrogatoire risque de mal tourner pour Patrick, Delphine se retrouve au volant d’une voiture qui essuie des coups de feu. De son cĂŽtĂ© Baptiste est-il toujours aussi motivĂ© Ă  devenir pompier ? Lundi 7 mars 2022, Ă©pisode 4491 Alors que Patrick semble rĂ©solu Ă  tuer Kenji et Mouss Ă  quitter la coloc, Baptiste est confrontĂ© Ă  son premier mort. Mardi 8 mars 2022, Ă©pisode 4492 Tandis que Patrick et Manon sont sur les traces de Kenji, le retour de ThĂ©o bouscule tout le monde. Quant Ă  Baptiste, assurera-t-il au concours pour devenir pompier professionnel ? Mercredi 9 mars 2022, Ă©pisode 4493 Alors que les Nebout vivent dĂ©sormais la peur au ventre et que Manon perd tout espoir d’avenir heureux, les colocs emploient les grands moyens. Franck, de son cĂŽtĂ©, a de plus en plus de doutes sur ThĂ©o et son travail. Jeudi 10 mars 2022, Ă©pisode 4494 Tandis que Kenji redonne de l’espoir Ă  Manon qui, du coup, en redonne Ă  Patrick, le dĂ©part de Nathan et Sabrina semble inĂ©luctable. Baptiste, quant Ă  lui, deviendra-t-il pompier professionnel ? Vendredi 11 mars 2022, Ă©pisode 4495 Alors que les Nebout sont enfin libĂ©rĂ©s d’une menace, les soupçons de Franck sur ThĂ©o se confirment. Pendant ce temps, l’état de Rochat empire et une nouvelle coloc se forme. Lundi 14 mars 2022, Ă©pisode 4496 Alors que Delphine amorce un virage douloureux, Patrick et Babeth ont une rĂ©vĂ©lation Ă  faire et le Docteur Vidal enquĂȘte. Mardi 15 mars 2022, Ă©pisode 4497 L’inquiĂ©tude de Delphine va crescendo, tandis que Baptiste est rattrapĂ© par sa vocation et Rochat est menacĂ©. Mercredi 16 mars 2022, Ă©pisode 4498 ThĂ©o prend tous les risques, Baptiste agit en hĂ©ros et c’est l’heure des au revoir chez les Nebout. Jeudi 17 mars 2022, Ă©pisode 4499 Franck, dĂ©passĂ©, s’inquiĂšte de plus en plus, Baptiste va de surprise en surprise et Luna dĂ©marre une nouvelle vie. Vendredi 18 mars 2022, Ă©pisode 4500 Delphine affronte le pire, Les enfants Castel font leur rentrĂ©e et la coloc est en pleine mutation. Plus belle la vie » en replay Plus belle la vie » c’est du lundi au vendredi dĂšs 20h25 sur France 3 mais c’est aussi en streaming vidĂ©o puis replay sur Sur SALTO, une offre payante, vous disposez aussi de deux Ă©pisodes d’avance.
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Plus belle la vie » RĂ©sumĂ©s courts en avance et spoilers de PBLV jusqu’au 25 fĂ©vrier 2022 inclus – Vous ĂȘtes fan de la sĂ©rie quotidienne de France 3 et vous avez envie d’en savoir plus ? Prenez une longueur d’avance sur les autres fidĂšles de Plus belle la vie » avec les spoilers et autres indiscrĂ©tions sur votre sĂ©rie prĂ©fĂ©rĂ©e. PublicitĂ© © FTV/Telfrance Dans votre sĂ©rie marseillaise, Rochat pense avoir rencontrĂ© son Ăąme sƓur, mais Malika a de mauvaises intentions.. Babeth et Patrick vont dĂ©couvrir quant Ă  eux que RaphaĂ«l n’est pas leur bĂ©bĂ© biologique.. PublicitĂ© Plus belle la vie » Spoilers et rĂ©sumĂ©s courts PBLV du 07 au 11 fĂ©vrier 2022 Lundi 07 fĂ©vrier 2022, Ă©pisode 4471 Manon est dĂ©chirĂ©e entre deux mondes tandis que Rochat a une surprenante nouvelle. Baptiste vit mal la nouvelle dĂ©cision d’Emma. Mardi 08 fĂ©vrier 2022, Ă©pisode 4472 Alors que Kevin est Ă  l’hĂŽpital, Rochat tente de faire sa grande demande. Abdel ose faire le premier pas avec OphĂ©lie. Mercredi 09 fĂ©vrier 2022, Ă©pisode 4473 Manon s’ancre de plus en plus chez les Nebout tandis que Baptiste dĂ©couvre son instructeur. Abdel a un rendez-vous amoureux. Jeudi 10 fĂ©vrier 2022, Ă©pisode 4474 Patrick et Babeth font de plus en plus confiance Ă  Manon. Rochat se fait coacher par les colocs. Baptiste fait une rencontre Ă  l’entraĂźnement. Vendredi 11 fĂ©vrier 2022, Ă©pisode 4475 Manon prend une dĂ©cision radicale. Le PACS de Rochat s’organise. Karim cherche Ă  sĂ©duire OphĂ©lie. Plus belle la vie » Spoilers et rĂ©sumĂ©s courts PBLV du 14 au 18 fĂ©vrier 2022 Lundi 14 fĂ©vrier 2022, Ă©pisode 4476 Patrick et Babeth font une terrible dĂ©couverte. Rochat s’apprĂȘte Ă  cĂ©lĂ©brer un heureux Ă©vĂ©nement. De son cĂŽtĂ©, Karim est sur le point de vivre de surprenantes retrouvailles. Mardi 15 fĂ©vrier 2022, Ă©pisode 4477 Babeth s’enfonce dans la douleur tandis que Patrick passe Ă  l’action. Rochat est aveuglĂ© par son histoire d’amour alors que Baptiste cherche l’approbation de sa hiĂ©rarchie dans sa nouvelle vocation. Mercredi 16 fĂ©vrier 2022, Ă©pisode 4478 Mue par une lueur d’espoir, Babeth passe, elle aussi, Ă  l’action. Tandis que Karim cherche Ă  ĂȘtre fixĂ© concernant Elsa, Baptiste prend une initiative qui risque de lui couter cher Jeudi 17 fĂ©vrier 2022, Ă©pisode 4479 Patrick et Babeth tiennent une piste sĂ©rieuse. Barbara s’apprĂȘte Ă  prendre une dĂ©cision sans prĂ©cĂ©dent. De son cĂŽtĂ©, Baptiste subit les consĂ©quences de son hĂ©roĂŻsme Vendredi 18 fĂ©vrier 2022, Ă©pisode 4480 Patrick et Babeth font face Ă  l’impensable. Rochat se montre trĂšs influençable par amour. De son cĂŽtĂ©, Bilal tente le tout pour le tout afin d’éviter la pire des rĂ©putations. Et enfin Plus belle la vie » Spoilers et rĂ©sumĂ©s courts PBLV du 21 au 25 fĂ©vrier 2022 Lundi 21 fĂ©vrier 2022, Ă©pisode 4481 Babeth refuse de reconnaĂźtre la vĂ©ritĂ©. Baptiste se demande ce que son instructeur cherche en le poussant Ă  bout. De son cĂŽtĂ©, Karim tente sa chance auprĂšs de sa jolie instructrice d’auto-Ă©cole Mardi 22 fĂ©vrier 2022, Ă©pisode 4482 Patrick et Babeth ne peuvent se rĂ©soudre Ă  abandonner leur bĂ©bĂ© Ă  l’ASE. Baptiste comprend enfin oĂč veut en venir son instructeur. Malika, quant Ă  elle, continue de pousser Rochat Ă  faire craquer ses locataires. Mercredi 23 fĂ©vrier 2022, Ă©pisode 4483 Tandis qu’un lien indĂ©fectible uni dĂ©sormais Patrick et Babeth Ă  Manon, Karim, Bilal et Abdel dĂ©cident de jouer le tout pour le tout pour venir en aide Ă  OphĂ©lie. De son cĂŽtĂ©, face Ă  la rĂ©sistance des colocataires, Malika dĂ©cide d’aller plus loin dans son action Jeudi 24 fĂ©vrier 2022, Ă©pisode 4484 Le risque grandit autour de Patrick et Babeth. Karim, Bilal et Abdel montent une arnaque pour sauver l’auto-Ă©cole d’OphĂ©lie. Vendredi 25 fĂ©vrier 2022, Ă©pisode 4485 Patrick est prĂȘt Ă  aller trĂšs loin pour sauver la vie de Manon et protĂ©ger sa famille. Baptiste gagne la confiance de Justine. Les colocs quant Ă  eux, comprennent enfin les mauvaises intentions de Malika Retrouvez Plus belle la vie » du lundi au vendredi dĂšs sur France 3, sur la plateforme payante Salto, mais aussi en streaming et replay sur
plusbellelavie #pblv #pblv2021Créé en 2004, Plus belle la vie, également connu sous le sigle PBLV, est un feuilleton télévisé français diffusé sur France 3
Mamcin est un site de streaming gratuit sans compte est super facile Ă  utiliser et trĂšs intuitif, il permet de regarder les Ă©pisodes de PBLV Ă  l’avance et de les rejouer. Regardez Plus belle la vie sur Mamcin Plus belle la vie aussi connu sous le nom de PBLV est un feuilleton tĂ©lĂ©visĂ© français trĂšs addictif. J’avais l’habitude de regarder cette sĂ©rie dramatique lorsque je passais les vacances chez ma mĂšre, car elle adore ça. À un moment donnĂ©, j’ai commencĂ© Ă  l’apprĂ©cier et Ă  la regarder mĂȘme quand j’étais Ă  la maison. Cependant, aprĂšs avoir manquĂ© de nombreux Ă©pisodes, il est devenu compliquĂ© pour moi de comprendre ce qui se passait. C’est pourquoi j’ai commencĂ© Ă  chercher oĂč je pouvais regarder les replays complets de PBLV gratuitement, et c’est lĂ  que je suis tombĂ© sur le cĂ©lĂšbre site de streaming français Mamcin qui propose presque tous les Ă©pisodes de replays, mais pas seulement. 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PBLV parle de la vie, de la mort, de l’amour et de la sĂ©paration, avec tous les personnages imaginables qui composent la sociĂ©tĂ© contemporaine. L’une des grandes forces de la sĂ©rie est l’évocation lucide de sujets souvent tabous. En effet, le drame aborde des thĂšmes forts pour mieux comprendre notre sociĂ©tĂ©, des sĂ©quences qui bouleversent nos a priori, provoquent la discussion et le dĂ©bat. Plus belle la vie, c’est tout simplement la vie ! Cela dit, Plus belle la vie est disponible en replay sur le site officiel de France TV, cependant il est nĂ©cessaire de crĂ©er un compte pour profiter des Ă©pisodes en replay ou en direct. Depuis dix-sept saisons en 2021, Plus belle la vie s’est imposĂ© dans le paysage des feuilletons quotidiens comme un pionnier, et celui dont la longĂ©vitĂ© est la plus impressionnante. Elle a ainsi ouvert la voie Ă  Demain nous appartient sur TF1, mais aussi Ă  Un si grand soleil sur France 2. Dans la section suivante, je vais vous apprendre comment regarder PBLV sur Mamcin ; facilement et gratuitement. Regarder plus belle la vie en avance sur mamcin Mamcin est un “mini” site de streaming créé en 2012 qui se concentre uniquement sur la diffusion des Ă©pisodes de la sĂ©rie Plus Belle la Vie. Le cĂ©lĂšbre site de streaming propose l’intĂ©gralitĂ© des Ă©pisodes de PBLV en replay et en avance en streaming gratuit et sans compte. Pour regarder plus belle la vie en avance sur mamcin il suffit de suivre les Ă©tapes suivantes AccĂ©der Ă  l’adresse officiel mamcin via le lien suivant ou allez trouvez les derniers Ă©pisodes, choisissiez le numĂ©ro de votre Ă©pisode PBLV en avance et cliquez sur le page s’affiche avec la description de l’épisode avec deux lecteurs un lecteur et cliquez sur le boutton play ». Ensuite, la diffusion de l’épisode PBLV commencera instantanĂ©ment. Bien que le site ne comporte pas de publicitĂ©, il est possible que les lecteurs voient des popup, mais rien d’autre, heureusement. Sur le site, les Ă©pisodes PBLV sont hĂ©bergĂ©s sur Sendvid, un hĂ©bergeur de vidĂ©os gratuites basĂ© aux Etats-Unis. L’adresse mamcin est mise Ă  jour chaque semaine pour vous avertir si le site change d’adresse ou ne fonctionne pas. Vous vous demandez sans doute comment le site propose les Ă©pisodes Ă  l’avance ? En effet pour chaque sĂ©rie/savon ou autre il faut savoir que plusieurs Ă©pisodes sont tournĂ©s Ă  l’avance avant la diffusion Ă  la tĂ©lĂ©vision. Il faut compter en gros 2 Ă  3 semaines pour la rĂ©daction, 1 Ă  2 pour le tournage et 2 Ă  3 pour la postproduction encore, en moyenne, ce qui vous laisse 5 Ă  8 semaines d’avance, mais cela varie beaucoup d’une sĂ©rie Ă  l’autre et cela dĂ©pend du planning. Ainsi, Plus belle la vie n’échappe pas Ă  cette rĂšgle, et c’est la raison pour laquelle Mamcin propose les Ă©pisodes de PBLV en avance. Retrouvez les Ă©pisodes de PBLV en replay En plus des Ă©pisodes en avance, le site MAMCIN propose Ă©galement la diffusion des Ă©pisodes de Plus belle la vie en replay. Pour cela il suffit de suivre les Ă©tapes suivantes Rendez-vous Ă  la page d’accueil mamcin via le lien suivant le menu en haut de la page, cliquez sur l’icĂŽne de la le numĂ©ro de l’épisode recherchĂ© et cliquez sur le bouton avec la loupe en votre Ă©pisode replay PBLV et cliquez sur le un lecteur et cliquez sur le boutton play ». Il convient toutefois de noter que vous pouvez tomber sur des lecteurs qui ne fonctionnent plus, notamment pour les anciens Ă©pisodes. Vous pouvez toutefois demander Ă  l’administrateur de tĂ©lĂ©charger Ă  nouveau l’épisode, en utilisant la section des commentaires en bas de la page. Pourquoi mamcin ne fonctionne-t-il pas ? En l’espace de huit ans, Mamcin a constituĂ© un important inventaire d’épisodes PBLV et compte pas moins de 4315 vidĂ©os au moment de la rĂ©daction de cet article. Ainsi, le site fait partie du top des sites les plus visitĂ©s en France. Et ceci explique que l’offensive contre le diffuseur illĂ©gal de Plus belle la vie est dĂ©jĂ  lancĂ©e, et que les demandes DMCA de France TĂ©lĂ©vision Distribution auprĂšs de Google portent dĂ©jĂ  leurs fruits. Mamcin a dĂ©jĂ  vu sa page d’accueil dĂ©rĂ©fĂ©rencĂ©e du moteur de recherche et seules quelques pages du site rĂ©sistent. La suite logique d’une telle action sera certainement, dans un avenir proche, la fermeture pure et simple du site ou le changement d’adresse comme c’est le cas de plusieurs sites de streaming gratuits tels que Voirfilms et Zone TĂ©lĂ©chargement. Bien que mamcin soit un site trĂšs utile pour regarder plus belle la vie en avance, il est cependant essentiel de noter que le meilleur moyen de regarder les replays de PBLV reste d’accĂ©der directement et gratuitement au site officiel de France TV ce qui vous fera gagner beaucoup de temps et vous Ă©vitera les mauvaises surprises ! Ainsi, si vous cherchez d’autres alternatives pour regarder plus belle la vie en streaming ou en diffĂ©rĂ©, vous pouvez opter pour l’une de ces solutions Plus belle la vie est un feuilleton quotidien diffusĂ© sur France 3 du lundi au vendredi, Ă  partir de 20h20Consulter d’autres sites proposant du streaming ipblv, tv-replayRegarder la rediffusion sur le site France 3Acheter les Dvds PBLV sur la fnac ou autres, cependant vous n’aurez pas accĂšs immĂ©diat Ă  l’épisode qui vient de sortie, bien Ă©videmment. Commentaires et Spoilers Comme vous avez pu le remarquer, sur les rĂ©seaux sociaux le site n’est pas actif ou ne peut pas publier, interagir avec ses fans, cependant aprĂšs chaque Ă©pisode, les utilisateurs commentent Ă  l’aide de leur compte disqus, les diffĂ©rents rebondissements des Ă©pisodes, il y a donc des critiques, des photos de personnes dans la sĂ©rie et bien sĂ»r des spoilers, ne dites pas que vous n’ĂȘtes pas prĂ©venus ! Ainsi, sur Mamcin vous avez la possibilitĂ© de partager vos commentaires et avis sur la sĂ©rie sous chaque Ă©pisode dans la section commentaires, vous pouvez Ă©galement demander le tĂ©lĂ©chargement d’un Ă©pisode spĂ©cifique de plus belle la vie.
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Signaler Partager Le moisi c'Ă©tait avant, lĂ  c'est juste poussiereux mais sans moisissure ou rat pourri dans un coin sombre Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites RĂ©ponses 246,5K Créé 15 a DerniĂšre rĂ©ponse 5 h Participants frĂ©quents Ă  ce sujet 27718 9945 8971 9869 Signaler Partager Nan! ça sent de plus en plus le moisi, plus d'activitĂ© ici, moins d'activitĂ© sur d'autres bistrots que je ne frĂ©quente pas, les compte de membres actifs, voir trĂšs actifs supprimĂ©s les un aprĂšs les autres Dogone, isab98, le profil dont j'ai oubliĂ© le nom en DL pour citer les plus rĂ©cents dont j'ai connaissance ..... C'est Ă©trange touSSa Y a t'il une conspiration des SAS d'un quelconque pays Ă©tranger ou est un coup de la DCRI ? 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Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager Ce cycle la est trĂšs long Bonjour Ma cb va fumer ... changement de pneus imminent sur les deux voitures Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager C'est un investissement Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager C'est un investissement Heureusement, ca fait un moment que j'ai prĂ©vu Ă  l'avance cet investissement Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager Je me suis dĂ©jĂ  servi de ce comparateur. Mais les Ă©cart de prix sont faible pour la marque que je veux prendre Michelin . J'ai bien trouvĂ© des prix valables sur certains sites, mais les centres de montage proposĂ©s sont Ă  Rennes pour les sites les plus intĂ©ressants en prix , soit presque 120 kms AR plus des tarifs de montage plus Ă©levĂ©s . Ce que je gagne en prix d'achat, je le perds en prix de montage, dĂ©placement , temps perdu touSSa . Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager perso, je vais pas plus loin que chez mon garagiste, il nous fait profiter des bonnes remises qu'il a chez Mich'bib bon, par contre, je fais pas le tour du dpt pour savoir qui est le moins cher, vu le prix du carburant, ça vaut pas le coup Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager Allopneus Pour 38€ t'as le montage Ă  la maison Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager Allopneus Pour 38€ t'as le montage Ă  la maison MĂȘme en 17" ? Je ne suis pas sur qu'il se dĂ©place dans mon bled paumĂ© sans supplĂ©ment Bonjour Pour revenir aux chinois du FBI sur FA j'ai dĂ©couvert et parcouru hier les topic Ă  fight en DL et maintenant je comprend mieux la raison du bordel en ce moment Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager B'jour lĂ  dedans Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager Bonjour a tous Je suis a la maison y a pas de boulot, la semaine prochaine j' ai ma FCO, 5 jours a l' Ă©cole avec des gros cons qui ont tout vu, aprĂšs 15 jours de vacances. Normal qu' il y est personne dans votre bistrot, le client faut le lecher, etre poli, a la limite de l' obsĂ©quiositĂ© et du mielleux, faut lui donner du "comme mĂȘme" a chaque post, s' enquĂ©rir de la santĂ© du petit dernier, s' extasier devant la belle voiture, bref faut etre chiant quoi toute ressemblance avec un bistrot existant serait purement fortuite bla bla bla bonne journĂ©e a tous. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager Bonjour a tous Je suis a la maison y a pas de boulot, la semaine prochaine j' ai ma FCO, 5 jours a l' Ă©cole avec des gros cons qui ont tout vu, aprĂšs 15 jours de vacances. Normal qu' il y est personne dans votre bistrot, le client faut le lecher, etre poli, a la limite de l' obsĂ©quiositĂ© et du mielleux, faut lui donner du "comme mĂȘme" a chaque post, s' enquĂ©rir de la santĂ© du petit dernier, s' extasier devant la belle voiture, bref faut etre chiant quoi toute ressemblance avec un bistrot existant serait purement fortuite bla bla bla bonne journĂ©e a tous. Le transport de vĂ©hicule est Ă©videmment impactĂ© par la crise automobile sauf l transport de soit disantes Ă©paves Ă  destination des Balkans . Cette crise n'est pas uniquement la consĂ©quence unique de la crise financiĂšre , mais aussi , Ă  mon avis, l'autophobiez qui rĂšgne en France depuis 10 ans a sa part de responsabilitĂ©s dans cette mauvaise passe Bon courage pour ta formation et bonnes vacances Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager Bonjour, week-end animĂ© ici Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager La politique Chiraco-Sarkozienne a portĂ© ses fruits Les gens font plus attention , commettent moins d’infractions et viennent moins se plaindre sur Fa Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager Le coĂčt de la vie aussi, trop cher Internet C'est soit la Freebox, soit l'abonnement au Coyote! Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager Suffit de prendre icoyote Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager C'est sur que niveau abonnements, faut avoir un sacrĂ© budget si on veut tout Bonjour Ce topic vivote , mais ne me demandez pas de faire du rodo2 comme sur le bistrot orange Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager Oui, tu va vanter ta jeunesse et parler de ta caisse de VRP dans la mĂȘme phrase, et tu seras pas crĂ©dible Et de ta mĂ©tĂ©o pourrie qui donne envie de vomir Je comprend pourquoi Damberrn est devenu alcoolique en si peu de temps Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Auteur Signaler Partager Oui, tu va vanter ta jeunesse et parler de ta caisse de VRP dans la mĂȘme phrase, et tu seras pas crĂ©dible Et de ta mĂ©tĂ©o pourrie qui donne envie de vomir Je comprend pourquoi Damberrn est devenu alcoolique en si peu de temps J'espĂšre que c'est aussi un peu grace Ă  moi, avec tout le temps que j'ai pris pour lui dĂ©montrer tout l'interet d'un Ă©tat alcoolique prolongĂ© et rĂ©pĂ©tĂ© Il grandit si vite Dam Et Bonjour Ă  tous Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager Oui, tu va vanter ta jeunesse et parler de ta caisse de VRP dans la mĂȘme phrase, et tu seras pas crĂ©dible Et de ta mĂ©tĂ©o pourrie qui donne envie de vomir Je comprend pourquoi Damberrn est devenu alcoolique en si peu de temps quand j'Ă©tais plus jeune faut pas croire que je suis vieux non plus , je roulais en R21 Nevada DĂ©jĂ  Ă  l'Ă©poque, je me prĂ©prarais Ă  l'avenir ĂȘtre mi-vieux quoi J'espĂšre que c'est aussi un peu grace Ă  moi, avec tout le temps que j'ai pris pour lui dĂ©montrer tout l'interet d'un Ă©tat alcoolique prolongĂ© et rĂ©pĂ©tĂ© Il grandit si vite Dam Et Bonjour Ă  tous Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites InvitĂ© §dam051Hk Signaler Partager Oui, tu va vanter ta jeunesse et parler de ta caisse de VRP dans la mĂȘme phrase, et tu seras pas crĂ©dible Et de ta mĂ©tĂ©o pourrie qui donne envie de vomir Je comprend pourquoi Damberrn est devenu alcoolique en si peu de temps En mĂȘme temps, entrer dans une Ă©cole de commerce aide aussi beaucoup pour ça J'espĂšre que c'est aussi un peu grace Ă  moi, avec tout le temps que j'ai pris pour lui dĂ©montrer tout l'interet d'un Ă©tat alcoolique prolongĂ© et rĂ©pĂ©tĂ© Il grandit si vite Dam Et Bonjour Ă  tous Le grand maĂźtre qui est en toi m'a tout appris Ă  ce niveau, et j'en suis reconnaissant Salut Ă  tous Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager Respecte la voirie Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites InvitĂ© §dam051Hk Signaler Partager Il t'a permis de te relever puis il t'a servi de bĂ©quille! Au rĂ©veil " Tiens, je me souviens pas d'avoir eu çà chez moi" Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites InvitĂ© §dam051Hk Signaler Partager Il t'a permis de te relever puis il t'a servi de bĂ©quille! Au rĂ©veil " Tiens, je me souviens pas d'avoir eu çà chez moi" Tellement vrai Mais c'est un vrai compagnon dĂ©sormais Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Auteur Signaler Partager C'est bien ça Poursuis, ta plus belle rĂ©ussite sera d'avoir ton diplome entre deux cuites, comme les meilleurs Les meilleurs, pas d'un point de vue scolaire hein ! Qui te tendait quoi ? Bonjour Ă  tous, et un joyeux mercredi Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Signaler Partager Si tu passes ce soir je te montrerai! Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites 1 a WildOne a mis en avant et a Ă©pinglĂ© ce sujet le 1 juil. WildOne a desĂ©pinglĂ© sujet

Lesreplays disponibles de Plus belle la vie. Saison 18 - Épisode 4482 : DiffusĂ© le 23 fĂ©vrier Rediffusion. Saison 18 - Épisode 4483 : DiffusĂ© le 24 fĂ©vrier Rediffusion. La
Plus belle la vie en avance avec le rĂ©sumĂ© de l’épisode 4178 du 23 dĂ©cembre 2020 – Mercredi, dans votre sĂ©rie quotidienne de France 3, Syd va s’attaquer Ă  Mila. Mirta et Yolande se rĂ©concilient. Capture France 3 Le rĂ©sumĂ© prĂ©cĂ©dent de Plus belle la vie du mardi 22 dĂ©cembre est disponible. Bonne lecture. Plus belle la vie le rĂ©sumĂ© en avance de l’épisode du 23 dĂ©cembre 2020 Patrick Nebout s’interroge sur Mazelle, et fait part de ses doutes au Procureur Revel. Son instinct de flic lui dit que quelque chose cloche dans l’arrestation de Mouss aprĂšs le meurtre de Monique Perrier. Revel confie Ă  Nebout que lui aussi s’interroge sur le commissaire. Patrick lui demande son accord pour enquĂȘter en sous-main sur Mazelle.. De son cĂŽtĂ©, Mila aborde Ă  la bibliothĂšque Eva le tĂ©moin de l’accident de Mouss, et lui explique la situation de ce dernier. Eva reconnaĂźt que c’est bien elle qui a appelĂ© les secours, mais elle affirme ne pas avoir vu le responsable de l’accident..Le soir venu, alors que Mila est au tĂ©lĂ©phone avec Mouss, Mila est agressĂ©e par Syd. Il lui a mis un plastique sur la tĂȘte pour l’étouffer.. Yolande n’a pas dormi trois nuits de suite. LĂ©a pense que sa grand-mĂšre ne vit pas trĂšs bien sa brouille avec Mirta, et se rend au CĂ©leste dans l’espoir de les rĂ©concilier. Elle confie Ă  la mĂšre de Luna que Yolande ne dort plus depuis trois jours, et que sa tension est mauvaise. LĂ©a tente de faire comprendre Ă  Mirta qu’elle a Ă©tĂ© injuste envers sa grand-mĂšre..Mirta a donnĂ© rendez-vous Ă  Yolande sur la place du mistral. Elles s’excusent mutuellement..LĂ©a propose par la suite Ă  Yolande et Mirta, d’intĂ©grer la semaine prochaine un centre de sommeil afin qu’elles puissent rĂ©gler leurs problĂšmes d’insomnie. AprĂšs avoir hĂ©sitĂ©, elles sont finalement partantes. Kilian et NoĂ© finissent par se rĂ©concilier. De son cĂŽtĂ©, Sophie offre Ă  Lola, un tĂ©lĂ©phone Ă©colo mais elle le refuse. Le soir venu, NoĂ© est sur son balcon pour guetter Franck qui doit rentrer, mais il aperçoit Lola, et ne peut s’empĂȘcher de la regarder.. Plus belle la vie », c’est du lundi au vendredi Ă  2020 sur France 3. Gardez le contact avec votre sĂ©rie prĂ©fĂ©rĂ©e, et rejoignez-nous sur Facebook. 2020-12-21
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